Page images
PDF
EPUB

rait beaucoup moins de chances d'incendie que lui. Autrefois, messieurs, on épluchait et on ouvrait le coton à la main; divers modes étaient suivis, mais le plus en usage était de frapper le coton avec des baguettes sur une claie: ce mode est encore suivi pour les cotons fins, longue soie, que le procédé mécanique de battage énerverait.

Le battage mécanique fait beaucoup d'ouvrage, et assez bien; mais il n'est pas sans inconvénients; des flots de poussière mêlée de duvet sont vomis au dehors de la machine, et on a peine à concevoir comment des ouvriers, des femmes, des enfants, peuvent résister dans une atmosphère aussi viciée; le mouvement de la batte est si rapide (quinze à dix-huit cents tours par minute), qu'il n'est pas rare de voir le feu prendre dans les batteurs, soit que les tourillons s'échauffent assez pour cela, soit parce que le coton s'y bourre dans quelque endroit au point de devenir plus dur que du bois; soit parce qu'un petit caillou, frappé par la batte, détermine le jet d'une étincelle ; soit par quelque autre cause physique, peu connue, peu étudiée, qui déterminerait l'inflammation du duvet de coton, si facile à prendre feu dans cet état.

Ce sont tous ces dangers que la compagnie voudrait voir disparaître : déjà on a fait des améliorations: des ventilateurs enlèvent la plus grande partie de la poussière qui s'échappe du coton battu; mais ces améliorations ne sont pas adoptées dans toutes les filatures, à cause de la dépense de force motrice qu'elles occa

sionnent; d'ailleurs il reste plus à faire qu'on n'a fait encore: tels sont les motifs pour lesquels votre commission vous propose de remettre ce sujet au concours pour 1849.

Votre troisième prix avait pour objet des expériences sur l'écoulement des gaz et des vapeurs, assez nombreuses, assez variées, pour servir à déterminer les lois de cet écoulement.

Il ne nous est parvenu aucun mémoire sur ce sujet; cependant les physiciens ne sont pas restés inactifs, des recherches partielles ont été faites, elles ont donné lieu à diverses communications adressées à l'académie des sciences de Paris; quant à nous, messieurs, nous demandons un travail complet qui serait d'une grande utilité, aussi nous vous proposons de remettre la même question au concours de 1850.

Votre quatrième question était la recherche des causes des crises commerciales et industrielles, et des moyens d'y remédier, ou tout au moins d'en empêcher la fréquence.

Depuis que vous l'avez proposée, la fatalité a voulu qu'une nouvelle crise vint s'ajouter aux autres, une crise plus compliquée que toutes celles qui l'ont précédée, puisqu'elle provient tout à la fois d'insuffisance de capitaux, du manque de subsistances et de l'inactivité presque absolue de nos fabriques.

L'argent absorbé par les entreprises de chemins de fer, celui envoyé dans le Nord pour l'achat des blés qui nous manquaient, sont des causes trop évidentes

de la crise financière, pour les méconnaître ; celle-ci et le haut prix du pain, ont à leur tour paralysé notre industrie dont le malaise est des plus grands.

Mais il existe bien d'autres causes des crises commerciales, pour ainsi dire périodiques, dont nous sommes frappés: ce sont celles-là qu'il faudrait combattre; pour le faire avec succès, il faut bien les connaître, bien les étudier, faire la juste part de chacune; votre commission, toujours persuadée de l'utilité de ces recherches, vous propose de remettre la même question au concours pour 1849, en portant à 200 fr. la valeur du prix, au lieu de 150.

Votre cinquième sujet de prix était relatif à la création d'un métier pouvant tisser mécaniquement toute espèce de rouennerie.

Chaque année voit éclore quelque perfectionnement dans le tissage mécanique: le parage, le garde-navette, le régulateur, le templet, ont été l'objet d'incessantes améliorations; cependant, jusqu'alors, on n'a pas réussi à tisser mécaniquement la rouennerie, à l'exception de quelques articles fort simples; c'est donc provoquer des perfectionnements utiles, que de remettre le même sujet de prix au concours de 1850.

Votre sixième prix, une grande médaille d'argent, devait être donné pour un bon procédé propre à reconnaître la qualité d'un indigo, sa valeur tinctoriale.

La science possède plusieurs moyens pour cons

tater la valeur d'un indigo, mais ils ne sont pas assez simples; ce que voudrait la compagnie, c'est un moyen élémentaire, qui donne aussi facilement la valeur tinctoriale d'un indigo, que l'alcoomètre donne la valeur d'un alcool.

Votre commission vous propose de maintenir ce prix au concours jusqu'en 1850.

Nous n'avions pas seulement, messieurs, pour tâche de vous faire un rapport sur le concours de cette année, mais nous avions à vous proposer de nouveaux sujets de prix, si nous en reconnaissions la nécessité. Nous avons pensé que c'était encore encourager les efforts des travailleurs, que de glorifier ceux qui sont morts en nous laissant pour héritage de nombreux et magnifiques travaux scientifiques.

Votre commission a vu avec peine que tout le monde, à Rouen, semblait aujourd'hui oublier Dulong, cet illustre enfant de la cité, qui nous a laissé de si glorieux souvenirs.

Rouen, qui est fier d'avoir donné le jour à Corneille, à Boïeldieu, à Géricault, peut aussi s'enorgueillir d'avoir vu naître Dulong; les travaux du savant, pour être moins brillants que ceux du poëte, ou de l'artiste, méritent la reconnaissance des générations qui en profitent; c'est d'après ces principes que votre commission vous propose de mettre au concours l'éloge de Dulong.

La question serait formulée ainsi :

Une médaille d'or de la valeur de 300 francs sera

décernée, s'il y a lieu, dans la séance du 6 juin 1849, à l'auteur du meilleur mémoire contenant l'éloge de Dulong, et une analyse critique de ses travaux en physique et en chimie.

Les concurrents doivent bien comprendre que ce que nous demandons, n'est pas seulement l'éloge d'un homme si haut placé dans l'estime du monde savant, mais une analyse complète et critique, des travaux de cet illustre physicien.

En adoptant ces vues, messieurs, vous atteignez un double but encourager les travailleurs, rendre justice à tous les mérites; c'est ainsi que la Société d'Émulation l'a toujours entendu.

« PreviousContinue »