Art. fournie, comme on disait au temps passé, et 122. les créanciers se consoleront avec ces paroles de l'Évangile : Mutuum date, nil indè sperantes (a). Toutefois les juges de commerce ne peuvent donner de surséance, lorsqu'il s'agit de lettres de change et de billets à ordre (1) (b). Il est assez généralement reconnu, quoique la Cour d'Aix et celle de Bordeaux aient émis une opinion contraire (2), que les juges peuvent seulement accorder des délais à un débiteur, dans le cas d'une condamnation qu'ils prononcent contre lui, et non lorsque la dette est déjà reconnue dans un acte authentique, incontesté, et exécutoire par sa propre force. Les doutes que la rédaction isolée de l'article 1244 du Code civil avait pu faire naître à cet égard, n'ont plus de prétexte raisonnable depuis l'apparition du Code de procédure : c'est par le jugement même qui statue sur la contestation, que le délai doit être donné; il faut donc qu'il y ait eu recours à un tribunal, et jugement demandé. Or celui qui a dans sa main un titre exécutoire n'a pas besoin de jugement. Et rien n'est plus juste. Si je prète sur un simple billet, je m'abandonne à la bonne foi de mon débiteur; je m'expose à la nécessité les débiteurs. Elles nous étaient venues de Théodoric, roi d'Italie et des Goths. Voyez Cassiodore, lib. 2, variar., cap. 38; l'ordonn. de 1535, chap. 8, art.32 et 33, et celle du mois d'août 1669, tit. 6. (a) Conf. Carré, no 523. -Dalloz, t. 18, p. 276. (1) Code de comm., art. 157 et 187.-Voyez aussi les art. 1656 et 1657 du Code civil. (b) Un arrêté du 25 novembre 1814 autorise le roi à accorder un sursis de payement à des négociants, corporations ou autres personnes, qui, sans qu'il y ait de leur faute, et par des événements extraordinaires de la guerre, ou par d'autres calamités imprévues, se trouvent dans l'impossibilité momentanée de satisfaire leurs créanciers. Ce sursis est accordé sur l'avis des cours d'appel, après avoir entendu les créanciers du débiteur qui demande la surséance. Aucun délai ou sursis ne peut être accordé pour plus de douze mois, mais il peut être prolongé après une nouvelle information sur la cause de la demande. (Pasinomie, t. 1, p. 359.) Les sursis accordés conformément à cet arrêté, suspendant le cours de la prescription et de la péremption d'instance, ils n'arrêtent pas les poursuites de le poursuivre, après le jour de l'échéance, afin d'obtenir des juges les garanties et les moyens d'exécution que j'ai négligé de prendre. Il faut bien que je me soumette aux tempéraments qu'ils y pourront apporter. Mais quand je me suis armé des plus sévères précautions, quand la loi a revêtu d'avance le titre que j'ai choisi, de toute l'authenticité et de toute la vigueur exécutoire d'un arrèt, il n'est pas permis aux magistrats de faire intervenir leur autorité, pour suspendre ou pour modifier l'exercice d'un droit que je ne tiens pas d'eux (c). Art. 122. Le délai que les tribunaux peuvent accor- 123. der en jugeant, s'appelle délai de gráce. II commence du jour de la prononciation, si le jugement est contradictoire, attendu que le débiteur doit connaître, dans ce cas, la faveur qu'il a obtenue. Si le jugement a été rendu par défaut, le délai ne prend son cours qu'à partir du jour de la signification, parce que, jusque-là, le défaillant est réputé ne pas savoir ce qui a été prononcé. Il résulte expressément de cette dernière disposition que le délai de grâce peut être donné d'office. Cependant M. Pigeau a prétendu que le délai devait toujours être demandé (3), ce contre les cautions, et n'empêchent pas de prendre des mesures conservatoires. Ces sursis ne peuvent être accordés que sur la production d'un certificat de l'administration locale, constatant que les créanciers du pétitionnaire ont été entendus et qu'ils ont trouvé probable l'état de la situation. (Arrêts de Brux. des 12 mai 1819, 17 nov. 1827, 21 mars 1832, et 28 août 1835. Jurispr. de Brux., 1819-2-35, 1828-1-67, 1832-1-579 et 1836-2-202.) Voyez, sur