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ne feroit pas plus coupable, que celui qui fe précipiteroit avec rage fur le raviffeur de fa femme & de fes enfans, fur l'affaffin qui en vondroit à fa vie; car l'une & l'autre défense font pour lui les plus facrés des devoirs ».

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Que l'homme n'a pas le droit d'apprécier pour un autre homme le prix de la liberté, ou le poids de la fervitude ».

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<< Mais qu'il doit toujours affiftance à fon femblable pour recouvrer celle-là & brifer celle-ci; car fon intérêt & la nature lui en impofent également le devoir ».

«Que celui qui regarde avec indifférence Fintérêt général de la focieté, renonce à la protection de la fociété ».

« Que celui qui n'aide pas fes femblables, renonce à en être aidé, qu'il s'ifole au milieu du monde.

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& Que les hommes ne doivent plus reconnoître une puiffance qui ne les nourrit pas, & qu'ils doivent par conféquent renverfer la puiffance qui les pille & les opprime. Dans les contrées infortunées où s'exerce une telle autorité, on defend,'" fous des peines afflictives, la pourfuite des fangliers qui ravagent les moiffons. Le gou vernement eft en effet trop reffemblant à ces animaux voraces & deftructeurs, pour ne pas les prendre fons fa fauve-garde ».

Dans la nouveauté de cet ouvrage des journalistes en le regardant comme le plus

fier qui eut encoré été écrit fur cette matiere, y défiroient un plan plus déterminé plus de correction de ftyle, &c. Mais il faut confidérer que c'eft une des premieres productions de l'auteur, un des jeux de fa jeuneffe, mais de la jeuneffe d'un grand homme. En effet on y trouve le germe de cette haine implacable contre la tyrannie, de cette fierté de caractere, de cette force d'ame, de ces talens lumineux, de cette éloquence mâle qui ont fait de nos jours de Mirabeau un des plus grands défenfeurs de la liberté des François.

Mémoires du baron DE CAPELLEN DE MARSCH, membre de l'Ordre équestre du comté de Zutphen, & des Etats fouverains du duché de Gueldre, député extraor dinaire à l'affemblée de LL. HH, PP., les Etats-Généraux des Provinces-Unies, condamné à perdre la tête par une fentence de la Cour de Gueldre, du 8 Août 2788, après le bouleversement de la république par les troupes pruffiennes. Traduit de l'hollandois avec cette épigra phe: C'est à la postérité à nous juger; mais fi nous fommes fages, nous devons la prévenir en nous jugeant rigourcufe ment nous-mêmes. Euv. poft. de FRE DERIC II, roi de Pruffe. A Paris, de

l'imprimerie de H. J. Jansen, Cloître St. Honoré. In-8°. Prix, 6 liv. 10 f

'Eft un fpectacle bien digne de l'attention humaine, que celui d'un citoyen, qui né avec de grands talens & de de grandes pofleflions, placé dans un rang où i devoit tout attendre de la faveur fous le pouvoir arbitraire, facrifie fes intérêts perfonnels à l'intérêt public, lutte avec un gé-, néreux courage contre une ariftocratie puiffante & oppreffive, & confacre les efforts fon crédit, fes veiles au maintien de la Conftitution de fon pays & à la défenfe des droits du Peuple. L'ame s'éleve à cette contemplation; mais elle eft pénétrée de douleur & d'indignation, fi l'on apprend que la caufe du Peuple a été trahie & abandonnée, que le patriotifme de l'homme libre & honnête lui a été imputé comme un crime capital contre la patrie, & qu'au nom même de la loi, la violence & la tyrannie ont condamné au glaive du bourreau une tête honorable à qui la couronne civique étoit due; mais en plaignant le malheur de l'homme de bien, on l'admire encore. Tel fut Cicéron profcrit dans Rome qu'il avoit fauvée. Tel eft M. le baron de Capellen chez les Bataves, dont il a défendu les droits. Les mémoires qu'il a publies pour fa juftification préfentent l'analyse de la fentence barbare & injufte, qui a été

la récompenfe de fon zele pour la chofe pu blique. Ces mémoires, ainfi que les pieces intereffantes qui y font anexées, font en quelque forte un précis des événemens qui ont précédé la Révolution ftatdhouderienne. Ils ferviront à faire porter un jugement équi table fur les principes en politique. On y voit un détail exact de la conduite qu'il a tenue en qualité de membre du Gouvernement. La fimple expofition de les actions & de leurs motifs en eft l'apologie. Son honneur perfonnel, l'honneur de la grande caufe à laquelle il s'étoit dévoué, exigeoit de lui cette démarche. A-t-on dû lui imputer l'intention de vouloir changer la Conftitution Batave, lorfqu'il s'eft élevé contre une jurifdiction militaire établie au préjudice des plus nobles privileges de cette Conftitution? Devoit-il voir d'un ceil indifférent le commerce de la Hollande, ce premier foutien de la république, livré aux combinaisons dangereufes de voifins jaloux ? Pouvoit-il ne pas réclamer contre la perfidie de cette influence fcandaleufe & allarmante que P'Angleterre s'eft conftamment arrogée dans les affaires de fon pays? Qui ne fçait qu'il fit man quer la jonction de l'efcadre armée dans le Texel avec l'efcadre françoise ? Qui ne fçait que dans la derniere guerre le Statdhouder avoit une connivence coupable avec l'ennemi, qui avoit attaqué la république de la façon la plus révoltante ? Qui ne fçait qu'inftruit du

moment où l'Angleterre devoit fe déclarer, le ftatdhouder ne permit aux vaiffeaux de commerce de fortir à tems des ports, & ne parût leur donner une escorte que pour qu'elle fûr attaquée avec avantage par les Anglois? N'étoit-il pas du devoir de M. le baron de Capellen d'infitter avec force pour que la conduite du ftardhouder fût éxaminée, fous les rapports de fes charges de capitaine & d'amiral- général, & pour que de perfides confeillers fi évidemment nuifibles à l'intérêt commun fuffent éloignés de fa perfonne. ? La Nation Batave ne fe voyoit -elle pas forcée de fortir de fa funefte léthargie & de fonger à revendiquer les droits & les privileges conquis par leurs ancêtres au prix de leur fang fur le tyran Efpagnol, & réduits depuis un grand laps de tems à une nullité prefqu'abfolue? Les Patriotes euffent vu fans doute triompher une fi jufte cau fe, fi la Hollande eûr montré plus d'énergie & fi l'intérêt de la chofe publique eût réuni les divers intérêts. On fçait d'ailleurs qu'el le eût le malheur d'être abandonnée par la France: & nous devons rendre cette juftice à Louis XVI, qu'il ne fe déterminât que malgré lui à cet abandon lâche & impolitiques il réfifta huit jours entiers aux fuggeftions de M. de Lomenie, alors principal miniftre & agent lui-même d'une autre intrigue.

On peut juger avec quel intérêt ces mémoires doivent être accueillis en France,

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