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TITRE PRÉLIMINAIRE.

78. Ne peut être soumise à la cour de cassation, la question de savoir si une assignation donnée au prévenu devant la juridiction civile a pu interrompre la prescription de l'action publique, lorsque cette question n'a pas été soulevée devant la juridiction correctionnelle et que cette assignation n'a pas été produite devant elle. - Cass. fr., 21 juin 1888, Journ. du droit crim., 1888, 307.

79. L'article 208 du code d'instruction criminelle répute l'opposition non avenue, si l'opposant ne comparaît pas à l'audience. L'arrêt par défaut devient définitif et aux termes de l'article 92 du code pénal, la prescription de la peine infligée est ouverte, venant se substituer à celle de l'action publique en cours jusqu'alors. Il importe peu que l'arrêt de débouté d'opposition ne soit pas signifié au prévenu; l'absence de cette signification a pour unique effet de tenir en suspend le délai du pourvoi en cassation. - Cass., 26 octobre 1896, B. J. 1897, 826; Pand pér., 1897, n° 484; Pas. 1896, I, 295.

80.

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Aux termes de l'article 2248 du code civil, la prescription est interrompue par la reconnaissance que fait le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait. Cette disposition est générale et s'applique aussi bien aux obligations civiles résultant d'un délit qu'à celles naissant des contrats ou quasi-contrats.

Cette reconnaissance pouvant être tacite, il appartient aux juges du fait d'apprécier si elle résulte des faits et circonstances de la cause. (Cass. fr., 3 juin 1893, Pas. 1893, IV, 155; Journ. du Pal, 1893, I, 310). Cette reconnaissance ne pourrait conserver l'action publique au delà du terme extrême de la prescription. Celle-ci est d'ordre public en matière répressive.

81. L'action civile née d'une contravention de police se prescrit par six mois.

S'il a été fait des actes de poursuite, l'action ne sera prescrite qu'après les six mois révolus à compter du dernier acte.

En aucun cas, elle ne peut se prolonger au delà d'une année, à compter du jour où elle a été commise. Cass., 17 décembre 1891, Pas. 1892, I, 56; B. J. 1892, 401; Cass., 1er octobre 1881, Pas. 1881, 1, 383; Cass., 15 février 1886, Pas. 1886, 1, 77.-Voyez notre commentaire de la loi du 30 mars 1891.-L'action civile n'est pas prescrite si elle a été intentée régulièrement, en même temps que l'action publique. Elle perdure tant que dure l'instance.

84. Ne sont pas valables et n'interrompent pas la prescription, l'ordonnance adressée par le procureur du roi au juge d'instruction à l'effet de se rendre avec lui sur les lieux et le transport du juge d'instruction sur les lieux, si l'affaire a déja été portée devant le tribunal, ce dernier ayant seul compétence, en pareil cas, pour procéder à ce transport.

Le procureur du roi n'est plus en droit de requérir le juge d'instruction pour procéder à une nonvelle information, s'il a déjà donné citation au prévenu à l'effet de comparaître devant le tribunal correctionnel. Liége, 27 juillet 1892, jurispr. Cour de Liége, 1892, 313; Pand. pér., 1892, nos 1862 et 1887.

85. Lorsqu'il est fait des actes d'instruction ou de poursuite, la prescription court, non à compter de l'expiration du premier délai, mais à compter du dernier acte interruptif. Cass., 13 juillet 1893. Pas. 1893, 1, 309.

86.- Un arrêt par lequel la cour de cassation casse un jugement d'un conseil de discipline et ordonne le renvoi de la cause devant le conseil de discipline composé d'autres juges, constitue un acte d'instruction interruptif de la prescription, donnant ouverture, s'il est intervenu endéans les six mois à compter de la contravention, à un nouveau délai de six mois pour l'exercice de l'action publique. Quand la prescription de l'action publique est accomplie par l'expiration de ce délai, la cassation qui intervient est prononcée sans renvoi. Cass., 31 octobre 1892 (deux espèces), Pas. 1893, 1,9 et 10; B. J. 1893, 173; Pand. pér., 1893, no 267.

87. Les conclusions signifiées et le dépôt des conclusions d'audience interrompent la prescription. Bruxelles, 3 juin 1893, Paud. pér., 1893, n° 1827.

