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D'un autre côté, il y a dans les départemens quantité de citoyens enrôlés qui n'ont pas encore vu le fen; cccx-ci brûlent de fe fignaler à leur tour (1). Déjà Dillon en recrute à Paris & dans d'autres lieux pour completter nos armées au printems prochain. Rien de mieux vu; mais il faut faire marcher de front tous les foins qui regardent tant de milliers de foldats. Malheureufement il nous faudra long-temps encore des baionnettes. Tant que la liberté fera à fon berceau, il faudra l'entourer d'armes défenfives. Malheur à ceux qui s'endorment à fes côtés; ils content rifque de ne plus la retrouver devant eux à feur réveil: tenons-nous done prêts. Mais vous, administrateurs, ne fermez l'oeil que quand les défenfeurs de la patrie n'auront aucune plainte à vous faire. De l'économie dans l'emploi des deniers de la république; mais que rien ne manque à celui qui fe facrifie tout entier au bien-être commun & à la sûreté générale, tant au dedans qu'au dehors.

PS. Les commiffaires à l'armée de la belgique ont écrit que le général Dumourier demande un congé pour rétabli fa fanté. Dumourier fe porteroit encore bien fi la convention eût voulu courber lá tême & foufcrire aux volontés du général victorieux.

Le confeil exécutif vient de nommer Eiren au commandement de l'atmée du Var, a la place d'Anfelme qui a été aeftitué.

On a appris vendredi que le général Bournonville a remporté un avantage confidérable far les hauteurs de Vavrein, près Mofeile.

Olympe de Gouges, difenfeur officieux de Louis XVL

Nous avons déjà en occafion de parler de cette femme, qui voudroit à toute force attacher fon nom à la révolution, & qui s'en Aatre toutes les fois qu'elle le placarde fur les murs de Paris. Elle ne manque pas de dire fon mot fur chaque événement, c'eft la mouche du coche. Comine Roland, elle a publié fon compre moral. A la barte de l'affemblée nationale, Olympe de Gouges a déjà beaucoup amute nos pères confcripts avec fa barrière d'honneur ouverte au' civifme. Sa lettre lue à l'aflemblée le 15 de ce mois a déridé un moment encore nos légiflateurs, fur-teur à ces mots : « franche & loyale r.publicaine, fans

tache & fans reproche, je crois Louis fautif comme » roi, je defire d'être admife à feconder un vieillard de » qua re-vingts ans dans une fonction qui demande route » la force d'un âge vert. » Elle ajoure: « Je puis mou»rir actuellement, une de mes pièces républicaines eft au » moment de la repréfentation, w

Nous n'avons pas encore perdu affez de nos anciennes

(1). On apprend que des volentaires du Finistère font en marche fur Paris, dirigés contre les agitateurs & les anarchifles, & qu'on demande dans ce département une garde pour la convention. Les Marseillois auffi font venus dans cet efprit, & font détrompés aujourd'hui, il en fera de même des Bretons; ils verront que les agitateurs, les anarchiftes font ceux qui veulent une garde.

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habitudes, pour ne pas fourire tout au moins à l'épître d'une femme encore verte, s'offrant à feconder un octogénaire, & mettant, pour ainfi dire, fur le bureau fes pièces républicaines, comme des titres pour être nommée l'avocate d'un monftre couronné qu'elle n'eftime que fautif.

La fufdite dame ne s'en tient pas là; elle termine fa lettre par fon opinion fur le ci-devant roi, & invite l'affemblée à en agir envers lui comme les Romains a l'égard de Tarquin.

Tout cela a donc bien amufé la convention, même les femmes qui s'y trouvoient. En effet, on ne peut guères imaginer rien de plus ridicule. Pour fe venger de cette chûte, Olympe de Gouges en appelle au peuple, & fait placarder fa lettre fur papier jaune, en y joignant des confeils à fes lecteurs. Là, elle plaide pour fon roi, & demande fa grace. Mais le peuple ne fe contente pas de hauffer les épaules, il déchire l'affiche, en difant: de quoi fe mêle-t-elle? Qu'elle tricote plutôt des pantalons pour nos braves fans-culottes !

