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appréciations auxquelles nous nous livrerons dans la seconde partie de ce Mémoire, et les hypothèses sur lesquelles nous asseyerons nos calculs.

Plusieurs écrivains de talent se sont déjà occupés des caisses des veuves et orphelins, en réduisant en formules mathématiques les données qui servent à préparer les solutions. Feu M. Pioch, professeur d'analyse à l'École militaire, a publié le premier, au commencement de 1845, des études sur les caisses des veuves '. Malheureusement il s'est fondé dans ses calculs sur une première ébauche des statuts, contenant des bases toutes différentes de celles qui ont été adoptées, ce qui ôte à ses réflexions critiques une partie de leur intérêt. L'auteur ne possédait pas d'ailleurs plus d'éléments que la commission générale. M. Liagre, capitaine du génie et membre de l'Académie royale de Belgique, a publié dans un appendice joint au Bulletin de ce corps savant (année 1833) un Mémoire étendu et très-intéressant, où il examine aussi les bases qui doivent servir à l'organisation de ces espèces de tontines, en appliquant plus particulièrement ses observations à la caisse des veuves et orphelins des officiers de l'armée. Nous ne pouvons suivre M. le capitaine Liagre dans tous ses développements, mais nous devons faire une réserve relativement à l'une de ses propositions, l'accroissement indéfini des charges des caisses, tout en souscrivant à cette thèse générale très-bien démontrée par l'auteur: « Ce ne sont donc pas des ressources constantes, ce sont des ressources crois>> santes que doit se procurer une caisse de veuves; et, pour les obtenir, il faut » que, dans les premiers temps de son établissement, elle réalise des bénéfices >> exorbitants en apparence, et les fasse fructifier par des placements avantageux (p. 34).

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M. Van Ginderachter, professeur à l'École militaire, s'est livré également, sur l'organisation des caisses des veuves, à des études qu'il publiera, espérons-nous, mais dont nous n'avons pas eu connaissance.

Enfin M. Maus, l'ingénieur en chef distingué qui a construit les plans inclinés de Liége et la voie ferrée si remarquable de Gênes à Turin, a bien voulu nous faire part de l'intention qu'il a de publier un travail auquel il se livre relativement à la caisse du Département des travaux publics. Nous ne connaissons pas non plus cet écrit qui n'a pas encore vu le jour. L'auteur, toutefois, nous a annoncé qu'il comptait appuyer ses conclusions sur des calculs s'appliquant à chaque cas de pension individuellement, tandis que, nous occupant en même 1 Observations sur la Caisse des pensions des veuves et orphelins des fonctionnaires et employés de l'État, par A. Pioch, professeur d'analyse à l'École militaire, etc. Bruxelles, 1845. 2 Mémoire sur l'organisation des caisses des veuves, avec des applications à la caisse des veuves et orphelins des officiers de l'armée belge; par J.-B.-J. Liagre, capitaine du génie, membre de l'Académie royale de Belgique. -Bulletin de l'Académie royale, année 1855.

temps des différentes caisses, nous devrons recourir à une méthode plus expéditive en nous contentant le plus souvent d'approximations. Le lecteur pourra juger des résultats auxquels cet ingénieur éclairé et nous, nous serons arrivés '.

La méthode que nous suivrons dans notre travail, c'est d'abord l'exposition des faits. Nous avons réuni les documents de dix années (1845 à 1854). Nous avons rédigé des tableaux qui présentent dans des cadres resserrés les comptes des recettes et des dépenses, le mouvement des pensions, les placements de fonds, en suivant constamment les comptes rendus détaillés, publiés par les Départements ministériels.

Convaincu de l'importance de posséder des comptes suffisamment développés et que l'on pût comparer, nous avions déjà fait, dans la séance de la Commission centrale de statistique du 4 août 1847 (tome IV du Bulletin, page 7 des Procèsverbaux), une motion tendant à apporter de l'uniformité dans la rédaction des comptes rendus des caisses des veuves et orphelins.

Les statuts ne contenaient, relativement à la publicité des comptes, que la disposition suivante : « L'état de situation annuelle sera inséré au Moniteur. » Mais on avait interprété cette disposition de telle manière que l'on se bornait, en général, à publier des comptes très-sommaires et un bilan qui ne pouvaient tenir lieu d'un « compte rendu moral et financier. » L'uniformité des comptes rendus était d'ailleurs nécessaire pour rendre les résultats comparables. Fort de l'appui de nos collègues et avec beaucoup de persévérance, nous sommes parvenu à surmonter quelques répugnances; et le Bulletin de la Commission centrale de Statistique (tome V, 2me partie, p. 63 et suivantes) contient le rapport sur les négociations

1 Le travail de M. Maus paraîtra dans les Annales des travaux publics, t. XVI. Il a été intercalé dans le compte rendu de la caisse des veuves du Département des travaux publics pour l'année 1857 (Moniteur belge du 21 août 1858), sous forme de rapport adressé au conseil de cette caisse. Il est signé par MM. Henri Maus et Ad. Eyckholt.

