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celle d'un chef choisi en Belgique même. Cette opinion est soutenue particulièrement par quelques-uns des ecclésiastiques qui siégent au Congrès.

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M. Devaux attire l'attention de l'assemblée indécise sur le prince Léopold de Saxe-Cobourg. « Il me semble, dit-il, que la ques«tion a été un peu rétrécie; on ne nous présenté d'autre "alternative qu'un prince français, le duc Auguste de Leuchtenberg, ou le prince Othon de Bavière. Je crois cependant qu'il est d'autres princes qui pourraient également nous convenir, et sur lesquels on a passé légèrement peut-être; et, parmi « ceux-là, je citerai le prince Léopold de Saxe-Cobourg. Je sais la prévention qui existe dans cette assemblée contre un prince anglais; je sais que tout ce qui touche à l'industrie se « soulève contre un pareil choix; mais on oublie que le prince « de Saxe-Cobourg n'est Anglais que par alliance, et que s'il <«< s'alliait à la France, en acceptant la couronne de la Belgique, « il deviendrait plus Français qu'Anglais. L'histoire nous. apprend d'ailleurs, messieurs, qu'un prince ne sacrifie pas les « intérêts du pays qu'il est appelé à gouverner à ceux d'un pays qui lui est devenu étranger. L'opinion générale est encore défa"vorable à ce prince, parce qu'elle se prononce en faveur d'un

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catholique. La manière dont j'ai voté sur les questions, mi-par« tie politiques, mi-partie religieuses, qui ont été soumises à «l'assemblée, me donne le droit d'exprimer librement mon opi«nion sur ce sujet. J'ai pensé alors que la loi ne devait être ni "catholique ni anticatholique, mais seulement juste et libérale; « et dans le même sens, je ne puis concevoir l'exclusion d'un prince non catholique; s'il est catholique, c'est bien; s'il ne « l'est pas, c'est bien encore, et je dirai plus, si dans l'élection

« de faire écouter une semblable proposition au sein de l'assemblée, et bien « plus encore d'être admis à en déduire les motifs. »>

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il pouvait y avoir une préférence, elle devrait être pour un prince non catholique; car d'après les bases de notre future constitution, il n'y a plus qu'une oppression à redouter, c'est «celle de la majorité. Toute notre organisation politique repose, «en effet, sur le système électif, et le système électif est le règne « de la majorité. La majorité étant catholique chez nous, il « serait peut-être à désirer que le chef du pouvoir exécutif ne le « fût pas. »

Les conclusions de la section centrale n'avaient pas trouvé beaucoup d'adhérents. Les uns les repoussaient afin de s'affranchir de la tutelle des grandes puissances; les autres pour ne pas faire peser des soupçons injustes sur les délégués du gouvernement provisoire. Le 15 janvier, l'assemblée décida par cent dixsept voix contre soixante-deux qu'elle n'enverrait pas des commissaires à l'étranger. Elle rejeta aussi une proposition de M. Devaux, qui tendait à adjoindre quatre membres du Congrès au comité diplomatique pour se concerter avec lui sur toutes les mesures à prendre à l'effet d'éclairer l'assemblée nationale dans le choix du chef de l'État.

Alors M. C. Rodenbach déposa une nouvelle proposition, par laquelle il demandait que le Congrès national fixât définitivement un jour pour procéder au choix du chef de l'État. Une autre proposition de M. Duval de Beaulieu était ainsi conçue :

« 4° Les commissaires belges, envoyés auprès de la confé«rence à Londres, sont chargés de prendre et de transmettre « au Congrès, dans le plus bref délai, des renseignements posi«tifs sur tout ce qui peut être relatif au choix du chef de l'Etat « en Belgique, soit sous le rapport du territoire, soit sous le « rapport des intérêts commerciaux, soit sous le rapport des << alliances.

«2o Ils s'assureront, en outre, et spécialement, si un accrois«sement de territoire au moyen d'échange, soit avec le roi de

Saxe, soit avec le duc de Brunswick, soit par d'autres com«binaisons, ne pourrait pas satisfaire à l'objet indiqué au pro«tocole du 20 décembre dernier : « un juste équilibre en Europe, « et assurer le maintien de la paix générale. »

Le 14, M. C. Rodenbach fut admis à développer sa proposition.

