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Rec. Sept. 10, 1700.

DE

JURISPRUDENCE.

ROYAUME DE BELGIQUE.

1876.

IIIme PARTIE.

JUGEMENTS DES TRIBUNAUX.

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LE TRIBUNAL; —Attendu que, dans son numéro du 27 juin dernier, le journal het Maeseycker Weekblad dont le défendeur est l'éditeur responsable, allègue que, le dimanche précédent, lors de la procession du SaintSacrement, le demandeur est venu à deux reprises successives et de propos délibéré se placer à deux pas de distance de cette procession et qu'il l'a regardée passer ayant son chapeau sur la tête, un cigare allumé à la bouche, les bras croisés et un sourire infernalement moqueur sur les lèvres;

Attendu que cette imputation, que le demandeur qualifie de mensongère, est de naPASIC, 1876. - 3o PARTIE.

ture à porter atteinte à son honneur et à sa considération;

Attendu, en effet, que si, d'après l'art. 15 de la constitution, nul ne peut être contraint de concourir aux actes et aux cérémonies d'un culte; que si encore, par voie de conséquence, personne n'est tenu, dans une cérémonie religieuse publique, de témoigner extérieurement, pour les objets d'un culte quelconque, un respect qui serait contraire à ses croyances, tout citoyen a le devoir de s'abstenir de poser, à l'occasion de pareilles cérémonies, des actes qui, par un caractère outrageant, blesseraient l'assistance dans ses sentiments les plus intimes;

Attendu, dans l'espèce, que le journaliste ne reproche pas uniquement au demandeur de ne pas avoir rendu hommage au culte catholique au moment où passait devant lui la procession de la Fête-Dieu; mais qu'il lui impute de s'être intentionnellement et à deux reprises successives porté sur le passage de cette procession et d'y avoir pris non-seulement une attitude irrévérencieuse en conservant son chapeau sur la tête et un cigare allumé à la bouche, mais encore, et par pure bravade, une contenance provoquante et pleine d'insulte, en croisant les bras et en souriant d'une manière sataniquement moqueuse;

Attendu que le défendeur ne saurait

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sérieusement prétendre que semblable conduite, aussi répréhensible qu'inconvenante, ne serait pas de nature à déconsidérer parmi ses concitoyens celui qui l'aurait tenue, puisqu'il articule dans son journal que les bourgeois de Maeseyck ont été indignés de l'attitude railleuse du demandeur et qu'il y dénonce les prétendus agissements de ce dernier à son chef hiérarchique;

Attendu que l'intention de nuire, qui a dicté les articles incriminés, résulte des termes dans lesquels ils sont conçus;

Attendu, quant à la conclusion subsidiaire du défendeur, que les faits dont il offre d'administrer la preuve sont exclusivement du domaine de la vie privée;

Que la preuve en est, dès lors, non recevable ;

Attendu, enfin, que l'insertion du présent jugement dans le journal het Maeseycker Weekblad et la condamnation du défendeur aux dépens constituent une réparation suffisante du dommage que le demandeur a éprouvé ;

Par ces motifs, ouï M. Debruyn, procureur du roi, en ses conclusions contraires, et sans avoir égard à la conclusion subsidiaire du défendeur, laquelle est déclarée non recevable, dit pour droit que les articles incriminés portent atteinte à l'honneur et à la considération du demandeur; condamne le défendeur...

Du 12 août 1874. - Tribunal de Tongres.
Prés. M. Ruys, juge.

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sion et à l'interdiction des droits énoncés aux articles 1, 3, 4 et 5 de l'article 31 du code pénal, comme coupable des faits prévus par l'article 372, §§ 1 et 2 dudit code; en conséquence, invoquant l'article 232 du code civil, elle demandait qu'il fût dit qu'il y a lieu au divorce entre elle et son mari et qu'elle est autorisée à se retirer devant l'officier de l'état civil pour le faire prononcer.

M. le substitut L. Hénoul motivé son avis comme suit :

« Attendu que, par arrêt de la cour d'assises du Brabant, en date du 27 octobre 1872, qui ne peut plus être réformé par aucune voie légale, le sieur H... a été condamné à cinq années de reclusion, du chef de faits prévus par l'article 372 du code pénal;

• Attendu que, d'après l'article 232 du code civil, la condamnation de l'un des époux à une peine infamante est pour l'autre époux une cause de divorce;

Attendu qu'il y a lieu d'attacher ces effets à toute peine criminelle;

Que si l'article précité du code civil ne s'est pas servi de ces derniers mots, cela tient uniquement à ce qu'ils eussent été trop généraux, sous l'empire d'une législation où certaines peines en matière criminelle entraînaient la mort civile, et par suite, la dissolution du mariage, comme le disposait l'article 227 du même code;

