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des questions suivantes, résultant d'une lettre adressée à sa grandeur par le ministre des finances le 2 mai 1823:

1° Si, avant d'intenter ou de soutenir des actions dans l'intérêt de l'État, les préfets doivent y être autorisés par les conseils de préfecture, ou s'ils ne doivent pas du moins prendre leur avis;

2° Si les particuliers qui se proposent de plaider contre l'État, sont obligés de remettre préalablement à l'autorité administrative un mémoire expositif de leur demande, et si ce mémoire doit être remis au préfet ou au conseil de préfecture;

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Sur la première question,

Considérant qu'aux termes de l'art. 14 de la loi du 5 novembre 1790 et de l'art. 13 de celle du 25 mars 1791, les procureurs-généraux syndics de département, et les commissaires du Gouvernement qui les ont remplacés, ne pouvaient suivre les procès qui concernent l'État sans l'autorisation des directoires de département ou des administrations centrales qui leur ont été substituées ;

Que cette disposition était une conséquence du système d'alors, qui plaçait dans les autorités collectives l'administration tout en tière, et réduisait les procureurs - généraux syndics et les commissaires du Gouvernement à de simples agens d'exécution qui ne pou vaient agir qu'en vertu d'une délibération ou autorisation ; mais que cet état de choses a été changé par la loi du 28 pluviôse an 8, qui dispose, art. 3, que le préfet est chargé seul de l'administration, et statue, par cela même, qu'il peut seul, sans le concours d'une autorité secondaire, exercer les actions judiciaires qui le concernent en sa qualité d'administrateur;

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Que d'ailleurs l'art. 4 de la même lai, qui détermine les fonctions des conseils de préfecture, leur attribue la connaissance des demandes formées par les communes pour être autorisées à plaider; mais que cet article, ni aucun autre, ne soumet à leur autorisation, ni à leur examen ou avis, les procès que les préfets doivent intenter et soutenir;

« Sur la deuxième question,

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Considérant qu'aux termes de l'art. 15 de la loi du 5 novembre 1790, les particuliers qui se proposaient de former une demande contre l'État, devaient en faire connaître la nature par un mémoire qu'ils étaient tenus de remettre au directoire du département avant de se pourvoir en justice; que cette disposition, utile à toutes les parties en cause, puisqu'elle a pour objet de prévenir le procès ou de le concilier, s'il est possible, n'a été abrogée explicitement ni implicitement par la loi du 28 pluviôse an 8; mais que le mémoire dont parle cet article doit être remis au préfet, qui est chargé seul d'administrer et de plaider, et non au conseil de préfecture, qui n'a reçu de la loi aucune attribution à cet égard,

Est d'avis, 1° Que, dans l'exercice des actions judiciaires que la

loi leur confie, les préfets doivent se conformer aux instructions qu'ils recevront du Gouvernement, et que les conseils de préfecture ne peuvent, sous aucun rapport, connaître de ces actions;-2° Que, conformément à l'art 15 de la loi du 5 novembre 1790, nul ne peut intenter une action contre l'État, sans avoir préalablement remis à l'autorité administrative le mémoire mentionné en cet art. 15; et que ce mémoire doit être adressé, non au conseil de préfecture, mais au préfet qui statuera daņs le délai fixé par la loi. » (Inst. du Dir. gén. de l'enreg., n° 1101.)

S. 51. Les principes posés par le nombre 1er de l'avis précité ont été consacrés, dans une instance administrative, par une ordonnance du Roi, du 11 février 1824, portant que l'art. 3 de la loi du 28 pluviôse an 8, qui charge le préfet seul de l'administration, statue, par cela même, qu'il peut, sans le concours du conseil de préfecture, exercer les actions qui le concernent, en sa qualité d'administrateur, et que l'art. 4 de la même loi ne soumet pas à l'examen, l'avis, ni à l'autorisation des conseils de préfecture les procès que le préfet doit intenter ou soutenir dans l'intérêt du domaine. (Trait. gen., tom. 3, pag. 209.)

S.

-.

52. Une autre ordonnance, du 17 mars 1825, a également décidé qu'aux termes de l'art. 15 de la loi du 5 novembre 1790, les particuliers qui se proposent de former une demande contre l'État doivent en faire connaître la nature, par un mémoire qu'ils sont tenus de remettre à la préfecture du département, avant de se pourvoir en justice; que cette disposition n'a pas été abrogée explicitement ni implicitement par la loi du 17 février 1800 (28 pluviôse an 8), et que le mémoire doit être remis au préfet, et non au conseil de préfecture. ( Idem, tom. 3, pag. 347.)

