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avec nous, à l'égard des autres Alliez ; il nous eft bien difficile de conjecturer & de * comprendre, comment un ordre fi préju diciable à toute la caufe commune, donné fi fubitement à nôtre infçu, & fans doute auffi à l'infçu des autres Alliez, peut convenir & fubfifter avec la nature de la Societé, & avec ces affûrances, & avec ces engagemens dont nous venons de parler: Car quoi-que, fuivant la Déclaration de l'Evêque de Bristol, V. M. fe tienne pour degagée de toute Obligation à nôtre égard, il eft evident qu'il ne s'agit point ici de nôtre interêt ou avantage particulier, mais de celui de tous les Alliez, qui fouffriront par le préjudice que cet ordre, fi peu attendu, portera à toute la caufe

commune.

Mais, MADAME,. Nous ne pouvons pas nous difpenfer de dire à V. M. que la Déclaration faite par l'Evêque de Bristol à Utrecht, ne nous a pas moins furpris, que celle du Duc d'Ormond à Armée. Elle nous paroit fi Extraordinaire, que nous ne favons pas comment la concilier avec cette grande bonté & bienveillance dont V. M. Nous a toûjours honorez, ne pouvant concevoir comment elles peuvent avoir changé.

i fubitement à nôtre égard. Nous n'en sommes pas feulement furpris, mais nous en fommes affligez. Nous avons examiné avec foin nôtre conduite, & nous n'y trou◄ vons rien qui puiffe avoir donné lieu au mécontentement que Vôtre Majefté nous a fait paroitre par cette Déclaration.

Du premier jour que V. M. eft montée fur le Thrône, Nous avons eu pour Elle toute la déference qu'Elle pouvoit défirer d'un Etat Ami & Allié: Nous avons recherché avec foin fon amitié & affection; & confiderant les bons effets que pouvoient produire, & qu'ont produit réellement la bonne intelligence, harmonie & Union entre V. M. & Nous, & entre les deux Nations, & l'avantage qui en réfultoit pour l'une & l'autre, auffi bien que pour la cause commune de tous les Alliez, nous avons pris à tâche & à cœur de les cultiver, & de gagner de plus en plus la.confiance de V. M. & de nous conformer à les fentimens, autant qu'il nous a été poffible.

Nous croyons en avoir donné une preuve éclatante, particulierement à l'égard de la Négotiation de la Paix; puisque non feulement, après que nous fûmes informez des pourparlers, qui fe font tenus ci-devant

en Angleterre fur ce fujet, Nous avons attendu que V. M. nous en donneroit connoiffance & ouverture, ayant cette ferme confiance en fon amitié pour nôtre Répu blique, & en fon zéle pour le bien de la caufe commune, que rien ne feroit fait qui put porter préjudice à nous, ni aux autres Alliez; mais auffi quand V. M. nous a fait communiquer les points Preliminaires, fignez par Mr. de Menager en Angleterre ; & quand Elle nous a fait proposer la convocation & la tenue d'un Congrès pour la Paix générale, & nous a requis de donner à cet effet les Pafleports néceffaires aux Miniftres de l'Ennemi, nous y avons confenti, quoi que nous euffions plufieurs raifons, à nôtre avis très-bien fondées, de n'entrer point dans une telle Négotiation fans plus de fondement, du moins fans la concurrence des autres Alliez; mais nous avons poft*polé nos fentimens à ceux de V. M. pour lui donner une nouvelle preuve de nôtre déference à fon égard.

Nous n'avons pas moins fait, par raport aux difficultez qu'on a fait naître au fujet du Traité de Garantie mutuelle de la Suc effion dans la Ligne Proteftante aux Royaumes de Vôtre Majefté, & de Nôtre

Bar

Barriere: Traité fi important pour les deux Nations, que nous le confiderons comme le lien le plus fort qu'on pourroit trouver, pour unir à jamais les cœurs & les interêts des deux Nations; conclu après la plus meure déliberation, & ratifié de part & d'autre dans la forme la plus authentique. Car quoi que nous euffions pû nous tenir fimplement à ce Traité, cependant nous fommes entrez en Négociation fur ces difficultez, & particulierement fur le point l'Affiento; furquoi nous avons tellement iftruit Nos Plénipotentiaires, que nous ne doutions plus que toutes les difficultez feroient applanies, au contentement réci proque, & que par là nous aurions regagné entierement la confiance de V. M.; d'autant plus, qu'en premier lieu, lorsqu'il s'agiffoit de l'Affemblée d'un Congrès pour la Paix générale, V. M. nous a fait décla rer par fon Ambaffadeur, qu'Elle ne defiroit que nôtre concurrence en ce feul point, & cette unique marque de nôtre confiance, qu'après cela elle nous donneroit des preuves fortes & réelles de fon affection envers nous, & de fes droites intentions à l'égard de la caufe commune de tous les Alliez : & qu'enfuite, quand on a fait intervenir les A 7.

dif

difficultez fur le Traité de Succeffion & de Barriere, V. M. Nous a fait affurer de même, que fi nous nous relâchions fur les points les plus effentiels, & particulierement fur l'affaire de l'Affiento, ce feroit le vrai moyen de rétablir la confiance mutuelle & néceffaire, laquelle étant rétablie, V. M. prendroit particulierement à cœur les interêts de l'Etat, & iroit de concert avec nous dans toute la Négotiation, pour parvenir à une Paix honorable, bonne & fûre.

Mais nous nous trouvons bien éloignez de nôtre attente, puisque dans le temps même que nous nous fommes les plus approchez de V. M., & que nous croyons que nous tomberions d'accord fur les points qui étoient en differend, nous voyons partir le Comte de Straffort fans avoir fini l'affaire, nous voyons arrêter l'Armée dans le commencement de fa carriere, & nous entendons une Déclaration, par laquelle V. M. fe tient dégagée de toutes fes Obligations à nôtre égard, dont on allegue pour raifon, que nous aurions mal répondu.aux avances qu'Elle nous a faites, & que nous ne voulions point concerter avec fes Minifres fur la Paix.

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