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devenait tous les jours plus abondante. Ce fut à cet époque que je commençai d'écrire dans les pays étrange pour leur demander des ministres. Ce fut dans ce desse que j'écrivis à Londres, en Hollande, en Suisse et à G nève; mes lettres étaient des plus pressantes et contenaie les tableaux les plus propres à émouvoir. Combien ne che chais-je pas à les exciter à la jalousie et à faire naîtr chez eux, une salutaire confusion, en leur représenta des cardeurs de laine, des tailleurs d'habits, des gar de boutique, des jeunes gens sans étude, qui remplissai l'œuvre à laquelle ils avaient été appelés eux-mêmes qui vérifiaient à la lettre ces paroles de l'Evangile: Si cent ci se taisent, les pierres mêmes parleront. Mais toutes semonces furent inutiles; elles n'engagèrent pas même pasteur à rentrer dans le royaume. C'eût été augmenta dangers du troupeau! La grande raison était qu'on nes sentait pas de vocation pour le martyre, et le martyre dans cette périlleuse mission, était comme inévitable.

<< Après cela, quel parti restait à mon zèle? Je n'ens pas d'autre que celui de l'établissement d'un séminair où les jeunes gens en qui je trouverais le plus de bot volonté pour se consacrer au salut de leurs frères, pusse être envoyés pour y acquérir les lumières et les conne sances nécessaires, et s'y mettre en état de servir ensu les Églises avec fruit. Mais il fallait, pour cela, des secour et les Églises n'étaient pas en état, elles-mêmes, de fournir. Comment l'auraient-elles pu? Elles, qui jusqu lors n'avaient pas même pu assigner des émoluments ceux qui sacrifiaient, tous les jours, leur vie pour elle et qui, lorsqu'elles commencèrent à le faire, ne pure porter ces émoluments, ainsi que je le réglai moi-mèn dans un synode, qu'à environ 3 liv. sterl. par an po

chacun.

«Il fallait donc chercher ailleurs des secours; mais les trouver, si ce n'est parmi les puissances de notre con munion? C'est aussi de ce côté-là que je portai toutes m vues, et ce fut alors que je commençai à travailler à intéresser à cette bonne œuvre. Je le fis en écrivant à d personnes que je savais être remplies de zèle et en créd auprès desdites puissances. C'est en particulier ce que, fis en 1720, en me donnant l'honneur d'écrire à milo

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ake, cet illustre primat, si digne d'avoir été le prédéseur de celui qui occupe aujourd'hui avec tant de gloire même siége épiscopal.

Après avoir commencé à donner à cet illustre prélat è idée courte de la manière merveilleuse dont Dieu avait mencé à réparer les brèches que la violence, l'apose et le défaut de zèle, le fanatisme, le relâchement, ent faites à son Église en France; après lui avoir parlé rétablissement de la discipline, des consistoires, des ɔdes, du nombre des Églises qui étaient déjà formées, petit nombre d'ouvriers qu'elles avaient pour les desir, de l'abondance de la moisson, et de la nécessité oir des missionnaires, je le conjurais d'en entretenir Majesté Britannique et de porter cet auguste prince à orer de sa protection royale et des riches effets de sa nificence, ces Églises qui renaissaient de leurs cendres. prélat fut touché du contenu de ma lettre. Il eut la té de parler au roi, qui en fut touché aussi, et qui mit de s'intéresser en leur faveur. »1

es efforts de Court furent enfin couronnés d'un plein cès. Quelques dons arrivés de l'étranger, joints aux saices que les Églises s'imposèrent, formèrent un petit ital, qui fut la première assise du séminaire de Laune, dont la fondation fut décidée le 15 mai 1729, date norable dans l'histoire du protestantisme français. Ce r-là, sur une terre étrangère, les réformés ressuscient l'œuvre que le clergé croyait avoir éteinte sous les nes des écoles de théologie de Sedan, de Nîmes, de mur et de Montauban.

XVIII.

Les Églises, consultées sur le choix d'un directeur, se ntrèrent intelligentes et reconnaissantes, en désignant ine voix unanime Antoine Court, qui accepta, au moent même où, à la suite de deux assemblées surprises, ne à Lunel et l'autre près Nîmes, sa tête avait été mise prix de 10,000 livres par l'intendant Bernage. Avant de

1. Mss. des arbitres, par Court, p. 3 et 4. Mss. P. R. Coquerel, t. Ier, p. 193-194.

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quitter le champ de ses travaux, le pasteur du dése voulut assister au synode provincial des Cévennes, qui entre autres mesures disciplinaires, prescrivit «que l' des jeûnes solennels célébrés en France, le serait même jour désigné par les Eglises suisses pour la céléb tion de l'un des leurs, afin de resserrer les liens no veaux qui allaient unir les Églises du royaume avec cel du pays où le séminaire venait d'être fondé ; le synode a rêta aussi d'écrire une lettre circulaire aux protestants vivaient sous la croix, pour leur rappeler l'obligation leur état de persécution leur imposait, de se rendre d toutes les assemblées de piété indistinctement, toutes fois que la Providence leur en fournirait l'occasion, sous peine d'être déclarés lâches, timides et tièdes, et séparés de l'Eglise du Seigneur par l'excommunication. »

