relations avec les parties ('), ce tiers prétendit-il avoir la propriété de l'immeuble. Son seul droit est d'évincer le bailleur par les voies ordinaires, et, son droit de propriété une fois démontré, il pourra expulser le preneur. 1242. Lorsque le bail a été fait par plusieurs copropriétaires solidaires, le congé n'est opposable au preneur que s'il émane de tous les copropriétaires (2). Cette solution vient de ce que, dans l'intention des parties, comme nous l'avons montré à propos de l'obligation de délivrance (3), le bail ne peut porter que sur la chose entière et non sur une ou plusieurs portions indivises de cette chose. Il n'en serait autrement que dans le cas où celui des bailleurs qui donnerait congé aurait reçu mandat de ses copropriétaires et où ce mandat serait porté à la connaissance du preneur (*). Réciproquement, si le bail a été consenti à plusieurs preneurs, ils doivent s'entendre pour donner congé ("). Mais si c'est à l'un des copropriétaires que le bail a été consenti, ou, ce qui revient au même, si le bailleur laisse plusieurs héritiers parmi lesquels se trouve le preneur, — il suffit, pour la validité du congé, qu'il soit donné par les autres propriétaires ou héritiers ("). Le preneur n'est pas, en effet, son propre preneur; il ne se paye pas de loyers, ce sont donc ses copropriétaires ou cohéritiers seuls qui sont ses bailleurs. On a objecté que, l'obligation de faire jouir imposée au bailleur étant indivisible, il n'y a pas confusion entre la qualité de (1) Guillouard, I, n. 433 (l'arrêt de Cass., 7 juin 1837, S., 37. 2. 134, que cile cet auteur, nous parait entièrement étranger à la question). (2) Toulouse, 10 mars 1898, Loi, 2 juin 1898. Bruxelles, 31 déc. 1807, S. chr. Trib. civ. Cherbourg, 13 août 1890, Loi, 12 nov. 1890. — Trib. civ. Dax, 8 nov. 1900, Gaz. Pal., 1901. 1. 410. Trib. paix Paris, 24 fév. 1892, Gaz. Trib., 13 mai 1892. - Trib. paix Saint-Palais, 20 mars 1897, Rer. just. paix, 97. 337. — Troplong, I, n. 428; Curasson, Comp. des juges de paix, n. 284; Guillouard, I, n. 433; Dalmbert, Note, S., 98. 2. 241. (3) V. supra, n. 286 s. (4) Cass., 25 pluviose an XII, S. chr. Toulouse, 10 mars 1898, précité. Troplong, I, n. 427; Guillouard, 1, n. 433. (*) Trib. civ. Seine, 13 fév. 1893, Gaz. Pal., 93. 1. 498. 18 janv. 1904, Rev. just. paix, 1905. 27. Trib. paix Sancoin, (6) Rouen, 15 avril 1897, S., 98. 2. 241 (pour le cas où le preneur est l'un des héritiers du bailleur. -Dalmbert, Note, S., 98. 2. 241. — Contra Trib. civ. Rouen, 9 fév. 1897, sous Rouen, 15 avril 1897, précité. copropriétaire ou de cohéritier et celle de preneur. Mais peu nous importe cette indivisibilité, qui, d'ailleurs, ne mettrait aucun obstacle à la confusion; il ne s'agit pas de savoir quelle est la nature de l'obligation du bailleur, il s'agit de savoir quels sont les bailleurs. Faut-il signaler la double absurdité de la solution contraire, qui, d'une part, subordonne la validité du congé à une signification que l'un des contractants, le preneur, se fera à luimême et, d'autre part, supprime en réalité, dans l'hypothèse prévue, le droit du bailleur à donner congé ? 1243. Lorsque le bail a été consenti à plusieurs preneurs solidaires, le congé n'est valable que s'il est donné et signifié à tous les preneurs, car, si on peut admettre que chacun des débiteurs solidaires a mandat d'améliorer la condition commune, on est d'accord pour reconnaitre qu'il n'a pas mandat d'amoindrir cette même condition; du reste, il serait singulier que l'une des parties solidaires représentât les autres parties solidaires pour recevoir un congé, alors qu'il ne les représente pas pour donner congé. On a essayé de répondre que le congé est un acte unilatéral; nous ne voyons pas en quoi cette observation diminue la force de notre raisonne ment. L'opinion contraire est cependant généralement admise ('); on la fonde sur une extension de l'art. 2249, d'après lequel la prescription interrompue contre l'un des débiteurs solidaires est interrompue contre les autres. Cet argument est sans valeur, car on reconnait que la disposition précitée déroge au droit commun et qu'elle ne se justifie pas. Réciproquement le congé doit être adressé par le preneur à tous les bailleurs solidaires. 