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LISTE DES LIVRES

QUE L'ON DISAIT ÊTRE SOUS LA PRESSE EN HOLLANDE.

Dissertation de la pierre philosophale, par le sieur Law; dédiée à M. le duc d'Orléans, Régent du royaume de

France.

Nouveau moyen par lequel un tuteur peut ruiner son pupille en lui conservant ses effets, par le même sieur Law; dédié au même Prince régent.

Traité de l'existence de Dieu et de la religion chrétienne, par l'évêque Sacre-Dieu '; dédié au même Prince régent. Les merveilles d'une terre inconnue, par un comédien ; dédié au même prince.

L'art de convertir ceux qui n'ont point de religion, par l'abbé de Tencin; dédié à M. Law.

Paraphrase sur les Lamentations de Jérémie, par M. d'Argenson; dédié au Parlement.

Remarques sur les différents mouvements de la pirouette, par M. le président de Mesmes; dédié à M. le cardinal de Noailles.

L'Oraison funèbre du saint père Clément XI, par les sept vieillards de la Compagnie de Jésus; dédié au cardinal de Bissy.

Les directeurs de la retraite, par MM. Paris; dédié à

M. Law.

1 Surnom donné par ironie à l'abbé Dubois. Matthieu Marais raconte, à la date du 9 juin 1720, qu'un laquais du cardinal de Mailly, archevêque de Reims, s'étant pris de querelle sur les qualités avec un laquais de l'abbé Dubois, celui-ci dit à son camarade : « Ton maître sacre les rois, mais le mien sacre Dieu tout le long du jour.» (Voyez aussi le Journal de Barbier à la date din 7 juillet 1720.)

L'art d'user du poison suivant les espèces de qualité particulière, avec un raisonnement physique sur leur efficacité, enrichi d'histoires remarquables arrivées dans l'Europe, par le duc de Noailles.

Démonstration des aventures que procure le papier, par le duc d'Antin, dédiée au duc de Bourbon.

Les abus de la science astrologique, œuvre posthume de la parodie de Mithridate, dédiée à M. le duc d'Orléans, régent.

Éloges de la soumission et de la fermeté avec laquelle les Français se sont laissé dépouiller par un seul homme, par M. le duc d'Orléans, dédié au même Prince régent.

M. d'Armenonville, secrétaire d'État, fit entendre quelques jours auparavant, au sicur abbé d'Asfeld et au sieur abbé Léger, docteur de Sorbonne, qu'il était chargé de deux lettres de cachet pour les envoyer en exil aux deux extrémités du royaume, s'ils eussent persisté à ne vouloir point aller complimenter M. l'archevêque de Bourges sur sa promotion au cardinalat, ce qui les fit bientôt déterminer à accompagner les autres docteurs de Sorbonne qui allèrent pour ce sujet visiter ce nouveau cardinal de Gesvres, que ces deux abbés avaient voulu détourner de cette démarche, parce que ce prélat avait été des premiers qui avaient paru les plus zélés à accepter la constitution Unigenitus, dans le temps de l'assemblée du clergé en 1713 et 1714, et à la faire publier dans son diocèse de Bourges.

L'avis que M. d'Armenonville eut ordre en cela de donner à ces deux abbés, persuadait que M. le duc d'Orléans avait beaucoup d'égards pour leur mérite, surtout pour celui de l'abbé d'Asfeld, qui depuis plusieurs années faisait toutes les semaines une conférence dans le presbytère de la paroisse de Saint-Roch, où il expliquait la sainte Écriture d'une manière aisée, savante, et qui instrui

sait admirablement toutes les personnes qui ne manquaient pas de s'y trouver chaque fois en grand nombre de tous les quartiers de Paris, ecclésiastiques séculiers et réguliers, gens du monde des deux sexes, de qualité, et autres personnes de mérite; les dames étant dans une chambre particulière dont la porte était ouverte afin qu'elles pussent entendre distinctement ce que disait cet illustre abbé avec une édification merveilleuse de tous ceux qui allaient l'écouter avec empressement.

-M. le garde des sceaux et M. le premier président du Parlement s'étant trouvés en même temps dans l'appartement de M. le duc d'Orléans en attendant Son Altesse Royale pour tenir le conseil, y ayant depuis longtemps quelque refroidissement entre ces deux magistrats au sujet de la police, lorsque le premier en exerçait la charge de lieutenant général; le garde des sceaux ne put s'empêcher en cette occasion de dire au premier président : « Vous voulez bien, monsieur, que je vous demande à vous-même l'état de votre santé. Fort à votre service, monsieur, » dit le premier président. M. le garde des sceaux ajouta : « Vous savez, monsieur, que M. le Régent a eu depuis quelques jours la bonté d'accorder la charge de lieutenant général de police à mon fils le cadet : c'est pourquoi je vous supplie de vouloir bien lui accorder l'honneur de votre protection, lui ayant beaucoup recommandé d'avoir toujours un grand respect pour votre personne en particulier, et pour toute la compagnie en général. » Sur quoi M. le premier président répliqua : « Vous pouvez compter, monsieur, que je ne le traiterai pas autrement que vous et que je ne lui ferai pas plus de peine que je vous en ai pu faire. »

On assurait que M. de Tencin, grand vicaire de Sens et abbé de Vézelay, qui avait beaucoup contribué à la conversion du sieur Law, avait fait un gros gain par moyen des actions qu'il lui avait données.