88. La sommation faite à l'adversaire par la partie civile, au cours d'une instance en calomnie régulièrement introduite dans les délais, d'avoir à signifier les griefs d'appel, avec déclaration que, faute d'y satisfaire, il en sera tiré tels avantages que de droit, est un acte de procédure valable, manifestant la volonté de continuer la poursuite et, par suite, interruptif de la prescription. - Cass. fr., 1er mars 1893, la Loi, 1893, 363; D. P. 1893, I, 381.

89. Est interruptif, un réquisitoire du ministère public à fins d'instruction, même à l'égard d'inconnus que cet acte ne désigne pas. Cass., 6 août 1897, Pas. 1897, 1, 269.

-

82. Devant la cour d'appel il appartient au 89bis. Est interruptif, un réquisitoire assiprocureur général d'accomplir les formalités de gnant les prévenus à comparaître. - Cass., 12 ocnature à mettre la cause en état. Cass., 24 no-tobre 1896, Pas. 1896, 1, 280; B. J. 1897, 701. vembre 1891, Pas. 1892, 1, 25; B. J. 1892, 33; Pand. pér., 1892, no 302.

83. La plainte de l'administration au procureur du roi interrompt la prescription, même à l'égard des inconnus qu'elle ne désigne pas. -Cass., 24 novembre 1891, Pas. 1892, I, 25; B. J. 1892, 33. 83bis. Lorsque rien ne démontre que la remise de la cause a été prononcée contradictoirement, et que plus de trois mois se sont écoulés depuis ce jour sans nouvel acte d'instruction, la poursuite pour délit de chasse est prescrite. Liége, 27 juillet 1892, jurispr. Cour de Liége, 1892, 314; Pand. pér., 1892, nos 1862 et 1887.

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90. L'acte interruptif utile pour la poursuite d'une contravention doit être posé dans les six mois à dater du jour de l'infraction. Doit être cassé sans renvoi, un jugement qui prononce une condamnation à raison d'une contravention converte par la prescription. Cass., 12 avril 1897, Pas. 1897, I, 144; B. J. 1897, 1261.

91.-La signification d'un jugement par défaut qui ne porte pas la date exacte du jugement est nulle. Le ministère public peut interjeter appel d'un jugement par défaut, mais l'instruction de la cause doit être suspendue en degré d'appel, jusqu'à ce que le prévenu soit déchu de son droit

d'opposition par expiration des délais légaux. Liége, 1899, 93; Pas. 1899, II, 161). L'arrêt de la L'opposition du prévenu a pour effet de faire ré- cour de Liége a été cassé; la cour de cassation députer non avenu le jugement par défaut et de cide que la citation devant un juge incompétent rendre inefficace l'appel du ministère public. Ce interrompt la prescription.- Cass., 17 avril 1899, jugement, cet appel et tous les actes faits en Pas. 1899, I, 185. Cons. conclusions de M. Van conséquence de cet appel ne peuvent avoir aucun Schoor, Pas. 1899, I, 185. - Conf. Cass., 27 avril effet interruptif de la prescription. - Gand, 7 jan-1880, Pas. 1880, I, 153. vier 1897, Pas. 1897, II, 329; Fland. judic. 1897, 222; B. J. 1897, 478.

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Dans l'espèce le ministère public avait cité devant le tribunal correctionnel un garde-chasse prévenu de délit dans l'exercice de ses fonctions (art. 483 du code d'instr. crim.).

94bis. La chambre des vacations peut, si

92. Pour être interruptifs les actes d'instruction doivent émaner d'un magistrat ou officier ayant caractère pour instruire les infractions dont il s'agit. Tel n'est pas le caractère d'une informal'instruction des affaires correctionnelles l'exige, tion administrative à laquelle ont procédé des délé- siéger en dehors des jours d'audience fixés par gués d'un officier supérieur. Cass., 8 février l'ordre de service des vacations. 1897, Pas. 1897, I, 87; Pand. pér., 1897, no 691; La citation à comparaître devant le tribunal B. J. 1897, 925. correctionnel un autre jour que ceux fixés par 93. Une demande d'extradition d'un gouver-l'ordre de service des vacations, interrompt la presnement étranger, en vertu d'une convention d'ex-cription. tradition, qui est accompagnée d'un mandat d'arrêt régulier, est interruptif. - Liége, 17 février 1897, Pas. 1897, II, 232, Jurisp. Cour de Liége, 1897, 86; Pand. pér., 1897, n° 1035.

