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pécuniaires accordés par l'empereur à ces gouvernemens, avaient fait sentir la nécessité de renforcer les ressources du trésor impérial, nécessité à laquelle contribuait encore la hausse des denrées dont la couronne était obligée de faire des approvisionnemens. A ces causes, une ordonnance impériale avait, dès les premiers jours de l'année, autorisé, pour un temps déterminé, l'émission de quatre séries de billets du trésor, chacune de dix millions de roubles assignations. Il résultait de cette ordonnance que vingt millions de roubles des billets du trésor des trois premières séries restaient encore à amortir.

Quoique cette disette dût aussi, porter atteinte à l'une des branches fondamentales de la richesse publique, restreindre la demande des marchandises étrangères, et ralentir la marche des reviremens du commerce et de l'industrie, cependant en examinant l'ensemble du commerce extérieur de l'empire, pendant la totalité de l'année 1853, on ne pouvait le considérer comme désavantageux au pays, puisque, malgré la cessation de l'exportation des céréales, la balance commerciale offrait encore un excédant de plus de 57 millions de roubles en faveur de la Russie (1).

(1) C'est ce qui résulte du résumé suivant des tableaux du commerce Catérieur de l'empire publié par le ministre des finances:

Exportations.-En 1833, ia valeur totale des marchandises exportées à l'étranger a été de. 236,743,893 rbls.

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faite des exportations.

49,623,128,

Le total du revenu des douanes s'était élevé à. 84,585,451, bls. 64 1/2 c.

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TURQUIE. Nouvelles réclamations de la France et de l'Angleterre contre le traité du 8 juillet: 1833.-Nouveau traité conclu entre la Porte et la Russie.-État incertain des choses en Orient.-Insurrection en Syrie contre la domination égyptienne —Arrivée de Méhémet-Ali en Palestine. -Défaite des insurgés syriens. Insurrection dans l'Yémen.-Préparatifs de la Porte.-Nouvelle cause de mésintelligence entre le sultan et le, pacha d'Egypte.-Arrangement des difficultés.-Troubles sur divers points de la Turquie.-Améliorations matérielles en Égypte.—Création d'une milice nationale en Turquie.

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A la manière dont les affaires de Turquie s'étaient arrangées l'année précédente, il avait été facile de voir que rien n'était définitivement terminé en Orient, et qu'aucune puissance, si ce n'est peut-être la Russie, n'avait lieu de se féliciter pleinement du résultat. Sans aucun doute, le pacha d'Egypte ne se regardait pas comme suffisamment payé de ses victoires; d'un autre côté, la défaite coûtait trop cher au sultan pour qu'il pût oublier de sitôt les sacrifices auxquels il avait dû se résigner; enfin le traité du 8 juillet 1833 constituait pour la France et l'Angleterre une cause permanente de défiance et de mécontentement. Voyez ce traité à l'Appendice).

De nouvelles réclamations furent faites à Constantinople contre ce traité, au nom des deux gouvernemens. Ils déclarèrent que de parcilles stipulations ameneraient en Europe. un état de choses qu'il était de leur devoir de prévenir. L'Angleterre s'inquiétait surtout de savoir jusqu'à quel point ses relations avec l'empire ottoman pouvaient ou pourraient, être ultérieurement modifiées en conséquence du traité du 8 juillet.

Pendant qu'on échangeait des notes à Constantinople sur ce traité, la Russie en concluait un autre à Saint-Péters

bourg, dans lequel on put reconnaître l'esprit qui avait dicté le précédent. Achmet pacha, qui avait été chargé par la Porte d'une mission spéciale auprès de l'empereur Nicolas, pour le remercier des secours qu'il avait envoyés au grand-seigneur, devait en outre, et comme accessoirement, régler sous les yeux de l'empereur les derniers points laissés en litige par le traité d'Andrinople. Ces négociations amenèrent, le 29 janvier, la signature d'un nouveau traité qui remettait à la Porte une partie des contributions de guerre qu'elle s'était engagée à payer, tranchait en faveur de la Russie la question des frontières d'Asie, et promettait l'évacuation prochaine de la Moldavie et de la Valachie, dont le sultan nommerait incessamment les hospodars, en attribuant aux Russes, pour huit années encore, la possession de Silistria (1).

Cependant l'inquiétude publique ne se calmait point à Constantinople. Il régnait parmi les grands une agitation qui tenait à la scission opérée dans le divan, par les efforts des ambassadeurs de France et d'Angleterre, contre l'alliance de la Porte avec la Russie. D'ailleurs la paix de Kutaya n'avait rendu à la Porte qu'une tranquillité apparente, et, ni en Egypte, ni en Turquie, on ne cessait de faire des armemens qui, rapprochés de plusieurs autres circonstances, démontraient que le repos de l'Orient manquait d'une base solide.

