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crira, et que vous continuerez à me donner de temps en temps de vos chères nouvelles, qui font une grande partie du bonheur de ma vie.

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Quinze ou vingt lieues dont vous vous êtes rapprochée en revenant à Montbard, chère bonne amie, me font déjà un si grand effet de plaisir, que je ne puis mesurer celui que je ressentirais si vous vous déterminiez à faire cinquante lieues de plus. Je vous ai adressé, en attendant, une petite boîte qui vous arrivera mardi 4 par le carrosse, dans laquelle vous trouverez du rouge et la boîte pour le mettre, avec quelques petits pots de pommade de Rome. Ame candide, personne nette et fraîche n'a pas besoin de parfums; mais le petit nez si fin les aime, et j'espère qu'il les agréera. Vous y trouverez en outre un cabaret en porcelaine, dont le dessin sera, je pense, de votre goût'. J'y joins pour votre cœur l'hommage, le don de tout le mien, aujourd'hui fin, demain commencement de l'an, et pour toutes les fins, tous les commencements des jours et des ans, qui s'épuiseront plutôt que mes sentiments pour vous, la plus digne et la plus aimable des amies.

BUFFON.

(De la collection de M. Henri Nadault de Buffon. -Publié par M. Flourens.)

CXLVI

A LA MÊME.

Le 9 janvier 1774.

Ne soyez plus fâchée, ma bonne amie; la chose n'en vaut pas la peine. Mettez la petite boîte au fond du puits; je vous en enverrai, ou plutôt je vous en porterai une autre que vous n'aurez nulle raison de rebuter. Je suis très-décidé à vous tenir parole; j'ai déjà pressé plusieurs affaires en conséquence de mon projet, et je ferai tout effort pour partir avant le carême, et plus tôt s'il est possible. J'ai la meilleure excuse du monde, car ma santé ne laisse pas de me tracasser. Mon cœur est aussi mal à l'aise; tout me porte vers vous, et je suis vraiment affligé de voir que rien ne peut vous amener ici. Cependant, bien loin de vous blâmer, je vous approuve. Je tâcherai d'échauffer un peu M. le Docteur pour l'affaire de la réhabilitation1; mais, chère amie, vous le connaissez, il ne prend rien à cœur. N'aurait-il pas dû, après ce que vous lui avez écrit, vous témoigner de l'empressement de vous voir, et prendre sur son compte une partie de l'humeur qu'on au1 rait eue ??

Trécourt m'a dit très-nettement que, quand même je ne voudrais pas le garder, il ne voulait plus rester avec M. votre mari, et qu'il était décidé depuis plus d'un an à aller à Sens, où on lui fait un parti avantageux. Et cela est très-vrai: car, comme il s'ennuyait ici dans les commencements de mon séjour, il me demanda son congé et voulait aussi me quitter pour s'en aller non pas à Montbard, mais à Sens. Ainsi, ma chère amie, vous voyez qu'il ne compte point du tout se remettre au service de M. Daubenton, et je ne sais pas trop moimême si je pourrai le conserver au mien.

Mandez-moi donc quelles sont vos commissions, je veux les faire. J'ai bien songé aux cordes de clavecin; mais les

marchands demandent du détail et des explications que je n'ai pas et que je vous prie de m'envoyer.

J'ai souvent le plaisir de parler de vous avec Mme et M. Amelot. Elle m'a dit que vous lui aviez écrit et que vous étiez fort aimable. Vous vous imaginez bien que j'ai fait tout ce que j'ai pu pour la dédire.

J'écrirai dans peu à votre cher beau-père. J'attends dẹ votre mari la décision de l'argent de l'hôpital. Pour peu que cela fasse difficulté, il n'a qu'à rembourser, et je compterai ici pour lui la même somme au 13 ou 14 février prochain.

Adieu, bonne et très-chère belle amie; je fais mille et mille vœux pour votre bonheur, et vous prie d'exaucer ceux que je me permets de faire pour le mien,

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BUFFON.

De la collection de M. Henri Nadault de Buffon.)

CXLVII

A LA MÊME.

Paris, le 14 janvier 1774.