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Le réquisitoire à fins de citation est, par luimême, un acte de poursuite complet, indépendamment de l'exécution qui lui serait donnée. - Trib. Charleroi, 18 octobre 1898, Pas. 1898, III, 358. 94. L'article 2246 du code civil est appli- 95. La prescription de l'action publique récable en matière répressive. Mais la citation sultant d'une contravention ne s'interrompt que par donnée par un magistrat compétent ratione ma-un acte d'instruction ou de poursuite, fait dans le teriæ, qui aurait, au moment où il faisait cet acte, délai de six mois à compter du jour où l'infraction connu son incompétence relative ratione persona, a été commise. est radicalement nulle et de nul effet, ainsi que Doit être cassé sans renvoi, le jugement qui tous les actes accomplis ensuite de cette cédule. prononce une condamnation à raison d'une contraCet acte nul, pas plus que les actes posés en-vention couverte par la prescription. suite de cette citation ne peuvent interrompre la 28 janvier 1901, Pas. 1901, I, 121; prescription (Liége, 6 mars 1899, Jurisp. cour de 12 avril 1897, Pás. 1897, I, 144.

Article 27.

Cass.,

Cass.,

Dans le cas de renvoi devant le tribunal civil ou devant l'autorité administrative, pour la décision d'une question préjudicielle, la prescription sera suspendue.

Il en sera de même dans le cas prévu par l'article 447, § 3, du code pénal.

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CHAPITRE DEUXIÈME. - De la suspension de la prescription. Cas d'application. - Espèces jugées (nos 3 à 24).

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Le législateur de 1878 a cru devoir déroger aux | de prescription, parce qu'elle n'aurait pas été règles invoquées par ces auteurs.

exercée.

La suspension de la prescription diffère de l'in- Le ministère public ne pouvant donner suite à terruption, en ce sens que cette dernière fait son action tant qu'il n'a pas été statué sur l'exceprecommencer en entier le délai de la prescription, tion préjudicielle, il faut anssi que le cours de la alors que la suspension arrête simplement le cours prescription soit arrêté. Rapport servant d'exde la prescription, l'empêche momentanément d'agir, posé des motifs de la loi du 17 avril 1878, par mais laisse au prévenu tout le bénéfice de la pres- Nypels, no 61, p. 42. cription qui a couru antérieurement.

La cause de suspension venant à se produire, le cours de la prescription est arrêté, et, cet obstacle étant levé, la prescription commencée antérieurement se compléte et s'achève.

Supposons que le délai de la prescription. grâce à une interruption, soit d'une année. Une infraction est commise le 1er janvier, la cause de suspension se produit le 1er octobre et n'est levée que le 1er décembre; la prescription serait acquise le 1er mars de l'année suivante. En effet, le délai d'une année se composera de neuf mois qui ont couru depuis le 1er janvier jusqu'au 1er octobre et des trois mois complémentaires, du 1er décembre au 1er mars. La prescription aura donc été suspendue pendant deux mois, et il en résultera cette conséquence que la poursuite de la contravention se sera prolongée au delà d'une année. - Cass., 17 octobre 1886, Pas. 1886, I, 355.

A la différence des causes d'interruption, les cas de suspension sont limités. On ne peut donc en admettre aucun autre en dehors de ceux indiqués cidessus. - Cass., 19 mai 1881, Pas. 1881, 1, 266;

Bruxelles, 30 mai 1881, Pas. 1881, II, 254, et 19 janvier 1884, Pas. 1885, II, 319;- Trib. Charleroi, 10 février 1882, Pas. 1882, III, 214. — CRAHAY, no 149b.

2. D'après Haus, il n'existe pas d'autres causes de suspension que celles indiquées par la loi.

Nous pensons qu'indépendamment des causes indiquées par l'article 27 de la loi de 1878, il y aura suspension de la prescription chaque fois qu'il existera dans la loi un obstacle qui empêche d'agir. — Voyez le n° 19 du présent article.