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« Les menées du parti orangiste sont flagrantes, dit-il. S'il «<faut en croire des nouvelles particulières de Londres, il parait que les cabinets anglais, russe et prussien, intriguent ouverte«<ment en faveur d'un prince que nous avons exclu, et cherchent, pour atteindre leur but, à retarder, par des voies détournées, la possession du Luxembourg et la libre navigation de l'Escaut. Oui, la faction orangiste cherche à semer le trouble; elle provoque le désordre; elle appelle la guerre « civile. N'a-t-elle pas trouvé un écho dans cette enceinte même

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" où nous avons proclamé la déchéance des Nassau ? »

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M. Rodenbach signale ensuite d'autres intrigues :

"Des

agents de divers partis excitent l'armée à pétitionner en faveur d'un prince; si vous laissez venir les choses à ce point, que répondrez-vous à l'armée? Vous élèverez-vous << contre elle? Encore un peu de temps, et les divisions qui " commencent à régner vont nous entraîner vers l'anarchie. »

Il ajoute que, dans les provinces, le peuple murmure de lassitude; qu'il est prêt à embrasser le parti qui lui présentera une apparence de calme, de tranquillité, ce parti fût-il le pius désastreux dans ses suites. Or il importe d'enlever à jamais aux ennemis de la Belgique de vaines et coupables espérances.

« Je le déclare hautement, ajoute-t-il en finissant, il faut être << ennemi de son pays, ou conserver quelque arrière-pensée pour « ne pas vouloir reconnaître la nécessité urgente du choix du chef de l'État... »

Ces dernières paroles excitent un violent tumulte dans une

partie de l'assemblée. Plusieurs membres demandent à grands cris le rappel à l'ordre de l'orateur. Mais, impassible à la tribune, il laisse passer cet orage. L'orage se calma, en effet, lorsque le président eut déclaré que l'intention de M. Rodenbach avait été mal interprétée.

L'assemblée, reconnaissant ensuite l'urgence des propositions déposées par MM. C. Rodenbach et Duval de Beaulieu, les renvoie l'une et l'autre aux sections.

CHAPITRE X.

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La fixation des limites de la Belgique se rattachait au choix du chef de l'Etat. Politique ferme et loyale du gouvernement provisoire. — Démarches faites à Paris et à Londres pour obtenir l'intégrité du territoire belge. Proclamation énergique adressée le 9 janvier aux habitants du grandduché de Luxembourg par MM. Thorn et Nothomb, commissaires du gouvernement provisoire. Protocole du 9 janvier enjoignant aux Hollandais de rendre l'Escaut libre, et aux Belges de lever le blocus de Maestricht. Agitation dans le Congrès. Comité secret du 46 janvier; ordre est donné aux troupes belges de s'éloigner de Maestricht. Congrès s'occupe de la polémique engagée dans les journaux de Paris entre M. le comte Sébastiani et M. F. Rogier; conséquences tirées du démenti du ministre des affaires étrangères. Le duc Auguste de Leuchtenberg déclare qu'il acceptera la couronne, si elle lui est offerte. Le cabinet français veut lui opposer le prince de Capoue. M. Lebeau dépose, le 49 janvier, un projet de décret tendant à appeler le duc de Leuchtenberg au trône de Belgique. Plusieurs orateurs s'élèvent vivement contre l'attitude prise par le ministère français. Le Congrès fait inviter les commissaires belges à Paris à transmettre de nouveaux renseignements sur le choix du chef de l'État, et fixe au 28 janvier la discussion relative à l'élection du souverain. M. Sébastiani, dans une lettre à M. Bresson, proteste avec énergie contre la candidature du duc de Leuchtenberg; cette dépêche est communiquée au Congrès; orage qu'elle soulève; on accuse le cabinet français de vouloir favoriser une restauration en Belgique.

Le choix du prince qui serait appelé au trône de la Belgique devait avoir une grande influence sur la fixation des limites du

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