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22 juin. ARRET du conseil d'État qui décide que la juridiction administrative n'est pas compétente pour connaitre des contestations relatives aux marchés de fournitures passés entre un particulier et un hospice. Une lettre par laquelle un préfet refuse de donner suite à une demande en payement de fournitures faites aux hospices ne constitue pas une décision et n'est pas de nature à être déférée à la juridiction contentieuse.

Le 27 juin 1846, le conseil de préfecture de la Seine se déclara incompétent pour connaître de contestations relatives à un marché passé entre les sieurs Menier et comp. et l'administration des hôpitaux et hospices civils de Paris, pour une fourniture de semence de lin. Le 29 août suivant, le préfet de la Seine, saisi de la même contestation, répondit au sieur Menier qu'il ne pouvait donner aucune suite à sa réclamation.

Les sieurs Menier et comp. se sont pourvus en annulation de l'arrêté du conseil de préfecture et de la lettre du préfet, qualifiée décision dans la requête. Sur ce pourvoi est intervenu le décret suivant :

« Ouï M. Leviez, auditeur, en son rapport;

>> Ouï Me Costa, avocat des sieurs Menier et comp., et Me Jagerschmidt, avocat de l'administration de l'assistance publique de la ville de Paris, en leurs observations;

>> Ouï M. du Martroy, maître des requêtes, commissaire du gouvernement, en ses conclusions;

>> En ce qui touche le pourvoi formé contre l'arrêté du conseil de préfecture de la Seine, en date du 27 juin 1846:

>> Considérant que la contestation soulevée entre l'administration des hospices et le sieur Menier a pour objet l'interprétation et l'application, soit de la soumission, en date du 17 novembre 1845, par laquelle le sieur Menier s'est engagé à fournir, pendant l'année 1846, la semence de lin nécessaire au service de la pharmacie centrale des hospices, soit du cahier des charges dressé pour l'adjudication de cette fourniture;

» Qu'il s'agit, dans l'espèce, d'un marché de fournitures passé entre un particulier et un hospice;

» Qu'aucune disposition de loi ou ordonnance n'a attribué à l'autorité administrative la connaissance des contestations relatives aux marchés de cette nature;

» Que, dès lors, c'est avec raison que le conseil de préfecture a déclaré qu'il était sans pouvoirs pour connaître de la demande du sieur Menier;

>> En ce qui touche le pourvoi dirigé contre la lettre, en date du 29 août 1846, par laquelle le préfet de la Seine a déclaré qu'il ne pouvait donner suite à la réclamation du sieur Menier :

>> Considérant que la lettre, en date du 29 août 1846, par laquelle le préfet de la Seine a déclaré qu'il ne pouvait donner aucune suite à la réclamation du sieur Menier, ne constitue qu'un refus d'acquiescer qui ne fait pas obstacle à ce que le sieur Menier porte sa demande devant l'autorité compétente, et qui, dès lors, n'est pas de nature à nous être déféré par la voie contentieuse;

» Art. 1. La requête des sieurs Menier et comp. est rejetée.

» 2. Les sieurs Menier et comp. sont condamnés aux dépens.

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28 juin. ARRÊT de la cour de cassation qui déclare que les rentes et redevances foncières, autrefois immobilières, et notamment les droits de champart ou de terrage, ne constituent plus, depuis les lois des 4 août 1789, 29 décembre 1790, 11 brumaire et 22 frimaire an VII, que des droits mobiliers garantis, sur les biens affectés au service de la redevance, par une hypothèque qui périt faute d'inscription.

Le droit de champart étant mobilier, la preuve de son existence ne peut être établie que par titres; l'article 1341 du code Napoléon s'oppose à ce que cette preuve soit faite autrement, et notamment par témoins (Articles 529, 530, 1341 du code Napoléon; articles 6 et 7 de la loi du 11 brumaire an VII).

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3 juillet. - ARRÊT de la cour impériale de Paris qui déclare que ni le directeur de la maison de santé dans laquelle a été placé un aliéné interdit, ni le subrogé tuteur de cet interdit, n'ont qualité pour s'opposer à la demande du tuteur tendante à faire transférer l'interdit de cette maison de santé dans une autre.

