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Ces paroles, ou plutôt cette cordiale et franche acceptation des grands principes du gouvernement constitutionnel furent accueillies par MM. les députés avec les témoignages de la plus vive satisfaction.

Le prince ajouta : « Messieurs, au » moment où vous arriviez, j'allais me » rendre à l'Hôtel-de-Ville; je serais >> bien heureux si je traversais Paris » au milieu des députés de la nation. »

Tous nos mandataires s'empressèrent de suivre le Lieutenant Général du royaume, qui monta à cheval dans la cour du palais, sans état - major, sans autre gårde que le peuple, sans autre cortége que celui des députés du pays. Le prince était en habit d'officier général, ne portant d'autre décoration que le ruban de la Légion-d'Honneur et la cocarde tricolore.

Peindre les cris d'enthousiasme du peuple, serait aussi difficile que d'exprimer son héroïsme dans les jours de combat. Les flots de la population se

pressaient et se confondaient tellement que MM. les députés étaient obligés de se séparer; et leur marche était d'autant plus difficile, qu'elle était entravée par les immortelles et héroïques barricades. A l'instant même les citoyens improvisent la plus admirable escorte qui ait jamais accompagné les députés d'un peuple, et le chef d'un gouvernement libre. Ils se donnent tous la main, marchant ainsi transversalement dans l'immense trajet du Palais-Royal à l'Hôtel-deVille, et forment ainsi une longue chaîne ou plutôt un immense faisceau; et tous s'écriaient : «< Voilà un ordre qui ne s'est » jamais établi avec des gendarmes! » Le prince s'arrêtait souvent, le chaà la main, saluant du geste et de la voix le peuple héroïque de la grande capitale, digne représentant de la grande nation. Les marches de l'Hôtel-de-Ville étaient couvertes de gardes nationaux; le prince leur a dit : « Messieurs, c'est » un ancien garde national qui vient » rendre visite à son ancien général (le

peau

>>

général Lafayette). » La proclamation a été lue de nouveau dans la grande salle de l'Hôtel-de-Ville, par M. Viennet, député de l'Hérault.

La place de l'Hôtel-de-Viile, les quais des deux rives de la Seine, les rues adja. centes, les croisées de tous les étages étaient encombrés d'une multitude de citoyens tous parés des couleurs nationales. Au moment où M. le duc d'Or léans et le héros des deux mondes, le général Lafayette, se présentèrent sur le balcon de l'Hôtel-de-Ville, étroitement embrassés, et agitant le glorieux drapeau tricolore, un tonnerre d'applaudissemens, de bravos, de cris de vive la Charte! vive la liberté! retentit sur les deux rives.

Jamais spectacle plus sublime, plus imposant, plus national ne fut offert à l'admiration des peuples. Les jours de la victoire étaient dignes de l'héroïsme des combats. Le bruit des canons, de

la

mousqueterie, et le carillon de toutes les cloches se mêlaient aux cris de la

sublime population parisienne. Le prince rentra à son palais au milieu des mêmes acclamations, n'ayant d'autre cortége que les citoyens, et d'autres courtisans que le peuple.

La proclamation qui suit fut le même jour affichée et répandue dans Paris.

Habitans de Paris!

» Les Députés de la France, en ce moment réunis à Paris, m'ont exprimé le désir que je me rendisse dans cette capitale pour y exercer les fonctions de lieutenant général du royaume.

» Je n'ai pas balancé à venir partager vos dangers, à me placer au milieu de votre héroïque population, et à faire tous mes efforts pour la préserver des calamités de la guerre civile et de l'anarchie.

» En rentrant dans la ville de Paris je portais avec orgueil ces couleurs glorieuses que vous avez reprises, et que j'avais moi-même long-temps portées. >> Les Chambres vont se réunir; elles

aviseront aux moyens d'assurer le règne des lois et le maintien des droits de la nation.

» La Charte sera désormais une vérité. >> LOUIS-PHILIPPE D'ORLÉANS. »

OUVERTURE DES CHAMBRES,

DÉCLARATION DES DÉPUTÉS,

AVÉNEMENT DE LOUIS-PHILIPPE I",

ROI DES FRANÇAIS.

Le duc d'Orléans ayant été proclamé Lieutenant Général du Royaume par une portion des Députés, il était important que cet acte, dicté par la nécessité, fût sanctionné par les Chambres régulièrement assemblées, et délibérant en majorité. On attendait donc avec impatience le 3 août, jour fixé pour l'ouverture de la session. Cette réunion et la proclamation définitive d'un gouvernement étaient devenues très-urgentes depuis l'heureuse issue des événemens

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