Nous ne pouvons que nous rallier au principe énoncé par ces honorables rapporteurs, à savoir: que l'avenir des caisses de prévoyance « est parfaitement assuré, lorsque chaque génération de » fonctionnaires dépose, comme tout fondateur de pension, les capitaux nécessaires pour payer » les rentes qu'elle crée. »

Comme on le verra, c'est le même principe qui préside à la rédaction de la seconde partie de notre Mémoire, où, ne procédant que par approximations, nous resterons bien au-dessous d'un travail fait avec une précision mathématique.

2 Le Ministre des finances, M. Frère-Orban, avait seul publié (Moniteur du 11 janvier 1849) un rapport au Roi très-étendu et très-détaillé sur les opérations de la caisse de ce Département pendant les cinq derniers mois de 1844 et l'année 1845. Mais cet exemple était resté sans imitateurs et n'avait pas été continué.

qui furent conduites avec les différents Départements ministériels et les modèles des tableaux adoptés par la Commission. Le plan et les tableaux qu'elle a proposés furent approuvés par tous les chefs des Départements. Quelques dernières objections ont été réfutées dans un rapport subséquent (séance du 30 décembre 1853, Bulletin, tome VI, 2me partie, p. 627 et suivantes); et aujourd'hui nous ne pouvons que nous féliciter des résultats auxquels on est parvenu, grâce à l'intervention de la Commission centrale et à la bonne volonté de MM. les chefs de division chargés de la comptabilité des caisses.

L'exposé des opérations des caisses des veuves et orphelins, que nous allons entreprendre pour la période décennale de 1845 à 1854, a demandé beaucoup de temps et de soins. Nous avons dû recourir plusieurs fois à l'obligeance de MM. les chefs de division pour obtenir des éclaircissements ou des renseignements supplémentaires. Nous leur en témoignons ici notre reconnaissance. Nous avons été particulièrement aidé pour la mise en œuvre des matériaux, leur classement, les calculs, par MM. Clavareau, chef du bureau des pensions au Département des finances, et Reuter, premier commis au bureau de statistique générale, au Département de l'intérieur. Nous nous plaisons à leur adresser nos remercîments pour l'empressement dévoué avec lequel ils ont bien voulu répondre à notre appel.

La première partie de ce Mémoire sera consacrée à l'exposition sommaire des comptes de recettes et de dépenses de chacune des caisses, avec le tableau de leurs placements au 31 décembre 1854; nous présenterons ensuite un résumé des recettes et des dépenses de toutes les caisses réunies.

La seconde partie examinera plus particulièrement, sous le rapport de l'avenir et de la prospérité des caisses, les conséquences à tirer des résultats des dix premières années, en ayant égard, pour les années suivantes, aux causes qui feront augmenter le montant des pensions. Pour nous guider, nous aurons les faits accomplis pendant les dix années écoulées; nous consulterons les statuts pour les causes d'augmentation, et nous essayerons d'évaluer la durée probable des pensions en interrogeant les tables générales de mortalité. Il en résultera un travail pour lequel nous demandons l'indulgence, puisqu'il n'a été entrepris que dans des vues d'utilité générale et sans idée préconçue.

A la suite de ce Mémoire l'on trouvera, outre quelques documents officiels, de nombreuses annexes qui permettront à chacun de refaire le travail et de contrôler nos appréciations. Il est à désirer, dans l'intérêt des caisses, qu'au bout de chaque période décennale l'autorité supérieure ordonne l'exécution d'un travail analogue au nôtre; ce n'est que par la comparaison des résultats que l'on parviendra à une

TOME VIII.

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connaissance complète de l'état de ces institutions, au maintien et à la prospérité desquelles tant de personnes sont intéressées.

Cette première publication sera d'un grand secours pour ceux qui voudront nous imiter ils seront, plus que nous, riches en faits et, par conséquent, moins exposés à tomber dans des erreurs.

PREMIÈRE PARTIE.

OPERATIONS DES CAISSES DES VEUVES ET ORPHELINS

PENDANT LES ANNÉES 1845 A 1854.

TITRE PREMIER.

OPÉRATIONS DES CAISSES CONSIDÉRÉES SÉPARÉMENT.

CHAPITRE Jer.

CAISSE DU DÉPARTEMENT DE LA JUSTICE.

Les fonctionnaires et employés qui ressortissent à cette caisse sont (art. 2 de ses statuts):

1o Les fonctionnaires et employés de l'administration centrale du Département de la justice, et les autres employés dépendant de ce Département;

2o Les fonctionnaires et employés civils de l'administration centrale du Ministère de la guerre et des administrations qui en dépendent;

3o Les employés de la Cour des comptes;

4o Les fonctionnaires et employés des prisons centrales et secondaires;

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