Madame Théry ayant donné, en 1849, des signes d'aliénation mentale, a été placée alors, par son mari, dans l'établissement de Charenton. M. Guilly, frère de l'aliénée, a provoqué, après le décès de M. Théry, l'interdiction de sa sœur; cette interdiction a été prononcée en 1852. M. Guilly a été nommé tuteur, et M. Denout, médecin, subrogé-tuteur. Depuis, M. Guilly a demandé à M. Boué, directeur de la maison de Charenton, la remise de la personne de madame veuve Théry, qu'il voulait placer dans l'asile public d'aliénés de Lille, lieu de naissance de madame veuve Théry, et où il a lui-même son domicile. Mais une opposition a été formée par M. Denout, subrogé-tuteur. Pendant neuf mois, M. Guilly a gardé le silence à la suite de cette opposition; mais au mois de novembre 1853, il a fait assigner en référé M. le directeur Boué, et l'ordonnance suivante est intervenue le 26 novembre :

<< Attendu que, par jugement de la deuxième chambre du tribunal civil de la Seine, en date du 9 juin 1853, enregistré, la veuve Théry a été interdite; que le conseil de famille, convoqué en vertu de ce jugement, a nommée Guilly tuteur;

» Attendu que provision est due au titre;

>> Disons que nonobstant l'opposition formée par Denout, suivant exploit de Marécat, huissier, du avril dernier, enregistré, et nonobstant l'oppposition de toute personne de la famille ou autre, M. le directeur de Charenton sera lenu, dans le jour de la signification de la présente ordonnance et sur la première réquisition de Guilly, de livrer la dame veuve Théry ;

» Ordonnons l'exécution provisoire sur minute, nonobstant appel, vu l'urgence. >>

Appel de M. Boué, et intervention devant la cour de M. Denout, autorisé par délibération du conseil de famille, du 26 décembre 1853, à soutenir l'avis de ce conseil favorable au maintien de l'interdite dans la maison de Charenton.

Me Nouguier, à l'appui de l'appel, a fait observer qu'à l'égard du directeur, il y avait incompétence du juge de référé.

Le même moyen a été présenté par Me Tapon-Cho!let, avocat de l'intervenant, qui s'est fondé sur ce que l'opposition de M. Denout constituait une action principale, sur laquelle le tribunal saisi devait être appelé préférablement à statuer à défaut de toute urgence.

Au fond, l'avocat a exposé que, depuis cinq ans, madame veuve Théry, fort bien traitée à Charenton, s'accommodait parfaitement du séjour de cette maison; il a ajouté que, jouissant de fréquents intervalles lucides, elle n'avait que des hallucinations, dans lesquelles elle croyait voir, tantôt son frère, M. Guilly, la poursuivre, armé d'un couteau, tantôt des insurgés menaçant son existence. Me Tapon-Chollet en concluait que, de toute manière, il convenait de laisser madame veuve Théry à Charenton, loin de son tuteur, qui habite les environs de Lille.

Me Meunier, pour M. Guilly, a fait observer que M. Denout, interne à la maison de Charenton, n'avait été nommé subrogé-tuteur qu'à défaut de parents, et que la délibération du conseil de famille, qui avait autorisé son intervention, n'était fondée que sur un exposé de faits passionné contre M. Guilly, qui y était accusé « d'abus d'autorité et de sordidité inhumaine et spéculative » (sic).

Me Meunier a dit que madame veuve Théry trouverait, à Lille, dans l'asile public d'aliénés, les mêmes soins, au même prix qu'à Charenton, et que son tuteur pourrait veiller plus assidûment à ses besoins. Il a expliqué les incriminations dirigées contre M. Guilly au sein du conseil de famille, par ce motif que plusieurs membres de ce conseil, non parents de l'interdite, avaient été poursuivis par M. Guilly pour des abus de confiance, qui avaient compromis singulièrement la fortune de celle-ci.

M. Goujet, substitut du procureur général impérial, a exprimé l'avis qu'il appartenait exclusivement à la justice de prendre, sur la requête du tuteur, la mesure la plus avantageuse à l'interdite ; mais il a estimé que cette mesure devait être le maintien de madame veuve Théry dans la maison de Charenton.

