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fagne un monument à la bienfaisance & à la reli gion. Un prêtre refpectable, qui, pendant une lon gue fuite d'années a été à la tête d'une paroiffe, a donné l'exemple de toutes les vertus aux ouailles qui lui étoient confiées, & un grand modele à fuivre aux eccléfiaftiques qui rempliffent de pareilles places. Le Sr. Mongodin, né de parents pauvres, mais d'une condition honnête, embraffa l'état eccléfiaftique, & y porta les lumieres & les vertus convenables. Après s'être diftingué pendant fon vicariat par des actes de bienfaifance, & un zele infatigable, il fut, à la de mande, & au vœu unanime de toute la paroiffe, nommé recteur, ou curé de St. Aubin, dans la ville de Rennes. Il trouva un écu de rente fondée pour les pauvres, & à fa mort, arrivée vingt ans après, il en a laiffé une d'environ 700 liv. conftitués en leur faveur. La bienfaifance, l'aumône, & la concorde étoient les textes ordinaires de fes fermons ; c'eft en chaire feulement qu'il recommandoit la charité, & qu'il intéreffoit en faveur des malheureux; hors delà il ne réclamoit point; on ne le voyoit pas aller de maison en maifon folliciter des aumônes que la vanité auroit quelquefois accordées en fe plaignant tous bas de l'importunité, & dans lefquelles on n'auroit eu aucun mérite. Il ne permit jamais qu'on fit des quêtes dans fa paroiffe pour les pauvres ; & lorfque le parlement permit à celles de Rennes de faire des emprunts il ne confentit point que la fienne en fit; pourvut lui-même à fes befoins; fes dixmes y étoient employées : mon revenu, difoit-il, appartient aux malheureux; je fuis leur caiffier qu'ils viennent chez moi retirer ce qui leur eft đû; jamais il n'en renvoya fans fecours; il fe trouva quelquefois dans des momens de difette. Il partagea avec eux fon repas. Ses parens n'eu

;

rent jamais exclufivement part à fes dons ; quelques-uns réduits à la mifere, recevoient feulement le pain de l'aumône; lui même s'en nourriffoit; il cultiva les patates, & en fit un trèsbon pain. A fa mort, on n'a trouvé que 40 écus à lui; par un teftament olographe, il a difpofé en faveur des néceffiteux, de ce que la commune pouvoit lui devoir. Plus de 200 artisans lui doivent leur état; il a laiffé en mourant 60 enfans en apprentiffage; c'étoit fon œuvre favorite. Son dernier acte a été un acte de bienfaifance; le jour de fa mort, il venoit à 6 heures du matin de donner 20 écus à fon vicaire pour procurer une fituation & un lieu commode, à une malheureuse domeftique trompée & abandonnée par fon maitre. Les vertus du Sr. Mongodin font un fpectacle touchant & rare pour l'humanité; la religion & la philofophie doivent fe réunir pour les célébrer; fa paroiffe lui a érigé un monument; la reconnoiffance qui la dreffé, l'a décoré de cette infcription fimple, mais qui rappelle les vertus du refpectable rec

teur.

Hic jacet

Andreas-Jacobus Mongodin
hujus parochia Redor,

cleri diæcefani procurator,

Virtute, confilio exemplo que potens ;
pauperum pater, pauper ipfe,
ut divina providentia fubfidio,
fic & in vidu parcimoniá dives,
egentis alimenta, veftes abundè fuffecit ;
hanc que facram adem
refecit, ampliavit, exornavit
In facro pænitentiæ tribunali fedens.
animam Deo reddidit,

V. cal. márt. an. M. DCC. LXXV.

Memores pofuere hujus parochia adminiflrį.

GRANDE-BRETAGNE.

Le parlement d'Angleterre, en voulant forcer les colonies feptentrionales de l'Amérique à une foumiffion aveugle & à une obéiffance fervile à tous fes décrets, ne s'eft pas feulement écarté, comme nous l'avons fait voir dans le dernier fupplément, des vrais principes de la conftitution & de l'équité naturelle; il femble encore avoir méconnu, ou plutôt trahi les intérêts qui lui ont été confiés. C'est ce que nous allons effayer de développer.

Faire le plus grand bien de la fociété & des individus, tel doit être le but de tout gouvernement, & telle eft fingulierement la loi fuprême que le citoyen anglois impofe à celui qu'il conftitue pour agir en fon nom dans l'affemblée nationale. Les moyens de parvenir à cette grande fin ont varié felon les tems. Des nations anciennes, & particulierement les Romains, ont étendu leur domination fur d'immenfes contrées, & fe font foumis divers peuples, fans le fecours du commerce. La culture de leur fol, quelques manufactures groffieres, purement adaptées à leurs befoins, la févérité de leurs mœurs leur fupériorité dans la difcipline militaire, leur enthoufiafme pour le nom feul de Rome, & enfin le plaifir & la gloire qu'ils mettoient à mourir pour la patrie, les rendirent maitres de prefque tout le monde connu. La guerre entraînoit alors peu de dépenfes; & les armes les plus pefantes, entre les mains des plus forts & des plus adroits, affuroient prefque toujours la victoire. Le commerce floriffoit chez d'autres nations, qui ne purent réfifter au fer de Rome. Les richeffes cédoient donc à la force; & loin de pouvoir la donner ou l'augmenter, elles contribuoient fouvent à fa ruine. De-là les révoltantes inftitutions de Lacédémone, & le mépris des richeffes qu'elle infpifoit à fes citoyens. Le tems a ame né d'autres changemens; de nouveaux arts ont introduit un nouveau fyfteme, Tous les peuples de l'Europe connoiffent aujourd'hui les mêmes armes, obfervent une même difcipline, fuivent une même tactique. Les guerres font accompagnées d'une profufion énorme dans la dépenfe; & la bourfe la mieux remplie eft le plus für garant du fuccès. Les richeffes feules, pour ainfi dire, conftiruent donc aujourd'hui la force. De-là l'encouragement

