Page images
PDF
EPUB

ni

ministère n'était pas obligatoire pour le recours primitif (Conseil d'État, 24 avril 1891, de Biermont). 143. (Nos 381, 382.) 3o La tierce opposition est le moyen, pour les personnes n'ayant figuré par elles-mêmes ni par des représentants à une instance, d'attaquer la décision qui les lèse dans son exécution. Ainsi, en cas de réformation d'un refus par le préfet d'autoriser un établissement insalubre, les tiers intéressés au maintien de ce refus pourraient former opposition. Faute de délai imparti pour exercer ce recours, on le déclare ouvert aux tiers pendant trente ans, à moins qu'il y ait eu exécution à leur égard valant de leur part acquiescement parce qu'ils n'ont formulé ni protestations ni réserves. Il s'introduit, s'instruit et se juge comme un recours principal.

(Nos 383, 384.) La voie de la tierce opposition est souvent employée par des parties qui, légalement représentées à l'instance, cherchent à remettre en question la chose jugée en se prétendant tiers étrangers au premier débat. Ce sont par exemple des héritiers, des acquéreurs ou des créanciers du premier plaideur. Pour parer à ce danger, l'article 38 du décret du 22 juillet 1806 prononce contre la partie qui succombe dans cette procédure une amende de 150 francs sans préjudice des dommages-intérêts que le Conseil d'État jugera bon de lui faire supporter.

---

144. (Nos 387-389.) VI. Dépens. Le décret du 22 juillet 1806 dans ses art. 41 à 43 présuppose, en traitant de la liquidation des dépens', l'appli

1. Le tarif a été fixé par l'ordonnance du 18 janvier 1826.

cation du principe posé dans les art. 130 et 131 C. proc. civ. toute partie qui succombe sera condamnée aux dépens et la compensation en est possible entre les parties si elles succombent respectivement sur quelques points. Le principe a été, en effet, toujours observé par le Conseil d'État, entre parties privées du moins, toutes les fois qu'il ne s'agissait pas d'un recours sans frais. Si la dispense des frais est absolue, aucune condamnation aux dépens n'est possible (Conseil d'État, 13 juin 1873, de Floraz) et, quand la dispense ne s'étend pas aux frais de timbre et enregistrement, ces frais là seuls peuvent être alloués comme dépens (Conseil d'État, 13 février 1874, Dussaussoy).

(Nos 390, 391.) Mais à cette règle générale la jurisprudence apportait une exception grave : l'État, étant présumé agir dans l'intérêt général, ne pouvait, d'après elle, être condamné aux dépens. Cette jurisprudence, condamnée par la loi du 3 mars 1849, a été reprise après l'abrogation de ladite loi par le décret loi du 26 janvier 1852. Elle persiste toujours comme principe (Conseil d'État, 30 mai 1873, Burgues). Du moins le décret du 2 novembre 1864, art. 2, a rendu les art. 130 et 131 du Code de procédure civile applicables à l'État lui-même dans trois cas : l'État peut donc désormais être condamné aux dépens en matière domaniale et dans les contestations relatives aux marchés de fournitures ou de travaux publics.

(Nos 392, 393.)

[ocr errors]

S'il n'a pas été statué sur les dépens malgré les conclusions formelles prises à ce point de vue, la réparation de cette omission inter

vient sous forme d'addition à l'arrêt rendu. Dans les dépens figurent les frais d'expertise que fixe souverainement le Conseil d'État.

145. — VII. Avocats et huissiers au Conseil. - Nous avons déjà plusieurs fois parlé de ces officiers ministériels dont en général le ministère est indispensable en matière contentieuse. Le titre IV du décret du 22 juillet 1806 leur est consacré.

(No 394.) — Il y a, depuis l'ordonnance du 8 septembre 1817, soixante avocats au Conseil d'État et à la Cour de Cassation. Devant le Conseil d'État ils ont seuls qualité pour représenter les parties dans l'instance et parler en leur nom; elles n'ont donc pas le droit de présenter des observations orales (Conseil d'État, 30 novembre 1895, Bideaux; 18 juillet 1896, Valtat.) Seuls aussi ils signent, à défaut des parties, les requêtes et mémoires adressés au ministres et aux administrations subordonnées à ceux-ci. Les règles relatives à la forme des actes qu'ils présentent et aux peines disciplinaires qu'ils peuvent encourir se trouvent dans le décret de 1806, art. 44 et suiv. (No 395.) Les huissiers ont le monopole des significations d'avocat à avocat et des notifications aux parties habitant Paris (Décr. 1806, art. 51). En outre, ils sont chargés de maintenir l'ordre dans les séances publiques.

[ocr errors]

Avocats et huissiers ont la faculté de présenter des successeurs à l'agrément du Chef de l'État (Loi 28 avril 1816, art. 91).

CHAPITRE IV

COUR DES COMPTES

(Duf., t. II, nos 139-183.)

146. (N° 139.) — La Cour des comptes, dont l'organisation n'a guère subi de modification importante dans ce siècle depuis la loi du 16 septembre 1807 qui l'a créée, a pour but principal de contrôler et vérifier la gestion des comptables, pour les décharger de toute responsabilité s'ils ont géré régulièrement ou, dans le cas contraire, mettre à leur charge les reliquats dont ils sont redevables.

147. (N° 140.) - L'origine première de cette institution se trouve dans les anciennes Chambres des comptes de la monarchie. Il n'y en eut qu'une à l'origine siégeant à Paris, créée en 1302 par Philippe le Bel, distincte du Parlement et du Grand Conseil pour surveiller les domaines et les finances de la Couronne, pour contrôler les recettes et les dépenses. Mais il en fut par la suite institué d'autres dans les provinces, également souveraines, qui, supprimées par l'Ordonnance de Moulins en 1566, puis rétablies, étaient encore au nombre de dix pour le moins en août 1789. Les conflits entre la Chambre des comptes de Paris et le Parlement furent aussi nombreux que retentissants. Bien que des ordonnances royales d'août 1375 et mars 1408 eussent interdit au Parlement de connaître, par voie d'appel,

des sentences de la Cour, la lutte persista entre les deux corps sur cette question pendant tout le xve siècle et ne se termina, à l'avantage de la Chambre des Comptes, que par une ordonnance rendue par François Ier à la Meilleraie, le 2 août

1520.

La Chambre des comptes de Paris avait des attributions spéciales d'ordre politique (enregistrement des lettres de grâce et d'anoblissement, des traités de paix, des contrats de mariage des rois, etc.) et administratif (surveillance du domaine royal et enregistrement de tous actes s'y rapportant). Mais elle avait aussi, comme les Chambres de province, des pouvoirs de juridiction en matière de comptes et de finances. Ces Chambres n'exerçaient aucun contrôle sur les comptes des ministres; elles vérifiaient seulement les comptes des comptables et avaient même sur la personne de ces derniers, pour tout le fait des comptes, une juridiction criminelle allant jusqu'à la torture.

Les services rendus par les Chambres des comptes furent relativement minimes sous l'Ancien Régime au point de vue de la comptabilité des deniers publics. La cause de cette impuissance doit être cherchée dans les vices de l'organisation financière du royaume quant au mode de perception des recettes, dans l'absence de publicité et de justification comme dans l'arbitraire des dépenses 1.

1. Voir sur le rôle des Chambres des comptes sous l'Ancien Régime, outre M. Dufour, t. II, no 140, MM. Dareste, La justice administrative en France, p. 5 et suiv.; E. Laferrière, Traité de la juridiction administrative, t. I, p. 110115; Ducrocq, t. II, no 734.

« PreviousContinue »