§. 53. L'obligation imposée aux particuliers d'adresser préalablement à toute instance un mémoire aux corps administratifs a été maintenue par la loi du 14 ventôse an 7 relative aux domaines engagés, et, d'après l'art. 15, tit. 3, de la loi du 5 novembre 1790, les particuliers ne peuvent se dispenser de s'y conformer à peine de nullité. Pour pouvoir en justifier, ils obtiennent un récépissé du secrétaire général de la préfecture, qui en fait mention sur un registre tenu à cet effet; la remise et l'enregistrement du mémoire interrompent la prescription; et, dans le cas où le préfet n'aurait pas statué dans le délai d'un mois, il est permis aux particuliers de se pourvoir devant les tribunaux.

S. 54. La nullité résultant du défaut d'exécution de l'art. 15, tit. 3, de la loi du 5 novembre 1790, qui veut que toute action ayant pour objet la revendication d'une propriété contre l'État, soit précédée d'un mémoire à l'administration, est absolue et d'ordre

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public: elle ne peut être couverte par le silence du préfet. Arrêt de la Cour royale de Bordeaux, du 17 mars 1826. (SIREy, 26—2— 263.) Voy. M. CARRÉ, Lois de la procédure, Quest. 622, et M. MERLIN, Questions de droit, au mot Nation, S. 2.

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§. 55. Un arrêté du Gouvernement, en date du 5 vendémiaire an 6, a statué que les usagers dans les forêts de l'État justifieront de leurs droits devant les administrations centrales des départemens, contradictoirement avec les agens forestiers et les préposés de la régie de l'enregistrement; cette marche n'ayaut pas été abrogée par les lois des 28 ventôse an 11 et 14 ventôse an 12, les directeurs des domaines et les agens forestiers doivent être entendus sur les demandes en jouissance de droits d'usage, et ils doivent être informés des significations des jugemens qui intéressent l'État. Lettre du ministre des finances à MM. les préfets, du 22 octobre 1823. (Trait. gén., tom. 3, pag. 171.)

§. 56.- Dans les affaires intéressant l'État, et poursuivies à la requête des préfets, les actes de procédure sont valablement signifiés aux parquets soit des procureurs du Roi soit des procureurs généraux; il existe de la part des préfets, une élection légale de domicile au parquet de ces magistrats, alors surtout que le préfet n'a pas usé de la faculté qui lui est accordée de constituer avoué. Arrêt de la Cour royale de Nancy, du 12 février 1827. (SIREY, 272 — 98.)

§. 57.- Un arrêt de la Cour royale de Toulouse, du 24 janvier 1827, a décidé, par application des art. 61, 456 et 470 du Code de procédure civile, qu'un exploit fait à la requête d'un préfet, agissant dans l'intérêt de l'État en matière de propriété, est nul, faute de constitution d'avoué, lorsqu'il s'agit de domaines et de droits domaniaux, espèce de litige où l'État doit être l'égal des particuliers. (SIREY, 27- 2 — 123.) Cette jurisprudence est contraire à deux arrêts de la Cour de cassation rendus les 16 messidor et 29 thermidor an 10. (Idem, 2 I -383, et 20—1—502.)

$. 58. Les agens forestiers n'ont pas qualité pour recevoir la signification des arrêtés des conseils de préfecture, et la signification qui leur en aurait été faite ne forme point obstacle au pourvoi contre ces arrêtés. Ordonnance du 4 juin 1823. (Trait. gén., tom. 3, pag. 146.)

S. 59. Un inspecteur des forêts n'est point partie capable pour représenter l'État dans une contestation relative à une question de propriété, et l'acquiescement par lui donné à l'exécution d'un arrêté de conseil de préfecture ne peut lier l'administration. Ordonnance du 15 juin 1825. (Idem, tom. 3, pag. 362.)

§. 60.

-La signification d'un jugement qui avait adjugé des

droits d'usage à une commune n'était pas suffisante si elle n'avait été faite qu'au procureur syndic d'un district, au lieu d'être faite au procureur général syndic du département. Cassation, arrêt du 17 juillet 1810. ( Trait. gen., tom. 2, pag. 353.)

S. 61. Les actions intentées contre l'État, sous l'empire de la loi du 5 novembre 1790, n'ont pu l'être valablement qu'en la personne des procureurs généraux syndics de département. Sont nuls en conséquence les jugemens obtenus en l'an 2 et en l'an 3, contre l'État, en la personne d'un agent national de district, qui ne représentait alors que le procureur syndic du district, le procureur de la commune ou leurs substituts, tous également sans pouvoir pour défendre en leur nom les intérêts de l'État. Cassation, arrêt du 9 mars 1825. (SIREY, 26 — 1 — 22.)

5o SECTION. Principes particuliers sur les droits d'usage des communes.