que les manufactures & le commerce reçoivent chez toutes les nations européennes, excepté deux. Ces dernieres tirent des mines éloignées, avec une facilité qui énerve leur induftrie, les tréfors dont les autres s'efforcent à l'envi de fe procurer la plus groffe part par le commerce. C'eft par ce moyen que la Hollande, avec un territoire qui ne pouvoit fufire à la nourriture de fes habitans, repouffé avec fuccès les attaques de la tyrannie & de la fuperftition. Une force artificielle, créée par le commerce, la mit en état d'équiper de nombreufes flottes, de foudoyer de puiffantes armées, & de combattre avec avantage contre des nations que la nature lui avoit rendues fi fupérieures.

La Grande-Bretagne femble l'emporter fur toutes le autres par fes arts & fes manufactures, par l'étendue de fon commerce, & les moyens qu'elle poffede de l'agrandir. Son crédit, reffource ordinaire d'un peuple commerçant, remplit fa bourfe & la mit à même de fournir à une dépenfe annuelle & extraordinaire de 16 à 18 millions fterling qu'exigeoit le foutien de la derniere guerre, fi ruineufe pour fes adverfaires, & fi glorieufe pour elle. Si fes coffres euffent été vuides, elle n'auroit jamais vu 90000 hommes employés fur fes flottes & dans fes ports, elle n'auroit pu attirer dans fes intérêts un allié puiffant, ni fournir les troupes qui ont étendu fa domination dans différentes parties du globe. Il est donc évident que le négoce eft le fondement de fa puiffance; c'eft de la qu'elle tire tous fes avantages, & toutes fes reffources; c'eft le commerce qui l'a mife en poffeffion de la moitié de l'hémifphere américain, & qui a fait fleurir dans fon fein l'agriculture & les arts. Le commerce feul pouvoit la foutenir dans cet état de fplendeur où il l'avoit élevée lors du traité de Verfailles en 1763, réparer les bréches que des emprunts fréquens avoient faites à fon fond national, & maintenir, ou même augmenter fon influence dans la politique de l'Europe. Enfin, en diminuant fon commerce, elle diminue néceffairement fes richeffes, & par conféquent fa force & fa puissance.

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Après avoir réfléchi fur l'importance du commerce dans l'empire britannique, fur l'aifance & la félicité qu'il procure à fes membres au-dedans, fur la fupériorité & la puiffance qu'il leur donne au-dehors; après avoir confidéré combien de moyens on avoit d'étendre & d'améliorer ce nerf de l'état, & combien il étoit avantageux & même indifpenfable de le faire;, on a peine à croire que le parlement ait pu perdre de vie un objet auffi intéres

fant, & expofer, dans la conjoncture préfente, la nation, qui lui a confié fes intérêts, à perdre d'un feul coup le tiers de fon commerce & toute efpérance de jamais le rétablir. C'est cependant de quoi il eft aifé de fe convaincre, en jettant d'abord un coup d'oeil fur les registres d'exportations produits au parlement, & en s'arrêtant un inftant aux fuites funeftes auxquelles les inconféquentes décifions de cette affemblée peuvent donner lieu. Nous fuivrons le fommaire de l'Evidence que le Sr. Glover à délivrée à la chambre des communes.

Le commerce colonique (Colonytrale) comprend trois branches principales: la premiere eft celle des Indes occidentales, autrement des illes de l'Archipel Américain; la feconde eft celle du Continent feptentrional; & la troifieme, qui dépend immédiatement des deux autres, eft celle d'Afrique. Les regiftres dont nous venons de parler, nous offrent le montant des exportations dans ces trois branches féparément depuis 1740 jufqu'à 1774; ce qui comprend une période de 34 ans, que l'on divife enfuite en deux autres périodes, dont la premiere fe ter mine au commencement de la derniere guerre. Les exportations de la premiere branche, pendant les 17 premiere années, excedent 12 millions fterling; ce qui fait annuellement plus de 700, 000, liv. fterl. Les 17 dernieres années rendent un total de plus de 19 millions fterling; ce qui fait annuellement plus de 1, 000, 000 fterling; d'où l'on voit que l'augmentation de la feconde période fur la premiere eft dans la proportion de 11 à 7. Un tiers de ces marchandifes vient de l'étranger, & le refte a cté directement tiré de la Grande-Bretagne. Quant à ce qui regarde le continent feptentrional, la premiere période fe porte à 17 millions fterling; ce qui fait une exportation annuelle d'un million. La feconde période rend plus de 40 millions en tout, & beaucoup plus de 2 300,000 liv. fterling annuellement; fon augmentation fur la premiere eft donc dans la proportion de 23 10; les trois quarts des marchandifes fournis par la métropole, & l'autre quart par l'étranger. A l'égard de l'Afrique dont le commerce avec l'Angleterre doit fon exiftence à fes colonies, les 17 premieres années en total approchent de millions; & annuellement de 180, 000 livres fterl. La feconde période va à 8 millions; ce qui donne anuuellement 470, 000 liv. fterl. La différence eft donc dans la proportion de 47 à 18, avec les deux tiers des marchandifes venant de l'Angleterre, & l'autre de l'é tranger.

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