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On ne pouvait pas dire la même chose de M. Vittemant, sous-précepteur du Roi et ci-devant de M. le Dauphin, duc de Bourgogne, de M. le duc d'Anjou, aujourd'hui roi d'Espagne, et de feu M. le duc de Berry; lequel remercia le Roi de la bonté que Sa Majesté ayait eue de lui conférer une abbaye considérable en le priant de le dispenser de l'accepter, se disant avoir assez de bien d'ailleurs sans avoir besoin du revenu de cette abbaye ni d'aucune autre pour l'aider à vivre, puisque « Votre Majesté, disait-il, ne me laisse manquer de rien.

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Vers la fin du mois de novembre dernier, M. le maréchal de Villeroy disait à M. Vittemant : « Il est inutile, monsieur, de vous offrir des actions, à moins qu'on ne veuille s'exposer à un refus de votre part; mais puis-je vous demander si vous permettrez au domestique qui vous sert d'en accepter quelques-unes? » M. Vittemant qui ignorait le fin des actions, fit réponse : « Vous êtes le maître, monseigneur, de faire du bien à qui il vous plaira. » Le maréchal en fit donner cinq à ce domestique, qui s'en alla aussitôt à la rue Quincampoix, avec un ami, pour les négocier, et les céda toutes cinq à raison de deux cent cinquante-huit livres par cent de profit, ce qui lui valut de bon la somme de six mille cent soixante livres en billets de banque, dont il fut étonné autant que M. Vittemant, d'avoir tant gagné en si peu de temps, et s'il avait différé encore de quelques semaines à s'en défaire, elles lui auraient valu vingt-sept mille livres au moins.

Comme il était dit par un arrêt du conseil d'État publié le 24 janvier 1720, qu'il était permis à tous régnicoles et étrangers de faire sortir du royaume de France toutes sortes d'espèces d'or et d'argent, on remontra à M. le duc d'Orléans qu'il était fort à craindre que cette permission ne fût très-préjudiciable à l'État par la grande quantité d'espèces qui ne manqueraient pas d'en sortir si l'on n'y remédiait promptement. M. Law représenta aussi

à Son Altesse Royale que pour profiter de ce privilége, un Anglais avait retiré le lendemain une somme de vingtquatre millions qu'il avait à la Banque; qu'ainsi il était absolument nécessaire de l'empêcher de profiter de l'augmentation portée par ledit arrêt et de faire sortir ces espèces hors du royaume.

-Ces remontrances si judicieuses furent apparemment la cause que le 29 on publia un autre arrêt qui révoquait ladite permission et fit en même temps défense à toutes sortes de personnes de faire sortir du royaume aucune espèce d'or et d'argent sous peine de confiscation, et qui réduisait les louis d'or.

Voici une aventure qui donna lieu à plusieurs discours et qui causa beaucoup d'étonnement. Un particulier, à sept heures du matin, engage un crocheteur à porter un rouleau, et étant arrivés devant la grande porte du Palais-Royal, il dit au crocheteur: « Va m'attendre au bas du grand escalier, proche la salle des gardes, je vais à deux pas d'ici chez un ami pour lui parler, après quoi j'irai te joindre; prends seulement bien garde de ne te point laisser prendre ce rouleau ni de le chiffonner, parce que c'est un tableau d'importance pour M. le Régent. » Le crocheteur va bonnement se poster à l'endroit que ce particulier lui avait indiqué. Après l'avoir attendu jusqu'à plus de onze heures et demie sans qu'il eût paru, ce crocheteur dit ingénument à l'un des gardes ce qui l'obligeait d'être là depuis si longtemps; que la personne qui l'avait pris ne venait point, que cela était cause qu'il perdait sa journée; qu'un inconnu lui avait dit de l'attendre là avec ce tableau roulé qu'il lui avait dit devoir présenter à M. le Régent; sur cette déclaration, le garde déroule le tableau, et l'ayant vu, fit monter le crocheteur. On présente le tableau à Son Altesse Royale, qui le considéra avec beaucoup d'attention, le fit mettre à part, et n'ayant pu tirer d'autre raison du crocheteur, il lui donna

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