Ce n'eft pas l'avis du légiflateur Condorcet, qui foutint, il y a quelques mois, dans un journal, qu'on devoit admettre indiftinctement les deux fexes dans toutes les affemblées politiques, & à toutes les charges de l'état. Qu'on imagine à la convention deux cents femmes de l'efpèce d'Olympe de Gouges, affifes à côté de l'évêque Fauchet, de l'auteur de Faublas, de Thuriot, de Chabot, d'Egalité, de Condorcet même, &c.... Nous laiffons à nos lecteurs le plaifir d'en calculer les fuites.

Sur la lettre oftenfible de Beaumarchais à fa famille.

Il court dans le monde & les journaux, une lettre de Beaumarchais à fa femme & à fa fille, P. Manuel a pris le foin, on ne fait trop par quel motif, d'en faire paffer une copie à la Chronique, qui s'eft empreffée de Finférer tout au long. Nous ne fouillerons pas notre journal de cette production fur laquelle fans doute perfonne ne prendra le change. L'auteur affecte d'écrire en bon homme bien fenfible, bien calomnié......

«Ma pauvre femme, & toi, ma charmante fille, je » ne fais où vous êtes.... J'apprends par les gazettes que »je fuis décrété pour cette miférable affaire des fufils » de Hollande ».

Le vieux renard! mais il a épuifé toutes fes rufes. Qui croira bonnement à cette ignorance où il dit fe trouver fur ce qui fe paffe chez lui? Sa lettre à fa famille n'eft qu'un moyen ufé pour tâter l'opinion publi

que & eflayer une espèce de juftification dont il fent avoir plus que jamais befoin.

Cette miférable affaire des fufils. Plus bas, il répète encore: Cette miferable affaire des fufils.... Il est vrai que Beaumarchais s'eft tiré d'un pas plus difficile; mais quoi qu'en dife fon Figaro, il faut rétablir l'ancien proverbe:

«Tant va la cruche à l'eau, qu'à la fin elle caffe ».

«O mes chères tendreffes! c'eft de Londres, de cette » terre hofpitalière & généreufe, où tous les hommes » perfécutés dans leur patrie trouvent un abri confola»teur, que je vous prie de ne pas vous affliger fur

» moi ».

Toutes les lettres de nos émigrés à Londres font de ce ftyle; il faut efpérer qu'on changera bientôt de ton, & que le peuple anglais, fouillé par de tels éloges, ne fera pas d'humeur à être encore long-temps le complice de tous les nobles ingrats qui déchirent le fein de leur mère, & de tous ces agoteurs cupides qui voudroient l'affamer ou la réduire au plus honteux dénuement.

« O mes chères tendreffes! je vois vos douleurs à toutes; » les larmes de ma fille me tombent fur le cœur & le > navrent.... ».

Perfonne ne fera dupe de ce néologifme fentimental.

Ah! ce n'eft pas ainfi que parle la nature.

Beaumarchais foutient « qu'il n'a jamais écrit une ligne » au roi Louis XVI depuis dix-huit années, au moment » qu'il s'élevoit à ce trône, d'où un caractère trop foi»ble, bien des fautes & la fortune viennent de le faire » cheoir fi miférablement >>.

A tous les forfaits de Louis Capet, il manquoit un grief, celui d'être plaint par Beaumarchais.

Il nous apprend, dans fa lettre, que fix heures plus tard il fubifloit, à l'Abbaye, le fort de tant de victi

mes innocentes.

Que de gens fe réconcilieroient avec une providence préfidant aux chofes de ce bas monde, s'ils voyoient Caron de Beaumarchais n'échapper à la juftice du peuple que pour tomber fous le glaive de la loi !

Réclamation.

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Lors de l'interrogatoire de Louis Capet à la barre de la convention nationale ce n'eft pas le député Mailhe comme nous l'avons dit, mais Valazé, qui présentoit au prévenu les pièces convictives de fes délits.

Mais Valazé ou Mailhe, toujours eft- il vrai que le repréfentant du peuple, chargé de cette fonction, ne s'en eft pas acquitté avec la décence qu'exigeoit fon caractère. Nous perfiftons à croire que Louis Capet, fûtil plus fcélérat encore, ce que nous n'eftimons pas être poffible, une fois fous la fauve-garde de la justice, il doit être hors de l'atteinte de l'outrage comme de la violence; il appartient à la loi elle feule peut en chipofer & preferire le traitement qui lui convient. Un légifla teur ou un juge n'a rien à ajouter à la loi qu'il a dictée ou dont il eft l'organe; il doit fe refpecter en elle & dans la perfonne de l'accufé comparaiffant à fon tribunal.

