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Jeunes filles, par leur zèle pour la décence et la propreté, qu'elles se font un honneur et un devoir d'entretenir dans le lieu saint, et par toute leur conduite; honorant ainsi la Religion, et la soutenant en leur manière; sans parler de cet esprit de foi et de Religion, dont la Sœur Bourgeois animoit intérieurement jusqu'aux plus petites actions de sa vie et dont elle a tracé plusieurs pratiques ases Sœurs; et surtout, dans cet écrit admirable, où leur détaillant quelquesuns des exercices ordinaires de la journée, elle les leur représente sous le double rapport de la règle extérieure, et de la règle intérieure, dont nous avons parlé.

- Elle donna encore des preuves bien éclatantes de sa Religion, par la joie et la dévotion qu'elle fit paroître, lors qu'en 1695, la bâtisse de l'Eglise des Sœurs de la Congrégation, qui avoit été entreprise deux ans auparavant, étant achevée et bénite le 9 Novembre de la dite année, sous l'invocation de la Visitation Notre-Dame, ou y dit la Messe pour la première fois, et qu'on y laissa le très St. Sacrement, pour y être adoré par les Sœurs à perpétuité. C'est à cette occasion qu'elle adressa à notre Seigneur l'humble et bello prière qu'elle composa elle-même, et récita sur le champ. La voici telle qu'on nous l'a conservée toute entière.

"Mon Seigneur et très aimable Sauveur, la protec"tion toute spéciale avec laquelle votre grande bonté a bien voulu soutenir notre communauté, qui est bien "toute vôtre, me fait espérer que vous ne dédaignerez

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pas les prières de vos enfants, qui ont recours à vous, en "cette qualité, comme au plus tendre de tous les pères, " remplies de la plus grande confiance en votre bonté " toute paternelle dont il vous a plu si souvent nous " faire éprouver les effets.

"C'est dans ces sentimens, mon Seigneur et mon "Dieu, que prosternées devant votre adorable majesté, "nous la conjurons, par la ferme croyance, que vous " êtes dans le très St. Sacrement, et par toutes les " douleurs de votre passion, dont vous nous y renouvel" lezla mémoire, d'avoir pitié de votre petite maison, " qui n'a d'autre ambition que de vous aimer et vous ser" vir fidèlement. Ne permettez pas, Seigneur, que cette

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" bonne et sincère volonté, qu'il vous a plu nous inspi "rer, vienne jamais à s'affoiblir; mais faites au contraire, qu'elle se fortifie de plus en plus, et que nous n'ayons " jamais d'autre contentement, que de vivre en vous et avec vous. Vous savez, mon Dieu, de quelles graces " nous avons besoin pour ce sujet : nous osons les espé

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rer de votre miséricorde; et nous vous remercions trés " humblement de celles que nous avons déjà reçues poor "cela, et des nouveaux moyens que vous nous en offrez " aujourd'hui. Daignez,sil vous plait, nous les continuer. "Nous osons toutes vous promettre que comblées de vos " bienfaits, nous en ferons un meilleur usage à l'avenir,

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que nous n'avons fait par le passé ; et nous espérons " de votre toute miséricordieuse charité, que la douleur et le cuisant regret que nous avons de nos infidélités " passées, vous engagera à jetter sar nous un regard fa"vorable, et à verser vos plus amples bénédictions,

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sur toutes les filles qui sont ici assemblées, et qui ne sont entrées dans cette maison que pour vous aimer " plus ardemment, et vous servir plus fidèlement le reste " de leurs jours. Soutenez cette maison, Seigneur,

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soyez sa force et son appui, et ne permettez pas que "l'ennemi du salut se glorifie jamais d'avoir remporté sur " nous les moindres victoires. Confondez ses ruses, renversez ses desseins, et conservez parmi nous, cette "paix dont il vous a plu nous faire goûter les douceurs " dans les liens de la plus pure charité.

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"Très Sainte Vierge, souvenez-vous que vous "êtes notre Mère. Soyez aussi notre avocate, et " le supplément de notre Religion auprès de votre divin " fils; et faites éclater votre crédit auprès de lui, en

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nous obtenant l'effet de nos prières, dont nous vous " supplions très humblement de vouloir bien vour charger vous-même, pour les présenter devant le trône de sa gloire. Ainsi soit-il."

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Sa Religion qui embrassoit tout, ne se-bornoit pas entièrement à Jésus et à Marie, sa divine mère ; elle s'étendoit encore spécialement et par préférance, à ce qui avoit un rapport plus sensible et plus immédiat avec zes principaux objets de son culte et de sa tendre piété. C'est d'elle qu'on a hérité, et qu'on conserve fidèlement dans sa communauté une dévotion singulière pour les Saints Anges, et pour St. Joseph, digne époux de Marie, modèles et protecteurs distingués de la modestie et de la pureté de toutes les Vierges Chrétiennes.

