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fes provifions. Le grand-feigneur vient de nommer, pour le remplacer, Hallil-Aga, ci-devant commandant de Galata, l'un des faubourgs de cette capitale, & l'a difpenfé, en même tems, de réfider à Smyrne, où il enverra un officier, avec l'agrément de S. H., pour y remplir les fonctions de gouverneur. Cara-Ofman s'eft déjà retiré de cette ville, & n'y a laiffé que 400 hommes aux ordres de fon neveu Méhémet-Aga.

Moldavangi vient d'être relegué à Brouffe; on a déja dit qu'une attaque d'apoplexie l'avoit mis hors d'état de continuer les fonctions de Pacha des Dardanelles.

Deux officiers ruffes qui étoient arrivés ici en couriers, en font repartis pour Bucharest le 24 du mois dernier; il n'a rien tranfpiré des dépêches qu'ils ont apportées, ni de la réponse que la Porte leur a remile. Les préparatifs de guerre font toujours fuivis avec la même vivacité. Dans le nombre des vaiffeaux de guerre qu'on travaille à réparer dans nos chantiers, il s'en trouve déja vingt qu'on peut armer, & les autres feront bientôt dans le même état. On preffe, avec une égale activité, la conftruction des vaiffeaux neufs, & l'on vient d'en lancer un de 66 canons en présence du fultan, qui ́vifite très-fouvent les chantiers. Il paffe continuellement en cette capitale, des transports de recrues venant d'Afe, & allant à l'armée du grand-vifir; d'autres convois de munitions de bouche & de guerre prennent fouvent la même route : l'armée Te trouve actuellement pourvue de tout ce qui lui eft néceffaire pour ouvrir la campagne au printems prochain, fi les négociations de Bucharest font infructueufes. On y a encore envoyé, le 2 de ce mois, 2, 800 bourfes ou I, 400000 écus au Lion; ces fommes font deftinées à des gratifica tions, & au paiement de quelques mois d'arrérages de la folde des Janiffaires,

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On ne peut rien ajouter à l'exactitude fcrupuleufe avec laquelle la Porte obferve les conventions ftipulées par l'armiftice. Un vaiffeau de guerre ruffe ayant échoué dernierement dans le détroit des Dardanelles, le capitan-pacha, dès qu'il en fut informé, lui fit donner tous les fecours dont il avoit befoin pour le mettre en état de rejoindre l'efcadre de fa nation. Ceux qui croient que toute efpece de rufe eft permife à la guerre, prétendent que le capitaine de ce vaiffeau étoit chargé de s'affurer de l'état actuel des Dardanelles, & de prendre des informations relatives aux opérations de la campagné prochaine.

Il y a eu à la Canée une émeute caufée par la cherté du pain. La foldatefque a pris les armes, & a parcouru laille en faifant ces cris redoutables Cher Allah ( juftice de dieu); mais les papas (prêtres Grecs) ayant réuffi, par leurs exhortations, à contenir les Grecs, qui forment le plus grand nombre des habitans, ils les ont empêchés de s'unir aux féditieux, qui ont occafionné quelques défordres, & qu'on eft parvenu enfin, à faire rentrer dans le devoir. Les Francs s'étoient retirés, pendant ce tumulte, dans le château, où le commandant leur avoit donné un asyle.

On n'a pas reçu la confirmation de la prife de Jaffa, qu'on avoit publiée d'après les lettres d'Alep. Celles de St. Jean d'Acre portent, que la garnifon lutte encore contre les forces d'Ali-Bey & du Cheik. Daher, qui pouffent le fiege avec la plus grande vigueur. On ne doute pas cependant, que cette place ne foit obligée de fubir la loi du vainqueur, depuis qu'on fait que les affiégeans ont reçu un renfort de troupes arrivées de Seyde tandis qu'une frégate ruffe, commandée par le capitaine Panayoti, & deux autres bâtimens font entrés dans la rade de Jaffa, pour feconder les opérations des troupes de terre. Ces lettres ajoutent

que le fameux Refch-Abdalla (*), qu'on difoit s'être fauvé en europe avec les tréfors d'Ali Bey, fon maitre, vient enfin, de le rejoindre au camp devant Jaffa; ce favori de l'ufurpateur de l'Egypte, pourfuivi par Ménémet-Aboudaab, s'étoit tenu caché dans cette province, d'où il a trouvé le moyen de s'échaper. Quelques jours après fon arrivée, Ali-Bey a fait embarquer un de fes officiers, qu'on dit être chargé d'une négociation auprès du com te d'Orlow.

RUSSI E.