< Attendu que, après l'abolition de la mort civile par la constitution belge, les peines auxquelles le code pénal de 1810 attachait cette conséquence rentraient naturellement dans les termes de l'article 232 du code civil, qui dès lors visa toutes les peines en matière criminelle;

Que si le nouveau code pénal n'a pas reproduit l'ancienne distinction en peines afflictives et infamantes, cela provient surtout de ce que le législateur a entendu laisser à l'opinion publique le soin de décerner l'infamie, que l'on conçoit devoir s'appliquer bien plutôt au fait qu'à la peine;

« Qu'il est donc impossible d'admettre l'abrogation de la cause de divorce inscrite à l'article 232 du code civil;

« Nous estimons qu'il y a lieu à divorce. ›

JUGEMENT.

LE TRIBUNAL; — Attendu que, par arrêt du 27 octobre 1872, la cour d'assises du Brabant a condamné H... à cinq années de reclusion;

Attendu que, sous l'empire du code pénal de 1810, la condamnation de l'un des époux

à la reclusion était, pour l'autre époux, une cause de divorce, qui devait, dans ce cas, être prononcé de plano, aux termes des art. 232 et 261 du code civil, la reclusion étant une peine infamante;

Attendu que, quoique le législateur du code pénal de 1867 ait changé la dénomination des peines et supprimé la distinction des peines criminelles en afflictives et infamantes ou infamantes seulement, il n'est pas permis de supposer que, par ce seul changement de dénomination, il ait entendu modifier la loi civile sur le divorce;

Par ces motifs, sur le rapport de M. de Sébille, juge, dit qu'il y a lieu à divorce.

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L'autorité administrative, régissant souverainement les choses du domaine public dont les rues forment une dépendance, est seule juge des mesures à prendre pour assurer la sûreté et la commodité du passage dans les rues; par suite, est non recevable l'action intentée devant le tribunal civil par un particulier aux fins de faire enlever, tel qu'il est établi, un tramway établi devant sa maison (1). L'autorité administrative est toutefois obligée de réparer le préjudice qu'elle cause si, en faisant usage des droits que la loi lui accorde, elle viole les droits des particuliers. L'une des destinations des rues des villes étant de fournir des accès, des jours et des vues aux propriétés dont elles sont bordées, l'expropriation totale ou partielle des droits d'accès, de jour et de vue pris par les riverains sur le domaine public, ne peut se faire que moyennant indemnité.

Ne peuvent être une cause d'indemnité pour un propriétaire les désagréments qui peuvent provenir de l'enchâssement des rails contre le trottoir de sa maison, ni les difficultés qui en résultent pour le stationnement des voitures devant cette maison (2).

(1) A rapprocher des arrêts de la cour de cassation de Belgique des 22 décembre 1864 et 10 janvier 1867 (PASIC. BELGE, 1865, I, 54 et 1867, I, 117). (2) Voy. cass. belge, 23 avril 1868 et 18 mars 1870 (Pasic. belge, 1869, 1, 244 et 1870, 1, 153).

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LE TRIBUNAL; Attendu que l'exploit d'ajournement à pour triple fin:

1° De faire, endéans les huit jours, enlever le tramway tel qu'il se trouve établi dans la rue Kipdorp, devant la maison du demandeur;

2o De payer une indemnité de 100 francs pour chaque jour de retard;

3o En ordre subsidiaire, de payer au requérant une indemnité de 25,000 francs, ou toute autre à arbitrer, pour moins-value et dépréciation de sa maison;

Attendu que la première conclusion ne concerne que la ville d'Anvers, qui a prescrit le tracé du tramway et sans l'autorisation de laquelle aucune modification ne peut être apportée à l'état de la voirie communale dont la rue Kipdorp fait partie;

Attendu qu'à cette conclusion, la défenderesse oppose une fin de non-recevoir tirée de l'indépendance du pouvoir administratif; qu'à l'audience le demandeur n'a pas insisté sur ce premier chef de sa demande;

Attendu, d'ailleurs, que l'autorité administrative est seule juge des mesures à prendre pour assurer la sûreté et la commodité du passage dans les rues, et qu'elle régit souverainement les choses du domaine public dont les rues forment une dépendance, que ses actes ne sont pas susceptibles d'être réformés par l'autorité judiciaire;

Attendu que celle-ci doit, il est vrai, aux termes de l'article 107 de la constitution, refuser l'application de celui de ces actes qui serait contraire à une loi, mais qu'on n'a pas même essayé d'indiquer une illégalité quelconque dans les dispositions qui ont réglé l'établissement du tramway;

