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fion de le montrer encore plus amplement dans la fuite. La feconde choque ouvertement, tous les Droits du Monde. Car ou elle ne fignifie rien, ou elle veut dire que les Etats de l'Empire ne peuvent pas fe garantir par des Alliances particulieres des Droits, dont ils ont tou jours joui, fans qu'on les leur ait difputer, mais qu'il eft pourtant à préfumer que quelqu'un pourroit leur difputer dans la fuite du tems. Il eft clair que les Etats étoient dans une femblable dépendance, ils feroient obligez de prou ver au préalable toutes leurs poffeffions par une fentence définitive du Juge fuprême, ou de fe ferv'r du bénefice des Loix: Si contendat, &c. & diffamari, ou bien de fe faire euxmêmes des Procès, pour prouver juridiquement leur Droit. Mais c'eft une chofe, qui ne fera jamais aprouvée parmi des Nations, qui n'ont pas entiérement fuprimé l'ufage de la raifon, & du Droit naturel, que l'on foit contraint de négliger les moyens de fa confervation & de fa fûreté, uniquement parceque l'on pourroit craindre quelques prétentions de quelque part. Au contraire on fait que les Droits exemptent même les particuliers de l'obligation de juftifier leur poffeffion, & d'avoir recours à la justice; feroit-il donc juste que l'on n'accordât pas aux Etats ce que l'on accarde aux particuliers? Ne feroit-ce pas annuller tout à fait le Droit des Alliances? Car en effet il n'y a point de droit fi liquide dans le Monde qui ne pût être contefté de quelqu'un quoiqu'injustement. Ce font donc deux propofitions qui renferment une contradiction manifefte; l'une que les Etats font toûjours en droit de contracter des Alliances

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pour leur défense & pour leur fûreté; l'autre que les Etats ne doivent point chercher des garanties étrangères, pendant qu'ils ont un Juge fuprême. C'eft comme fi l'on difoit que les Etats ont la liberté de faire des Alliances; mais qu'ils ne doivent pas s'en fervir, pendant qu'ils peuvent plaider leurs caufes devant d'autres Tribunaux pendant que l'Empire fubfifté, puifque l'on ne manquera jamais de Juge tant que le Corps Germanique fera gouverné par un Empereur. Il faut donc que l'une de ces deux propofitions foit fauffe, ou que les Etats de l'Empire foyent en droit de faire des Alliances, ou que la jurifdiction de Sa Majefté Impériale les empêche. Or la prémière de ces deux Thefes eft fondée incontestablement fur le Traité de Weftphalie, & la derniére a été inconnue jufqu'à ce que l'Auteur de l'Analyfe en a voulu inftruire le Monde.

Pour mettre ces Prérogatives des Etats dans un plus grand jour, on priera avant toutes chofes le Lecteur judicieux de fe fouvenir combien on a eu de peine jusqu'au XV. Siecle à abolir le cruel Droit du plus fort, dont l'Empereur Maximilien I. d'heureufe Mémoire & les Etats font enfin venus à bout par la conclufion de la Paix publique, & par l'établiffement d'une Cour de juftice, qui eft la Chambre Impériale. Par ce Réglement tous ceux qui avoient des Procès ont trouvé des Juges légitimes, à qui ils pouvoient s'adref fer felon la téneur de l'Article I. de l'Inftrument de la Paix publique arrêtée à Worms en 1495.

Comme donc felon l'aveu même de notre Antagoniste les Empereurs ont été obligez par Tome II. Ꮓ

