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sans addition; ressemblances qui prennent un degré d'importance d'autant plus marqué, que la forme primitive des espèces déjà connues, auxquelles on serait tenté de rapporter, au premier aperçu, soit l'helvin, soit la craitonite, s'éloigne complétement du rhomboïde. On remarquera en outre que les deux substances doivent posséder la propriété de la double réfraction; c'est du moins ce que la structure rhomboïdale peut faire présumer avec beaucoup de probabilités. Si on s'en tient à ce qui est connu, on conviendra que si ces substances présentaient les mêmes couleurs et le même éclat, on n'aurait vraiment aucune raison plausible pour ne pas les réunir. Les différences tiennent donc à quelques propriétés de nature variable, et auxquelles les minéralogistes de l'École française accordent bien peu de poids lorsqu'il s'agit d'instituer une espèce. On jugera mieux de l'importance de ces propriétés, dans le cas dont il s'agit, si on veut se rappeler que plusieurs substances minérales, telles que l'argent antimonié sulfuré et les deux oxides de titane, offrent indifféremment l'éclat métallique et l'éclat vitreux, et que d'autres substances présentent, dans leurs variétés, les teintes les plus disparates et les plus trompeuses: telle est, par exemple, la tourmaline, qu'on voit passer du noir opaque au brun translucide, et de là à de belles nuances de brun rougeâtre, de rouge, de vert ou de bleu, accompagnées de plus ou moins de transparence, et se montrer même sans couleur et d'une limpidité parfaite. Ainsi, il n'y aurait rien d'étonnant à ce que l'helvin du bourg d'Oisans (en sup

posant que la craitonite dût porter ce nom) fût noir ou d'un brun noirâtre, au lieu d'être d'un brun jaunâtre ou d'un jaune serin, comme celui de Saxe; à ce qu'il fut opaque au lieu d'être un peu translucide, et à ce que son éclat approchât sensiblement de l'éclat métallique.

Malgré la force de ces considérations, je ne m'avancerai point à donner une conclusion définitive; je me contenterai de dire que, dans l'état de nos connaissances sur l'helvin et la craitonite, il y a beaucoup plus de motifs pour réunir ces deux substances en une seule espèce, que pour en faire deux espèces nouvelles.

Dans tous les cas, les bases du rapprochement méritent d'être pesées par les minéralogistes. M. Haüy nous a prouvé, et nous prouve tous les jours combien il faut être réservé dans l'adoption de nouvelles espèces. Sa doctrine en nous apprenant à serrer les rangs, a placé la science dans une direction plus philosophique et plus satisfaisante; mais les applications de cette doctrine réclament une main sûre et exercée. De là vient sans doute qu'un assez grand nombre de questions, du genre de celle qui nous occupe, sont encore en suspens. Il faut espérer que nous en trouverons des solutions décisives dans la seconde édition du grand Traité de M. Haüy. Ses jugemens sont attendus avec impa tience; ils ne formeront pas la partie la moins intéressante d'un ouvrage que l'infatigable génie de, son auteur a su rendre presque entièrement neuf à tous égards, et dont la publication prochaine doit, à plus juste titre encore que celle de

la première édition, marquer une époque à jamais mémorable dans l'histoire de la science.

Je reviens au rapprochement qui fait le principal objet de ce mémoire. En cas de confirmation, il me semble que ce serait à l'helvin à perdre son nom, et qu'il faudrait conserver, pour l'espèce formée des deux substances réunies, celui de craitonite. Cette espèce d'hommage serait à l'adresse de M. de Bournon comme à celle de M. Crichton.

Je terminerai en faisant observer qu'il ne scrait pas aisé, du moins à l'aide des variétés de craitonite et d'helvin découvertes jusqu'à ce moment, de produire de nouvelles considérations minéralogiques propres à jeter une grande lumière sur l'exactitude du rapprochement que je viens d'indiquer. On s'épargnerait des recherches trop difficiles, en s'adressant dès à présent à la chimie. Sa sanction ou sa désapprobation serait ici d'un grand poids, puisqu'il s'agit de substances ayant un trop petit volume pour se prêter à un examen minéralogique qui ne laisse rien à désirer. M. Wollaston, en opérant sur un petit fragment de craitonite, a été assez habile pour y rereconnaître la présence de la zircone unie en proportion dominante avec du fer, du manganèse et de la silice. Le résultat de cet essai, rapporté par M. de Bournon, a dû paraître fort intéressant; il est indispensable que les chimistes, qui s'exerceront sur l'helvin, en aient connaissance, et puissent même le répéter. On ne saurait trop le dire, car c'est le fruit d'une expérience déjà aussi longue qu'incontestable : pour

un grand nombre d'espèces minérales, sur-tout celles de composition complexe, nous n'avons d'analyses chimiques, qui soient rigoureusement comparables, que celles qui ont été faites à l'aide des mêmes formules, par la même main et avec les mêmes vues. Qu'on supprime une de ces conditions, on voit aussitôt varier les résultats trouvés par les hommes les plus habiles, quoiqu'ils aient opéré sur des individus qu'on devait regarder comme parfaitement identiques, à en juger du moins d'après le témoignage unanime de leurs caractères minéralogiques; témoignage d'un bien grand poids, puisqu'il est toujours direct.

ANALYSE

Des principaux produits de la fabrication du laiton au moyen de la calamine et de la blende;

PAR M. P. BERTHIER, Ingénieur au Corps royal des Mines.

PENDANT

ENDANT mon séjour à Jemmape, j'ai fait une collection de tous les matériaux qu'on emploie dans l'usine, et des divers produits de la fabrication. Ces matériaux et ces produits ont été analysés, avec tout le soin possible, par les élèves des Mines, dans le laboratoire de l'école. MM. Thibaut et Dufresnoy, actuellement aspirans, se sont principalement occupés de ce travail la manière dont ils ont opéré ne permet pas de douter de la parfaite exactitude des résultats qu'ils ont obtenus.

Les analyses que je vais rapporter termineront ce qu'il a été jugé utile d'insérer dans ce recueil, relativement à la fabrication du laiton, soit avec la calamine, soit avec la blende (1). Elles serviront, comme on le verra, à éclaircir plusieurs points importans de la théorie de l'art.

A Jemmape, lorsqu'on fabrique le laiton par la méthode ordinaire, on emploie de la calamine de la Vieille-Montagne, de la cadmie des hauts fourneaux, nommée kiess par les ouvriers, du

(1) Annales des Mines, t. III, pages 65, 227, 345 et 377.

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