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tout-à-coup la tour du château fut frappée de la foudre, qui parcourut enfuite les tuyaux de toutes les cheminées & quelques appartemens, où elle laiffa des traces de fon paffage, & furtout une odeur de foufre confidérable. Cinq perfonnes qui étoient dans une de ces chambres, furent terraf→ fées, fans avoir été bleffées; une femme seule, à l'afpect d'un feu rapide, éprouva à la tête, à la poitrine & aux jambes, une commotion violente qui cependant n'a point eu de fuite; fon mari qui étoit en dehors, vit au même inftant un globe de feu d'environ deux pieds de diamêtre & ce fut alors feulement, & lorfque le feu fé diffipoit dans les airs, qu'on entendit le bruit éclatant du tonnerre.

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On écrit de Confoulens, petite ville du Poitou, fur la Vienne, que, vers la fin du mois de Juin, on éprouva dans ce pays deux ouragans confidérables: le premier fut très-funefte aux bâtimens par l'excès du vent, qui les découvrit pref que tous, & qui en fit crouler quelques-uns. Dans la campagne, il déracina des arbres, dont la chûte bleffa plufieurs perfonnes; il enleva même quelques voyageurs à 7 à 8 toifes de diftance de leurs montures. Le fecond a été plus finiftre encore, parce qu'il fut accompagné d'une grêle abondante qui ravagea plufieurs paroiffes. Dans le même tems à deux lieues de Cahors, la petite ville du Bas, fituée entre des montagnes fur les bords de la riviere du Lot, fut fur le point d'être entierement fubmergée par des torrens de pluie: onze maisons furent démolies & emportées. Parmi les perfonnes qui périrent, on compte deux négocians du lieu. Deux enfans ont été trouvés noyés dans leurs berceaux; les vignes, prés, terres labourables, tout a été arraché & comblé. Le dommage eft fi confidérable, que 15 paroiffes voisines peuvent à peine espérer Août. 1775, 2e. quinz.

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C

de rétablir dans la fuite leurs poffeffions ravagées.

On lit dans quelques papiers publics l'anec

dote fuivante.

Un negre, âgé d'environ 30 ans, au fervice d'un riche particulier de Lyon, fe rendant le foir au château de fon maitre, 'rencontra à 2 lieues de la ville un payfan affis & pleurant près d'une haie. Le negre s'approche, ému de compaffion, & demande au payfan le fujet de fes larmes. «J'allois, dit ce dernier, à la foire de Mont-Luel acheter du bétail, & deux voleurs m'ont pris mon argent, ma taffe & mon habit ». Sont-ils loin d'ici, repartit le negre, quel chemin ont-ils pris ? « Ils ont pris cette traverse, & ils font à peine à deux portées de fufil». A l'inftant le negre fe met tout nud: gardez mes habits, & dans la minute je fuis

vous. Il part comme un trait, & ayant atteint les voleurs, coquins, leur cria-t-il, rendez l'habit, l'argent & la taffe que vous avez pris à un malheureux à deux pas d'ici, ou je vous entraîne dans l'enfer. Cette menace, prononcée d'un ton terrible, la noire effigie du perfonnage, les ténebres, l'effroi qui pourfuit fans ceffe le crime, troublent les deux brigands; ils s'imaginent voir le diable, le prient de ne pas approcher, vuident leurs poches, jettent tout à terre, & s'enfuient à toutes jambes. Le negre ramaffe les effets abandonnés, & les apporte au villageois, qui y trouva 22 écus en fus de ce qu'on lui avoit volé.

L'épizootie qui depuis fi longtems afflige nos provinces méridionales, a fait des progrès du côté de Tarbes, Caftres &c. On affure aufli qu'une maladie contagieufe s'eft manifeftée dans le Nivernois. Principiis obfla. La célérité des opérations a arrêté le mal à fa naiffance en Normandie, il y a quelques mois.

Il ne faut pas ceffer de répéter que la confommation habituelle du fel eft le préfervatif le

plus efficace contre les maladies peftilentielles, putrides &c. du bétail. Tant que cette denrée ne fera pas marchande, il eft à craindre de les voir fans ceffe renaître, ou même de ne jamais les voir ceffer. Nous remarquons une diminution bien effrayante & peu furprenante dans la confommation du fel en France; & fans doute, les plus forts retranchemens ont été faits fur le bétail & les terres. En 1582, le gouvernement s'engagea à faire jouir l'adjudicataire du bail du droit de gabelle fur feize à dix-fept mille muids. Après une prodigieufe dégradation, Sully porta l'engagement à dix-huit mille. Le royaume a été depuis augmenté de plufieurs provinces, & la fourniture de la ferme ne va qu'à environ 13, 000 muids.

Extrait d'une lettre écrite du Poitou, le 22 Juillet

Vous vous êtes élevé, Monfieur, avec raifon contre les privileges exclufifs, les maitrifes, & toutes les entraves qui gênent les mouvemens de l'induftrie & du commerce, les empêchent de profiter de toutes leurs forces, les dépouillent d'une partie de leurs reffources. Que penferez vous, Monfieur, quand je vous dirai que dans une ville de cette province, où il n'y a pour les marchands ni prérogative de corporation à acquérir, ni droit de communauté à payer, des magiftrats inftitués pour veiller fur nos propriétés, arrêter la concuffion, réprimer les abus, ont impofé de leur autorité trèsprivée & fans forme, un droit de vingt livres fur tous ceux qui veulent vendre à boutique ouverte ?

