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remplie. Il est certain qu'elle n'est pas exigée; mais doit-on en conclure qu'elle n'est pas nécessaire?

Pour résoudre cette question, il faut d'abord considérer, que, bien qu'il soit dit que les établissemens de troisième classe, peuvent, sans inconvénient, être formés auprès des habitations particulières, ils sont néanmoins susceptibles, dans certains cas, d'incommoder le voisinage, car autrement ils n'auraient pas été assujettis à une permission. Il faut donc que l'autorité cherche à connaître si cette autorisation peut être accordée sans incónvéniens. Pour éclairer sa religion, et quoique les réglemens n'aient ordonné aucune formalité, le Préfet de police consulte le commissaire de la petite-voirie et le Conseil de salubrité, et personne ne serait fondé à critiquer cet usage comme n'étant pas reconnu par les réglemens, et comme retardant la décision à intervenir.

Sans doute l'examen des lieux que font les hommes de l'art, est dans l'intérêt des voisins comme dans l'intérêt général; mais pourquoi les voisins le plus spécialement intéressés ne seraient-ils pas entendus en tems utile, c'est-à-dire avant la mise en activité des travaux ? Peut-on disconvenir qu'en certains cas, ces voisins ne pussent faire des observations de nature à fixer toute l'attention de l'administration?

Il ne faut pas perdre de vue, ainsi ainsi que le porte la circulaire de M. le Directeur général du commerce, du 4 mars 1815, que les dispositions des réglemens sur les établissemens insalubres ou incommodes, présentent à la fois une garantie aux propriétaires et aux entrepreneurs d'établissemens: aux propriétaires en les assurant qu'il ne sera pas formé, dans leur voisinage, à leur insçu, et sans des précautions,

des ateliers, dont l'activité peut préjudicier à leurs intérêts; aux entrepreneurs, en leur donnant la certitude, que, lorsqu'ils auront obtenu une permission, ils ne seront pas troublés dans l'exercice de leur industrie.

Le défaut d'informations de commodo et incommodo, déroge à ce principe; car d'une part les propriétaires voisins ne seront informés du projet du fabricant, que lorsque ce dernier mettra ses travaux en activité, et c'est par les incommodités qu'ils pourront éprouver qu'ils seront instruits de l'existence de l'établissement.

Ils pourront à la vérité se pourvoir au Conseil de Préfecture; mais si leurs réclamations sont accueillies, ils n'en auront pas moins éprouvé un assez long préjudice, qu'une information préalable eut pu leur éviter; d'une autre part, l'entrepreneur, en vertu d'une permission délivrée à l'insçu des voisins, aura fait des dépenses d'établissement qui seront une perte réelle pour lui, si la permission vient à être infirmée par le Conseil de Préfecture.

Ainsi, le défaut d'informations peut être souvent préjudiciable, tant aux propriétaires voisins qu'aux fabricans.

Au surplus, que les voisins soient ou non consultés, le Préfet ne peut se dispenser de prendre l'avis du Maire, dans une commune rurale, et de la police locale, à Paris, c'est-à-dire, l'avis du Commissaire de police. Or, rien, mieux qu'une information de commodo et incommodo, ne peut mettre le Maire ou le Commissaire de police à portée de se former une opinion sur un projet d'établisse

ment.

Ces considérations ne pouvaient manquer de fixer l'attention des Préfets de police, et depuis un grand

nombre d'années ils sont dans l'usage de faire faire des enquêtes pour ces établissemens.

Cette marche n'a fait naître jusqu'ici aucune réclamation; seulement, comme l'enquête de commodo et incommodo n'est point exigée par les réglemens, pour les établissemens de troisième classe, et si les voisins sont consultés, ce n'est que par que voie officieuse, on ne la vise que comme un procès-verbal pur et simple dans les arrêtés pris sur les établissemens appartenant à cette classe.

SECTION III.

De l'intervention des Conseils de Préfecture, en ce qui concerne les établissemens de troisième classe, et du pourvoi que l'on peut former contre leurs décisions.