1244. Le congé est un acte d'administration, puisqu'il a pour objet de modifier seulement le mode d'exploitation de l'immeuble; aussi le successible qui n'a pas encore pris parti peut-il y procéder sans être réputé héritier pur et simple (2). (1) Paris, 18 avril 1857, S., 57. 2. 107. Trib. civ. Louvain, 31 janv. 1885, Journ. trib. belg., 85. 415.-Aubry et Rau, IV, p. 500, § 369, nole 28; Guillouard, 1, n. 433: Hue, X, n. 332: Siville, VI, n. 542. (*) V. notre Tr. des succ., 3e édit., II, n. 1151. A plus forte raison en est-il ainsi de l'héritier bénéficiaire. Mais il n'est pas un acte conservatoire, donc il ne peut être donné par la femme commune qu'avec l'autorisation de son mari ('). 1245. Le congé doit, d'après l'art. 1736, être donné dans les délais fixés par l'usage des lieux, et l'art. 1759 dit également que le congé doit être donné dans « le terme fixé par l'usage des lieux ». Cette disposition a été édictée, comme le dit le tribun Mouricault dans son rapport (2), parce que l'on est accoutumé à faire ses spéculations et ses dispositions d'après les usages », parce que les usages locaux sont très divers, et enfin parce qu'il n'y a aucun inconvénient à s'y référer. Sans doute la détermination des usages locaux est quelquefois difficile, mais nous ne saurions cependant, comme le font quelques auteurs (3), blamer le législateur de ne leur avoir pas substitué une règle uniforme; toute disposition législative sur ce point n'aurait pu mériter l'approbation que si elle avait été l'expression de la volonté tacite des parties; or les parties ne peuvent avoir d'autres volontés que de se conformer à l'usage établi dans la région où est située la chose louée. D'un autre côté, cet usage répond souvent aux nécessités de l'exploitation, il varie suivant la nature de cette exploitation, il varie, pour le même genre de culture, suivant les régions, à raison du climat et de la précocité plus ou moins grande des récoltes; on comprend qu'il eût été difficile au législateur de tenir compte de tous ces éléments. L'usage des lieux étant souverain en cette matière, le juge du fait décide si le congé a été donné conformément aux règles fixées par cet usage ('); il peut décider, par exemple, (1) Trib. civ. Cherbourg, 13 août 1890, Loi, 12 nov. 1890. (2) Fenet, XIV, p. 329. 3 Laurent, XXV, n. 329; Guillouard, I, n. 435. (Cass., 29 déc. 1880, D., 81, 1. 345. Guillouard, II, n. 504.- V. infra, n. 1413 s. - A Paris, le délai est de trois mois pour les appartements. Trib. civ. Seine, 13 juin 1891, Gaz. Pal., 91. 2. 281. - Trib. paix Paris, 14 juin 1894, Loi, 19 juin 1894. Trib. paix Paris, 5 mai 1898, Loi, 31 mai 1898. - Il est réduit à six semaines pour les locaux dont le loyer est inférieur à 400 fr. — Trib. civ. Seine, 5 déc. 1501, Droit, 20 avril 1962. Le delai est de six mois pour les bouti que le congé donné pour le milieu d'une année de jouissance est valable ('). L'usage des lieux peut être consulté non seulement pour le délai qui doit s'écouler entre le congé et la sortie du preneur, mais encore pour la question de savoir à quelles époques le bail peut prendre fin en vertu d'un congé (*). En effet, il y a des termes d'usage, auxquels les baux commencent ou finissent habituellement. Ces termes se confondent ordinairement avec les termes fixés par l'usage pour le paiement. Mais si le paiement doit avoir lieu hors des termes d'usage, il ne s'ensuit pas nécessairement que le congé doive être donné pour l'un des termes convenus pour le paiement ("). D'autre part, dans certaines régions, il est d'usage que le bail ne puisse finir qu'à des échéances fixées à un certain délai après son commencement ('). 1246. Souvent le délai n'est pas le même pour les divers objets loués; il peut varier par exemple pour les locaux indus ques et locaux industriels. Paris, 17 déc. 1872, S., 73. 2. 47. - Trib. civ. Seine, 18 juin 1901, Gaz. Trib., 5 nov. 1901. Trib. civ. Seine, 5 déc. 1901, Droit, 20 avril 1902. — Trib. paix Paris, 5 mai 1898, précité. - Même situés à un étage supérieur. Paris, 22 juil. 1857, Gaz. Trib., 26 juil. 1857. Paris, 21 nov. 1863, S., 64. 