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l'on ne s'érige pas en juge de la propre caufe C'eft-là le crime qu'il eft ordonné de punir par la profcription de ceux qui s'en rendent coupables, comme on le peut voir dans les Traitez./

Mais quoiqu'il en foit, cette Loy ne veut pas dire que les Etats n'ofent jamais ufer de leurs Droits, fans en demander permiffion, & on feroit injufte de foûtenir que les Etats ramenent le Droit du plus fort, & qu'ils troublent & renverfent l'ordre de l'Empire, quand ils exercent la Souveraineté & les Droits qui leur apartiennent, en vertu des Loix fondamentales de l'Empire. Comme nous avons prouvé que le Droit des Alliances eft de ce genre-là, le Droit Civil autorife chaque particulier d'être l'arbitre de fon bien & de fes Droits, & d'en agir comme il lui plait, fans être obligé d'en demander chaque fois la permiffion du Juge. Quelle aparence de raison y a-t-il donc que les Princes & Etats de l'Empire foyent moins Maîtres de leur Souverai. neté Territoriale & des Prérogatives qui en. dépendent, que les particuliers le font de leur bien? Il eft vifible qu'il n'y a point de Loi ni de Conftitution qui lie en cela les mains aux Etats, pourvû qu'ils ne fe prévalent pas de leurs Droits pour troubler l'ordre de l'Empire.

Cela eft exprimé en propres termes dans le Recès Impérial arrêté en 1654. §. 6. & 15.

Mais il y a même beaucoup de cas, dont les Etats peuvent décider de leur propre autorité, & poursuivre leur Droit par voye de fait fans s'adreffer pour cela à aucun autre Tribu

nal,

nal, parceque les Conftitutions de l'Empire n'ont rien statué fur ce Point.

Telle eft la Prérogative que le Capitulat de l'Empereur Charles V I. accorde aux Princes & Etats de l'Empire de s'oppofer de leur propre autorité & pouvoir à ceux qui voudroient établir de nouveaux droits de Doüanne dans leurs Païs.

De même il eft permis aux Etats de l'Empire de maintenir leurs Droits Seigneuriaux contre leurs Sujets Rebelles, fans remettre leur deffense entre les mains du Juge fuprême de l'Empire. C'eft ce qui a été arrêté dans le Capitulat de l'Empereur régnant Article XV. dont voici les termes. De même foit permis aux Electeurs, Princes & Etats, compris la Nobleffe immédiate de l'Empire de ramener leurs Sujets rebelles àl'obéissance, & de maintenir contre eux, felon l'ordonnance des Conftitutions de P'Empire, avec le fecours de leurs voisins, leurs Droits Seigneuriaux, &c.

Tout le monde peut donc voir qui faudroit renverser toutes les Loix & Constitutions fondamentales de l'Empire, & en inventer de nouvelles à leur place, pour foutenir la Thefe, que l'Auteur de notre Analyse a pofée en fait; & fur laquelle il a bâti prefque tout fon mauvais fyftême.

Sur les Article VI. VII. & VIII.

L'Article VII. eft le feul auquel l'Auteur de l'Analyse se borne ici. Nous ne nous attendions pas à la vérité à tout le rafinement des réflexions qu'il employe, pour trouver du Miftere à un Article, qui n'en eft pás fuf

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ceptible. L'Auteur de l'Analyfe fupofe que l'on n'a pas eu intention que l'Empereur, ni l'Espagne, ni la Pologne, ni la Ruffie fuffent invitez à prendre part au Traité d'Hanovre. Affurément il donne une fauffe interpretation aux fentimens des Princes, qui ont contracté enfemble par le Traité d'Hanovre. L'on a eu une extrême attention à en rendre les ftipulations telles que tout Prince amateur du repos public pût y acceder, & la plus faine partie de l'Europe a tellement paru convaincue que · cet objet avoit été parfaitement rempli, qu'elle eût vû fans doute avec un extrême plaifir les Puiffances ici nommées dans l'Analyfe entrer dans l'efprit & dans les vûës du Traité d'Hanovre. Nous fommes perfuadez même que tôt ou tard les préjugez qui ont produit les inquiétudes & les allarmes de la Cour de Vienne & de fes adheráns cefferont, & feront -place à des fentimens plus équitables & plus conformes au repos de l'Europe.