PETERSBOURG (le 2 Mars. ) Les faillites arrivées en Hollande & en Angleterre faifoient craindre, avec raifon, qu'on n'en reflentît ici les influences. Déjà un négociant anglois établi en cette ville, & dont l'aflocié avoit manqué à Lon→ dres, fe rouvoit fur le point d'être obligé de fufpendre fes paiemens. Ce négociant avoit une prétention de 96 mille roubles à la charge de quelques feigneurs qui ne pouvoient le fatisfaire, étant eux-mêmes en procès avec la couronne pour une fomme encore plus forte: cependant, en ce moment, il avoit le plus preffant befoin de fon argent, Dans cette extrémité, il s'adreffa directement à l'impératrice; & quoique les prétentions de ces feigneurs ne fuffent pas encore conftatées, S. M. I., perfuadée que le commerce eft un des principaux appuis de l'état, & qu'il mérite dêtre favorisé par toute forte de confidérations ordonna d'abord qu'on lui fit toucher les 96 mille roubles qui formoient fa créance. De plus, S. M. voulant prévenir que d'autres négocians, qui

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(*) Nous avons parlé de Refch-Abdalla dans la feconde quinzaine d'Août 1772, pag. 7. Ce miniftre avoit pris la fuite pendant le combat qui s'eft livré entre Méhémet-Aboudaab & Ali-Bey.

n'auroient point la même reffource, ne foient forcés de fe déclarer infolvables, a fait notifier par le Sr. Frédérichs, banquier de la cour, à tous les commerçans étrangers établis ici, qu'il y avoit un million de roubles dépofé, dont ils pourroient prendre telle fomme qui leur manqueroit, à condition feulement, de donner quelque fureté pour ce prêt, ou de fournir un état exact & fidele de leurs affaires & de leurs dettes actives & paffives. Cette déclaration a beaucoup contribué à maintenir le crédit & la circulation. La maniere généreufe dont l'impératrice en a agi en cette occafion, prouve la vérité des fentimens qu'elle exprima dans fa lettre, écrite en 1768, à L'académie royale des fciences de Berlin: Ma fcience, dit-elle, fe réduit à fçavoir que tous les hommes font freres; ma vie fe paffera à étudier l'art d'agir en conféquence."

Le chef des Cofaques du Don, qui ne le cede en richeffes à aucun feigneur ruffe, ayant abufé de l'autorité qui lui avoit été confiée, pour commettre des malverfations, & n'ayant pas youlu déférer aux ordres de la cour, qui lui avoit mandé de venir rendre compte de fa conduite, un officier des gardes fut chargé de s'affurer de fa perfonne. La commiffion étoit fort épineufe; il falloit tromper la vigilance des gardes de l'hetman des Cofaques, & l'arracher de fon palais, L'officier aux gardes a conduit fon entreprise-avec tant d'intelligence & de fecret, qu'il eft parvenu à fe faifir du rébelle. Il a été conduit ici & enfermé dans les prifons de la fortereffe; la cour vient de nommer un confeil de guerre, qui fera chargé d'inítruire fon procès.

Le prince Drohehan, qui cherche à s'affranchir d'un tribut que lui impofe le Sophi de Perse, envoie une grande députation dont on parle beaucoup ici. On dit qu'elle eft chargée de rendre

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hommage à l'impératrice, & de la fupplier de prendre fous fa protection les états du prince perfan, qui réclame, en même tems, les fecours de S. M. I. contre les troupes du Sophi. Il eft douteux que le gouvernement fe prête à cette derniere demande, dans des circonftances où il a befoin de toutes fes forces. On eft fondé à croire que les conférences de Bucharest n'ameneront point la paix; la continuation des préparatifs militaires, le profond filence qu'on garde fur les dépêches des couriers, le mouvement de nos troupes, l'approvifionnement des magasins la conftruction des vaiffeaux &c., tout indique que la guerre va recommencer avec une nouvelle fureur. Il paffe d'ailleurs, pour certain que la cour a envoyé au Sr. Obrefcow, fon miniftre plénipotentiaire à Buchareft, un fecond ultimatum contenant des conditions qui font de nature à être rejettées par les Turcs.

SUEDE.

STOCKHOLM ( le 5 Mars.) Le roi a nommé Lagman, ou juge provincial de l'ifle de Gothland, le baron Charles-Guftave Wrangel, chevalier de l'ordre de l'épée. S. M. a accordé des lettres de nobleffe à plufieurs perfonnes, parmi lefquelles on compte le lieutenant Lothfack, beaufils de feu Guftave Kierman, bourguemaitre de cette capitale, fameux par les difgraces que la diete de 1765 lui fit éprouver. Ces lettres d'anobliffement font honneur à la mémoire de ce citoyen, puifqu'elles font données fous le titre de Kiermanfchild, dont le lieutenant Lothfack & fes 4 fœurs viennent de prendre le nom.

Le baron de Nolcken, chambellan du roi, fe difpofe à partir pour Pétersbourg, où il eft chargé de remettre au grand-duc, de la part de S.

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