Mais il faut un obstacle légal pour produire la suspension, et non des lenteurs de procedure. La cour d'assises de la Seine, le 30 octobre 1882 La loi du 17 avril 1878, dans son article 27, in- (Pas. 1893, IV, p. 137), a décidé que la prescripdique deux causes de suspension de la prescription criminelle ne peut être invoquée, lorsque tion; la jurisprudence y ajoute une troisième, c'est l'obstacle légal: le pourvoi en cassation. Aux termes de l'article 27, la prescription sera suspendue:

l'exercice de l'action a été empêché par un obstacle légal, tel que celui qui résulte, aussi longtemps que l'autorisation régulièrement demandée n'a pas été accordée, de la disposition interdisant de pour1o Dans le cas de renvoi devant le tribunal suivre un député, pendant le cours de la session civil ou devant l'autorité administrative par la dé-législative, sans autorisation de la Chambre à cision d'une question préjudicielle. (Nous ren- laquelle il appartient.

voyons à notre commentaire de l'art. 17 de la loi Cette décision est suivie des observations suide 1878, pour savoir quand il y a question préju-vantes de l'arrêtiste. dicielle).

2o Dans le cas prévu par l'article 447, § 3 du code pénal, c'est-à-dire lorsque, en cas de poursuite du chef de calomnie, le fait imputé est l'objet d'une poursuite répressive ou d'une dénonciation sur laquelle il n'a pas été statué.

3 D'après la cour de cassation, la prescription est suspendue pendant l'instance en cassation à partir du recours. Cass., 4 octobre 1878,19 mai 1881, 12 juin 1882, 27 octobre 1886, Pas. 1879, I, 339; 1881, I, 206; 1882, I, 320; 1886, I, 355.

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La calomnie étant un délit, les tribunaux de police n'auront à se préoccuper de ce cas que si, à raison de circonstances atténuantes, un délit de cette espèce leur était renvoyé par la chambre du conseil.

Quant aux questions préjudicielles, elles se soulèvent souvent devant les tribunaux de police. Il s'agit ici de questions préjudicielles au jugement. L'article 27 admet la suspension, soit que la solution de la question préjudicielle rentre dans le domaine du juge civil, soit de l'autorité administrative. Dans les deux hypothèses, en effet, la poursuite répressive est fatalement arrêtée. C'est ce motif qui a fait admettre la suspension de la prescription. « Il serait absurde, dit l'exposé des motifs, que l'on suspendît l'exercice de l'action publique, en la subordonnant à l'accomplissement d'une formalité et qu'on la frappât en même temps

«La question spéciale à propos de laquelle a été rendu l'arrêt ci-dessus est. croyons-nous, sans précédent dans notre pays. En France, elle a été examinée récemment dans un rapport présenté au Sénat par M. Cordelet, sénateur, à propos d'une demande en autorisation de poursuites formulée par M. Gaston Bazille contre M. Couteaux, sénateur, du chef d'injures publiques par la voie de la presse. Il nous paraît intéressant de reproduire ici les principaux passages de ce rapport:

«... En s'arrêtant à ces conclusions (refus de l'autorisation de poursuites), la commission a à se demander si elle n'élèverait pas, en fait, une fin de non-recevoir insurmontable contre l'action que M. Gaston Bazille se propose d'intenter.

«L'action civile résultant des crimes et délits et contraventions prévus par la loi du 29 juillet 1881, se prescrit comme l'action publique elle-même, après trois mois révolus, à compter du jour où ils ont été commis, ou du jour du dernier acte de poursuite, s'il en a été fait (art. 65).

«La présente session ne devant être vraisemblablement close qu'en juillet ou en août, il s'ensuit que l'action de M. Gaston Bazille ne pourra s'exercer que plus de trois mois après les faits qui la motivent.

