1770, 1771, on continua à en frapper la province, en dépit des protestations du Parlement, des promesses formelles du Contrôleur général en 1770; et, en 1772 encore, cette somme avait figuré dans le budget, malgré les représentations de la Cour, formulées en décembre 1771, auxquelles on n'avait même pas répondu. C'est après toutes ces vicissitudes, toutes ces charges et toutes ces promesses, que l'édit de novembre 1771 survenait, comme une nouvelle faillite de tous les engagements du Roi, une violation de toutes les garanties que la province avait achetées pourtant plus cher encore sur ce point qu'au sujet de la perception des vingtièmes. Le Parlement s'insurgea. Il rendit, le 13 juillet 1772, l'arrêt suivant : La Cour, les Chambres assemblées, considérant de quelle importance il est que le gouvernement public se tienne à des principes fixes, principalement dans l'administration des Corps politiques, tels que les villes, bourgs et communautés particulières du royaume, a arrêté qu'il sera fait de très humbles et très respectueuses remontrances audit Seigneur Roi, à l'effet de lui représenter: 1° Que depuis le mois d'août 1692, c'est-à-dire depuis quatre vres, devaient être prélevées en augmentation pendant dix ans et deux mois. Arch. de l'Isère, B, Reg. 2314, f 199, lignes 26 et 27. L'arrêt de la Cour du 13 juillet 1772, qui prévoit des remontrances, dans le quinto dit 77.000 livres. Arch. de l'Isère, B, carton 2255. Ce qui complique la question, c'est que les deux premiers textes et une lettre de Vidaud, du 11 septembre 1772, disent à ce sujet que, pendant les vingt dernières années, la province a payé plus de 2.000.000 pour rembourser 530.000 livres. vingts ans révolus, on a vu différents édits de création et ensuite de suppression d'offices municipaux, dans lesquels alternativement le gouvernement a changé de principes et combattu ce qu'il avait précédemment établi, variations qui avaient porté dans tous les Corps municipaux une confusion et un désordre nécessairement fatal à la chose publique ; 2° Qu'on n'avait pu trouver de moyen plus sûr, plus facile et plus conforme à l'essence de toute administration politique que de supprimer définitivement les offices, et de laisser aux citoyens eux-mêmes le choix de leurs représentants et de leurs agents; et que c'était dans cette vue qu'avaient été rédigés l'édit et la déclaration du mois de mai 1766, lois aussi sages dans leurs précautions de surveillance que dans les principes qui les avaient dictées ; 3° Que si la liberté des élections a pu ètre dans quelques villes du royaume une source d'inimitiés et de cabales, par le désir que des gens souvent incapables avaient de participer à l'administration, son Parlement peut lui attester que l'enregistrement de l'édit et de la déclaration de 1765 a été l'époque de la tranquillité, de l'ordre, du zèle et de l'économie dans les Corps municipaux; que les élections s'y sont toujours faites par un esprit de justice et de bien public, qui en a écarté la brigue et fermé l'espoir à l'ignorance; que, s'il y a eu quelques difficultés sur les rangs et séances, elles ont été décidées sommairement et sans frais, et qu'actuellement il règne dans tous les Corps municipaux une tranquillité que tout annonce devoir être durable et qui fait cesser le motif principal de l'édit; 4° Que les autres considérations rappelées dans le préambule de cette loi ne sont qu'un langage souvent employé et sans cesse combattu pour asseoir, sur les villes et communautés, une imposition, qui n'a déjà été que trop répétée dans la province la plus pauvre du royaume ; 5° Que son Parlement a d'autant plus le droit de réclamer contre cette surcharge, que le Dauphiné supporte depuis vingt. ans révolus une imposition annuelle de 77.000 livres pour le rachat des offices municipaux, rachat qui, au terme des lettres patentes du 22 août 1751, devait être consommé en dix ans et deux mois; que, depuis la prorogation de l'impôt au delà du terme fixé par la loi, les justes représentations de son Parlement réitérées chaque année n'ont point été écoutées, et que la province a payé plus du double de la somme nécessaire pour le rachat. 