cette matière, l'Essai historique sur les surséances, par S. P. Lipman, avocat. Amsterdam, 1827, in-80. (2) Sirey, 14-2-257 et 373. (c) Conf. Carré, no 524. Dalloz, t. 20, p. 466. La cour de Bruxelles avait d'abord jugé, le 4 avril 1825 (Jurispr. de Brux., 1825-2-105. Jurispr. du XIXe siècle, 1825-3-141), que les juges pouvaient accorder un délai, même lorsque des poursuites en payement étaient déjà commencées, et en vertu de titres préexistants. Mais la cour de cassation a réformé cet arrêt le 14 mars 1826. (Jurispr. de Brux., 1826-1-205. Jurispr. du XIXe siècle, 1826-3-175.) (3) Tome 1, p. 515. 124. M. Carré, pour justifier l'avis de M. Pigeau, propose une distinction: il pense que la loi, en parlant du délai de grâce pour l'exécution d'une condamnation prononcée par défaut, ne s'applique point au défendeur qui n'a pas comparu sur l'ajournement, mais à celui qui, s'étant d'abord présenté, a requis le délai par ses défenses, et s'est ensuite abstenu de plaider (a). Cette distinction est tout à fait en dehors de la question. Le débiteur qui comparaît et qui, dans ses écritures, requiert un délai pour payer, ne peut faire de sa dette une reconaissance plus formelle. Certes le jugement qui intervient, dans cet état de choses, n'est point un jugement par défaut, quand même il n'y aurait pas eu de plaidoirie. Je ne puis concevoir de condamnation par défaut que celle qui a été prononcée contrà inauditum, soit parce que le défendeur n'a pas constitué d'avoué pour le représenter, soit parce que son avoué n'a rien dit, ni rien écrit, pour faire rejeter ou modifier les conclusions du demandeur (1). Or, donner un délai qui n'a pu être demandé, c'est le donner d'office (6). La conséquence est inévitable. Elle s'agence parfaitement d'ailleurs avec le système du Code touchant les jugements par défaut; car un tribunal ne doit adjuger les conclusions d'une partie, dans l'absence de l'autre, que s'il les trouve justes et bien vérifiées; et cette vérification des circonstances de l'affaire et de la position du défaillant, peut conduire les magistrats à trouver juste de lui accorder un délai pour l'acquittement de sa dette. L'article 1188 du Code civil veut que le bé(a) Carré, no 526. (1) Voyez au chap. suiv. (b) Le juge doit user avec la plus grande réserve de la faculté que lui donne la loi d'accorder des délais aux débiteurs. (Brux., 16 nov. 1851. Jurispr.de Brux., 1832-1-66. Jurispr. du XIXe siècle, 1852-3529. Dalloz, t. 20, p. 463.) (c) Un délai peut encore être accordé dans le cas des art. 1655, 1656, 1657, 1661, 1899-1901 du Code civ. (V. Carré, Proc., no 528.) Cet auteur pense (no 529) 124.5 néfice du terme ne puisse être invoqué, lorsque Art. les sûretés données au créancier par le contrat viennent à être compromises, de quelque manière que ce soit. Le Code de procédure a dit la même chose pour le délai de grâce. Les juges ne doivent l'accorder qu'au débiteur dont la foi n'est pas suspecte, et qui n'a besoin que de cette allégeance pour arriver à sa libération : il cesse d'en jouir, s'il est poursuivi d'un autre côté; si la vente de ses biens est provoquée; s'il est constitué prisonnier, ou déclaré failli; enfin si, par toute autre cause, il tombe dans un état tel, que le sursis tournerait évidemment à la perte d'un droit légitime (c). Le délai de grâce n'a d'autre effet que celui de suspendre des rigueurs dévorantes, et d'arrêter cet ouragan de poursuites qui submerge toute la fortune d'un malheureux, auquel un peu de calme aurait permis de surgir au port. Si dies nec dùm effluxit, creditor ad solutionem antè agens, et plus tempore petens, repellitur (2). Mais en donnant à l'un le temps de rassem- 15. bler paisiblement les ressources qui doivent éteindre sa dette, la loi n'a point voulu interdire à l'autre la faculté d'agir pour conserver son droit, et pour en assurer l'exercice. Ainsi je puis, en attendant l'expiration du délai, frapper d'une inscription hypothécaire les immeubles de mon débiteur (3), m'opposer