«La prescription de trois mois pourra-t-elle alors lui être opposée victorieusement? Si cela était, le refus d'autorisation équivaudrait à un

«La question se ramène à savoir si la prescription n'est pas virtuellement suspendue pendant la durée de la session parlementaire, du moins à partir de la demande en autorisation de poursuites; et, c'est, en effet, à cette conclusion qu'un examen sérieux a conduit la commission.

véritable déni de justice et votre commission ne | poursuite. La plupart des auteurs n'ont pas ces vous le proposerait pas. scrupules et professent que si la maxime Contrà non valentem agere non currit præscriptio n'est point applicable comme règle générale en matière criminelle, elle doit être appliquée toutes les fois que l'empêchement d'agir provient de la loi ellemême; et la jurisprudence s'est depuis longtemps prononcée dans le même sens. LE SELLYER, Traité de l'exercice et de l'extinction des actions publiques et privées, no 520;- MANGIN, no 334; — MORIN, Rep., vo Prescription, n° 20;-DALLOZ, Rép., vo Prescription criminelle, nos 153-161. « On en a conclu :

« Dès lors, si le refus d'autorisation impose un délai à l'exercice de l'action, il ne la supprime pas et laisse intact le droit du plaignant...

«La prescription en matière criminelle, plus encore qu'en matière civile, est d'ordre public.

«En matière civile, elle court contre toute personne, à moins qu'elles ne soient dans quelque exception établie par une loi (art. 2251 du code civil). Les prescriptions autres que les courtes prescriptions sont suspendues au profit de personnes qui sont dans l'impossibilité légale ou morale d'agir, comme les mineurs, les interdits et, dans des cas déterminés, les femmes mariées (art. 2252 à 2256 du code civil).

« Ces exceptions sont fondées sur l'ancienne maxime Contrà non valentem agere non currit præscriptio. On a beaucoup discuté sur le point de savoir si cette maxime est applicable en matière criminelle, et M. Faustin Helie, dans une étude publiée par la Revue critique de législation et de jurisprudence (1858, p. 505), en conteste absolument l'autorité en cette matière.

«Il rappelle qu'il en était ainsi dans l'ancien droit, et que si l'article 59 de l'édit de Nantes (avril 1598 a déclaré « que toutes prescriptions, «tant légales que coutumieres pendant les troubles «ou par empêchements légitimes provenus d'eux, «seraient estimées comme non faites ou advenues», un arrêt du Parlement de Paris du 26 juillet 1610 a décidé que cette disposition n'était applicable qu'aux matières civiles.

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1° Que la prescription est suspendue quand le tribunal de répression surseoit à statuer jusqu'au jugement d'une question préjudicielle renvoyée à une autre juridiction. Cass. fr., 20 janvier 1830, SIREY, 1830, I, 441; Cass. fr., 10 avril 1835, SIREY, 1835, I, 387; Cass. fr., 29 août 1846, D. P. 1816, IV, 525; Cass. fr., 7 mars 1851, D. P. 1851, 5, 407; Cass. fr., 24 août 1882, SIREY, 1884, I, 352. (Nous ajoutons qu'en Belgique la loi est formelle sur ce point.)

2o Qu'un décret du 14 octobre 1814 ayant défendu de rendre à l'avenir aucun jugement par contumace, pour délit de désertion, l'exercice de l'action publique ne pouvait commencer à l'égard de ce délit qu'au moment où le déserteur se représentait ou était arrêté, et que, dès lors, jusqu'à ce moment, la prescription ne courait pas à son profit. - Cass. fr., 7 février 1840, SIREY, 1840, I, 186. (Nous ajoutons que ce principe est admis en Belgique. - Voy. l'article 28 du titre préliminaire du code de procédure pénale.)

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3° Que le pourvoi en cassation est non seulement interruptif, mais encore suspensif de la prescription, pendant toute la durée de l'instance en cassation.

« Cet effet suspensif attaché au pourvoi est digne de remarque. De nombreux arrêts l'ont consacré. (Voyez les arrêts cités dans la note de la Pasicrisie; nous ajoutons que le principe est admis en Belgique.)

« Il n'admet pas d'exception à la règle posée dans les articles 637 et 638 du code d'instruction criminelle, où il n'est question que d'interruption de la prescription par des actes de poursuites ou d'instruction et il s'efforce, par d'ingénieuses expli- «Par application du principe si souvent procations, à faire rentrer dans cette règle les solu-clamé que la prescription en matière correctiontions de la jurisprudence qui paraissent s'en écarter.

« La même doctrine se retrouve dans la théorie du code pénal de CHAUVEAU et FAUSTIN HÉLIE (t. Ier, no 367, 6 édit., 1887). Cependant, dans son Traité de l'instruction criminelle M. FAUSTIN HELIE s'était montré moins absolu.

