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ma chère bonne amie, que l'une de mes plus grandes satisfactions sera de vous revoir.

BUFFON.

Je reçois dans l'instant une lettre du cher oncle Gueneau, par laquelle il me marque qu'il attend avec impatience cette caisse qui doit vous arriver mardi. Ainsi, bonne amie, ne tardez pas à la lui faire passer. Vous pourrez l'envoyer prendre à la voiture par Junot1, qui en sera averti.

(Inédite. De la collection de M. Henri Nadault de Buffon.)

CXLVIII

A LA MÊME.

Mardi, 25 janvier 1774.

Avec l'esprit d'un ange, il y a, bonne amie, deux petites choses que vous n'avez pas saisies: ma santé comme prétexte, et la petite boîte comme réconciliation avec le métal proscrit. Se peut-il que ma santé soit bonne, si je ne respire pas l'air qui vous environne, et de temps en temps celui qui vous anime? Se peut-il que je sois content de vos commissions, si elles vous gênent au lieu de vous plaire? Je tiens auprès de moi une jolie petite canne que je vous porterai avec le portefeuille et l'assortiment de cordes; mais, au nom de Dieu, chère belle amie, comptez donc de moins près avec moi et avec vous; car je serai toujours bien en reste. Comptez aussi le temps en rabattant; je serai auprès de vous, si vous le permettez, le lundi 7 du mois prochain. Le carnaval ne sera donc pas si long; je le trouverai bien court, et même le carême et ma vie tout entière, si je la passais près de mon aimable amie. Rien ne m'attache ici que mon enfant, auquel je remettrai votre lettre demain. Vous êtes bien bonne de lui avoir écrit. Votre joli directeur aurait bien dû me prévenir; la chapelle est donnée depuis quelques jours seulement à un

protégé de M. l'évêque de Langres 1, qui m'a sur-le-champ demandé mon agrément, et j'y ai consenti: je ne puis donc revenir sur cela; mais j'en prendrai occasion de lui parler de M. Bienaimé pour quelque chose de mieux. Comptez aussi que je parlerai de mon mieux pour la réhabilitation. Adieu, écrivez-moi; vous lire est mon plaisir suprême, lorsque je ne vous vois pas.

BUFFON.

(Inédite. De la collection de M. Henri Nadault de Buffon.)

CXLIX

AU PRÉSIDENT DE RUFFEY.

Paris, le 26 janvier 1774.

Les marques de votre amitié, mon très-cher Président, me seront en tout temps également précieuses et chères. Vous m'en avez comblé dans mon dernier séjour à Dijon, aussi bien que Mme de Ruffey, à laquelle j'ai voué depuis longtemps le plus sincère et le plus tendre respect. J'ai aussi été enchanté du caractère, des vertus et de l'honnêteté de M. votre fils. Vous êtes digne d'être heureux, mon cher ami, et vous l'êtes comme père et comme mari. Ce sont là les deux pivots sur lesquels roule le bonheur d'un honnête homme. Les petits dégoûts extérieurs que peuvent lui donner ses envieux, les tracasseries académiques, ne doivent pas l'effleurer, et je vous ai vu avec plaisir fort supérieur à ces misères. Personne n'ignore le bien et le très-grand bien que vous avez fait à votre patrie en soutenant l'Académie prête à tomber. Tout le monde connaît vos vertus, et vos amis encore plus que les autres savent que vous n'avez jamais eu que des intentions pour le bien. Ainsi vous ne devez pas vous soucier de la contradiction de quelques esprits de travers, qui dans le fond ne peuvent s'empêcher de vous estimer.

Je retourne à Montbard dans dix ou douze jours, et je

pourrai bien faire un voyage à Dijon au mois de mars ou d'avril. Je puis vous protester qu'une de mes plus grandes satisfactions sera de vous y voir et de vous y renouveler les témoignages de la tendre amitié et du respectueux attachement avec lesquels je serai toute ma vie, mon très-cher Président, votre très-humble et très-obéissant serviteur.

BUFFON.

(Inédite. De la collection de M. le comte de Vesvrotte.)

