turellement portés vers la crise politique, qui eût empêché le génie du mal de l'enfanter pour les troubles du monde. Témoin chaque jour, sous le règne d'un Bourbon, du scandale des mêmes doctrines, de la propagation des mêmes principes et de l'audace des mêmes factions que nous eûmes à combattre il y a vingt ans pour conquérir la monarchie sur le terrain usurpé par la république, j'ai pensé que le rapprochement des circonstances fructidoriennes avec les symptômes actuels ne seroit pas sans utilité. Dans les révolutions des Etats, la connoissance du passé est le guide le plus sûr du présent, l'oracle le plus infaillible de l'avenir. Là où les mêmes causes se reproduisent, on doit s'attendre aux mêmes effets. Au 18 fructidor, la révolution l'emporta sur le royalisme: de là vingt ans de nouvelles calamités pour la France et l'Europe. Un pareil triomphe de la faction anti-monarchique qui nous travaille, ra mèneroit pour le monde entier des malheurs peut-être irréparables. La sagesse des Chambres, puissant auxiliaire de celle du Roi, peut sans doute nous en affranchir; mais, comme aux jours fructidoriens, des partis opposés s'agitent, et sans l'abnégation franche de cet esprit de coterie qui divise trop souvent les bons, sans le concours franc et énergique de toutes les volontés généreuses, sans un plan de conduite délibérative qui fixe les irrésolutions et prévienne les divergences, la ruine de l'Etat peut sortir encore d'où l'on attendoit son salut. Eh quel temps fut jamais plus visiblement marqué pour un système politique, d'où puissent naître de siècles de stabilité, que ce moment ineffable où du fond d'un tombeau apparoît à nos yeux, encore mouillés des pleurs que fit couler un grand crime, le berceau dépositaire de l'objet de nos vœux les plus ardens, et de nos plus chères espérances! Ce berceau, qui, protégé du haut des cieux par un prince dont la mort a tant illustré la vie, présage la survivance de ses vertus au fils qu'il lègue à nos cœurs! Ce berccau enfin, autour duquel les Souverains rassemblés dans la personne de leurs représentans, viennent de saluer du titre auguste et solennel d'Enfant de l'Europe, ce nouveau Dieudonné, qui d'une manière plus miraculeuse encore qu'aux jours antérieurs, nous est apporté du ciel même pour fixer les destins de la terre! Oui, le doigt de Dieu est vraiment ici : nul ne sauroit le méconnoître. Ce Dieu, dont la bonté sauvoit son peuple choisi par l'éclat des miracles, a toujours voulu relever la France par la naissance ou le salut inattendu des enfans de nos Rois. Ce beau royaume, le royaume très-chrétien, est-il menacé sous Louis XIII de voir les préparatifs du grand siècle se perdre faute d'une main pour les recueillir? Du sein d'un mariage frappé de stérilité pendant vingt-deux ans, nait un enfant, et le grand siècle de Louis XIV étonne le monde. La gloire de ce Monarque, et celle de la France chancellent-elles sur la tête d'un enfant à qui sa foible constitution promet à peine quelques jours d'existence? Cet enfant se fortifie contre tout espoir, et soixante ans d'un bonheur trop doux luisent sur la France pendant les règnes de Louis XV et de Louis XVI, jusqu'à l'ère révolutionnaire. Enfin, dans la mer de sang où la révolution a enlouti les premières victimes royales, son infernal génie plonge le duc de Berri, que la nature semble destiner seul à perpétuer son auguste race: l'infortuné meurt sans héritier : déjà son féroce assassin se réjouit d'avoir coupé la racine des lis, et soudain du sein d'une héroïne, s'élance vers la vie le fils des derniers jours de ce prince qui, hélas! ne doit voir ni ce fils miraculeux, ni les transports de l'allégresse générale. A l'aspect de tant de prodiges, quelle âme ne s'embraseroit pas d'amour pour ces élus de la Providence, auxquels la France a si souvent dû sa gloire et son salut? Quel cœur ne sentiroit pas le besoin de se précipiter à la voix de la patrie dans la noble carrière du bien public, d'abjurer tout intérêt privé, de se dépouiller de toute prévention injuste', et d'arriver par le choix d'hommes sages, fermes, constans amis de la légitimité et de la Charte, pour les fonctions législatives, à la composition d'une Chambre qui fonde enfin l'union, désormais indissoluble, des royalistes avec le Gouvernement; seule condition de tranquillité et de bonheur pour la France. DE LA GUYANE FRANÇAISE. wm PLACÉE entre les sixième et deuxième degrés de latitude septentrionale, et les cinquante-huitième et cinquante-troisième de longitude occidentale, la Guyane française offre cent quarante licues de côtes, elle est bornée au nord-ouest par le Maroni, grand fleuve qui la sépare de la Guyane hollandaise, et au sud par la rivière de Vincent-Pinçon, nommée aussi Yapoc, qui la sépare de la Guyane portugaise: ses limites intérieures sont tout le cours du Maroni, qu'on n'a guères remonté que jusqu'à cinquante lieues, à cause des cataractes dont il est hérissé, et qui en rendent la navigation très-difficile; mais sa source paroît être au moins deux fois plus éloignée. La partie qu'on a parcourue s'est trouvée couverte de forêts presque impénétrables où languissent quelques hordes indiennes peu connues. On a pénétré beaucoup plus loin du côté des possessions portugaises: nos limites longent le fleuve des Amazones à la distance de quinze lieues de sa rive gauche jusqu'à celui de Rio-Négro, qui s'y jette à plus de deux cent cinquante lieues de la mer. Ainsi, la Guyane française forme une île allongée et immense, baignée au nord et à l'est par l'Océan, et au midi et à l'ouest par les rivières qu'on vient de désigner : c'est le traité d'Utrecht qui a déterminé ces limites en 1743: le fleuve des Amazones formoit auparavant la véritable ligne de démarcation en vertu d'une convention conclue à Lisbonne le 4 mars 1700: les Portugais avoient même, à cette époque, été obligés de démolir leurs forts construits sur la rive gauche de ce fleuve. Il s'est cependant élevé des contestations en 1791: le gouverneur du Para a prétendu nous donner pour borne la rivière d'Oyapoc, qui est à soixante-dix lieues de l'Amazone et par quatre degrés et demi de latitude nord, tandis que celle de Vincent-Pinçon n'est qu'à 15 lieues, et à 2 degrés de latitude: il a voulu faire prendre le change sur le nom de cette rivière appelée Vincent-Pinçon seulement depuis l'année 1500, que le compagnon de Christophe Colomb mouilla dans la baie où elle se jette: elle est encore appelée Yapoc par les Indiens, mais non pas Oyapoc qu'ils distinguent bien de la première. Ce gouverneur fit même quelques incursions, auxquelles on n'opposa aucune résistance; ces terres inondées la plus grande partie de l'année, ne méritoient guère dans leur état actuel d'être disputées. Mais depuis, des négociateurs portugais ont élevé d'autres prétentions non moins étranges; ils vouloient bien se replier sur la rivière de Carswenc éloignée d'un demi-degré de latitude nord de la baie de VincentPinçon; mais ils tiroient de là à l'ouest une ligne droite jusqu'au Rio-Bianco vis-à-vis son embouchure dans le lac Parime ou mer blanche, ce qui nous enlevoit les trois quarts de nos possessions intérieures les plus intéressantes: heureusement que ce traité est resté |