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la Paix publique & par les Capitulats de leurs Elections d'adminiftrer la justice dans l'Empire tant aux petits qu'aux grands, les Etats de leur côté ne fe font foumis à la décision de ce Tribunal fupréme, qu'ils établiffent conjointement avec l'Empereur; & à cause de cela même que les Etats font convenus avec Sa Majefté Impériale de faire adminiftrer la juftice par les Tribunaux, dont nous venons de parler, les Loix défendent auffi fous des peines très-rigoureufes à tous Etats qui compofent le Corps Germanique de faire en leur particulier des Guerres ou des Alliances offenfifives, comme incompatibles avec l'institution des Corps de juftice de l'Empire. Cependant ces mêmes Etats confervent toûjours inviolablement leurs Droits, Libertez & Immunitez, & entre autres auffi celle de contracter des Alliances particulieres pour leur défense & pour leur fûreté. C'est un Droit que ces Etats ont toûjours ftipulé exprès dans tous les Capitulats des Elections des Empereurs, afin qu'on n'eût point de prétexte à y donner quelqu'atteinte. C'eft dans cette inftitution que l'on a inféré cette claufe remarquable dans le Capitulat de Sa Majesté Impériale régnante. Article I, en ces termes. Comme auffi nous ,, déclarons, que c'eft abfolument notre in,, tention pour la Nation Allemande, pour ,, le Saint Empire Romain, & pour les Elec"1 teurs qui en font les Chefs & les Colom ,, nes, de même que pour les autres Princes, ,, Prélats, Comtes, Seigneurs & Etats. y , comprise la Nobleffe, qui dépend immédia,,tement du St. Empire, de leur conferver leur Souveraineté & Dignitez tant fpirituel

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,, le que temporelle, leurs Prérogatives, leurs ,, Droits & leur Pouvoir à chacun felon fon ,, Etat &c.; c'est pourquoi nous ne foufri,, ront point qu'il foit fait aucun tort ou pré, judice aux Etats dans leur Territoire, tant ,, à l'égard des affaires de Religion, qu'à l'é,, gard de ce qui concerne l'Etat ou la juftice, ,, fous quelque prétexte que ce foit, pour ,, maintenir contre toute infraction la Paix ,, publique & toutes les Alliances légitime,, ment contractées dans toute leur rigueur. Mais ne feroit-ce pas caufer un préjudice évident au Droit public, ou aux affaires d'Etat des Princes de l'Empire, fi l'on vouloit déclarer invalides & illégitimes des Alliances défenfives contractées felon l'ufage de tous tems, & en vertu de l'Inftrument de la Paix, uniquement parceque ces fortes de garenties ne femblent pas être néceffaires dans un tems & dans un Païs, où l'on peut avoir recours à la Jurifdiction fupréme d'un Empereur, qui pourroit fe croire offenfé par ces précautions extraordinaires? Il faut bien nous garder de commettre ainfi par une partialité injufte les intérêts de l'Empire avec ceux de l'Empereur. Celui-ci fera toûjours Juge fupréme, mais fauf le droit des Etats, & les Etats auront toûjours la liberté de fe fervir de leurs Droits & Prérogatives, mais fauf l'Autorité judiciaire de Sa Majefté Impériale.

On ôfe bien défier l'Auteur de l'Analyse de produire un feul exemple de l'Histoire du tems paffé avant la conclufion du Traité de Weftphalie, ou du tems qui s'eft écoulé après cette époque, par lequel on puiffe prouver que Z 2

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les Etats de l'Empire doivent féparer des conditions de leurs Alliances défenfives cette efpece de Droits, qui leur ont déjà été difputez, ou qui le pourroient être une autre fois. Qu'on nous montre une Alliance contractée feulement felon l'hipothefe de notre Auteur pour la garentie des Droits qui furent hors des conteftations des Parties, ou juridiquement decidez par l'autorité d'une Sentence. Celui qui a pû avancer un principe fi monftreux & fi vifiblement opofé tant à la raison qu'aux Loix de l'Empire, feroit tenu de le prouver par des faits qui y fuffent conformes. Cependant au défaut de ces preuves historiques de l'hypothefe de notre Antagoniste, nous voulons bien alléguer quelques exemples autentiques, qui font tous incontestablement favorables au fentiment que nous défendons ici contre l'Analyse.

C'eft ainfi que dans le Contract arrêté en 1366. entre l'Empereur Charles IV. d'une part, & Albert & Léopold, Ducs d'Autriche d'autre part, ces Princes s'engagent entre eux de la maniere la plus folemnelle à s'affifter & à fe foûtenir les uns les autres de toutes leurs forces contre quiconque attaqueroit en aucune maniere leurs Droits, Dignitez, Prérogatives, Libertez, Usages reçûs, y compris tant ce qu'ils poffedent actuellement, que ce qu'ils pourroient acquérir dans la fuite.

La Confédération conclue à Linz le prémier Dimanche après la Saint André de l'an 1459. entre George Roi de Boheme & Albert Archiduc d'Autriche..

La Confédération concluë à Coire en 1485.

entre

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