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La forme syncopale est plus rare ; à la suite d'une émotion morale ou d'une cause occasionnelle quelconque, on voit survenir des syncopes précédées de vertiges, de constriction à l'épigastre et à la gorge, de faiblesse du pouls. Ces attaques syncopales peuvent se prolonger assez longtemps et se distinguent facilement de la mort apparente.

Les attaques de coma sont précédées des mêmes symptômes précurseurs que les autres; à peine la constriction à l'épigastre et à la gorge s'est-elle fait sentir, que les malades s'endorment d'un sommeil comateux, d'ailleurs calme et tranquille, qui se prolonge pendant des heures et des journées entières. J'ai vu une fois cette léthargie durer plus de trois jours. C'est au coma hystérique qu'il faut rapporter la plupart des faits de mort apparente dont les auteurs rapportent l'histoire le plus souvent exagérée et amplifiée.

L'état cataleptique s'observe quelquefois sous forme d'attaque chez les hystériques. On sait que la catalepsie est une névrose consistant dans l'abolition momentanée du mouvement et de la volonté, avec persistance des contractions musculaires dans les membres, qui restent fixes et immobiles dans chacune des positions qu'on leur fait prendre. Ce dernier symptôme caractéristique se retrouve dans certaines formes d'attaques hystériques, auxquelles il donne une physionomie spéciale. Après quelques prodromes, la figure rougit, tout le corps devient roide, et les malades, qu'elles aient conservé ou non leur connaissance, sont dans l'impossibilité d'exécuter un seul mouvement; mais elles gardent indéfiniment la position qu'on leur donne, quelque pénible et gênante qu'elle puisse être. L'attaque cataleptique dure rarement plus d'une demi-heure, et par elle-même elle n'offre aucune gravité.

MARCÉ.

MAL. MENT.

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$ 5. Des troubles intellectuels dans l'hystérie.

Nous ne faisons que mentionner les hyperesthésies et les anesthésies de la peau, des muqueuses, des organes des sens, des viscères; les perversions de la sensibilité, les contractures, les paralysies partielles ou générales, symptômes plus fixes, plus durables que ceux que nous venons d'étudier, et qui persistent même pendant l'intervalle des attaques, pour accorder une attention plus spéciale aux modifications intellectuelles qui sont liées à l'existence de l'hystérie.

Nous étudierons successivement:

1° Les modifications du caractère et de l'intelligence qui se produisent à la longue chez les hystériques, en dehors de la folie;

2o Le délire passager qui éclate pendant la durée de l'accès convulsif;

3o La manie, la mélancolie et les délires partiels qui, se développant chez des sujets hystériques, empruntent quelque chose de spécial à la névrose à laquelle ils se surajoutent, mais sont tout à fait indépendants de l'accès convulsif.

1o Modifications du caractère et de l'intelligence.

Lorsque les attaques sont rares, dit Georget (1), et que l'affection n'est pas ancienne, les sujets hystériques peuvent offrir les apparences de la plus brillante santé... Cependant presque tous sont nerveux, mobiles, très susceptibles, d'une imagination vive, faciles à s'inquiéter pour les plus légers motifs, impatients, irascibles, entêtés, opiniâtres. Les sens sont très irritables: une lumière trop vive, certains sons, certaines odeurs, les variations de température, l'atmosphère chargée d'électricité, les affectent vivement; les occupations

(1) Georget, Dict. de méd. en 30 vol., t. XVI, art. HYSTERIE.

un peu sérieuses les fatiguent beaucoup, leur causent des maux de tête. Chez eux le sommeil est rarement profond et continu; souvent il est difficile ou impossible, incomplet, troublé par des rêves pénibles, interrompu par des réveils en sursaut. La plupart sont habituellement mélancoliques, solitaires, portés aux idées noires, quelquefois avec désir vague de suicide; quelques-uns sont d'une gaieté extrême, et rient sans cesse pour des causes légères, ou sans savoir pourquoi d'autres sont tourmentés par des envies de pleurer. On observe aussi chez ces malades des migraines, des serrements de gosier, des besoins de respirer qui nécessitent plusieurs profondes inspirations de suite, des palpitations, des étouffements, des gastralgies, de la constipation. Le flux menstruel est quelquefois irrégulier, ou bien, s'il vient chaque mois, il est difficile, de courte durée, et s'accompagne de maux de tête, de malaise, de changements dans. le caractère..... »

A cette description d'une grande vérité, bien que plusieurs de ses traits soient principalement applicables à l'état nerveux, ajoutons cette tendance des hystériques à inventer des histoires romanesques et extravagantes combinées avec un art parfait, leurs désirs fougueux et irrésistibles qui ne reculent devant rien, la facilité avec laquelle elles se laissent aller à des actes excentriques, enfin les idées érotiques qui viennent souvent compliquer la maladie première et deviennent le point de départ de passions inexplicables.

