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l'avidité jusqu'à refuser de faire entrer en compte cet objet, au moment même, de renouveller les baux. Devons-nous croire ce qu'on ajoute, que quelquesuns d'entre eux, par des menaces violentes, cherchent à intimider les propriétaires, pour leur faire abandonner leurs droits? Combien cette conduite est coupable! Les cultivateurs ne sont-ils pas assez soulagés, et les propriétaires assez chargés, par le nouveau mode de contribution foncière? Ceux-ci vont être grévés, non-sculement du remplacement de la dîme, mais même de la taille d'exploitation que payoient autrefois tous les fermiers.

Nous dénonçons à nos lecteurs ces indignes procédés. Qu'ils les punissent de leur mépris. Sur-tout qu'ils se gardent bien de servir le brigandage et la tyrannie de ces fermiers, en paroissant les soutenir. Tout fripon est notre ennemi, autant que le plus violent aristocrate; car il déshonore la liberté. Un tel homme n'est pas notre concitoyen: ne soyons pas ses complices.

N. B. Voici les termes du décret du premier décembre dernier. "Les fermiers et colons des fonds dont les fruits étoient sujets à la » dîme ecclésiastique ou inféodée, seront tenus de payer, à compter des récoltes de l'année 1791, aux propriétaires, la va"leur de la dîme qu'ils acquittoient, etc.

Evénemens.

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savans

ROME. Le souverain pontife, embarrassé de la réponse que l'on attend de lui, touchant la constitution civile du clergé de France, a consulté tour-à-tour les cardi naux et les canonistes romains. On nomme Canonistes des avocats instruits dans le droit-canon, c'est-àdire dans les lois relatives à la discipline et à la jurisprudence ecclésiastiques. Ces jurisconsultes dans les antiquités religieuses, ont trouvé une conformité frappante entre la primitive église et la constitution civile du clergé de France; et par conséquent ils ont invité le pape à l'éprouver. Le pape y étoit disposé par ses sentimens évangéliques et pacifiques en même-temps. Mais les cardinaux ont été d'un avis contraire, et cela par un motif bien simple. En pos

session d'élire les papes, ils regardent la papauté comme un héritage dont ils disposent à leur gré, et comme une couronne offerte à leur vieillesse. Or, ils risqueroient de perdre cette prérogative, s'ils approu voient une constitution qui rend au peuple le droit naturel d'élire leurs pasteurs et leurs évêqués. Le peuple romain réclameroit ce droit, à la première élection d'un pape; et le conclave, au lieu d'être une antichambre du saint siège, occupée par des intrigans, deviendroit comme autrefois, la chambre électorale de l'église, c'est-à-dire des fidèles assemblés. Ainsi, les canonistes jugent d'après le droit-canon; et les cardinaux. d'après l'ambition cardinale.

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VIENNE, capitale de l'Autriche. La diète, ou le conseil tenu par l'archiduc. a été un combat continuel entre la tolérance, accordée par les lois, et l'intolérance demandée les évêques. Nous avons rappar porté, d'après les journaux d'Allemagne, là dispute à coups de poing et à coups de crosse, qui s'est passée dans cette diète, et où le premier juge a failli d'être assommé pour avoir soutenu la liberté des consciences et la tolérance des opinions. Il faut en convenir: il faut le déclarer à la face de l'Europe; l'épiscopat est la plus terrible aristocratie et le plus odieux privilège qui ait jamais existé. L'épiscopat a usurpé les droits de la divinité, et il s'est dit, le seul héritier de Jesus-Christ. L'épiscopat a usurpé les droits de la royauté, et il s'est intitulé une puissance de l'état. L'épiscopat a usurpé ies droits du peuple, et il s'est nommé le seul patron, le seul collateur de tous les bénéfices. L'épiscopat a usurpé les droits de l'église, et seul il a voulu représenter les fidèles, présider les conciles, consacrer les prêtres, élire les pasteurs, inaugurer les papes. L'épiscopat a usurpé les droits des pauvres, et il s'étoit fait un revenu, un monopole de toutes les fondations, de toutes les aumônes léguées autrefois par la charité chrétienne. L'épiscopat enfin avoit usurpé les droits des consciences et il avoit, au mépris de l'évangile, imposé des articles de foi bisarres, des credo arbitraires, des sermens oppresseurs, des inquisitions horribles, des tortures, des bûchers, des supplices infâmes. L'épiscopat avoit donc

fait plus de mal au christianisme que l'impiété et l'hérésie. Voilà pourquoi tous les véritables croyans bénissent la réforme, faite par l'assemblée nationale de la France. Cette assemblée a reconnu que nulle liberté politique ne pouvoit subsister, si l'on conservoit le despotisme, le druidisme, le judaïsme épiscopal.