<< La Cour,

>> Considérant que le directeur de la maison de Charenton n'a ni qualité ni droit pour contester les actes de Guilly et s'opposer à l'exercice du pouvoir qu'il tient de la justice; qu'il ne peut réclamer qu'une chose, c'est que l'opposition qu'il a reçue soit levée et sa responsa

bilité mise à couvert; que tel est le résultat de la décision attaquée ;

» Que, d'un autre côté, le subrogé-tuteur ne peut, hors des cas prévus par la loi, intervenir dans les procès où le tuteur est directement engagé ; qu'il n'y a dans la cause aucune opposition d'intérêts entre le tuteur et l'interdite; qu'en tout cas Guilly use du droit inhérent à son titre, et qu'en ordonnant l'exécution de ce titre, le président, jugeant en état de référé, n'a point excédé sa compétence;

« Sans s'arrêter à l'intervention, confirme. »

20 juillet. JUGEMENT du tribunal de commerce d'Angoulême qui déclare que les receveurs, payeurs, percepteurs et autres comptables de deniers publics sont assimilés aux commerçants, relativement aux billets qu'ils souscrivent. Ces billets sont réputés faits pour leur gestion, si une autre cause n'y est exprimée; ils les rendent justiciables des tribunaux de commerce, et passibles de la contrainte par corps.

Ainsi décidé par le jugement suivant :

« Attendu que Labonne soutient que, bien qu'il soit soumis à la juridiction commerciale, comme percepteur, pour les billets qu'il a souscrits, néanmoins la contrainte par corps ne doit pas être prononcée contre lui; que, dans tous les cas, cette contrainte par corps ne devrait être prononcée contre lui que pour une somme de 1,342 fr. 28 c., parce qu'il prétend qu'il peut justifier qu'il n'y a que cette somme qui a été employée aux besoins de sa gestion de percepteur;

» Sur le premier chef:

» Attendu que l'article 634 du code de commerce dit que les tribunaux de commerce connaîtront des billets faits par les percepteurs;

>> Qu'il est évident que le législateur, en soumettant les percepteurs à la juridiction commerciale, a entendu qu'ils en subiraient toutes les conséquences;

» Que s'il en était autrement, il n'aurait pas manqué d'ajouter à l'article 634: « Néanmoins, les tribunaux » de commerce ne pourront pas prononcer la contrainte >> par corps contre les percepteurs, » comme il l'a fait à l'article 637 du même code en faveur des individus non négociants;

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bienfaisance une somme fixe par année, pour droits du dixième attribué aux pauvres, ne sont pas applicables sans réduction, aux temps de troubles politiques qui ont suivi la révolution de 1848, pendant lesquels le nombre des représentations a dû être diminué. Le taux de l'abonnement doit être réduit d'une somme proportionnelle au nombre des représentations ordinaires qui n'ont pu être données.

On doit, de plus, imputer sur le montant de cet abonnement le produit d'une représentation qui a été donnée au profit des pauvres, dont l'imputation sur la créance a été consentie par le bureau de bienfaisance.

Le sieur Seveste, en qualité de directeur des théâtres de la banlieue de Paris, exploitait le théâtre de Belleville qui donnait des représentations quotidiennes, lorsqu'il fut convenu entre lui et le bureau de bienfaisance que, pour les années 1848, 1849 et 1850, le droit du dixième dû aux pauvres serait remplacé par une somme annuelle de 4,000 fr. Mais survint la révolution de février, et le nombre des représentations dût être diminué de prés de moitié du 1er mai 1848 au 1er septembre 1849, époque à laquelle, par suite d'une résiliation, l'abonnement du sieur Seveste cessa.

Se fondant sur celle réduction des représentations, et sur les réductions que le droit des pauvres a subies pendant les derniers mois de 1848 et pendant l'année 1849, le sieur Seveste a refusé de payer le montant intégral de son abonnement. Le bureau de bienfaisance réclamait, au contraire, l'exécution du traité d'abonnement en consentant à imputer sur la créance le montant d'une représentation au bénéfice des pauvres donnée par le sieur Seveste, alors qu'il n'y était pas obligé, et dont le montant s'était élevé à 1,283 fr. 25 c. Lo conseil de préfecture avait repoussé la prétention du sieur Seveste par arrêté du 28 avril 1851.