«S'il refusait de reconnaître comme causes interruptives, ou plutôt suspensives de la prescription les empêchements de fait comme ceux résultant de la démence de l'accusé, de guerres et de troubles dans l'Etat, etc., il admettait les causes provenant d'un empêchement de droit qui suspend l'action publique, et il citait comme exemples:

nelle est suspendue « toutes les fois qu'un obstacle de droit met la partie poursuivante dans l'impossibilité d'agir, la cour de cassation a décidé que la prescription est notamment suspendue pendant le temps, quelle qu'en soit la durée, que le juge consacre au délibéré. Cass. fr., 4 décembre 1885, D. P. 1886, I, 343.

«En matière de presse, disait, lors de cet arrêt, M. le conseiller rapporteur Falconnet, vous avez jugé que lorsqu'un pourvoi est formé contre un arrêt qui a statué en matière correctionnelle sur une question de prescription, la prescription de l'action publique est suspendue pendant la durée de l'instance en cassation. Le motif de cette solution nous semble tiré de l'impossibilité d'agir pendant que le pourvoi est en suspens devant la cour de cassation.

« 1o Le jugement d'une question préjudicielle; 2o La demande en autorisation de poursuivre les agents du gouvernement (art. 75 de la Constitution du 22 frimaire an VIII. Encore, dans ce dernier <«< Et il terminait ainsi : « La cour appréciera si cas, se posait il la question de savoir si cette « ce n'est pas le cas de reconnaître la force de demande, précédée, aux termes du décret du « l'adage : Contrà non valentem agere non currit 9 août 1866, art. 3, d'un procès-verbal d'informa- « præscriptio et de casser l'arrêt qui lui est tion, ne devait pas être assimilée à un acte de « déféré ».

L'adage n'a pas passé dans l'arrêt, du moins | pourrait priver les citoyens des droits qui leur sont dans sa forme même et dans sa généralité, mais il conférés par la loi. » y est traduit et précisé en ces termes : La prescription est nécessairement suspendue toutes les fois qu'un obstacle de droit met la partie poursuivante dans l'impossibilité d'agir.

« Il n'est pas téméraire de penser que la jurisprudence de la cour de cassation de France, qui s'est tant de fois affirmée et ne fait que consacrer un principe de sens commun, est aujourd'hui définitivement fixée sur ce point.

«On retrouve une application intéressante du même principe dans la loi du 26 mai 1819 sur les poursuites de crimes et délits commis par la voie de la presse. Aux termes de l'article 2 de cette loi, dans le cas d'offenses envers les Chambres ou l'une d'elles, par voie de publication, la poursuite ne pourrait avoir lieu qu'autant que la Chambre, qui se croirait offensée, l'aurait autorisée; et par voie de conséquence, l'article 29 décidait que, dans ce cas, le délai de la prescription ne courrait pas dans l'intervalle des sessions. Il y a lieu de rappeler que la loi précitée avait fixé, en principe, à six mois seulement la durée de la prescription de l'action publique.

«La cour n'a pas eu le cas d'en faire l'application à la question spéciale qui fait l'objet de ce rapport. Mais n'est-il pas évident que cette appli-ici cation ne saurait faire l'ombre d'un doute? Le citoyen qui se prétend victime d'un délit commis envers lui par un membre du Parlement, n'est-il pas mis, par la loi elle-même, dans l'impossibilité d'agir avant la fin de la session, si l'autorisation exigée par l'article 14 de la loi constitutionnelle du 16 juillet 1875 lui est refusée, et, dès lors, la prescription n'est-elle pas nécessairement suspendue? C'est-ce qu'a formellement décidé un arrêt de la cour d'assises de la Seine du 30 octobre 1882. Cet arrêt a été frappé de pourvoi; mais, par suite d'un désistement, la cour n'a pas eu à statuer.

« Une disposition de cette nature eût été encore plus justifiée sous l'empire de la loi actuelle sur la presse, qui réduit à trois mois la prescription de l'action publique et de l'action civile, si le délit d'outrage envers les Chambres, qui figurait dans le projet dont M. Lisbonne fut le rapporteur, avait été définitivement maintenu.