Entre toutes ces circonstances, l'une des plus dignes d'attention, était le mouvement de la flotte anglaise qui appareilla de Malte, au mois de mai, pour se rapprocher de Constantinople. La diplomatie s'en émut profondément, et des conjectures sans fin se formèrent sur le but véritable que se proposait l'Angleterre. Bien qu'elle eût expliqué la

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(1) L'installation des hospodars eut lieu au mois de septembre, et quel que temps après les troupes russes se retirèrent en Bessarabie.

réunion de ses forces navales dans la Méditerranée, par la nécessité de donner au nouvel amiral chargé du commandement en chef de sa flotte, l'occasion de connaître l'habileté des marins qui lui étaient subordonnés, et de faire exécuter des manoeuvres aux équipages, on ne savait si en réalité elle ne voulait pas forcer le passage des Dardanelles, ou tout au moins occuper un point de la côte, en représailles du traité du 8 juillet. Cette dernière supposition était probablement la plus vraisemblable, et peut-être si elle ne s'est pas convertie en fait, doit-on l'attribuer à la résolution du gouvernement français de ne pas se laisser entraîner dans l'orbité de la politique anglaise, en ce moment plus belliqueuse que la sienne. Il est possible aussi que l'Angleterre n'eût que le projet de se mettre en mesure, à cette époque où, par suite des troubles qui agitaient la Syrie, tout présageait entre la Porte, et l'Egypte de nouvelles hostilités, dans lesquelles la Russie pourrait être encore une fois tentée d'intervenir. ››

Un examen attentif des choses avait conduit de bonne heure à conclure que la domination égyptienne rencontrerait des obstacles en Syrie. Cette contrée n'offre pas, comme l'Égypte, un pays plat, où l'oppression trouve une libre car rière, où l'opprimé soit sans refuge. Elle est sillonnée, au contraire, de montagnes qui sont autant de citadelles naturelles contre la tyrannie. Les habitans n'y étaient pas, de même qu'en Égypte, mous de caractère et façonnés à l'esclavage; on n'y avait jamais vu que des populations inquiètes, factieuses, toujours en guerre avec le despostisme turc, des potisme doux en comparaison de celui de Méhémet-Ali. Le premier, inégal, capricieux, laisse, par cette raison même, quelque relâche; le second est pour ainsi dire érigé en Charte. En aucun temps d'ailleurs, la Porte n'avait ordonné de levées d'hommes, soit dans le district d'Adana, soit dans les divers gouvernemens de la Syrie. Toutes les forces qu'elle en tirait se bornaient à des enrôlemens volontaires. Les ressources financières de ces contrées étaient pareillement presque nulles

pour de trésor impérial. A cet égard, la Syrie allait changer du tout au tout sous son nouveau maître; aussi, ces provinccs qui avaient été traversées plutôt que soumises, en 1832, par les Égyptiens; Naplouse, avec ses villages qui sont des forteresses; le mont Liban, avec ses défilés et ses peuplades guerrières; Damas, Tripoli, Alep, avec leurs habitans indociles, devaient-ils se plier d'autant plus difficilement à ce régime, que, selon toute apparence, l'or et les intrigues de l'étranger y fomentaient ces redoutables élémens de révolte.

Une sourde opposition à l'affermissement du pouvoir de Méhémet-Ali en Syrie avait commencé de se manifester dès la fin de 1833. Dans le mois de décembre, on avait découvert à Alep une conspiration dont le but était de massacrer le gouverneur, les troupes, les employés, les partisans du viceroi, et de livrer la ville aux Arabes. Ibrahim pacha, qui était resté en Syrie pour organiser le pays, triompha aisément de cette conspiration et de quelques autres symptômes de mécontentement, jusqu'au jour où l'application du système administratif et financier de Méhémet-Ali vint, en assujettissant les habitans à des devoirs et à des impôts tout-à-fait inaccoutumés, développer plus complétement leurs dispositions naturelles à se révolter.

L'insurrection éclata, au mois de mai, dans les montagnes de Naplouse, de Jérusalem et d'Hébron, embrassant ainsi la Palestine et la Galilée tout entière. Elle eut pour principal motif une levée de recrues ordonnée par Ibrahim. On évaluait à 25,000 au moins le nombre des insurgés dans cette partie de la Syrie. Des mouvemens semblables avaient eu lieu à l'est du Jourdain et dans les montagnes de Tripoli. Un régiment de cavalerie que, faute d'infanterie disponible, Ibrahim avait envoyé contre les Naplousains, fut attaqué dans un défilé, et forcé de battre en retraite, laissant au pouvoir de l'ennemi, outre ses bagages, une centaine de morts, parmi lesquels se trouvaient le colonel et deux capitaines. Ce premier échec, fut suivi d'un autre encore plus

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