C'est aussi cet amour pour la Religion, qui lai donna toujours un attrait particulier pour toutes les autres vertus Morales et Religieuses, c'est-à dire, qui forment le principal caractère de l'état Religieux, connues sous les nome célèbres de pauvreté, chasteté, et obéissance. Car quoique sa communauté ne fût pas précisément ce qu'on appelle un ordre Religieux, elle voulut en avoir toute la perfection et tous les avantages, et y ajouter même le vœu d'instruire les personnes de son sexe, comme renfermant le plus haut point de la charité et de la perfection Evangélique, qui se seroit trouvé trop resserrée, à son gré, dans l'état d'une vie clostrée. Examinons donc présentement en détail, ses sentimens et ses pratiques à Végard de tous ces différens engagemens

2°. La Pauvreté; Seconde vertu Religieuse. On n'a jamais pu porter plus loin qu'elle l'a fait, l'amour et la pratique de la sainte pauvreté. St. François d'Assise, tout renommé qu'il est pour l'exercice de cette vertu, n'a rien fait de plus en ce genre, que ce qu'elle a fait pour elle-même, et de ce qu'à l'imitation de ce saint patriar. che, elle auroit voulu faire pour toute sa communauté, si son zèle n'avoit été retenu en ce point par l'autorité des Supérieurs Ecclésiastiques, qui ont jugé que, sars préjudice de la pauvreté de cœur demeurée pour héritage à ses filles, il étoit plus décent et plus convenable, surtout à leur sexe, d'en retrancher plusieurs pratiques extérieures, comme de porter des chaussures trop viles, des habits trop usés, faire tous ses voyages à pied, &c. sur lesquelles elle ne s'épargna jamais elle-même. Suivons-la donc à présent par l'examen de plusieurs points de sa conduite, et nous l'écouterons ensuite s'expliquant elle même sur ce même sujet.

L'on a souvent admiré dans le cours de sa vie, ce dégagement parfait et effectif avec lequel elle se toit pour la première fois au service de Dieu, en renonçant pour toujours, et par un acte public, à toute sorte de prétentions temporelles. Elle se met en route sur terre; elle s'embarque sur mer; elle vient en Canada; elle y forme de grandes entreprises: mais c'est toujours sous les auspices de la seule pauvreté. Elle n'a de contentement, que lorsqu'elle est reléguée dans une étable; il lui faut faire une espèce de violence, pour la retirer de cet état de pauvreté; et elle ne se pardonnera jamais à ellemême la faute qu'elle croit avoir faite, lorsque par déférence à ses Supérieurs, et par complaisance pour ses Sœurs, elle a consenti à leur procurer un logement un peu moins incommode.

Je la vois d'ailleurs, sous un extérieur pauvre et abject, imitant en tout l'ajustement et les manières des pauvres, se confondre avec plaisir parmi eux, et leur distribuer abondamment dans leurs besoins, son propre nécessaire. Combien d'exemples n'avons-nous pas pu remarquer dans sa vie, d'une pareille conduite? Mais écoutons-la parler et s'expliquer elle-même sur les transports amoureux qu'elle avoit pour la pauvreté, et sur le zèle ardent qu'elle avoit de laisser en héritage à ses filles, cette chère vertu de son cœur.

Elle a laissé par écrit; "que comme dans les maisons " des riches et des grands de la terre, on y peint et grave " dans tous les endroits les plus fréquentés et les plus ap

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parens, les armoiries et les titres de leur grandear, " de même la Congrégation doit faire paroître en tout

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et partout, la pauvreté et la simplicité, qui doivent en " faire les plus grands ornemens, comme étant le carac"tère et l'esprit propre de l'institut.

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"La Ste. Vierge dont nous sommes les filles, disoit-elle encore, a embrassé une étroite pauvreté; elle a re" tranché tout ce qui n'étoit pas absolument nécessaire, "au logement, en linge, en habits, en meubles, en nouriture, et en toute autre chose. Ce que notre Seigneur a confirmé par son exemple, ayant participé "en tout à lapauvreté de sa mère. Il nait d'une mère "pauvre; illoge avec elle dans une pauvre étable; il " est couché dans une pauvre crêche, où son plus tendre " duvet est de la paille. Dans le cours de sa vie, il n'a

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pas où reposer sa tête; sa première instruction à ses "disciples sur la montagne, est de canoniser la pauvreté " en disant: bienheureux sont les pauvres d'esprit, &c. Enfin il meurt nu, et en plain air, sur une croix.

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"Il faut donc se ressouvenir, continue-t-elle que pour jouir "des avantages de la sainte pauvreté, il faut d'abord êtr pauvre d'esprit et de cœur, nous tenant entièrement dégagées de tous les biens de la terre, de tous les désirs déréglés de la nature corrompue, de tous les plaisirs "des sens, et de tous les honneurs du monde; mais il "faut de plus, pour la pratique, ne rien posséder en propre, et se contenter de ce que la Providence nous fournit, par le moyen de la communauté, non seulement pour cequi regarde la nouriture et notre vêtement; mais encore pour le logement, la chambre et les meubles,

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et généralement pour toutes les autres choses, même " les plus nécessaires à la vie. Et lorsqu'il nous est "libre de choisir, il faut, en esprit de pauvreté, prendre toujours ce qu'il y a de plus pauvre, de plus simple, " de plus humiliant, et de plus contraire en un mot, aux inclinations de la nature corrompue; ne nous don"ner la liberté de disposer de quoi que ce soit, sans un sujet raisonnable, et même alors, ne le faire qu'avee permission.

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Il faut aussi, que dans toute la maison, tout soit simplement accommodé, et se ressente de la sainte pauvreté. Dans l'infirmerie mème, où la charité permet qu'en faveur des malades, on ait quelques petites commodités, il faut que les meubles et les ustensilles dont on se servira, quoique commodes, ne soient point trop "recherchés: mais qu'on se contente de ce qu'il y a de plus commun. Que toutes se servent d'un même Mé"decin, et qu'on n'use que des remèdes les plus simples " et les plus communs, si ce n'est dans le cas de quelque " maladie extraordinaire, se ressouvenant toujours, que Dieu ne manque pas au besoin de ceux qui le servent avec fidélité.

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Notre Seigneur, continue-t-elle encore, a souvent fait connoîrre à ses vrais serviteurs, qu'il faisoit bien peu d'état des personnes qui n'ont pas en recomman

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