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poursuites seront exercées par les agents forestiers au nom de l'administration forestière, sans préjudice du droit qui appartient au ministère public. »

Art. 183: Les agents de l'administration des forêts peuvent, en son nom, interjeter appel des jugements et se pourvoir contre les arrêts et jugements en dernier ressort; mais ils ne peuvent se désister de leurs appels sans son autorisation spéciale. »

Les droits du ministère public ne sont cependant nullement limités par cette attribution. L'art. 189 du Code d'instruction criminelle, après avoir disposé que le tribunal correctionnel pouvait être saisi par la citation de l'administration, ajoute: << et dans tous les cas par le procureur du roi. » L'art. 187 du Code forestier, après avoir établi le .droit de poursuite de l'administration, ajoute également: sans préjudice du droit qui appartient au ministère public. » Enfin l'art. 184 de ce dernier Code déclare que : « le droit attribué à l'administration des forêts ou à ses agents de se pourvoir contre les jugements et arrêts par appel ou par recours en cassation est indépendant de la même faculté qui est accordée par la loi au ministère public, lequel peut toujours en user, même lorsque l'administration ou ses agents auraient acquiescé aux jugements et arrêts. »

Il résulte de ces dispositions: 1° que l'administration forestière exerce les poursuites en réparation de tous les délits forestiers, et que cette action

comprend nécessairement l'application des peines encourues par les délinquants, aussi bien que la condamnation aux dommages-intérêts et aux resstitutions; 2° que le ministère public exerce, concurremment avec l'administration, les mêmes poursuites et la même action (1).

Ces règles admettent néanmoins deux exceptions: 1° à l'égard des délits et contraventions commis dans les bois et forêts de la couronne. Ces bois et forêts ne sont point soumis à l'administration forestière; mais les agents et gardes de ces domaines exercent les mêmes droits que les agents et gardes de l'administration (2). 2o A l'égard des délits commis dans des bois particuliers non soumis au régime forestier. Ces délits, hors les cas prévus par les art. 134, 143 et 219 du Code forestier, et dans lesquels l'administration peut agir, ne peuvent être poursuivis que par le ministère public et la partie lésée, l'un pour l'application de la peine, l'autre pour les dommages-intérêts..

La poursuite des délits de pêche fluviale est soumise aux mêmes règles que la poursuite des délits forestiers.

"

L'art. 36 de la loi du 15 avril 1829 est ainsi conçu « Le gouvernement aura la surveillance et la police de la pêche dans l'intérêt général. En conséquence, les agents spéciaux par lui institués

(1) Arr. cass. 8 mai 1835 (J. P., tom. XXVII, p. 154).

(2) Cod. for., art. 86 et 87.

à cet effet, ainsi que les gardes champêtres, éclusiers des canaux et autres officiers de police judiciaire, sont tenus de constater les délits qui sont spécifiés au titré 4 de la présente loi, en quelques lieux qu'ils soient commis; et lesdits agents spéciaux exerceront, concurremment avec les officiers du ministère public, toutes les poursuites et ac tions en réparation de ces délits. » Les art. 183 et 184 du Code forestier sont textuellement reproduits par les art. 60 et 61 de la loi. Les droits de l'administration et du ministère public sont donc les mèmes dans les deux cas.

Nous retrouvons donc en matière d'eaux et forêts, comme en matière de douanes et de contributions indirectes, la double intervention du ministère public et de l'administration, pour la poursuite des mêmes faits. Mais une différence sépare toutefois les deux espèces. Les administrations des contributions indirectes et des douanes n'exercent même à l'égard des délits qui les concernent qu'une action partielle et limitée; l'administration forestière est, au contraire, investie, en ce qui concerne la poursuite des délits forestiers, de l'action publique entière. Le droit qu'elle exerce n'est point restreint aux faits passibles de condamnations pécuniaires; elle requiert la peine de l'emprisonnement comme les autres peines; son appel transporte l'action tout entière devant les tribunaux saisis. Il est évident que ces pouvoirs plus étendus doivent exercer quelque influence sur l'intervention du ministère public dans

cette matière. Il n'est plus nécessaire, comme en matière de douanes, qu'il procède par voie d'action, puisque les réquisitions des agents forestiers embrassent toutes les condamnations. Il suffit qu'il surveille, en général, les poursuites intentées par l'administration et qu'il se borne, soit à suppléer la négligence et l'inertie des agents, soit à signaler aux juges les applications fausses et inexactes de la loi qui leur seraient demandées.

Il importe de faire encore deux observations sur les poursuites intentées par les administrations publiques.

La première est que l'attribution d'une portion de l'action publique à une administration ne peut être faite que par la loi; d'abord, parce qu'une telle attribution constitue en elle-même une véritable règle de compétence, ensuite, parce qu'elle crée une exception au droit commun. Or, la loi, par les dispositions qui viennent d'être rappelées, n'a délégué cette attribution extraordinaire qu'aux seules administrations des contributions indirectes, des douanes et des eaux et forêts; il ne serait donc pas permis de l'étendre au delà de ces termes (1): les autres administrations n'ont d'autres prérogatives que celles des parties civiles ordinaires.

Notre deuxième observation est que l'action de ces trois administrations est soumise, dans le cercle restreint où elle s'exerce, aux règles générales qui régissent l'action publique. En effet, elle n'est, (1) Arr. cass. 30 nov. 1821 (J, P., tom. XVI, p. 984).

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au fond, qu'un démembrement de cette action; elle doit donc subir toutes les conséquences de son caractère générique. C'estpar ce motif que la Cour de cassation a reconnu que l'action publique, en matière de contraventions fiscales comme en toute autre matière, s'éteint par le décès du prévenu : ⚫ attendu que si l'administration a le droit de poursuivre la peine de la contravention, c'est qu'elle en a reçu l'attribution de la loi; que cette attribution est fondée sur ce que les amendes font partie des intérêts fiscaux qui sont confiés à sa surveillance; mais que son action, en cette partie, n'en est pas moins soumise aux règles qui concernent les actions publiques (1). »

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Il est nécessaire maintenant, pour apprécier d'une manière complète les mouvements de l'action publique et l'impulsion qu'elle peut recevoir, d'examiner dans quelle mesure les parties lésées participent à l'exercice de cette action.

Nous avons déjà, en traçant la théorie générale du droit de poursuite, indiqué sommairement les principaux actes de cette participation (2). Il importe de les préciser.

Plusieurs auteurs ont pensé que les dénonciations et les plaintes doivent avoir pour effet né

(1) Arr. cass. 9 déc. 1813 (Dev. et Car., tom. IV, p. 484). (2) Voy. suprà, § 103, p. 157.

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