D'ailleurs indignation profonde qu'inspirent à tout homme fenfible la maffe & l'énormité des forfaits du ci-devant monarque, ne doit laiffer dans l'ame aucune place à de petits reffentimens de vengeance.

Avis aux amateurs du Mercure de France.

Le Mercure de France vient de fubir une nouvelle métamorphofe. Pankoucke, dans un avis à fes foufcripteurs, les prévient que fon journal dorénavant paroîtra, tous les jours. En tête du profpectus, comme fur les affiches de fpectacles, on lit le nom des auteurs de cette entreprite littéraire: c'eft M. la Harpe pour la poéfie, &c. Le def tin de ce poëte feroit-il d'être condamné toute la vie au Mercure de France? Ceft M.. Suard pour la littéra ture étrangère. Celui-ci, quant au civisme & au talent, fera Peunuque du férail Pankoucke Quatre rédacteurs fe font diftribués le travail que rédigeoit à lui tout feul Mallet du Pan. Ce font MM. Caftera le traducteur; Lenoir, le député conftituant; Rabaud, le député conventionna!; & Garat, le miniflre de la juftice, que PanRoucke, qui s'y connoît, compare à Ciceron.

Le libraire prévient for mende qu'on ne perdra rien à la nouvelle forme qu'il donne à fon Mercure : « Il •lui confervera fon caractère & tous fes avantages; la

charade, dit-il avec une naïveté qui a fon prix, pa. » coîtra le dimanche, l'énigme te lundi, le logogryphe

» le mardi. Et puis du Marmontel, c'eft-à-dire, un petit » conte moral le premier de chaque mois ».

Affurément, avec tous ces ingrédiens, un journal ne peut manquer d'être utile, & le reftaurateur du Mercure français a bien mérité de la république.

Dans un P. S. il cherche à nous apitoyer fur les pertes qu'il a faites. Il est une des grandes victimes de la révolution. On croiroit qu'il s'agit de quelque citoyen qui fe feroit immolé pour le falut de fon pays. Point du tout. Celui parle ainfi eft un libraire trop entreprenant qui, per fas & nefas, c'est-à-dire, par deux journaux, Pun femi-patriote, Pastre tout-à-fait aristocrate, a voulu aller à la fortune par deux chemins oppofés, & puifer dans deux bourfes à la fois. Vraiment ce plan étoit adroite. ment conçu. Mais les événemens l'ont un peu contrarió; en forte qu'il faut aujourd'hui effayer de ramener les foufcripteurs par l'attrait des nouvelles de tous les jours Si cette dernière phafe du Mercure ne tourne pas au profit de Pankoucke, fans doute la république s'emprefiera de le dédommager des chances malheureuses qu'il éprouve.

Mais parlons férieufement. Ne faut-il pas avoir perda la tête ou toute pudeur pour ofer fe faire un mérite des pertes réfultantes de la chute d'un journal rédigé par Mallet du Pan?

L'affemblée électorale du département de Paris eft venue, par députation, réclamer, à la barre de la convention, le paiement des indemnités accordées par la loi aux électeurs. Ils ont été mal reçus ; à peine a-t-on voulu les entendre, & l'on eft paffé fur l'objet de leur demande, à l'ordre du jour, motivé fur l'existence de la loi, & fur ce que la convention n'a pas les deniers publics en manîment.

Cette conduite des repréfentans de la nation envers une portion des électeurs nommés par le peuple, eft pour le moins étrange. Le corps électoral de Paris n'a point démérité, & avoit droit à un peu plus d'égards. D'ailleurs leur pétition étoit équitable, & la réponse qu'on leur a faite n'eft qu'évafive. Il est bien vrai qu'il exifte un décret qui accorde une indemnité aux électeurs qui fe déplacent du lieu de leur domicile pour celui de leur féance. Quand le corps électoral de Paris s'eft tranfporté au Bourg de l'Égalité, on n'a pas contefté aux membres leurs droits à une indemnité; la loi qui le porte eft formelle, mais elle ne s'explique pas fur les indemnités que les électeurs de Paris ont plus d'un mo

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