La discussion à laquelle nous nous sommes livrés, touchant l'incompétence des Conseils de Préfecture, en ce qui concerne le recours de l'entrepreneur contre l'arrêté qui lui a refusé sa permission, n'est plus en harmonie avec les dispositions de l'art. 8 du décret de 1810, portant : « S'il s'élève des réclamations contre la décision prise par le Préfet de lice, (soit qu'elles viennent de la part du fabricant, soit qu'elles aient été formées par les opposans.

po

Ordonnance du 14 janvier 1824), ou par les Maires sur une demande en formation de manufacture ou d'atelier compris dans la troisième classe, elles seront jugées en Conseil de Préfecture ».

Le Conseil de Préfecture se trouve investi, par cet article, d'un droit qui nous paraît exorbitant, celui de juger un acte émané du Préfet dans un intérêt général. «Il est de principe, dit Macarel, élémens de jurisprudence administrative, que les Con

seils de Préfecture ne peuvent rapporter ni maintenir les arrêtés des Préfets». Nous avouons que nous avons peine à comprendre que le Conseil de Préfecture, qui ne peut connaître du recours du fabricant contre l'arrêté du Préfet, s'il s'agit d'un atelier de deuxième classe, ait ce droit si l'établissement est de troisième classe.

Dira-t-on que les établissemens de troisième classe sont trop peu importans pour être l'objet d'une requête au Conseil d'Etat; que les instances devant ce Conseil entraînent des déplacemens et des démarches longues et dispendieuses, et que ce serait le surcharger sans utilité, d'affaires d'une importance toute secondaire?

Ces considérations seraient certes d'un grand poids, si le Conseil de Préfecture jugeait en dernier ressort dans l'espèce, mais nous allons voir que ses décisions rendues sur des établissemens de troisième classe, peuvent être attaquées devant le Conseil d'Etat.

Dira-t-on encore que la décision du Préfet est contentieuse, puisqu'il décide à la fois et sur la demande et sur les oppositions des voisins?

Mais nous avons démontré que le Préfet ne juge pas les oppositions, et qu'il ne les examine que comme renseignemens. D'ailleurs, en admettant cette doctrine, il faudrait attribuer la connaissance du refus d'autorisation pour les établissemens de deuxième classe, au Conseil de Préfecture, puisque le Préfet décide comme pour la troisième, qu'il y ait où non opposition.

Prétendra-t-on enfin que d'après l'art. 8 du décret, le Préfet statuant comme Maire, les Conseils de Préfecture peuvent connaître de sa décision comme ils connaissent de celle des autres Maires?

Mais cette assertion ne serait plus valable depuis l'ordonnance de 1815, qui a attribué, dans les départemens, la connaissance des établissemens de troisième classe, aux sous-Préfets et non aux Maires.

Nous ne pourrions nous expliquer cette distinction dans la compétence du Conseil de Préfecture, qu'en adoptant l'ancienne jurisprudence sur les établissemens de deuxième classe, d'après laquelle ce Conseil connaissait des oppositions avant la décision du Préfet. Dans cette hypothèse, on pouvait dire que la décision du Préfet étant purement administrative, puisqu'il ne connaissait pas des oppositions, ne pouvait être attaquée devant le Conseil de Préfecture, tandis que lorsqu'il s'agissait des établissemens de troisième classe, le Préfet appréciait les oppositions et alors sa décision était presque litigieuse et pouvait être dénoncée au Conseil. Mais telle n'a pas été la pensée des premiers législateurs, et avec la jurisprudence admise aujourd'hui et qui, nous le répétons, semble seule rationnelle, nous persistons à croire que le Conseil de Préfecture ne devrait pas statuer sur le recours du fabricant contre un arrêté qui lui refuse une autorisation de troisième classe, puisqu'il ne pourrait en connaître s'il s'agissait d'un atelier de deuxième classe, et que dans l'un comme dans l'autre cas, le Préfet décide, qu'il y ait ou qu'il n'y ait pas d'oppositions.

Nous livrons ces observations à l'attention des légistes.

L'article 8 du décret ne parle pas du pourvoi au Conseil d'Etat, contre les décisions du Conseil de Préfecture rendues dans l'espèce: doit-on en conclure que ce pourvoi n'est pas admissible? Non

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