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toyens et sans les convier au concours de l'intelligence et du travail que, chaque année, la Société s'empresse d'ouvrir. Il est bien loin de nous ce temps où l'esprit des découvertes était étouffé dès sa naissance par l'indifférence et souvent le mépris; où tout homme de progrès mourait de désespoir à côté d'une machine inachevée, et emportait avec lui dans la tombe le sccret qui, peut-être, l'aurait immortalisé. Aujourd'hui, le mot impossible, rayé déjà du vocabulaire par l'énergique expression d'un grand homme, a perdu également sa signification dans l'atelier du mécanicien, et l'épithète d'incompris a été laissée à certains poëtes pour cacher leur nullité. Aujourd'hui, l'industrie porte la tête haute, son attitude est fière, sa démarche assurée; chacun la respecte, car elle porte avec elle la richesse des nations et la paix du monde.

Mais, cet élan immense, qui l'a donné? Qui l'a excité ? N'est-il pas juste d'en attribuer une part d'honneur à la sollicitude vivifiante des sociétés savantes, luttant entre elles à qui décernera le plus de récompenses, à qui aura, pour le talent modeste, plus de paroles d'encouragement? Oui, Messieurs, l'émulation des unes a suscité l'émulation des autres, et tel qui, par une découverte célèbre, a acquis une réputation méritée, n'aurait peut-être pas entrepris son travail, s'il n'avait pas été sûr d'avance de trouver à point nommé, à jour dit, des hommes éclairés, pour rendre hommage à son intelligence et préconiser son

invention.

Maintenant, toutes les améliorations sont-elles obtenues? Ne se rencontrera-t-il plus de ces ouvriers ayant besoin de venir puiser une nouvelle vie au foyer bienfaisant des sociétés industrielles? Une machine, pour être inventée, pourra-t-elle se passer de la consécration des associations savantes, dont le seul mobile est de mettre à la disposition de l'inventeur les mille voix de la renommée? Nous ne le pensons pas. Peut-être même, parmi nos auditeurs, se trouve-til des hommes qui se sont laissé rebuter par un premier échec, et qui, encouragés par nos paroles sympathiques, reprendront avec une nouvelle ardeur des travaux depuis longtemps abandonnés. A ces hommes, comme à tous ceux qui viendront à nous, nous promettons un examen consciencieux, un jugement toujours dégagé d'influences étrangères et de partialité. Loin de dédaigner des inventions qui, au premier coupd'œil, pourraient paraître futiles et sans intérêt, nous les envisagerons avec attention comme les premiers jalons d'une plus importante découverte.

Courage donc, vous tous, amis du progrès, venez prendre place au vaste banquet de l'intelligence, et soyez convaincus d'avance que vous ne recevrez pas avec plus de plaisir les récompenses de vos travaux, que nous n'éprouverons de bonheur à vous les décer

ner.

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Les cours publics et gratuits que fait professer chaque année la Société d'Emulation, sont, sans contredit, un de ses moyens les plus puissants, et, à la fois, des plus efficaces pour faire progresser l'industrie.

Si nous avions besoin de faire ressortir ici l'avantage de ces cours, nous pourrions citer les noms de

ceux qui, de simples employés qu'ils étaient d'abord, sont devenus, grâce à cet enseignement, les uns chefs de maison, les autres obtenant un intérêt dans les établissements industriels de premier ordre.

Les ouvriers ne sont pas, d'ailleurs, les seuls qui aient profité de ce mode l'instruction, et si plus d'un commis lui doit la position qu'il occupe aujourd'hui, bien des chefs d'industrie lui doivent également leurs succès.

Mais pourquoi insisterions-nous davantage pour démontrer l'utilité de ces cours? cette utilité n'estelle pas, depuis longtemps, reconnue et appréciée de tous?

Elle doit l'être aujourd'hui plus que jamais, car aujourd'hui plus que jamais, les lumières et le talent sont en tout les premières conditions de succès.

La Société libre d'Émulation de Rouen a donc conçu une utile et généreuse pensée le jour où elle a résolu de créer divers cours, dont l'objet fùt de former des commerçants éclairés et des industriels habiles.

C'était un bienfait dans une cité où abonde une jeunesse active et studieuse, destinée presque tout entière à prendre une position quelconque dans la carrière commerciale et industrielle qui s'ouvre devant elle.

Ces cours ont déjà produit d'heureux fruits; la Société en attend de plus abondants encore. Elle a

droit de tout espérer du zèle et de l'assistance des jeunes gens qui se destinent au commerce et à l'industrie; elle compte, d'ailleurs, sur le concours des parents et des chefs d'atelier, qui engageront leurs enfants et leurs jeunes employés à profiter de l'instruction qui leur est offerte, le leur prescrivant même autant que cela dépendra d'eux.

Si les limites de ce rapport nous le permettaient, nous insisterions davantage sur la nécessité de l'éducation professionnelle, parce que, nous l'avons déjà dit, et nous le répéterons toutes les fois que l'occasion s'en présentera, l'avenir du pays repose, en grande partie, sur le savoir et l'intelligence des classes commerçantes et industrielles.

Cette année, la Société d'Emulation a joint à ses autres cours un cours de chaleur appliquée aux

arts.

Il n'est pas besoin de faire ressortir l'utilité de cet enseignement dans une contrée où les établissements industriels mus par la vapeur, les filatures, les tissages, les ateliers de construction, se comptent par centaines.

Parmi les milliers d'ouvriers employés dans ces établissements, combien peu connaissent et sont à même de se rendre compte des effets de la dilatation par la chaleur, de toutes les circonstances de la combustion, des conditions de la vaporisation des liquides, etc.?

N'est-il pas déplorable, d'ailleurs, de voir que chez

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