2o Délire survenant au moment de l'accès convulsif.

Pendant l'accès convulsif lui-même, les malades sont souvent prises d'un délire que M. Briquet (1) a comparé, non sans raison, à celui qui est déterminé par l'emploi du chloroforme; il est, dit cet auteur, toujours bruyant, très agité,

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(1) Briquet, Traité clinique et thérapeutique de l'hystérie. Paris, 1859, p. 363.

et rarement incohérent. Il a généralement rapport, soit à des scènes auxquelles la malade se croit présente ou auxquelles elle se reporte, soit aux pensées qui l'occupent habituellement ou qui l'ont beaucoup frappée : il faut le considérer comme une sorte de rêve. Quelquefois la vitalité de l'encéphale est tellement exaltée, que les facultés intellectuelles et les facultés sensoriales prennent une activité surprenante. Ainsi, dans quelques cas, les malades se servent d'un langage beaucoup plus distingué que celui dont elles usent d'habitude; on en a vu qui faisaient des vers. » Le délire signalé par tous ces caractères se rapproche notablement. de l'excitation maniaque.

M. Landouzy a fait observer que les hallucinations, les illusions et la perversion des sens se rencontrent quelquefois pendant la durée même de l'accès; parmi les malades, les unes aperçoivent sans cesse, au moment même de la crise, l'objet qui a causé leur première frayeur; les autres accusent les sensations les plus extraordinaires, se plaignent de cordes qui leur compriment les membres, de bêtes qui leur rongent les os. Ces divers troubles intellectuels n'ont qu'une durée passagère et disparaissent avec les mouvements convulsifs.

3o De la folic hystérique et de ses variétés.

La manie hystérique, à côté des symptômes fondamentaux qui constituent l'état maniaque et que nous avons précédemment décrits, offre quelques nuances spéciales résultant de l'association de la manie à l'hystérie. — Ainsi, l'agitation des malades, sans arriver jusqu'à la fureur, est caractérisée par un besoin incessant de mouvement et d'activité, par une tendance très marquée à briser, à déchirer, à déplacer tous les objets qu'elles peuvent atteindre. Les sujets se plaignent d'anxiété respiratoire, et au milieu même des paroxysmes d'agitation, présentent des accès convulsifs complets qui ne font qu'aggraver les perturbations intellectuelles. Dans les

moments de calme, l'impressionnabilité est portée à un haut degré, et le délire érotique, sans être constant, se présente avec une grande fréquence. Les jeunes filles, même les plus réservées, se prennent de passion pour leur médecin, pour le premier individu qu'elles aperçoivent; le son de la voix, le bruit des pas d'un homme, les jettent dans une excitation inexprimable; leurs préoccupations délirantes roulent sur des idées de mariage; elles ont l'œil humide et noyé, les allures provoquantes, et offrent un singulier mélange de retenue et de passion; souvent il leur arrive de parler de leur mari, de leurs enfants, ou bien de se croire enceintes et sur le point d'accoucher.

A part ces nuances symptomatiques, parmi lesquelles l'accès convulsif seul est caractéristique, la manie hystérique présente la mênie marche et la même terminaison que l'accès de manie ordinaire. J'ai vu dans plusieurs cas la guérison s'opérer avec une grande netteté, mais souvent aussi l'agitation ne cesse que pour faire place à des symptômes nerveux protéiformes dans lesquels l'intelligence reste plus ou moins gravement compromise.

Le délire général mélancolique est rare, mais ce qui est infiniment plus commnn, c'est le délire partiel avec ou sans hallucinations. Certaines malades ont des troubles du goût et de l'odorat, sont poursuivies par des idées d'empoisonnement, et en arrivent envers ceux qui les entourent à des sentiments de haine et de vengeance. D'autres sont tourmentées par des scrupules, s'accusent de crimes qu'elles n'ont pas commis et forment des projets de suicide. Tous ces états sont susceptibles de guérison et sont remarquables en général par leur mobilité.

Il n'en est pas de même du délire hypochondriaque lorsqu'il vient compliquer l'hystérie. Cette association de l'hystérie et de l'hypochondrie est toujours assez grave au point de vue du pronostic, et indique une lésion profonde du

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