AVIGNON. Des troubles nouveaux ont agité cette ville, moitié française, moitié papale. Une dispute s'y est élevée pour le sujet du monde le plus facile à résoudre. Elle étoit entre un aumônier et un lieutenantcolonel. L'aumônier, après la messe, entonna le domine salvum fac regem, et y ajouta, domine salvam fac legem, salvam fac gentem. Le leiutenant-colonel ordonna de retrancher les deux dernières prières. C'est qu'il n'entendoit, ni le latin, ni la loi, ni la raisop. Le bon aumônier, après de violens débats, fit comprendre au régiment et à la ville, que les trois prières latines vouloient dire: vive la nation, vive la loi, vive le roi. Il ajouta ces mots, pleins de sagesse : ne séparons jamais le roi de la nation, si nous voulons que lanation ne se sépare jamais du roi. Cette réflexion sera sentie par tous les bons Français et par tous les bons curés, et désormais en chantant le domine salvum regem, ils chanteront aussi le domine salvam fac gentem, et le domine salvam fac legem. Que l'on ne dise pas qu'il n'appartient qu'au pape et aux évêques de faire ce changement dans une prière publique : ce n'est pas la prière du pape, ni des évêques; c'est celle du peuple qui est bien le maître de prier pour qui bon lui semble.

AUTUN. Des paysans d'Issy-l'Evêque, près d'Autun sont partis pour aller réclamer la justice de l'assemblée nationale en faveur de leur curé, détenu prisonnier depuis plusieurs mois, et faussement accusé d'avoir été l'auteur des brigandages dont ce pays a porté plainte. Ces bons villageois, arrivés à Paris, ont été introduits dans la salle des Jacobins où se rassemblent les amis de la constitution, et là ils ont dit: « Nous venons rechercher notre pasteur et déposer en faveur de son inno" cence. Dans tout ce qu'il a fait, il a exécuté les ordres » que la municipalité avoit donnés, avant qu'il eût été

" choisi pour le maire de notre village. Soit en réglant "la chose publique, soit en réprimant les vexations pat

ticulières, il a toujours agi d'après le vœu et la réquisi,, tion de notre communauté. En établissant des greniers " d'abondance, il a mis dans ces greniers une partie de , sa fortune. Il distribuoit au peuple les provisions de ,, bled à une moindre valeur qu'il ne les avoit achetées. Il accordoit aux pauvres des billets pour recevoir "gratuitement la quantité de grains qui leur étoient né" cessaires et qu'il payoit de son argent. S'il y a eu " dans notre village et dans nos environs, un homme "bienfaisant, c'est lui. S'il y a eu des coupables, c'est nous qui le sommes. Nous arrivons à pied du fond de nos habitations éloignées; nous avons par" couru l'espace de quatre-vingt lieues; notre courage " augmentoit à chaque pas; nous voilà, Messieurs, à

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la porte de l'assemblée nationale; nous venons lui ,, demander, pour toute grace, qu'elle nous laisse ", prendre les fers de notre curé, et que l'on rende à notre paroisse son bienfaiteur et son père, 29. L'attendrissement a été universel, et l'on a ordonné l'impression du discours.