à ce que le partage d'une succession qui lui est échue se fasse hors de ma présence (4), saisir les sommes qui lui sont dues, et demander qu'elles soient versées en mes mains, aussitôt qu'il me sera permis d'aller en avant. Toutes ces précautions ont pour objet de maintenir les choses dans un état de sûreté, sans porter atteinte aux conditions du statu quo, en ce qui concerne les poursuites d'exécution (d). que le délai ne pourrait être refusé alors même qu'il aurait été stipulé par les parties, comme condition essentielle, que le débiteur ne pourrait obtenir de délai. (2) Joannes a Sande, Recueil des arrêts du sénal de Frise, liv. 2, tit. 5, déf. 4. (3) Code civil, art. 2123. (4) Ibid., art. 882. (d) Conf. Carré, t. 1, p. 341, note 1. - Dalloz, t. 20, p. 464. De même qu'il est permis aux juges de tempérer, suivant la position des personnes et des choses, les rigueurs trop hâtives de l'exécution de leurs sentences; de mème ils peuvent renforcer, dans certains cas, la sévérité des règles ordinaires, et donner à saisir nonseulement les meubles et les immeubles de la partie condamnée, mais encore sa liberté, son corps. Je devrais, fidèle à mon plan, placer ici l'histoire de cette procédure, inévitable début du lion antique sur lequel on a posé depuis le pied de la Justice, et tracer l'esquisse de ces mœurs rudes, bizarres, qui permettaient au créancier d'emprisonner, de torturer le débiteur, alors qu'elles défendaient de prendre en gage ses armes et sa charrue (1). Puis arrivant à l'époque où l'on comprit mieux la valeur de P'homme, je dirais comment les puissantes théories de la liberté parvinrent à se faire jour dans les ténèbres de la pratique, et comment, en matière civile, la contrainte par corps cessa d'ètre une règle générale, pour descendre au rang des plus étroites exceptions. Mais j'ai déjà consacré beaucoup de pages à ce qui touche les jugements, et ce vaste sujet réclame encore d'autres explications. Mieux vaut renvoyer les développements de la contrainte par corps au chapitre de l'emprisonnement. Peut-être, avant que j'arrive à cette partie du Code, le temps que presse si fort l'ardeur de nos progrès, aura-t-il fait disparaître le principe lui-même. Toutefois je ne veux pas traverser un seul article, qu'on me pardonne l'expression, sans m'arrèter un peu à ce qui doit être défini, préparé, et sans indiquer du moins les maximes de droit qui s'y rattachent. La contrainte par corps est l'emprisonnement que le créancier fait faire de la personne de son débiteur, pour le forcer à payer. Elle fut abolie le 9 mars 1793, comme attentatoire aux droits de l'homme. Les prisons s'ouvri (1) Diodore, lib. 1, part. 2, cap. 5. (2) Sauf en ce qui touchait les étrangers. Cette omission fut réparée quelques jours après, par une autre loi du 4 floréal an vi. J'en parlerai au chapitre de l'emprisonnement. (3) Code civ., art. 2059 et 2060; Code de procéd., BONCENNE. TOME 1. rent aux débiteurs, pour faire place aux suspects, car ce fut le lendemain que l'on décréta l'établissement du tribunal révolutionnaire. Cependant le besoin de faire rentrer le commerce dans le sein de la probité se fit bientôt sentir. On reconnut que la contrainte n'était point une aliénation du corps, mais une garantie de fidélité, et que si le citoyen met sa vie mème en gage pour sûreté de ses engagements envers la société, il était assez naturel qu'il donnât une garantie sur sa personne, pour assurer l'acquittement exact de ses obligations. La liberté consiste dans un droit égal à la protection des lois, et non dans le droit de n'ètre jamais incarcéré. La contrainte par corps fut donc rétablie le 24 ventose an v, puis organisée par la loi du 15 germinal an vI. Le premier titre de cette loi traitait de la contrainte par corps en matière civile, le second de la contrainte par corpsen matière de commerce, et le troisième du mode d'exécution des jugements emportant contrainte par corps. C'était un ensemble complet (2). Mais le Code civil