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S. 62. Les lois des 28 août 1792 et 10 juin 1793 ne peuvent autoriser des communes à réclamer des droits d'usage dans une forêt domaniale, lorsqu'elles ne sont point portées dans les états arrêtés au Conseil. Cassation, arrêt du 1er prairial an 12. (Trait. gén., tom. I, pag. 681.) Voy. l'art. 2 de la loi du 28 ventôse an II, ci-devant, pag. 204.

— §. 63. -- Une transaction par laquelle une commune et son seigneur se sont partagé un bois sur lequel la commune avait eu des droits d'usage, ne suffit pas, après qu'une longue possession l'a confirmée, pour faire réintégrer la commune, en vertu de l'art. 8 de la loi du 28 août 1792, dans la totalité du bois. De simples présomptions ne peuvent autoriser l'application de cet article à la réclamation de la commune.. Cassation, arrêt du 8 messidor an 12. (Idem, tom. I, pag. 684.)

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§. 64. Une commune ne peut se faire adjuger la propriété de bois ou la possession d'usages dont elle prétend avoir été dépouillée par la puissance féodale, qu'autant qu'elle justifie, par des titres clairs et positifs, qu'elle a anciennement possédé ces bois ou ces usages. Une commune qui a reçu par forme de cantonnement la moitié des propriétés sur lesquelles elle avait des droits d'usage, ne peut faire reviser ce cantonnement sous prétexte de dol, puisque, d'après l'ancienne jurisprudence, il n'était ordinairement abandonné que le tiers aux usagers. Arrêt de la Cour royale de Lyon du 13 janvier 1813. Voy. les Annotations, $3 et suivants, sur l'art. 63. ( Idem, tom. 2, pag. 537.)

§. 65. Une ancienne transaction par laquelle une commune qui se prétendait usagère de trois terrains, a renoncé à ses prétentions sur deux, moyennant sa maintenue dans le droit d'usage sur

le troisième, ne forme pas aujourd'hui obstacle à ce que le propriétaire exerce contre elle l'action en cantonnement. Cassation, arrêt du 27 décembre 1814. (Trait. gén., tom. 2, pag. 643.)

§. 66. - Les communes n'ont pu s'autoriser de la loi du 28 août 1792 pour demander l'annulation des cantonnemens exécutés en faveur d'usagers qui n'étaient pas leurs seigneurs. Cassation, arrêt du 17 vendémiaire an 13. (Idem, tom.1, pag. 700.)

§. 67. - La loi du 28 août 1792, qui avait autorisé les communes à revendiquer la propriété des biens dont elles avaient été dépouillées par l'abus de la puissance féodale, n'était point applicable aux bois dans lesquels, n'étant qu'usagères, elles avaient consenti à des cantonnemens en faveur de leurs ci-devant seigneurs. Cassation, arrêt du 26 nivòse an 13. (Idem, tom. 2, pag. 6.)

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§. 68. - La loi du 28 août 1792, applicable aux abus de la puissance féodale, ne l'était pas aux actes du pouvoir législatif, ni par conséquent aux usagers dans les forêts de l'État. Cassation, arrêt du 17 juillet 1810. (Idem, tom. 2, pag. 353.)

S. 69. Une commune usagère dans les bois de l'État peut être admise à renoncer à l'exercice de son droit, pour se dispenser d'acquitter la redevance établie à raison de ce droit. Ordonnance du Roi, du 2 avril 1823. (Idem, tom. 3, pag. 129.)

S. 79. Une commune ne peut se maintenir en possession d'un hien national de première origine, sous prétexte qu'elle en jouit depuis plus de quarante ans, lorsque sa jouissance consiste en un droit d'usage, ou que ce bien a fait partie de ceux qui ont été déclarés communaux en 1793. Cassation, arrêt du 1er juin 1824. ( Idem, tom. 3, pag. 234.)

S. 71.- La prescription de cinq ans, établie par les art. 1er et 6 de la loi du 28 août 1792, pour certaines actions à intenter par les communes contre leurs ci-devant seigneurs, ne s'étend pas l'action en réintégration que leur accorde l'art. 8, à l'égard des biens fonds ou des droits d'usage dont elles auraient été dépouillées. Dans l'appréciation des titres établissant le droit d'usage réclamé par une commune, les juges sont autorisés à donner toute préférence aux titres qui sont les plus favorables aux communes, aux termes de l'art. 12 de la loi du 28 août 1792. (Cassation, arrêt du 18 mai 1825. (SIREY, 26-1-420.)

S. 72. L'art. 6 de la loi du 28 août 1792, en fixant aux communes un délai de cinq ans pour faire opérer les cantonnemens, ne s'applique pas au cas où les communes ont été laissées en possession de leurs usages sans exécution du cantonnement.

La

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