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M. l'Abba G..... (car l'Auteur est un Prêtre, aufli irréprochable par fes mœurs que diftingué par fon zèle pour la Religion), M. l'Ab. G... confideran le Coliba dans l'ordre phyfique, mentre & prouve par des exemples qu'il eft fouvent puni par la pete de la fanté; & l'on a vu de jeunes Ecclefiaftiques que le Célibat forcé a rendus abfolument fous. C'eft pour prévenir une partie de fes dangereux effets qu'on imagina les jeûnes, les macérations, &c. les la gnées mêmes y furent employées & quelquefois inurilement de là cette foule d'illufions qui égarèrent l'imagination de tant de Sali aires; de-là ces descriptions vives & paflionnées de leurs tourmens, de leurs fonges, qui firent die plaifamment à Montagne, que ce qu'il admiroit le plus dans Saint Jérôme, ce grand Apôtre de la virginité, c'étoit la force & la continuité de fe rentations. Nous demandors pa don à M. l'Ab. G... plus qu'a nos Lecteurs, de~ cette cira on trop pru grave. Revenons.

Le Célibat, confidéré dans l'ordre moral, ne peut être placé parmi les vertus, sil eft vrai que là notion commune des vertus ne donne ce nom qu'aux actions ules à la Société. » La continence, die

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Charron, eft une ver u fans action & » fans fruit: c'eft one privation, un nonfaire, peine fans pich.". Mais il y a ples. Le Célibar eft nuifible à la Sociér; i. cît un attentat contre les inceurs publi

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ques; le Célibat d'un feul néceflite un double facrifice, & livre au désespoir ou à la débauche un des deux coeurs que la Nature avoit deftinés à s'unir. Aufli obfervet-on que le Célibat s'accrédite chez toutes les Nations à mefure que les mœurs fe détériorent. La milanthropie, la dureté de cœur, l'égoïtime, & plufieurs paffions antifociales découlent naturellement de la fuite du mariage; tandis que toutes les affections douces font l'effet néceflaire d'un lien qui nous attache plus fortement à la Société. Aufli les Peuples qui ont porté le plus loin l'efprit focial, ne connurent-ils le Célibat que dans les temps de leur décadence. A Sparte, il étoit fiétri par les Loix, & par l'opinion. Chez les Athéniens, ce fur la Secte Epicurienne qui, la première, recommanda la vie célibataire à fes Dfciples; & dans Rome, le Célibat ne fur que l'effet du luxe & des mauvaises mœurs Mais pour le borner au Celibat religieux, P'Auteur obferve que chez les Grecs, la Religion n'appeloit au Célibat que deux Prêtreffes, celle de Delphes & la Prêtreffe de Junon. Les autres Vierges qui paroiffoient dans les cérémonies religieufes, ne contractoient point un engagement éternel. A Rome, fix ou fept Veftales furent vouées à la Virginié, & malgré les honneus done elles étoient comblées, il fut pas o jours facile de compléter ce nombre. Perfonne n'ignore que chez les Juifs, la mul

tiplication du genre humain fut un des préceptes de la Loi. La ftérilité des mariages y fut en opprobre, & le grand nombre des enfans une bénédiction. La Tribu de Lévi, qui préfidoit au culte, ne fut point foumife à la continence, & Dieu fe contente d'exiger que les Prêtres n'époufent que des Vierges. La Loi nouvelle, auffi indulgente que l'ancienne, n'ordonne nulle part le Célibar. On ne trouve dans l'Evangile prefque aucun témoignage en faveur de la virginité, & tout attefte au contraire la prédilection de Jéfus - Chrift pour le mariage. Le premier prodige qui gnale fon avénement, c'est la fécondité d'Elifabeth, mère de Saint Jean. Il honore d'un miracle les noces de Cana. Les comparaifons qui lui font le plus familières pour défigner le royaume des Cieux ou hui-même, c'eft tantôt celle d'un époux, tantôt celle d'un père de famille. Dans le feftin, fymbole de la béatitude célefte, on n'y eft admis qu'avec la robe nuptiale. Le prix de la prudence des Vierges lages elt d'être admifes aux noces; les Vierges folles en font exclues. On fait que les Apôtres furent tous mariés, hors Saint Jean. Dans les Actes qui portent leur nom, on trouve qu'il n'eft parlé d'aucune Vierge, si ce n'eft des quatre filles du Diacre Saint Philippe ; tandis qu'il eft fouvent fait mention des veuves ou des autres femmes attachées à l'Eglife. Que font, contre ces témoignages,

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les partifans de la virginité? Ils tourmentent plufieurs paffages de l'Evangile, pour en extraire la doctrine qu'ils veulent accréditer. C'eft ainfi qu'ils en ufent à l'égard des Epîtres de Saint Paul, tandis que cet Apôtre dit formellement dans fa première à Timothée: Il faut qu'un Evêque foit irrépréhenfible, qu'il foit le mari d'une. » feule femme; il faut que les Diacres » n'aient qu'une feule époufe «. Ici l'Auteur s'enfonce dans un labyrinthe théologique pour réfuter l'opinion de quelques Docteurs, qui donnent à ces paroles un fens allégorique & forcé. Il fort vainqueur de ce labyrinthe, & multipliant les preuves, les autorités, il démontre qu'avant le 4. fècle, l'abftinence du mariage ne fut preferite aux Prêtres ni par aucune Loi ni par la tradition. Il est bien vrai que dès le 2o. fiècle l'excellence de la virginité devint la doctrine favorite des nouveaux Chrétiens. Ce fut l'effet des perfécutions auxquelles ils. étoient exposés, de la crainte habituelle du martyre, & plus encore de l'opinion qui fe répandit fur la fin prochaine du monde. Ce fut alors que s'introduisirent les épreuves févères de la pénitence: on remarque à ce fujet que ce furent des Sectes hérétiques qui poufsèrent plus loin le rigoifme; mais il en réfulta que cet efprit fe répandit même parmi les Orthodoxes, qui fe crurent obligés de renchérir fur les Hérétiques. Cependant le Célibat ne fut en

core impof par aucune Loi, & Tertullien, partifan outré de la virgi ité, en convient luimême: Prohiberi nuptias nufquam omnino leg mus. Au Concile de Nicee, il fat queftion d'obliger les laïques mari's à quitter lears femmes en devenant Evêques, Prêtres ou Diacres. Le décret étoit près de paffer, lorfqu'un vénérable Evêque, qui avoit paffé fa vie dans le Célibat & dans les auftérités, s'éleva contre cette innova tion & la fit rejeter. Qui croiroir que malgré cette décifion du Concile de Nicée, un Concile de l'Eglife Larine ofa', plufieursfiècles après, citer ce même Concile de Nicée comme ayant in erdit le mariage aux Prêtres? Et tel étoit en Occident Pigno-. rance univerfelle, que les Evêques & les Prêtres, les plus révoltés de ce nouveau jorg, n'opposèrent point à leurs adverfaires l'autorité d'une décifion entièrement contrad ctoire qui eût accablé leurs antagonistes.

Le mariage continua donc d'être permis aux Prêtres de l'Eglife d'Orient; mais la prééminence de la virginité s'établissant dans l'opinion, un grand nombre fit profellion du Cé'ibat. Les Ecrits des SaintePères font pleins du récit des défordres qu: en furent la fuite. Ce fut alors qu'on vi s'accroître de jour en jour le nombre de ces Vierges, connues dans l'Hiftoire Eccléfiatique fous le nom d'Agapètes, aimées. La familiarité dans laquelle elles vé

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