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préopinant, & qu'il importe de relever, c'est qu'il a dit que les 95 millions qui restent sont sur le point d'être absorbés, il s'en faut beaucoup que cela soit ; & puis la contribution patriotique va fournir de grandes ressources. Le ministre avoit fait fonds sur le remplacement de la gabelle & des autres impôts supprimés sur la rentrée prochaine de la contribution patriotique; vous savez qu'il n'en est rien; mais j'ai un autre reproche à faire à l'assemblée : c'est le 29 mai que le ministre a apporté le budjet de l'année courante, & ce n'est que depuis trois semaines. qu'elle a ordonné à son comité de lui en rendre compte.

Quant aux demandes de fonds faites par le ministre, nous ne pouvons que les porter à l'assemblée, en examinant les apperçus qu'il nous donne au soutien, & dire : Cette demande nous paroît légitime, ce qui est porté en recette est vraisemblable, car ses états ne seront accompagnés de pieces probantes que lorsqu'il rendra ses comptes.

Le préopinant a parlé d'anticipations nouvelles. Tout ce que nous savons, c'est qu'on n'en renouvelle point depuis votre décret: s'il en est autrement, c'est à notre insçu ; & la responsabilité doit en faire justice. Mais il ne faut pas semer des inquiétudes par de simples allégations tenons le public au courant, rien de plus juste; mais ne l'alarmons pas inconsidéré

ment.

M. Fréteau a succédé à la tribune; il a dit Il avoit déjà été question dans l'assemblée de ces anticipations nouvelles dont vient de vous parler

:

M. Camus. Cette assertion avoit sans doute échappé à l'assemblée & au comité des finances. Quant aux anciennes, je me suis apperçu dans le compte que vient de fournir M. Necker, qu'au lieu d'une extinction de 70 millions, il n'y en. avoit eu qu'une de 26 réalisée. Et M. Camus a grande raison de demander que la France entiere en soit instruite : car quand M. le Couteulx vient vous dire que les étrangers anglois, allemands & autres admirent nos opérations, & y ont confiance; cela ne peut être qu'autant que nos travaux seront conséquens les uns des autres, & assez suivis pour justifier la confiance; or s'il n'y a que 26 millions de payés là où il doit y en avoir 70%, il y a certes une grande erreur. Si le défaut de perception des impôts en est la cause. pourquoi n'exécute-t-on pas les décrets rendus à ce sujet ? Pourquoi ne pas nous dire quels sont les départemens qui sont en retard? On nous dit vaguement qu'il y a des refus partiels : il faut nous dire en quels lieux; il faut que nous sachions enfin si nous sommes dans un abyme sans fond.

On nous dit encore qu'il est à propos de tâter la maniere dont la caisse de l'extraordinaire fera. le service, & de commencer à échanger seulement ceux des billets de caisse qui ne peuvent circuler que dans Paris. Mais ce fermier de province qui a reçu du boulanger des billets de caisse. en paiement de son bled, & qui a besoin d'argent pour faire les frais de sa moisson, comment, fera-t-il donc pour s'en procurer? Quel discrédit n'est-ce pas jeter sur les assignats ! Je demande, sur-tout qu'il n'y ait nulle distinction dans les

échanges. Je demande également qu'il soit versé au trésor, non 95, mais seulement 20 millions. On ne les demande pas, répond-on, pour le comité. En ce cas, qu'on ne donne rien, reprend M. Fréteau. Mais je demande que le premier ministre justifie l'acquit qu'il devoit faire des anticipations. M'objectera-t-on qu'on ne paie pas les impôts? Je réponds que les rôles ne sont pas encore envoyés par-tout; qu'ils ne sont pas encore faits pour la Champagne. Et qu'on ne me dise pas qu'on touchera tout en même tems: car comment payer les impôts arriérés, quand il faudra payer les impôts courans ? Il est évident que le contribuable aura dépensé en janvier la somme qu'il avoit à fournir en Juillet. Enfin, je demande que le tableau des départemens en retard soit représenté.