Il semble que la simple prudence aurait dû dicter ordre contraire aux membres du synode, et cependant, que dans nos jours de tiédeur spirituelle nous regarderi comme une haute imprudence, fut un acte de sagesse di par l'expérience, qui avait appris à Court et à ses collègue que la privation du culte avait été plus fatale aux prote tants que la persécution la plus violente, parce qu'elle avait familiarisés avec la dissimulation et leur avait d force de confesser hardiment leur Sauveur. Dans époque de leur histoire, les protestants se montrere grands, héroïques, et furent du nombre de ceux qui la sainte hardiesse de dire à un pouvoir fort, violent inique «Juge toi-même s'il est plus juste d'obéir hommes qu'à Dieu. >>

Le malheur des temps, le prophétisme surtout, avaie relâché les liens de la discipline. Le synode général s pliqua à les resserrer; il voulut que tout protestant conduisit extérieurement en chrétien et se distinguát monde par une conduite exemplaire; il lança l'excomm nication contre ceux qui se livraient aux plaisirs de danse. «Quand l'Église pleure, disait-il, ses membres doivent pas se réjouir.» Avant de se séparer, il désigna pasteur, qu'il chargea de visiter les Églises, afin d'y rétablir la discipline. C'est ainsi que le protestantisme se retre

1. Borrel, Biographie de Court, p. 157.

it dans les larmes, et puisait, sous la croix, les forces i lui étaient nécessaires pour traverser les temps oraux qui se préparaient. '

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XIX.

Les mesures prises par l'assemblée du Languedoc, et · celles qui suivirent, ne furent pas cependant accueillies tout avec la même faveur; les protestants des contrées n'avaient pas souffert comme celle des Cévennes, trouent que leurs frères du Languedoc avaient plus de déement que de prudence; ils leur transmettaient leurs ervations et leurs critiques; ils étaient, surtout, froissés l'initiative des Cévenols, qui, dans leur zèle, oubliaient une parfaite égalité doit régner dans les Églises, parce il leur arrivait de parler en maîtres. C'est ainsi que de ites et mesquines jalousies se faisaient jour dans les emblées synodales, qui, malgré les misères inhérentes otre pauvre nature, devenaient le lierre enveloppant ses mille bras l'édifice de la Réforme pour l'empêcher tomber en ruine.

es hommes pieux et sensés, qui comprenaient que ion fait la force, savaient excuser les Églises du Landoc et leur pardonnaient leur initiative en souvenir de rs longues souffrances et de leurs glorieux martyrs. En apulsant les monuments écrits de cette époque héque si oubliée de nos jours, malgré les brillants et isciencieux travaux de MM. N. Peyrat et Charles Coque, nous y retrouvons des traces vivantes de cette soussion profonde que les protestants avaient toujours fessée pour l'autorité civile. Dans un synode provincial Bas-Languedoc, les membres de l'assemblée prononent l'excommunication majeure contre ceux de leurs religionnaires qui se dispenseraient de payer le tribut roi, feraient ou autoriseraient la contrebande; mais s mémes hommes, qui rendent à César ce qui est à sar, déclarent nulle et de nul effet sa défense d'introire dans le royaume des livres de religion, «altendu,

1. Synode des Cévennes. ■erel, t. [er, p. 200.

Mss. Rab. Saint-Étienne. — Ch. Co

dişent-ils, que cela ne porte aucun préjudice au roi el l'État. >>

C'est ainsi que les tronçons épars du protestantisme rejoignaient et tendaient à former un corps nouveau; aus le spectacle le moins intéressant de cette époque n'est p celui que nous présente cette Église sous la croix; l'e et la potence lui avaient enlevé ses pasteurs et ses pr dicateurs, elle en cherche d'autres dans la boutique l'ouvrier, dans la ferme du laboureur; on avait démoli temples, elle célèbre son culte sous le feuillage des arb séculaires et dans les cavernes; on avait supprimés nombreuses et célèbres écoles de théologie, elle fonde séminaire de Lausanne; ses synodes avaient été intera elle les rétablit, et renoue la chaîne de sa forte organist tion, brisée brutalement par Louis XIV. Court est de cette œuvre, qui ne le cède en rien, en dévouement, sagesse, en zèle, à celle des pères du célèbre synode 28 mai 1559, qui de toutes les Églises formèrent cel belle Église réformée dont Court ramassa les précieux bris et devint le restaurateur.

XX.

Après un apostolat de seize ans, le pasteur du dést quitta la France et se retira à Lausanne, d'où il ne ce de veiller sur ses frères et de se consacrer sans réserv leur service. Absent, il fut au milieu d'eux par son espr leurs douleurs furent ses douleurs, leurs espérances! espérances, leurs joies ses joies; il ne se sépara pas d'e pour se soustraire au martyre, mais pour mieux les serv Peu d'hommes ont eu une vie plus remplie que la sien! sa volumineuse correspondance, ses écrits, ses mémoir que nous avons parcourus, témoignent d'une activité p commune. Il s'attachait surtout à pourvoir les Églises pasteurs fidèles; car il avait pu se convaincre que prédicants ignorants et fanatiques étaient leur ruine. disette de bons conducteurs ne l'était pas moins; il tendait des anciens lui dire: «Autrefois nous avions nombreux communiants; mais depuis que nous somm privés de pasteurs et de la célébration des sacrements, n fidèles tombent dans l'idolâtrie et le déréglement; donne

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