vint en détacher la part des matières civiles; puis le Code de procédure s'empara du mode d'exécution, pour en composer son titre de l'emprisonnement. On devait s'attendre à voir le Code de commerce évoquer à son tour, et classer parmi ses articles les autres dispositions d'un système qui semble lui appartenir plus spécialement. Cette attente a été trompée. Le Code de commerce n'a point de titre sur la contrainte par corps; il ne fait là-dessus que se référer aux lois existantes. Ainsi, pour les matières commerciales, il faut aller chercher ce qui reste encore du cisaillement de la loi du 15 germinal an vi. La contrainte par corps est légale, lorsque la loi ordonne (3) ou permet (4) aux juges de la prononcer. Elle est conventionnelle, lorsqu'elle est art. 191, 221, 164, 605, 604, 690, 712, 714, 744, 824, 859; et la loi du 16 septembre 1807, art. 1er, relative aux étrangers non domiciliés en France. (4) Code civil, art. 2060, § 5, 2061 et 2062; Code de pr., art. 107, 126, 127, 201, 215, 320, 554; et la loi, ci-dessus citée, du 10 sept. 1807, art. 2 et 3. 44 Art 126. 1 126. Art. formellement stipulée dans un contrat. Cette La contrainte par corps ne peut être exer- La rigueur de la contrainte serait excessive, s'il s'agissait d'une somme moindre de 500 francs. Un intérêt aussi modique ne peut jamais avoir assez d'influence sur la fortune du créancier, pour qu'on lui abandonne en gage le corps du débiteur. Hors le cas de stellionat, il est défendu aux juges de la prononcer contre les septuagénaires, contre les femmes et les filles; pour celles-ci, la loi romaine disait que les bonnes mœurs sont intéressées à ce qu'on ne les mette pas dans une telle dépendance de leurs créanciers. Ut non per hujus modi occa siones, inveniantur circa castitatem in- Art. juriate (1). Chez les Anglais, l'exécution de tout jugement entraîne la contrainte par corps, au moyen d'un writ de capias ad satisfaciendum (4). Toutefois un statut de Georges III a limité à vingt jours la durée de la détention, lorsque la dette n'excède pas vingt schellings, et à quarante jours, lorsqu'elle n'excède pas quarante schellings. Mais si la condamnation est de quarante et un schellings, et si le débiteur est hors d'état de payer, l'emprisonnement peut durer toute sa vie. Nous devons être fiers de notre législation, en la comparant à ce vieux culte de nos voisins pour les traditions du moyen âge. Chez nous, la contrainte par corps n'est admise, au civil, que comme une stricte exception, dans certains cas spécifiés (5). «Hors ces cas, dit l'article 2063 du Code civil, il est défendu à tous juges de la prononcer, à tous notaires et greffier de recevoir des actes dans lesquels elle serait stipulée, et à tout Français de consentir pareils actes, même en pays étrangers; le tout à peine de nullité, dépens et dom mages et intérêts. » La contrainte est une peine; elle s'éteint par la mort du contraignable, et ne peut être exercée sur la personne de ses héritiers. Il n'y a plus alors que les biens qui restent af fectés. Les rédacteurs du Code civil ne conservèrent point les dispositions de l'ordonnance de 1667, qni soumettait, de plein droit, à la contrainte par corps les administrateurs du bien d'autrui, pour reliquat de leurs comptes, et tous autres plaideurs, pour dommages et intérêts, restitution de fruits, et dépens, après quatre mois de la condamnation obtenue contre eux (6). « N'est-ce pas assez, 126. 5 (5) En matière de commerce la contrainte par corps est de règle générale. Outre que le créancier s'est plus confié à la personne du débiteur qu'à ses biens, l'inobservation d'un seul engagement peut en faire manquer beaucoup d'autres, et ruiner ainsi le crédit de toute une place, de tout un pays. Il importe donc que la loi s'arme de sa plus sévère puissance pour faire respecter la foi commerciale. (6) Titre 54, art. 2 et 5. 