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depuis qu'on l'a adopté comme base de la réforme pénitentiaire.

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Je ne conteste ni la vérite des faits qu'on me cite, ni la rectitude des calculs de statistique qu'on établit. Mais il me sera permis de soutenir qu'ils ne prouvent rien contre l'opinion que je défends.

D'abord, il n'est pas vrai que le nombre des récidives soit la conséquence nécessaire de tel ou tel système d'emprisonnement. Car, avons-nous dit, pour les 80 centièmes des libérés, le principe de la récidive n'est pas dans les vices moralement délétères du régime intérieur de la prison, mais dans le mode d'existence que la liberté doit leur rendre au jour de leur élargis

sement.

Ainsi à Genève, le nombre des récidives est peu considérable; pourquoi? c'est qu'à Genève des influences de mœurs publiques allégent pour les détenus libérés, le poids d'infamie qui résulte de la condamnation qu'ils ont encourue.

En Prusse, où le système pénitentiaire Américain est encore loin d'être adopté dans tous ses modes, les récidives n'ont rien d'alarmant: pourquoi? c'est que là, ainsi que nous l'avons vu, «dès qu'un con>> damné quitte l'une des prisons de la Prusse-Rhé» nane, il entre en correspondance immédiate avec » l'un des comités auxiliaires de la société Rhéno» Wetsphalienne des prisons, et que, dès ce moment, >> il est soumis à une surveillance particulière de la >> part du comité qui d'un autre côté lui procure,

■ Voyez introduction au code de Réforme et de Discipline des prisons dans Ch. Lucas, vol. 1.

>> soit par des secours pécuniaires, soit par des recom>> mandations auprès des autorités, tout l'appui dont » il a besoin pour commencer une vie honnête et >> régulière. »>

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A Malte, dit la Contemporaine, « un homme qui a >> passé par un supplice rentre dans tous les droits de » son innocence primitive: la punition subie est » comme un baptême qui lave jusqu'à la moindre » trace du délit. »

S'il en est ainsi, les récidives doivent être rares à Malte.

Aux États-Unis, où l'on attribue avec tant de certitude au système cellulaire, la diminution des récidives, on oublie qu'il est presque impossible de les constater d'une manière exacte, par la facilité laissée aux libérés de changer de nom et de pays sans que l'obligation des passeports et les entraves de la surveillance légale viennent, à chaque pas, les arrêter sur la voie du repentir et d'un sincère amendement. Mais en France, le condamné libéré est livré sans miséricorde et sans secours à l'indignation publique qui, loin de s'appaiser, s'accroit d'heure en heure contre le malheureux, signalé qu'il lui est de tous côtés par tous les agens de toutes les polices imaginables.

Et combien de circonstances imprévues ne viennent-elles pas ajouter aux chances malheureuses qui le précipitent de nouveau dans le crime! Les révolutions politiques, la cherté des vivres, les rigueurs

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État des Prisons en Allemagne, par H. Lagarmitte. Julius vol. 2, p. 441.

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inaccoutumées d'un long hiver, la dépréciation du commerce, que sais-je, mille autres motifs encore sont autant de puissances qu'il ne saurait vaincre dans la sphère d'humiliations et d'infamie où vous l'avez replacé à l'expiration de son ban: il faut donc qu'il

rechute.

Et puis faites des statistiques à l'appui de vos systèmes !

La diminution dans le nombre des récidives est, sans contredit, le but où doit arriver le meilleur système pénitentiaire mais le faire dépendre positivement des distributions intérieures de vos maisons de détention, n'est rien moins qu'un songe fantastique que ne justifie, jusqu'à présent, aucun résultat décisif; dont aucune considération physiologique ne peut logiquement expliquer le pourquoi; et qui, malgré tout l'éclat de ses brillantes éventualités, ne saurait jamais éblouir ni convaincre ceux qu'une longue habitude de la vie des prisons laisse encore dans le doute pénible de savoir, si la régénération morale des condamnés n'est pas une entreprise au-dessus des forces et de la vertu de leurs plus charitables protecteurs !

Dans tous les cas, et quelle que soit l'influence des dispositions ou de l'alignement architectural de vos charpentes et de vos murs bardés de fer et flanqués de tourniquets à clochettes; il est un point qui dans votre système comme dans le mien, ne doit pas exercer moins d'empire sur l'amendement de vos condamnés C'EST L'INSTRUCTION. Question difficile à résoudre, et vers la solution de laquelle nous sommes également bien éloignés de tenter d'arriver par les mêmes moyens. Voyons.

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QUATRIÈME DIVISION

DE L'INSTRUCTION RELIGIEUSE, MORALE ET INDUSTRIELLE.

A mesure que la civilisation se développe, elle enfante en s'avançant de nouvelles doctrines; il est d'un sot ou d'un fou de les admettre ou de les rejeter par enthousiasme ou par esprit d'opposition; c'est au temps seul et à l'expérience qu'il appartient d'en constater les erreurs ou la vérité ; mais dans le doute, il est sage d'en exposer loyalement les principes, sauf à n'en tirer que telles conséquences dont l'application nous semble pouvoir se rattacher par quelques points saillants aux diverses institutions qui font le plus particulièrement l'objet de nos études et de nos travaux.

Je veux parler de la phrénologie; non pas en médecin; non pas même en physiologiste, je n'ai malheureusement aucune des connaissances nécessaires pour cela; mais à la manière de ces bonnes gens qui simplement pourvus de la faculté d'entendre et de comparer, jouissent, sans amour-propre et de bonne foi, des découvertes que quelques hommes de savoir et de génie ont bien voulu prendre la peine de leur révéler. Que d'habiles jardiniers au monde savent à quel orient ils doivent planter leurs fleurs et disposer leurs arbrisseaux, sans rien comprendre à la décomposition des rayons du soleil !

Moi aussi, sans rien comprendre à la puissance motrice des organes complexes et multipliés du cerveau, je me suis ressouvenu, depuis qu'on m'en a parlé, d'une foule de faits qui me semblent présenter de fortes présomptions en faveur de plusieurs axiomes fondamentaux de la doctrine de Gall: et plus observateur aujourd'hui qu'autrefois, parce qu'on m'a donné quelques nouvelles idées, je suis forcé d'avouer que chaque jour depuis lors, je me sens entraîner malgré moi, à l'application de ce qui me semble cependant n'être encore qu'une audacieuse et séduisante théorie. On a dit par exemple :

>>

«La méthode suivie par Gall pour connaître les >> rapports des facultés mentales et de l'organisation, » était la seule possible dans l'enfance de l'art, ou plutôt lorsque l'art n'existait pas encore; mais elle » avait l'inconvénient de signaler la manifestation » énergique, l'abus d'une faculté, comme la faculté » elle-même, et de maintenir l'idée qu'il y a dans » l'homme des facultés mauvaises. Or, toutes sont >> nécessaires à l'homme ou à l'espèce; le mal dépend » du défaut d'harmonie entre les sentimens et l'intel»ligence, de la direction funeste donnée à des pen» chans exclusifs, et des circonstances malheureuses, » qui pÉSENT D'UN SI GRAND POIDS DANS LA BALANCE DE » NOS DESTINÉES. »

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Il y a dans ce peu de mots que je viens de souligner, le corollaire net et précis de tout ce que l'observation et l'étude m'ont appris, depuis plus de 26 ans, sur

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Foissac, D. M. Introduction au Journal de la Société Phrénologique de Paris, tom. 1, p. 38.

TOME III.

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