Le directeur des théâtres de la banlieue s'est pourvu contre cet arrêté, et, après avoir entendu le rapport de M. Gomel, maître des requêtes, Me Ripault, avocat du sieur Seveste, et Me Fabre, avocat du bureau de bienfaisance de Belleville, sur les conclusions de M. du Martroy, mattre des requêtes, commissaire du gouvernement, est intervenue la décision suivante :

<< Vu les lois des 7 frimaire an V et 9 décembre 1809; >> Considérant que la convention par laquelle un abonnement fixe a été substitué, pour les années 1848, 1849 et 1850, à la perception au profit des pauvres du droit proportionnel sur les recettes quotidiennes du théâtre de Belleville, a constitué entre le bureau de bienfaisance de cette commune et le sieur Seveste un contrat qui n'a cessé de produire ses effets qu'à partir du 1er septembre 1849, date de la résiliation qui en a été consentie entre les parties;

>> Considérant toutefois que cette convention a été passée à raison de 4,000 fr. par année, en vue d'une situation ordinaire et de représentations qui devaient se renouveler chaque soir;

» Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au lieu de 488 représentations qui, dans les circonstances ordinaires, auraient dû être données du 1er mai 1848 au 1er septembre 1849, il n'en a été donné que 281, et que c'est par suite des événements politiques de février 1848 et de l'état d'agitation dans lequel s'est trouvée la commune de Belleville, que le sieur Seveste a été empêché

de donner des représentations quotidiennes; que, déc lors, il convient de tenir compte dans ce règlement des sommes dont le sieur Seveste est débiteur, des circonstances ci-dessus énoncées, et qu'il y a lieu de déduire du montant de l'abonnement, qui serait dû pour les seize mois courus du 1er mai 1848 au 1 septembre 1849: 1° une somme proportionnelle au nombre des représentations qui n'ont pu être données; 2° le produit d'une représentation qui a été donnée au profit des parvres, le 10 novembre 1848, et s'élevant à la somme de 1,283 fr. 25 c., et qu'ainsi il y a lieu de fixer la somme due par le sieur Seveste à 1,787 fr. 75 c.;

» Art. 1. La somme due par le sieur Seveste au bureau de bienfaisance de Belleville, pour les causes cidessus énoncées, est réglée à 1,787 fr. 75 c.

» 2. L'arrêté du conseil de préfecture de la Seine, en date du 28 avril 1851, est réformé en ce qu'il a de contraire au présent décret.

» 3. Le surplus des conclusions tant du sieur Seveste que du bureau de bienfaisance de Belleville est rejeté.

» 4. Les dépens sont compensés entre les parties. »

31 juillet. = CIRCULAIRE concernant les caisses de scours mutuels et relative à l'exécution des articles 9 et 10 du décret du 26 mars 1852 et de l'article 4 de l'arrété ministériel du 5 janvier 1855.

Monsieur le préfet, l'importance que le gouvernement de l'empereur attache au développement des sociétés de secours mutuels me fait un devoir d'appeler votre altention spéciale sur ces utiles institutions, au moment où va s'ouvrir la session de votre conseil général.

Vous recevrez très-prochainement des instructions qui auront pour but de mettre chacun des conseils municipaux de votre département en demeure de se prononcer sur l'utilité de la fondation d'une société de secours mutuels dans leur commune. Mais, afin de préparer et de faciliter cette fondation dans les communes dont les ressources ne pourraient suffire à l'exécution des obligations imposées par les articles 9 et 10 du décret du 26 mars 1852, et par l'article 4 de l'arrêté ministériel du 5 janvier 1853, il me paraît tout à fait opportun de demander au conseil général un crédit destiné à y pouvoir. Vous ne manquerez pas de faire remarquer au conseil combien cette minime allocation au budget départemental sera féconde en heureux résultats, puisqu'elle vous donnera les moyens d'assurer aux communes les plus pauvres les avantages d'une institution dont l'expérience a déjà démontré la salutaire influence aussi bien parmi les populations rurales que parmi les ouvriers des villes.

Vous remettrez sous les yeux du conseil général ma circulaire du 18 août 1853, n° 57; elle contient les renseignements relatifs à la nature et à l'étendue des obligations imposées aux communes en faveur des sociétés approuvées.

Dans peu de jours, je vous adresserai un certain nombre d'exemplaires du rapport présenté à l'empereur par la commission supérieure sur la situation des sociétés de secours mutuels pendant l'année qui vient de s'écouler. Vous veillerez à ce que la distribution de ce document soit faite conformément aux prescriptions détaillées de ma circulaire du 24 août 1855.