Cette ville-là eft pauvre & très-pauvre. Si quelques miférables viennent à bour par de longs travaux, & par des efpeces de larcins faits à leur propre fubfifiance journaliere, d'amaffer une petite fomme d'argent ils rifquent de la confier au trafic; car pour des arts & métiers les jurandes les leur interdifent. Les marchanas feuls avoient échappé au joug; mais la police les a pourfuivis & arrêtés pour les y enchaîner. Comme ils n'ont point de comptes à rendre, il n'y a pas d'autre bénéfice à faire fur eux.

Vingt livres pour un malheureux qui ne peut écomomiler que maille à maille, vous fçavez ce que c'eft

que cette fomme. Il faut citer un fait. Une femme avoit loué dans une petite rue une petite échope. Depuis que'ques mois elle y vendoit de menues denrées, & gagnoit médiocrement fa vie fans avoir été inquiétée. L'efpion de la police, à l'œil de qui elle avoit échappé comme par un miracle, l'apperçoit, la queftionne, & la menace. Les commettans, informés qu'une femme ofe vendre à boutique ouverte des allumettes fans leur avoir donné 20 ou 22 liv. de fes fonds, lui font fignifier que fi elle ne paie dans le jour, fa marchandife fera faifie & elle au cachot. Les ordres font notifiés avec tant de violence que la femme effrayée va se jetter toute en pleurs aux pieds du chef municipal en exercice, pour obtenir une remife ou un répit, fi l'on ne veut réduire à l'état le plus cruel fa nombreuse famille. Ni répit ni remife: de l'argent ou la prifon. Enfin, elle offre la plume d'un lit qu'elle avoit, la feule chose dont elle pût difpofer. La plume d'un lit! Oui, Monfieur, ce n'eft point une maniere de parler. La plume eft acceptée, apportée, pefée, eftimée par le juge-acquéreur ; le prix qu'il met, n'eft pas celui du droit qu'il a mis. Outre la plume, il faudroit la paille du lit, 6 la paille avoit une valeur. Enfin, la femme auroit fermé fa boutique & donné fa famille à nourrir ou à dévorer à l'officier, fi la charité ne lui avoit avancé, dans le jour, le reftant de la fomme exigée.

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Je fens bien, Monfieur qu'ajouter de nouveaux traits à celui-là, c'eft affoiblir le tableau. Cependant, il ne feroit pas déplacé de montrer par des faits le tort que cette exaction caufe au commerce, après avoir qué celui qu'elle fait au pauvre, Tous les habitans de cette ville fçavent qu'un marchand de foiries qui avoit coûtume de s'y arrêter tous les ans, & d'y débiter une grande quantité d'étoffes, avoit deffein de s'y fixer, & qu'il y renonça, parce qu'on voulut lui faire payer deux fois le droit d'ouverture de boutique, & qu'il effuya, à cette occafion, toute forte d'avanies. Tout récemment encore on a voulu exiger ce droit d'an fils de marchand, affocié & demeurant avec fon pere, qui fait le commerce en détail depuis 30 ans.

On ne connoit dans cette ville, que je connois bien fans l'habiter, aucun réglement qui autorife cette levée. Ceux qui la font, fe méfient fi fort de sa légitimité, qu'ils n'infiftent pas quand on leur tient tête; mais le pauvre, le foible baiffe la fienne, & paie en pleurant.

Mon intention n'eft pas de nuire, puifque je ne Bomme pas. Mon efpérance eft que ceux qui fe reconnoitront dans ce tableau, feront un retour fur euxnêmes, & vers la juftice & l'humanité.

Lorfque les Juifs de Landau eurent chanté le cantique inféré dans le dernier journal, ils réciterent la priere fuivante.

« Grand dieu, feigneur & maitre fouverain de l'univers, toi qui es le pere de tous les êtres créés, le protecteur de la vérité & le foutien de la puiffance des rois, dieu jufte, d'Abraham d'Ifaac & de Jacob, daigne exaucer les vœux & les prieres de ton peuple d'Ifraël, qui, en ce moment; t'invoque, & fe jette aux pieds de ton trône; exalte en ce jour la gloire & le nom de notre roi Louis XVI, facré; conferve fon augufte famille accorde lui des jours heureux & les années les plus reculées dans la fageffe & la fanté la plus parfaite éleve fon royaume auffi haut que le foleil, & fais le briller comme les étoiles du firmament. Affermis fa couronne jusques dans l'éternité; car la confiance des rois eft en toi feul ».

<< Seigneur tout-puiffant, dieu du ciel & de la terre, toi qui as préfervé David, ton fidelle ferviteur, de toutes les perfécutions de fes ennemis, & fouftrait fa tête au glaive qui le menaçoit; toi, qui as ouvert un paffage dans la mer & fait un chemin à travers les flots à ton peuple, daigne conferver, bénir & réjouir le cœur de notre monarque Louis XVI; éleve-le au- deffus de tous les rois de la terre; par ta miféricorde & ta puiffance infinie, fais le furvivre à tous les ayeux, fans aucun nuage, dans la carriere la plus longue & la plus heureufe. Aide-lui à furmonter tous les dangers, & à mettre ses ennemis fous les plantes de fes pieds, en le faisant prof pérer dans toutes fes entreprises »>.

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