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transmission de mouvement en usage dans les machines?

Quoi qu'il en soit, notre ingénieux confrère a su réunir et utiliser dans sa machine une multitude d'agents mécaniques dont le choix est aussi heureux que l'application bien réussie. C'est là ce qui constitue à nos yeux le principal mérite de l'invention de M. Lacroix.

L'excentrique, la manivelle, la bielle, les rouages côniques et cylindriques, un grand nombre de segments de roues, la vis, la chaîne de Vaucanson, le ressort à boudin, en un mot presque tous les organes principaux de la mécanique sont réunis dans cette admirable machine, et leur utilisation y est bien entendue, bien combinée, nullement confuse.

Pour faciliter l'embrayement des nombreux segments de roues qu'il a employés, l'auteur a fixé sur les jantes des rouages et de leurs pignons, à leur point de rencontre, de petits moutonnets formant des espèces de cames ou de guides, à l'aide desquels il est parvenu à régulariser parfaitement les nombreux embranchements et déclanchements dont il a fait

usage.

L'invention de notre confrère n'est pas restée à l'état purement spéculatif; sa lithographie mécanique fonctionne au contraire tous les jours. Comme preuve de conviction, nous faisons passer sous vos yeux des épreuves tirées en notre présence, et qui ne laissent rien à désirer.

Nous n'avons point à nous appesantir longuement sur les avantages que présente la lithographie mécanique, vous les avez déjà pressentis.

Un ouvrier expérimenté lithographiant à la main ne peut tirer en dix heures que trois cents exemplaires format jésus. Un ouvrier fort ordinaire, et n'ayant, par conséquent, droit qu'à un salaire modeste, peut, à l'aide de la machine de M. Lacroix, tirer dans le même laps de temps, deux mille exemplaires du même format; c'est un peu plus de trois exemplaires à la minute. Ces chiffres sont exacts, nous les avons vérifiés avec soin.

La lithographie mécanique produit une notable économie dans l'emploi de l'encre. Nous observerons que cette matière est fort chère; elle coûte de 20 à 24 fr. le kilogramme.

Nous ne pourrions préciser la force motrice qu'absorbe la machine de M. Lacroix; celle que nous avons examinée a servi à créer l'invention; elle porte les traces des nombreux essais qu'il a fallu lui faire subir avant de réaliser la reproduction mécanique de mouvements si compliqués. Cette machine d'essai est, en conséquence, plus lourde qu'une autre mieux construite. Elle fonctionne par l'entremise de la machine à vapeur qui commande les ateliers de construction de l'inventeur. On voit au premier coup-d'œil qu'elle absorbe une force motrice minime; mais ne pouvant la déterminer exactement, nous nous bornerons à dire que nous l'évaluons à un demi-cheval environ.

M. Lacroix a construit pour l'exposition des produits de l'industrie nationale, une machine lithographique parfaitement soignée. Nous ne doutons pas qu'elle n'attire l'attention du public, et qu'elle n'obtienne les plus hautes récompenses du jury parisien.

Quant à votre commission, elle regrette vivement, pour l'inventeur et pour vous-mêmes, que son titre de membre résidant de notre Société ne nous permette pas de lui décerner la juste rémunération que mérite une invention dont nous sommes fiers de compter l'auteur au nombre de nos concitoyens et de nos collègues.

BRUNIER.

DISCOURS D'OUVERTURE

DES

COURS PUBLICS

PAR

M. A. POULLAIN,

Professeur de Droit commercial.

MESSIEURS,

Le commerce et l'industrie ont aujourd'hui plus que jamais besoin des notions de la science. Il est déjà loin de nous le temps où l'on s'engageait à l'aventure dans cette carrière sans en avoir auparavant sondé le terrain, et calculé, autant que le permet la prévision humaine, toutes les chances d'en sortir avec

succès.

Alors que la mine était riche et féconde, et qu'il

suffisait de mettre la main à l'oeuvre pour en tirer un large profit, on conçoit qu'un certain esprit de routine pût seul créer de grandes fortunes; mais plus tard, quand l'épuisement s'est fait sentir, quand il n'est plus resté que quelques rares filons à exploiter, toutes les ressources d'une intelligence éclairée ont quelquefois été impuissantes à faire surgir une entreprise à bon port.

C'est que la concurrence, avec sa liberté sans limites et sa dévorante activité, jette sur les marchés ses immenses produits à profusion, et dépasse souvent les projets de spéculation les mieux conçus. Dans cette lutte incessante des intérêts qui se croisent et se heurtent à chaque pas, il faut, pour soutenir un établissement avec avantage, joindre à la pratique des affaires, toutes les connaissances spéciales qui s'y rattachent. On pourrait presque dire aujourd'hui de ces deux branches de la richesse sociale, ce que Bossuet disait de la politique : C'est l'art de n'abandonner à la fortune que ce qu'on ne peut pas lui arracher. Aussi, dans l'espoir d'éluder ses caprices, on a eu recours à l'association. On s'est imaginé y trouver une sorte de puissance magique propre à conjurer toutes les catastrophes; on s'en est épris jusqu'à l'engouement, comme d'un culte nouveau qui devait régénérer et sauver le monde commercial. Hélas! qu'avons-nous vu durant cette fièvre de quelquesannées? un agiotage effréné spéculant sans pudeur sur des valeurs factiees qui restaient, en fin de compte,

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