2. 158. Trib. civ. Seine, Gaz. Trib., 12 janv. 1852. Toutefois si le loyer des boutiques est inférieur à 400 fr., et si, en outre, elles ne sont pas situées sur rue ou sur cour marchande donnant accès au public, elles sont assimilées aux appartements de moins de 400 fr. Paris, 22 juin 1842, D., 42. 2. 243. — Trib. civ. Seine, 5 déc. 1901, précité. Décidé qu'à Saint-Denis (Seine), à la différence de certaines communes voisines, le délai pour les maisons, boutiques et usines est de trois mois et non de six mois. Trib. civ. Seine, 8 juil. 1896, Droit, 20 août 1896; qu'à Toulouse le délai est de 6 ou 3 mois, suivant que le loyer alleint ou non 400 fr. - Trib. civ. Toulouse, 23 juil. 1902, Gaz. Trib. Midi, 7 déc. 1902; — qu'à Bordeaux, le délai est d'un mois pour les locations au mois. Trib. civ. Bordeaux, 18 déc. 1901, Rec. Bordeaux, 1902. 2. 37; qu'à Lyon le délai varie suivant que le bail est à l'année ou au mois, mais que le Lail consenti à l'année n'est pas réputé fait au mois par cela seul que le loyer est payable mensuellement. - Trib. civ. Lyon, 13 déc. 1901, Loi, 9 juin 1902. civ. Lyon, 14 fév. 1903, Mon. jud. Lyon, 26 fév. 1903; pour les locaux donnant sur une cour, le délai est de six mois. Trib. civ. SaintEtienne, 23 nov. 1904, Droit, 13 déc. 1904. (Cass., 29 déc. 1880, D., 81. 1. 345. Trib., 24 sept. 1899. Guillouard, I, n. 434. (2) Guillouard, I, n. 435; Hue, X, n. 332. - V. aussi Trib. qu'à Saint-Etienne, - V. du reste infra, n. 1256. Trib. civ. Bourgoin, 10 mai 1899, Gaz. (3) V. cep. Lyon, 12 mars 1898, Mon. jud. Lyon, 26 juill. 1898. () Trib. civ. Cognac, 15 juin 1891, Rec. de Bordeaux, 93. 3. 1 (usage de Cognac, le bail d'une maison est censé fait à l'année). triels et pour les appartements compris dans le bail ('); il va sans dire que le délai de congé est alors unique, la volonté des parties étant en ce sens (2). Le délai applicable est celui qui concerne l'objet auquel les parties ont attaché le plus d'importance (1). 1246 bis. En général, le délai fixé par l'usage des lieux ne s'applique pas aux locations gratuites; elles cessent dès que le bailleur manifeste sa volonté (*). 1247. La convention des parties peut déroger à l'usage des lieux (*). D'un autre côté, le congé donné par l'une des parties contrairement à l'usage des lieux est valable s'il est accepté par l'autre partie (6). 1248. Le congé peut être donné le jour même fixé pour l'entrée en jouissance (7). Il ne peut être donné avant l'entrée en jouissance, de manière, par exemple, que le bail soit résilié avant le jour fixé pour l'entrée en jouissance (*); l'opinion contraire tendrait à permettre à chacune des parties, dans toutes les hypothèses où le bail a été conclu à une époque précédant l'entrée en jouissance d'un temps égal à la durée ordinaire des congés, de résoudre le contrat avant son exécution et de méconnaitre ainsi la convention. Le congé donné avant l'entrée en jouissance doit donc être réputé avoir été donné le jour de l'entrée en jouissance (9), (1) V. la note 4, p. 713, supra. Cpr. pour les baux de biens ruraux et urbains, supra, n. 1238. Décidé qu'en cas de bail d'une écurie et d'un logement peu important à un loueur de voitures, c'est le délai des locaux industriels qu'il faut appliquer. - Trib, paix Paris, 5 mai 1898, Loi, 31 mai 1898. () Trib. paix Lectoure, 6 sept. 1901, Rev. just. paix, 1903. 96. (5. Trib. civ. Seine, 30 déc. 1897, Gaz. Trib., 14 mai 1898. - Trib. paix Paris, 14 juin 1894, Loi, 19 juin 1894. (*) Trib. civ. Lyon, 5 janv. 1887, Mon. jud. Lyon, 18 avril 1887. (1) A plus forte raison peut-il être donné avant l'expiration d'un temps égal à celui qui, d'après les usages locaux, constitue le délai de congé. Par exemple, si ce délai est de six mois, le bailleur n'est pas tenu d'attendre six mois à partir de l'entrée en jouissance pour donner congé. Contra Trib. civ. Saint-Etienne, 23 nov. 1901, Droit, 13 déc. 1904. 136. () Trib. paix Paris, 11e arrondissement, 30 janv. 1895, Pand. franç., 95. 2. Contra Bordeaux, 28 fév. 1881, Rec. Bordeaux, 1881, p. 77. (Trib. civ. Seine, 13 juin 1891, Gaz. Pal., 91. 2. 281. |