8 août. DÉCISION du bureau de l'assistance judiciaire près la cour impériale de Paris, qui déclare que l'article 75 de la loi de finances du 25 mars 1817, qui donne le droit au ministère public de faire d'office procéder gratuitement, et quand il y échet, à la rectification des actes de l'état civil intéressant les indigents, n'est pas un obstacle à ce qu'aujourd'hui les indigents sollicitent l'assistance judiciaire pour faire procéder par eux-mêmes à ces rectifications.

Le contraire avait été décidé par le bureau d'assistance judiciaire établi près le tribunal de Joigny, par une décision non motivée rendue, le 17 juin 1854, après un rapport ainsi conçu :

Le 8 de ce mois, M. le procureur impérial de Joigny nous a saisi d'une demande qui lui avait été adressée par le sieur Joseph Bezault, berger, et tendant à obtenir l'assistance judiciaire pour faire rendre un jugement destiné à remplacer l'acte de naissance du sieur ÉmileAndré Bezault, son fils, né le 5 août 1846, cet acte de naissance ayant été omis sur les registres de l'état civil de la commune. L'affaire dont s'agit soulève la question suivante :

L'article 75 de la loi du 25 mars 1817 se trouve-t-il abrogé par la loi sur l'assistance judiciaire du 22 jan

vier 1851?

Il paraît difficile de résoudre affirmativement cette question.

En effet, en principe, l'abrogation d'une loi est expresse ou tacite.

Elle est expresse lorsqu'une loi postérieure la prononce nommément; elle est tacite lorsqu'elle résulte implicitement, mais nécessairement, de dispositions législatives nouvelles. Par exemple, une loi est-elle inconciliable avec une autre loi antérieure? Il est clair que, dans cet état, celle-ci est abrogée tacitement. Mais il ne faut pas perdre de vue que les lois relatives à des matières spéciales ne peuvent être considérées commo abrogées par des lois générales postérieures qu'autant que ces dernières contiennent des propositions expresses d'abrogation.

Telle est la doctrine des auteurs consacrée par de nombreux monuments de jurisprudence, et notamment par un arrêt de la cour de cassation du 8 août 1822.

Peut-on soutenir que la loi du 22 janvier 1851 est inconciliable avec l'article 75 de la loi du 25 mars 1817? La négative nous paraît certaine si l'on se reporte au texte de ces lois, et si l'on veut bien se pénétrer de l'esprit qui a présidé à leur confection.

Non-seulement ces deux lois n'ont rien d'inconciliable, mais elles ont même un but tout à fait différent.

Conçue dans un intérêt d'ordre public, la première a considéré les questions qui se rattachaient à l'état des personnes comme intéressant la société tout entière, et c'est à ce titre qu'elle a autorisé le ministère public à agir d'office en cas d'indigence dûment constatée de l'individu qui réclame la rectification.

La loi de 1851, au contraire, a eu pour but de venir en aide à l'intérêt privé et de faciliter l'exercice des actions judiciaires, paralysées par l'état de pauvreté des parties intéressées.

La différence entre les deux lois est si grande que, dans le premier cas, le trésor n'a aucun recours contre

le justiciable dont l'état a nécessité le jugement, tandis que, dans le second, il ne fait, en quelque sorte, qu'une avance, et il est toujours fondé à exiger le remboursement des frais, si l'adversaire de la partie qui a obtenu l'assistance judiciaire se trouve par la suite dans une position de fortune qui lui permette de les payer.

La loi du 25 mars 1817 et celle du 31 janvier 1851 n'ont donc rien d'inconciliable et peuvent, par conséquent, exister simultanément.

Si vous admettez cette interprétation, vous n'aurez point à apprécier la demande qui vous est soumise, laquelle rentre dans les attributions conferées à M. le procureur impérial par l'article 75 de la loi du 25

mars 1817.

Sur ce rapport, le bureau de Joigny a décidé qu'il n'y avait lieu de statuer, et que le dossier serait remis immédiatement à M. le procureur impérial.