CL

A M. LECLERC D'ACCOLAY.

Au Jardin du Roi, le 27 janvier 1774.

Nous sommes si loin l'un de l'autre, monsieur, que je n'ose pas vous proposer de venir au Jardin du Roi et que je ne voudrais pas aller au faubourg Saint-Honoré sans être sûr de vous y trouver. Je serais cependant enchanté de vous voir et de conférer avec vous, monsieur, d'une affaire de famille dont vous vous êtes entretenu avec M. le comte de La Rivière1. Je ne sais que d'aujourd'hui que vous êtes à Paris; sans cela j'aurais eu l'honneur de vous prévenir plus tôt, et, comme je n'ai plus que huit jours à rester ici, je vous serai obligé de me marquer le jour et l'heure où je pourrai vous trouver chez vous, et vous assurer des sentiments d'estime avec lesquels j'ai l'honneur d'être, monsieur, votre très-humble et trèsobéissant serviteur.

Le comte de BUFFON.

(Cette lettre a été publiée en 1854 dans l'Annuaire de l'Yonne. L'original appartient à M. Leclerc, juge de paix à Auxerre, homme aussi éclairé qu'obligeant.)

Madame,

CLI

A MADAME NECKER1.

Montbard, le 22 mars 1774.

J'ai reçu, au retour d'un petit voyage, la lettre pleine de bonté dont vous m'avez honoré. Elle augmente encore mes regrets; mais il me fut impossible de trouver un moment pour aller vous dire adieu, ainsi qu'à M. Necker. Je vous supplie de compter tous deux sur les sentiments profonds de l'estime et du respect que vous m'avez inspirés. Je vous proteste, madame, que je m'estimerais moi-même davantage, si je pouvais penser en tout aussi bien que vous et lui; mais la première de toutes les religions est de garder chacun la sienne', et le plus grand de tous les bonheurs est de la croire la meilleure. Je n'en ai pas moins eu un plaisir délicieux dans ces conversations où nous n'étions pas tout à fait d'accord, et vous reconnaîtrez, madame, par mon empressement à chercher les occasions de vous faire ma cour, la sincérité des sentiments que je vous ai voués.

J'ai reçu des nouvelles de votre charmante amie, Mme de Marchais, et je compte lui écrire au premier jour. Je vous supplie de baiser pour moi votre aimable enfant, à laquelle vous m'avez permis de présenter mon fils. J'espère être de retour vers le 20 de mai, et jouir souvent du plaisir de vous voir et de vous donner des marques du très-respectueux attachement avec lequel j'ai l'honneur d'être,

Madame,

Votre très-humble et très-obéissant serviteur.

BUFFON.

(Inédite.)

CLII

A M. NECKER.

Montbard, le 3 septembre 1774.

Je serais moi-même inconsolable, monsieur, si vous aviez quelque regret à vos soins ou le moindre doute sur ma reconnaissance 1. Je suis bien sûr que vous avez fait tout ce qui était en vous, monsieur, et mille fois plus que je n'ai jamais pu mériter auprès de vous. Indépendamment de ces obligations très-réelles et très-senties que je n'oublierai jamais, je sens avec plaisir tout ce que vous m'avez inspiré d'estime et d'amitié; et Mme Necker, la plus digne et la plus spirituelle des femmes, que j'aime de tout mon cœur et que je respecte de même, me permettra-t-elle comme vous de compter sur son amitié? J'ai l'honneur de lui envoyer cijoint un petit morceau fugitif, que j'aurais dû laisser fuir en en effet, parce qu'il a peu de valeur 2; mais je suis accoutumé à son indulgence, et je voudrais pouvoir faire graver à jamais la lettre et le jugement qu'elle a portés de mon écrit sur le premier chapitre de la Genèse. C'est réellement un chef-d'œuvre de bon sens, et où le discernement le plus exquis se trouve joint à la politesse la plus noble et à l'honnêteté la plus pure. Je fais passer mes remercîments par vous, monsieur, et je vous assure tous deux de la plus sincère et de la plus respectueuse amitié.

(Inédite.)

BUFFON.

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