« L'article 68 de ce projet portait, en effet, expressément que, pour ce délit spécial, le délai ne courrait pas dans l'intervalle des sessions. « Déjà sous l'empire de l'article 75 de la Consti- Voy. rapport de M. Lisbonne du 29 janvier 1881. tution du 22 frimaire an vii (abrogé par le décret «Le principe de la suspension de la prescripdu 19 septembre 1870), lequel subordonnait toute tion par l'empêchement légal d'agir étant ainsi poursuite contre les agents du gouvernement, justifié, il reste à en préciser les conditions d'appour des faits relatifs à leurs fonctions, à une auto-plication au cas de l'immunité parlementaire. risation du conseil d'Etat. et, dans certains cas, « Ce qu'il importe avant tout de remarquer, de l'administration enregistrement, douanes, eaux c'est que l'immunité parlementaire ne crée pas un et forêts, monnaies) dont relevaient les agents, la obstacle absolu à la poursuite, même pendant la doctrine et la jurisprudence avaient fait l'applica-durée de la session. Cet obstacle peut être levé sur tion à ce cas particulier, qui présente avec celui la demande du ministère public ou du plaignant. qui nous occupe la plus grande analogie, du prin- «Quand le ministère public et le plaignant cipe, « que les prescriptions et les déchéances ne seront ils en face d'un empêchement absolu et défipeuvent courir contre ceux qui ne peuvent agir, nitif d'agir pendant la durée de la session? Le jour et que les empêchements de droit sont toujours seulement où l'autorisation ayant été demandée, une exception suffisante pour le défaut d'action leur aura été refusée. Mais comine, d'une part, en dans le délai déterminé par la loi qui règle l'ac-la sollicitant, ils ont fait tout ce qu'ils pouvaient tion ». Ce sont les termes mêmes de l'arrêt de la cour de cassation du 13 avril 1810, SIREY à sa date.

la

faire, et que, d'autre part, il ne dépend pas d'eux qu'il soit statué plus ou moins promptement par Chambre (argument d'analogie tiré de l'arrêt precité de la cour de cassation française du 4 décembre 1885), on doit admettre que la prescription est suspendue depuis la demande d'autorisation ellemême jusqu'au jour où elle a été accueillie et jusqu'à la fin de la session si elle a été repoussée.

<«< Dans le même sens, Cass. fr., 28 août 1823, DALLOZ, Répert., v° Procédure criminelle, no 157; Metz, 1er mars 1866, D. P., 1866, II, 54. «M. LE GRAVEREND (t. Ier, p. 88) fait remarquer que dans l'espèce de l'arrêt précité du 13 avril 1810, il s'agissait de faits prescriptibles pour trois «Que si l'autorisation de poursuivre n'a pas été mois, et que la décision devrait être différente si le demandée, le motif juridique et essentiel de la susdélai de la prescription était le délai ordinaire. pension de la prescription manque, car rien ne Mais le principe posé par la cour de cassation est prouve qu'elle n'eût pas été accordée, et l'obstacle général et ne comporte pas cette distinction qui à la poursuite levé. C'est bien ainsi que paraît qui n'a pas prévalu. Ce qu'il faut retenir, toutefois, l'avoir entendu M. Gaston Bazille quand il a dit : de l'observation de M. Le Graverend, c'est que,« La prescription devant être acquise avant la fin lorsqu'il s'agit de courtes prescriptions, le principe « de la session, je suis dans la nécessité de demans'impose avec plus de force et d'évidence. Il arri- der l'autorisation de poursuivre. » verait, en effet, qu'à l'occasion de délits commis au commencement d'une session, l'action publique et l'action civile n'auraient même pas une heure pour s'exercer et se trouveraient, comme le fait remarquer l'arrêt précité de la cour d'assises de la Seine, subordonnées aux décisions du pouvoir parlementaire qui, se substituant au pouvoir judiciaire, et statuant hors des limites de sa compétence,

« Sous le bénéfice des considérations qui précèdent, votre commission a l'honneur de vous proposer de ne pas accorder l'autorisation demandée. »

La cour d'appel de Liége, par arrêt de la chambre des mises en accusation, a, dans l'affaire relative à des poursuites exercées contre M. Smeets, en 1902, consacré le principe admis par la cour d'assises de la Seine du 30 octobre 1882.

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