Sur ce pourvoi de M. le procureur général, qui a déféré cette décision au bureau établi près la cour, est intervenue une décision réformatrice dont voici le texte :

« Vu la lettre de M. le procureur général près la cour impériale de Paris, en date du 11 juillet 1854, par laquelle il défère au bureau, en vertu de l'article 12 de la loi du 22 janvier 1851, une décision rendue le 17 juin 1854 par le bureau d'assistance judiciaire près le tribunal de Joigny, qui a déclaré n'y avoir lieu à statuer sur la demande du sieur Bezault, tendante à la rectification d'un acte de l'état civil;

» Vu ladite décision et le rapport qui la précède, duquel résulte la question de savoir si l'article 75 de la loi du 25 mars 1817 se trouve abrogé par la loi sur l'assistance judiciaire du 22 janvier 1851, ou si ces deux lois peuvent se concilier dans leur application;

» Vu les observations présentées sur cette question par M. le substitut de M. le procureur impérial près le tribunal de Joigny;

» Vu les avis du conseil d'État, des 12 brumaire an XI et 30 frimaire an XII, l'article 75 de la loi du 25 mars 1817, l'article 3 de la loi du 18 décembre 1850, et enfin la loi du 22 janvier 1851 sur l'assistance judiciaire;

>> Considérant que la loi du 22 janvier 1851 est une loi générale, qui a eu pour but de donner aux indigents le moyen d'exercer leurs actions et leurs droits en justice, quel qu'en fût l'objet ;

» Que l'article 75 de la loi de finances du 25 mars 1817 a eu seulement en vue de venir en aide aux indigents dans un cas déterminé, celui où il s'agit de réparer les omissions et faire les rectifications qui les intéressent sur les registres de l'état civil, dans lequel cas, porte cet article, seront visés pour timbre et enregistrés gratis les actes de procédure et les jugements à la requête du ministère public;

» Que cette disposition est donc spéciale dans son objet, et qu'elle l'est également, quant à l'action qui est réservée dans ce cas au ministère public;

le

>> Considérant qu'il n'est pas douteux qu'aux termes de cette disposition de loi qui n'a pas été abrogée, ministère public ne puisse toujours agir dans le cas pour lequel elle a été faite, ou lorsque l'ordre public, dont il est constitué le gardien, lui paraft intéressé dans la question, comme s'il y a lieu de remplacer les registres perdus ou incendiés par les événements de la guerre, et

de suppléer aux registres qui n'auraient pas été tenus, cas prévu par la deuxième partie de l'article 75 de la loi du 25 mars 1817;

» Mais que l'action donnée dans ces cas au ministère public, comme elle l'a été depuis par la loi du 18 décembre 1850 pour ce qui est relatif au mariage des indigents, ne s'oppose pas à l'action directe que l'indigent peut demander à former dans son propre intérêt, depuis l'existence et à la faveur de la loi du 22 janvier 1851;

» Qu'en effet, l'indigent a été mis par cette loi dans une position égale à celle des autres citoyens pour tout ce qui concerne l'exercice de ses droits en justice;

» Que la règle générale étant donc que la rectification d'un acte de l'état civil non-seulement peut-être, mais doit être demandée par les parties intéressées (code Napoléon, article 99), l'indigent trouve dans la loi du 22 janvier 1851, qui n'a excepté aucun cas, le moyen de former une pareille demande, et que l'en priver, ce serait lui dénier un des effets de la loi ;

» Que l'article 85 de la loi du 25 mars 1817 avait eu pour but de remédier à l'impossibilité où il était d'agir en donnant pour ce cas l'action au ministère public; mais que cette impossibilité n'existant plus, l'indigent est replacé dans le droit commun;

>> Considérant qu'il n'y a rien d'incompatible et d'inconciliable entre l'action donnée dans certain cas au ministère public, telle qu'elle résulte de l'article 75 | de la loi du 25 mars 1817, et l'action que peuvent exercer, dans les mêmes cas, les parties intéressées, le ministère public et les parties restant juges, à leurs points de vue respectifs, de l'intérêt et des motifs qui les font agir; que c'est là ce qui se rencontre dans un grand nombre de dispositions de la loi, de celles surtout qui touchent à l'état des personnes, et notamment en ce qui concerne le mariage;

>> Considérant, en fait, que le sieur Joseph Bezault, berger, demeurant à Césilly, arrondissement de Joigny, a adressé, le 2 juin dernier, une demande à M. le procureur impérial près le tribunal de Joigny, à l'effet d'obtenir l'assistance judiciaire pour faire rectifier les registres de l'état civil de la commune de Césilly, en ce que l'acte de naissance d'Émile-André, son fils, n'y aurait pas été inscrit;