6° Qu'en rachetant ainsi les offices, la province a dû s'attendre qu'on n'en créerait plus de nouveaux; qu'il est juste de lui restituer les sommes qu'elle a données pour s'affranchir de la domination des officiers, ou de lui conserver la liberté qu'elle a achetée à si haut prix, liberté qu'on pourrait même dire qu'elle a payée d'avance, par la durée de l'imposition pendant onze ans au delà du terme fixé pour sa libération; 7° Que la levée des deniers que l'édit veut établir n'est qu'un emprunt dont ledit Seigneur Roi a solennellement proscrit l'usage dans le préambule de l'édit de novembre dernier, comme étant la cause de la perte de la confiance et du désordre des finances; que cet emprunt est dirigé de manière, selon toute apparence, et à juger par les lois anciennes et leurs principes, à faire craindre à la province de payer une seconde fois et cumulativement le capital et les intérêts; 8° Enfin qu'il n'est point de ville dans la province qui soit en état de payer sur ses revenus l'intérêt des offices qu'on veut créer; que les octrois qui ont presque doublé par l'établissement de 8 sols par livre ne peuvent être d'aucune ressource pour l'acquittement de ces intérêts, puisqu'ils ne suffisent plus aux dépenses les plus nécessaires des communautés; qu'ainsi cette loi présentant autant de difficultés dans son exécution que de contradiction avec les principes d'une administration. politique, son Parlement attend avec confiance dudit Seigneur Roi qu'il voudra bien retirer son édit et laisser sa province sous une forme d'administration qui fait le bonheur des villes et bourgs qui y sont assujettis. Le 15 juillet 1772, le Premier Président envoya copie de l'arrêt à Maupeou, à l'abbé Terray, et au marquis de Monteynard; il ajoutait que le Parlement ne rédigerait ses remontrances que s'il recevait des lettres de jussion. Elles ne se firent pas attendre, elles étaient datées de Compiègne, du 30 juillet. Le 13 août, le Parlement arrêta qu'il serait donné suite au projet de remontrances, que les commissaires étaient chargés de rédiger le plus tôt possible (1). Le 17 août, Vidaud essaya encore d'arriver à une entente; il écrivit à nouveau aux ministres pour les aviser que l'on allait travailler incessamment aux remontrances. Peine perdue. Elles furent prêtes le 17 septembre. Elles sont une amplification abondante des paragraphes de l'arrêt de la Cour; sans être aussi énergiques que les remontrances relatives à la prorogation du second vingtième, elles ne craignent pas de dire que l'objet apparent de l'édit, qui déclare vouloir remédier aux prétendus abus de l'administration actuelle des communautés, n'est qu'un prétexte, que le vrai mobile est de soumettre ces communautés à de nouvelles charges (2). Le 11 octobre, les remontrances partirent pour Paris, et Vidaud en envoya une copie à M. de Monteynard pour qu'il apportât à la campagne entreprise l'appui de son influence. Il écrivit en même temps à Maupeou, (1) Arch. de l'Isère, B, Reg. 2255. (2) C'est dans l'historique qu'elles renferment de la question qu'ont été pris les renseignements ci-dessus rapportés. à Terray et au duc d'Orléans dans le même but (1). Qu'en advint-il par la suite? On est sur ce point réduit aux conjectures. Aucun document, passé cette date, ne fait allusion à l'édit portant création d'offices municipaux, qui ne figure dans aucun registre d'enregistrement du Parlement de Dauphiné. Les remontrances semblent, c'est l'hypothèse la plus naturelle, avoir atteint leur but, à moins que l'oubli ou la fantaisie de quelque greffier de cette époque n'ait rendu introuvable la constatation officielle de cet enregistrement. Avant d'en arriver aux hypothèques, et pour ne rien. laisser dans l'ombre, il convient de citer encore des lettres patentes du 17 octobre 1773 (2), qui ne furent pas intégralement acceptées par le Parlement de Grenoble. Elles contiennent un règlement pour l'enregistrement du bail des fermes et de l'arrêt de prise de possession, et fixation des sommes à payer pour ledit enregistrement. Sur le fond même de la question, aucune difficulté, mais, par l'article 4 de l'arrêt du Conseil pris en exécution de ces lettres, il était dit qu'à la requête du Procureur général il serait procédé à l'enregistrement des baux des fermes dans la huitaine, et à la Grand' Chambre seulement dans les Cours en contenant plusieurs; qu'outre cela les officiers de ces Cours ne pourraient y apporter (1) Voir ces quatre lettres à la Bibl. de Grenoble, Q, 5, f° 98. (2) Rec. des Édits, t. XXVI, no 9 ; f. 533. Arch. de l'Isère, B, Reg. 2373, |