M. Anson a obtenu la parole ensuite. Il a répété les raisons alléguées, déjà par M. de Beaumets. S'il en a employé de nouvelles, il l'a fait avec une telle clarté que je n'ai pu les

saisir.

M. le Couteulx a relu son projet de décret : il insistoit pour qu'il fût décrété article par article.

M. Fréteau en a demandé l'ajournement. Prenez garde, Messieurs, qu'il ne s'agit pas moins ici que d'autoriser le ministre à toucher une somme de 95 millions. Nous ne pouvons disposer d'une paroille somme sans connoissance de canse. Sous prétexte d'un rapport très-court du comité des finances, c'est un objet de la plus haute importance qu'on soumet à l'assemblée dans ce moment. Je ne pouvois m'attendre qu'on

agiteroit une pareille question. Je déclare qu'il me manque des pieces qui me fourniront de justes réflexions sur le décret qu'on vous présente. J'insiste pour l'ajournement à mercredi & l'impression à l'avance du projet de décret.

Il ne s'agit point, a répondu M. le Couteulx, d'autoriser le ministre à toucher ces 95 millions. Vous pouvez dire & mettre dans le décret que les sommes ne seront versées dans les mains du ministre que successivement.

M. Roederer, en appuyant l'ajournement, a donné sa démission du comité des finances, & a demandé que l'assemblée nommât, même par acclamation, M. Fréteau. L'assemblée n'a point fait ce que demandoit l'opinant.

M. Charles de Lameth: Jamais on ne nous prévient, quand nous devons délibérer sur les finances. On ne peut cependant se dissimuler que cette façon de procéder dans une matiere qui intéresse aussi essentiellement les peuples, leur donne la plus grande inquiétude. Il faut convenir qu'on fait tout le contraire de ce qu'on devroit faire. Plus les finances sont obscures pour nous, moins on nous donne de lumieres; car la plupart de nous, grace aux nuages que les financiers ont jetté jusqu'à présent sur la comptabilité, nous sommes très-ignorans dans cette partie, & moins nous semblons prendre de précaution.

On vient nous donner des louanges; ce n'est pas des louanges qu'il nous faut, mais des vérités. J'ai toujours vu jusqu'à présent que quand il s'agit de faire délivrer des sommes au premier ministre, on nous attaque toujours au dépourvu, on semble nous prendre à la-gorge. Le ministre,

dit-on, a besoin de telle somme. On le décrete aussi-tôt de confiance. Les députés ne sont point venus pour se confier, mais pour examiner l'emploi que l'on fait des revenus publics, pour les diriger vers leur but unique, le bien général.

Je demande que désormais tout ce qui aura trait aux finances soit imprimé trois jours d'avance. J'insiste pour l'ajournement.

. M. Necker a fait parvenir à l'assemblée un mémoire. Il y est dit: Les affaires de finances ne reprendront leur niveau que quand l'ordre sera totalemeut rétabli.

En rappellant son tableau de dépenses & recettes pour les huit derniers mois de l'année, où il promet que la recette pourra s'élever à onze millions au-dessus de la dépense, le ministre compte un vuide de plus de 6 millions sur les impositions, une diminution sensible & graduelle sur le produit des aides & de la régie générale. Les 25 millions qu'il avoit portés en compte pour le remplacement de l'impôt de la gabelle sont nuls jusqu'à ce moment. La répartition n'est pas encore faite.

Les contributions patriotiques souffrent des lenteurs & des contrariétés. Les économies à faire sur les départemens ne peuvent encore s'effectuer. L'augmentation de solde fait pour chaque mois un surcroit de 600 mille 1. de dépenses dans celui de la guerre.

Les paiemens des pensions que l'assemblée a ordonnés nécessiteront dans cette partie 7 millions d'extraordinaire. Les 30 mille 1. accordées à chaque département pour la mendicité font encore une dépense de 2 milions & plus.

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