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Rien n'étoit, ce femble, fi nacurel que d'inviter à acceder au Traité d'Hanovre la République de Hollande, qui avoit été elle même Partie contractante dans celui de la Triple Alliance, confirmé tacitement dans le nouveau Traité. Ce n'eft pas que nous puiffions être étonnez des efforts que la Cour de Vienn a faits pour empêcher cette acceffion. Elle nous y avoit préparez par ceux qu'elle avoit faits dans le tems pour arrêter la conclufion du Traité de la Triple Alliance fignée à la Haye le 4. Janvier 1717. mais elle n'auroit point eu dans cette derniere occafion de mouvemens à fe donner, fi cette affection Impériale pour les Etats Généraux, dont les affurances fe Tome II. A a

renouvellent en toutes occafions avoit été foutenue par les effets.

Paffons maintenant au détail des réflexions alléguées dans cet endroit.

L'Auteur de l'Analyfe reconnoit lui-même que par raport au Commerce, les intérêts de l'Angleterre & de la Hollande font communs, & que ces deux Puiffances font accoutumées à agir conjointement fur ce principe. Ainfi nul Miftere dans l'invitation de la Hollande à laquelle l'Angleterre a donné les mains.

Venons à la France On lui reproche de fonger à garantir un des Articles du Traité de Ja Barriere fait contre fes intérêts. L'Auteur de l'Analyfe n'a pas fongé, que dans le rems qu'il vouloit rendre fufpectes les intentions de la France, il prouvoit lui-même d'un feul mot combien les vues de cette Couronne font defintereffées; & il y a lieu de croire que le Public ne fera point féduit, par ce qu'il ajoute que la France a fongé pour fon intérêt à divifer les Puiffances qui ont été fi tong-tems unies contre Elle. L'Europe a peut- -être pû, dans ces tems être allarmée des deffeins attribuez à la France. Aujourd'hui elle a des fujets de crainte differens, & c'eft contre ceuxlà qu'elle fonge à fe précautionner. L'Auteur de l'Analyfe femble infinuer que l'on a uniquement eu en vue de féduire la République de Hollande, & de lui faire abandonner les principes de fageffe qu'elle avoit fuivis jusqu'à préfent. Nous avons vu par nous-mênes que les Miniftres de France & d'Angleterre n'ont employé ni menaces ini artifices, ils ont laiffé à la République de Hollande tout le tems de réflechir & de fe confolter, & nous

ne

ne pouvons douter que fon acceffion au Traité d'Hanovre ne foit une nouvelle preuve de la fageffe de fon Gouvernement.

Ce n'eft ici nile tems ni le lieu de traiter ce qui regarde l'O&troy donné à la Compagnie d'Oftende. Affez d'Auteurs ont expliqué jufqu'à préfent le véritable fens des Articles V. & VI.du Traité de Munster, mais nous ne pouvons nous empêcher de réfléchir fur la garantie de ce même Octroy accordée par le Duc de Ripperda dans les Traitez qu'il a fignez. L'Espagne avoit plus d'une fois preffé par écrit les Miniftres d'Angleterre de travailler à arrêter cet établiffement comme contraire à la foi des Traitez publics, Elle avoit fait en France auffi les plus vives inftances pour faire porter cette affaire au Congrès de Cambray, & c'eft après toutes ces circonstances plus amplement détaillées dans les * Réponses imprimées des Etats Généraux aux Mémoires du feu Marquis de St. Philippe, que l'on a vu 'Efpagne accorder la garantie de ce même Otroy. La Cour de Vienne n'efpere pas aparemment de raporter cette garantie comme une preuve de la folidité de fon Droit, & nous fommes trop perfuadez de l'équité de l'Empereur, pour ne pas compter que, lorfqu'il reconnoitra la juftice de la caufe des Hollandois apuyée des fuffrages des principales Puiffances de l'Europe, ce Prince ne balancera pas à donner une fatisfaction, fi néceffaire à la fureté & à la confervation de la République de Hollande.

* Elles font au commencement du Tome III,

A a 2

Sur

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