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aux corsaires, lorsqu'ils attaquent l'ennemi dans les parties de son territoire maritime dont nous venons de parler, le traitement d'ennemi légitime, et on les punit comme pirates (1). Mais c'est là un usage qui n'est pas assez reconnu pour faire règle internationale.

Tout corsaire doit réunir les conditions nécessaires pour faire preuve de nationalité; la plus importante de ces conditions est, que son équipage soit composé en majorité de sujets de l'état dont il porte le pavillon et qui a délivré la commission en

guerre.

Enfin une loi, universellement obligatoire, et qu'on peut considérer comme la plus restrictive des abus possibles de la course, est celle en vertu de laquelle toute capture de la propriété privée sur mer, même lorsqu'elle a été faite par un bâtiment de l'état, n'est considérée comme définitive, qu'après que des tribunaux spéciaux ont prononcé sa validité. Jusque-là c'est une saisie provisoire que le capteur est autorisé à mettre en lieu de sûreté, infra præsidia, mais dont il lui est défendu de dis

poser.

Telles sont sommairement les règles principales auxquelles la course maritime est soumise chez toutes les nations. Il y a d'autres règles de détail qui, nous

(1) De Martens, Essai sur les Armateurs, chap. 2, § 18.SCHMALZ, Droit des Gens européen, p. 244.

l'avons déjà dit, sont à peu près les mêmes partout. Sans entrer dans une exposition complète de toutes ces règles, nous renvoyons, pour ce qui concerne la France, à l'arrêté du 2 prairial an x1 (22 mai 1803), en vigueur aujourd'hui. Cet arrêté, que nous croyons utile de donner en entier à l'appendice (1), n'est, dans plusieurs de ses dispositions, que la reproduction du titre des prises, de l'ordonnance du mois d'août 1681.

1) Appendice Annexe, C.

CHAPITRE QUATRIÈME.

De la Neutralité.

SOMMAIRE.

Relations de simple amitié et relations d'alliance entre deux états. Neutralité. Il n'est pas exact de dire que la guerre soit pour les neutres comme si elle n'existait pas.-En quoi consiste l'impartialité que les neutres doivent garder.

Actes incompatibles avec la neutralité.-Prétentions opposées des belligérants et des neutres.

Deux états qui vivent en paix l'un avec l'autre peuvent être, ou simplement amis, ou alliés. Ils sont simplement amis, ou si l'on veut ils sont non ennemis, lorsque dans leurs relations mutuelles de toute sorte, chacun d'eux se borne à respecter scrupuleusement les droits absolus ou acquis de l'autre. Ils sont alliés, s'il existe entre eux quelque traité qui les oblige réciproquement à concourir ensemble au maintien de leurs droits, à se prêter une assistance mutuelle dans certains cas déterminés où l'un ou plusieurs de ces droits ont été lésés; en un mot s'ils sont tenus, en vertu d'un pacte qui les lie, à prendre part d'une manière ef

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fective, en faveur l'un de l'autre, aux différends qui peuvent survenir à l'un des deux avec d'autres puissances.

L'assistance ou les secours que l'un est obligé de donner à l'autre dans ces cas déterminés, peuvent être partiels ou illimités, passifs ou actifs; ils peuvent être donnés seulement une fois pour toutes, ou être exigibles tant qu'ils sont nécessaires. C'est le traité par lequel sont liées les deux parties qui fixe l'étendue et la portée de ces secours. Mais quels qu'ils soient, du moment qu'ils sont réels et efficaces, les deux états ne sont plus simplement amis, ils sont alliés.

Lorsque deux puissances se font la guerre, ceux des autres états qui, avant que cette guerre surgît, étaient simplement amis de l'une et de l'autre, ont le droit incontestable de demeurer tels pendant qu'elle dure; mais, pour conserver ce caractère, c'est pour eux un devoir, non-seulement de s'abstenir rigoureusement de toute participation à la guerre,mais encore de ne s'immiscer en rien dans la querelle des belligérants, et tout en maintenant avec chacun d'eux les relations ordinaires de l'état de paix, de ne rien faire en faveur de l'un qui puisse tourner au détriment de l'autre. La guerre entre deux nations donne donc lieu, pour les peuples qui veulent demeurer en paix, à un état nouveau par rapport aux belligérants. C'est l'état de neutralité.

On a dit que la neutralité n'est pas pour la puis

sance qui l'adopte un état nouveau, mais qu'elle n'est que la continuation de l'état antérieur de paix (1). On a dit que les neutres, étant totalement étrangers à la guerre, sont en droit d'agir de la même manière qu'ils peuvent le faire pendant la paix. Nous pensons, avec un auteur danois, qu'un pareil raisonnement est très hasardé, et qu'il est un peu singulier de vouloir fixer le droit d'agir des neutres par la supposition qu'il n'y a pas de guerre, là où il y en a réellement une (2). Et en effet, par le fait seul d'une guerre entre deux ou plusieurs puissances, les neutres ont à remplir envers ces puissances des obligations qu'ils n'avaient pas pendant la paix générale: il n'est donc pas vrai que la guerre soit pour eux comme si elle n'existait pas. S'il est vrai de dire avec Azuni que l'état de guerre entre plusieurs nations n'altère en rien l'indépendance naturelle et la liberté des autres peuples pacifiques, on ne peut pas dire, ainsi que le prétend cet auteur, que ces autres peuples pacifiques regardent d'un ceil tranquille et indifférent l'état violent qui trouble et agite les autres (3). C'est

(1) HUBNER, De la Saisie des bâtiments neutres, part. 2, ch. 2, § 2.-AZUNI, Droit maritime, t. 2, p. 53 et 69. — MASSE, Droit commercial, etc., t. 1, p. 177 et 192.

(2) Jo. NICOL. TETENS, Considérations sur les droits réciproques des puissances belligérantes, et des puissances neutres sur mer, P. 34.

(3) AZUNI, à l'endroit cité.

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