Madame et chère amie, j'ai remis dans une petite caisse, qui doit arriver mardi à Montbard par le carrosse, une trèspetite boîte pour vous. Cette caisse est à l'adresse de M. Gueneau de Montbeillard. Vous pourrez la retirer et l'ouvrir pour en retirer cette petite boîte qui est à votre adresse, dans laquelle vous trouverez une autre petite boîte qui vous réconciliera avec le métal que vous n'aimez pas, car elle vous paraîtra d'or et cependant elle n'en est pas. Elle coûte 60 livres, et j'espère que vous et votre cher mari ne la trouverez pas trop chère. Ma santé est toujours au même état; c'est-àdire moins bonne qu'à Montbard, et je crois que je n'attendrai pas le carême pour y retourner. Vous devez être sûre,

ma chère bonne amie, que l'une de mes plus grandes satisfactions sera de vous revoir.

BUFFON.

Je reçois dans l'instant une lettre du cher oncle Gueneau, par laquelle il me marque qu'il attend avec impatience cette caisse qui doit vous arriver mardi. Ainsi, bonne amie, ne tardez pas à la lui faire passer. Vous pourrez l'envoyer prendre à la voiture par Junot1, qui en sera averti.

(Inédite. De la collection de M. Henri Nadault de Buffon.)

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CXLVIII

A LA MÊME.

Mardi, 25 janvier 1774.

Avec l'esprit d'un ange, il y a, bonne amie, deux petites choses que vous n'avez pas saisies: ma santé comme prétexte, et la petite boîte comme réconciliation avec le métal proscrit. Se peut-il que ma santé soit bonne, si je ne respire pas l'air qui vous environne, et de temps en temps celui qui vous anime? Se peut-il que je sois content de vos commissions, si elles vous gênent au lieu de vous plaire? Je tiens auprès de moi une jolie petite canne que je vous porterai avec le portefeuille et l'assortiment de cordes; mais, au nom de Dieu, chère belle amie, comptez donc de moins près avec moi et avec vous; car je serai toujours bien en reste. Comptez aussi le temps en rabattant; je serai auprès de vous, si vous le permettez, le lundi 7 du mois prochain. Le carnaval ne sera donc pas si long; je le trouverai bien court, et même le carême et ma vie tout entière, si je la passais près de mon aimable amie. Rien ne m'attache ici que mon enfant, auquel je remettrai votre lettre demain. Vous êtes bien bonne de lui avoir écrit. Votre joli directeur aurait bien dù me prévenir; la chapelle est donnée depuis quelques jours seulement à un

protégé de M. l'évêque de Langres1, qui m'a sur-le-champ demandé mon agrément, et j'y ai consenti: je ne puis donc revenir sur cela; mais j'en prendrai occasion de lui parler de M. Bienaimé pour quelque chose de mieux. Comptez aussi que je parlerai de mon mieux pour la réhabilitation. Adieu, écrivez-moi; vous lire est mon plaisir suprême, lorsque je ne vous vois pas.

BUFFON.

(Inédite. De la collection de M. Henri Nadault de Buffon.)

CXLIX

AU PRÉSIDENT DE RUFFEY.

Paris, le 26 janvier 1774.

Les marques de votre amitié, mon très-cher Président, me seront en tout temps également précieuses et chères. Vous m'en avez comblé dans mon dernier séjour à Dijon, aussi bien que Mme de Ruffey, à laquelle j'ai voué depuis longtemps le plus sincère et le plus tendre respect. J'ai aussi été enchanté du caractère, des vertus et de l'honnêteté de M. votre fils. Vous êtes digne d'être heureux, mon cher ami, et vous l'êtes comme père et comme mari. Ce sont là les deux pivots sur lesquels roule le bonheur d'un honnête homme. Les petits dégoûts extérieurs que peuvent lui donner ses envieux, les tracasseries académiques, ne doivent pas l'effleurer, et je vous ai vu avec plaisir fort supérieur à ces misères. Personne n'ignore le bien et le très-grand bien que vous avez fait à votre patrie en soutenant l'Académie prête à tomber. Tout le monde connaît vos vertus, et vos amis encore plus que les autres savent que vous n'avez jamais eu que des intentions pour le bien. Ainsi vous ne devez pas vous soucier de la contradiction de quelques esprits de travers, qui dans le fond ne peuvent s'empêcher de vous estimer.

Je retourne à Montbard dans dix ou douze jours, et je

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