LYON. Il se forme dans cette ville qui doit toute son opulence, non aux chapitres de noblesse, ni aux maisons des gouverneurs et des intendans, ni aux hôtelsde-ville et aux palais de justice, mais aux manufactures, aux comptoirs, et aux bateaux de la Saone et du Rhône ; il se forme, dis-je, dans cette ville, plusieurs petits clubs d'ouvriers. I! se rassemblent, les jours de fête, pour discourir sur les affaires publiques et sur les travaux particuliers. Un homme d'esprit nous mande qu'ayant assisté à quelques-unes de ces assemblées, il a été frappé de l'ordre que l'on y observe et de la sagesse que l'on y montre. On y parloit, un soir, des ci-devant nobles: un artisan démontra que le préjugé de la noblesse consistoit dans une opinion vraiment ridicule, dans la croyance qu'une lettre-patente du roi valoit mieux que la nature, la religion, le travail, le génie. Graces à Dieu, ajouta-t-il, ma famille peut prouver de père en fils deux cents ans de roture, sans aucune tache de noblesse.

CAHORS. Toute la France a été alarmée de l'infurrection des villages voisins de Cahors. Ce n'eft point le brigandage qui l'a fuscitée, ainfi qu'on s'eft plu à le répandre dans les journaux. Voici le fait. Dans un de ces villages, on avoit planté trois mais, l'un conue la nobleffe, l'autre contre le clergé, l'autre pour la liberté publi que. Les officiers municipaux obtinrent aifément que l'on abattît les deux premiers mais, qui paroiffoient deux monumens de difcorde. Ils effayèrent de faire abattre auffi le troifième mai dédié à la liberté publique. Cet attentat fouleva les payfans. On fonna le tocsin. De proche en proche l'infurrection fe propagea comme un incendie. 49 mille hommes fe font trouvés réunis pour défendre et venger le mai de la liberté publique. Ils fe font avancés vers Cahors. Les magiftrats ct les gardes nationales de la ville ont tenu confeil. M. Dupuys de Montbrun, général de la garde Montalbanoise, étoit au milieu de ce confeil. Un paysan, arrivé de l'armée infurgente, s'eft préfenté. Je viens vous annoncer, a-t-il dit, que notre deffein eft d'exterminer les aristocrates refugiés dans Cahors. Nous favons qu'ils ont résolu la perte du peuple et le renverfement de la conftitution. Nous voulons les punir, et demain notre armée entrera dans votre ville. M. Dupuys de Montbrun fe leva et répondit: Nous fommes ainfi que vous les ennemis irréconciliables de l'ariftocratic. Mais ce n'eft pas au glaive de la violence qu'elle doit être abandonnée. Nous refervons les vrais coupables au glaive de la loi. Vous menacez de pénétrer par force dans une ville qui a les mêmes fentimens que vous. Si quelqu'un attaquoit vos proprietes, vos champs, vos hameaux, vous nous verriez accourir pour vous défendre. Mais fi vous entreprenez d'attaquer vous-mêmes nos propriétés, nos demeures, nos juftes droits, nousjurons de mourir plutôt que de céder, et fi votre armée se préfente en ennemie,' nous avons une armée auffi, nous avons pour nous la loi, Dieu', le courage et le canon. Le payfan député s'avance vers le général, l'embraffe, et lui dit: vous avez raifon : nous devons être frères d'armes je vous avois déclaré la guerre je vous annonce la paix. Il fortit du confeil et de la ville, et revenu au milieu de l'armée, il la congédia.

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COMPIEGNE. Une troupe de braconniers s'étoit répandue dans la forêt de Compiègne. La municipalité a requis un détachement des troupes de ligue et un detachement des gardes nationales. Les braconniers ont tiré fur les detachemens. La patrouille eft tombée fur les braconniers coups de fabre, en a bleffé plufieurs, et conduit un certain nombre en prifon. Ces brigands ou plutôt ces affaffins ont donné pour excufe, qu'ils avoient cru ne tirer que fur les gardes-chaffe, comme fi les gardes-chaffe n'étoient pas des hommes utiles et refpectables dans leurs fonctions, comme fi les gardes-chaffe devoient abandonner les bois et les champs confiés à leur vigilance, pour les livrer au premier voleur, au premier malfaiteur qui fe préfentera les armes à la main; comme fi l'inftrument de la violence devoit l'emporter fur les défenfeurs de la propriété. Il eft temps que nos amis les villageois retiennent bien ces vérités que nous recommandons à leur bon fens naturel. S'ils veulent qu'on refpecte leurs poffefiions, ils doivent refpecter celles d'autrui. Le gibier d'un champ, d'une forêt appartient au maître de ce champ et de cette forêt. Les bois nationaux appartiennent

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