Attendu que la clause pénale qui forme l'objet de la seconde conclusion n'est qu'un accessoire destiné à garantir l'exécution de la demande principale; qu'elle est donc non recevable au même titre que cette dernière ;

Attendu que la fin subsidiaire tendant à l'allocation de dommages-intérêts est recevable en tant que l'autorité administrative est obligée de réparer le préjudice qu'elle peut causer, même en ne faisant usage que des droits que la loi lui accorde;

Attendu que pour être tenu à réparation il faut avoir ou commis une faute ou violé un droit de la partie qui se plaint;

Attendu que les considérations qui précèdent ont déjà reconnu que la ville d'Anvers, en prescrivant le tracé du tramway, a rempli un devoir de police; qu'il ne s'agit donc plus que de rechercher si, en prenant des mesures qui lui ont semblé commandées par l'intérêt de la généralité des habitants, elle a porté atteinte aux droits privés de quelques-uns et spécialement du demandeur au procès;

Attendu qu'à ce point de vue, il importe de considérer que les rues de nos villes ont une double destination, l'une principale et l'autre accessoire : la première de servir de moyen de communication à tous, la seconde de fournir des accès, des jours et des vues aux propriétés dont elles sont bordées et qui contribuent, en une certaine mesure, à en faire la sécurité et l'agrément;

Attendu qu'à raison de cette destination même de la voirie, les vues, les accès et les jours, pris par les riverains avec autorisation expresse ou tacite de l'administration, constituent sur le domaine public de véritables droits dont l'expropriation totale ou même partielle ne peut se faire que moyennant indemnité;

Attendu que le demandeur ne prétend pas et ne saurait du reste, avec une ombre de raison, prétendre que l'enchâssement des rails dans le pavé de la rue Kipdorp diminue en rien les droits de jour, de vue ou d'accès dont jouit sa propriété ;

Attendu qu'il se borne à soutenir que l'accès de sa maison est assujetti à des entraves et à des dangers, parce qu'il devient impossible aux voitures de s'arrêter devant la porte pour prendre ou déposer les personnes qui se rendent chez lui;

Attendu que ce reproche s'adresse moins à l'établissement des rails qu'à l'usage qui en est fait pour y faire circuler des voitures auxquelles tous autres véhicules doivent, au moment de leur passage, céder cette partie de la voie publique sur laquelle les rails sont établis ;

Attendu qu'en fait donc le reproche est exagéré; que rien n'empêche les voitures particulières d'approcher de la propriété du demandeur, de s'y arrêter, ni même d'y stationner dans l'intervalle du passage des omnibus employés à l'exploitation du tramway; que la seule modification apportée à l'état de choses antérieur, c'est la difficulté, voire même l'impossibilité de prolonger indéfiniment, devant la porte du demandeur, le stationnement des voitures appartenant aux personnes qui descendent chez lui;

Attendu, en effet, qu'antérieurement à

l'établissement du tramway, avant d'entrer daus la maison, d'en sortir ou d'approcher seulement du trottoir; il fallait, comme aujourd'hui, s'assurer s'il n'y avait pas d'autres véhicules en possession de la voie publique; que les voitures du tramway donnassentelles lieu à un passage infiniment plus multiplié, encore n'y aurait-il pas sujet à se plaindre, la destination principale des rues étant de servir à la circulation de tous;

Attendu que le stationnement dans les rues n'appartient à personne à titre de droit; qu'il s'exerce comme simple tolérance, si bien que l'abus en est réprimé par les dispositions pénales qui punissent les entraves apportées à la libre circulation;

Attendu qu'il appartient par cela même à l'autorité qui a la propriété et l'administration de la voirie, de régler et de restreindre la faculté du stationnement, en conciliant les aisances des particuliers avec les nécessités de la circulation publique ; qu'en le limitant à l'intervalle de temps qui sépare le passage de deux omnibus, la ville d'Anvers n'a ni lésé le droit du demandeur, ni même entravé d'une manière appréciable la jouissance de sa propriété ;

Attendu que les deux autres parties ne font qu'user de la concession qui, d'après ces considérations, pouvait leur être accordée par la ville d'Anvers; qu'on ne leur impute aucun fait particulier d'abus pouvant donner naissance à responsabilité; que, quant à elles aussi, l'action manque donc de fondement;

Par ces motifs, de l'avis conforme de M. Wouters, substitut du procureur du roi, statuant en premier ressort, déclare le demandeur non recevable et non fondé en ses diverses conclusions et le condamne aux dépens.

Du 7 janvier 1875. Tribunal d'AnPrés. M. Smekens, président. — Pl. MM. J. Jacobs et Delvaux.

vers.

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