» Que le sieur Bezault a justifié de son indigence dans les formes prescrites par la loi du 22 janvier 1851;

>> Par ces motifs, le bureau statuant conformément à l'article 12 de la loi susdite, sur la décision qui lui a été déférée par M. le procureur général,

» Dit que c'est à tort que le bureau d'assistance judiciaire près le tribunal de Joigny a déclaré n'y avoir lieu de statuer sur la demande du sieur Bezault; réforme ladite décision et accorde l'assistance judiciaire au sieur Bezault, à l'effet de poursuivre par les voies de droit la rectification, en ce qui le concerne, des registres de l'état civil de la commune de Césilly. »

25 août. JUGEMENT du tribunal correctionnel de Tonnerre qui condamne à deux ans de prison et 300 fr. d'amende une dame de charité du bureau de bienfaisance de cette ville pour détournement de deniers des

pauvres.

Madame X..., dame patronesse du bureau de bienfai

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sance de Tonnerre (Yonne), était citée devant le tribunal correctionnel de cette ville pour détournement des deniers des pauvres.

A la suite d'une longue et minutieuse instruction dans le cours de laquelle près de cent témoins furent entendus, il a été reconnu que si, en toute occasion, madame X... plaidait chaleureusement la cause des malheureux, c'était uniquement pour mieux voler les infortunés qu'elle était chargée de secourir. Ainsi elle trafiquait de la charité et réduisait les secours; ella mangeait le pain et la viande destinés aux pauvres ; eile garnissait son foyer du chauffage des pauvres; se faisait faire des remises sur les fournitures et payait avec des bons de pain ses menues dépenses de table, fruits, légumes, champignons, etc. Enfin, l'information a établi que sur la modique somme de 1,100 fr. et 1,200 fr. qu'elle a été appelée à distribuer chaque année, tant en viande qu'en pain et quelque pen d'argent, cette dispensatrice du bien des pauvres était venue à bout de détourner, notamment en 1855, plus de 400 fr., c'està-dire au dela du tiers des secours alloués.

Les débats auxquels a donné lieu cette affaire n'ont pas duré moins de quatre audiences. Malgré une donation de 5,000 fr. comptant déposée le matin même au bureau de bienfaisance, dans le but de réparer le tort fait aux pauvres; malgré les efforts de son défenseur pour la faire considérer comme ne jouissant pas de la plénitude de ses facultés intellectuelles, le tribunal correctionnel de Tonnerre a condamné madame X... à deux années d'emprisonnement, 300 fr. d'amende et aux frais.

31 août. = CIRCULAIRE adressée par M. le ministre des finances à MM. les préfets, relative aux pensions civiles. (Extrait.)

Monsieur le préfet, quelques-uns de MM. vos collègues m'ont soumis, relativement à l'exécution des dispositions des articles 30 et 35 du décret du 9 novembre 1853 sur les pensions civiles et de l'article 6 de l'arrêté du 25 avril 1854 sur les congés, la question de savoir si la désignation des médecins ne lui appartenait pas, aussi bien en ce qui concerne les employés des administrations financières que pour les comptables directs du trésor.

Il m'a paru que la délégation à MM. les préfets du droit de nomination des médecins appelés à constater l'état de santé de tous les agents extérieurs ressortissant au ministère des finances, demandant soit leur mise à la retraite pour cause d'invalidité, soit des congés sans retenue pour raison de maladie, était une conséquence naturelle du décret de décentralisation du 25 mars 1852.

Je crois donc devoir résoudre affirmativement la question dont il s'agit, et il demeure entendu que les désignations de médecins auxquelles vous procéderez s'appliqueront indistinctement aux deux catégories de fonctionnaires spécifiés plus haut.................

Une autre question a aussi été soulevée à l'occasion de la prestation de serment des médecins délégués: on a demandé devant quelle autorité cette prestation devrait avoir lieu. Je complète les instructions qui précèdent en vous faisant connaitre qu'en principe le serment doit être prété entre les mains du préfet pour l'arrondissement chef-lieu et entre celles du sous-préfet pour chaque arrondissement de sous-préfecture (en exemption des droits d'enregistrement, conformément à la décision

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