26. rt. disait-on, que le tuteur réponde sur ses biens d'une administration que la loi lui a imposée, ou qu'il a acceptée par affection? Faut-il encore que le mineur puisse attenter à la liberté de celui qui lui servit de père (1)? » En discutant le Code de procédure, on est revenu à des idées plus positives. L'histoire de tous les siècles et de tous les pays témoigne hautement qu'un tuteur, un curateur, un administrateur, ne sont pas toujours les fidèles images d'un bon père de famille, et que les dommages-intérêts encourus par un plaideur cauteleux, sont le plus souvent une peine dont se jouent la chicane et l'astuce. Toutefois le Code de procédure n'a point rendu au créancier le droit de faire exécuter son jugement par corps, après les quatre mois; mais il a donné aux juges la faculté de décerner, ou de ne décerner pas la contrainte par corps, suivant la variété des circonstances, la bonne ou la mauvaise foi du débiteur, et la nature de l'affaire. Il est dit au titre des jugements : << La contrainte par corps ne sera prononcée que dans les cas prévus par la loi. Il est néanmoins laissé à la prudence des juges de la prononcer : « 1o Pour dommages et intérêts en matière civile au-dessus de la somme de 300 francs; << 2o Pour reliquats de compte de tutelle, curatelle, administration de corps et communautés, établissements publics, et toute administration confiée par justice, et pour toutes restitutions à faire, par suite desdits comptes (2). » « Les juges pourront, dans les cas qui viennent d'être énoncés, ordonner qu'il sera sursis à l'exécution de la contrainte par corps, pendant le temps qu'ils fixeront: après lequel elle sera exercée sans nouveau jugement. Ce sursis ne pourra être accordé que par le (1) Rapport fait au tribunat par M. Gary, sur le titre de la contrainte par corps. (2) Pourvu que le reliquat et les restitutions montent à plus de 300 francs. La contrainte par corps ne peut jamais être prononcée pour une somme moindre, en matière civile. Voyez les arrêts cités au Répertoire de M. Favard, vo Jugement, sect. 1, § 2, no 8. jugement qui statuera sur la contestation, et Art. qui énoncera les motifs du délai. » Ainsi tout doit être réglé d'avance par le jugement qui porte la condamnation principale; point de nouveaux procès, point de conclusions nouvelles, ni pour la contrainte, ni pour le sursis, ni pour l'exécution après l'expiration du terme fixé. La contrainte par corps ne doit être prononcée que lorsqu'elle a été demandée; mais le sursis peut être donné d'office, car les juges ont la faculté de modifier ce que la loi leur permet de refuser en entier (a). 126. 127. Autrefois on emprisonnait pour les dépens, après les quatre mois de la sentence, bien que 130. la contrainte ne fût, sous aucun rapport, applicable à l'objet principal de la condamnation (5). C'était un frein contre la fougueuse témérité des plaideurs, ad coercendam in litibus movendis temeritatem. On a vu des enfants contraints par corps, à raison de dépens faits contre leur père, après la mort duquel ils avaient repris une instance (4). Cette rigueur déraisonnable ne se trouve point dans nos Codes (5). (6). Il est vrai, en général, que les dépens sont la peine du plaideur téméraire, mais il n'est pas moins constant que la plupart des procès sont mus par des doutes qui s'élèvent de bonne foi dans l'esprit des plaideurs; que ces doutes sont entretenus par l'imperfection d'une foule de textes, par la diversité des avis, et que la loi elle-même veut que l'on s'adresse aux tribunaux, parce que nul n'a le droit de se faire justice. Les dépens sont dus par la partie qui perd son procès, pour que celle qui le gagne soit rendue indemne des frais qu'elle a été obligée d'avancer : Propter litem, et non propter crimen. Ce sont les dommages et intérêts qui réparent les préjudices réels et les vexations outrageuses. (a) Carré, Proc., no 540. - Dalloz, t. 6, p. 300, nos 7 et suiv., 364 et suiv. (3) Ordonn. de 1667, t. 34, art. 2. (4) Arrêt du 27 novembre 1687 rapporté par Bor nier, 1. 1, p. 323. (5) Sirey, 1810-1-64, et 1817-1-225. (b) Paris, 17 janv. 1832. (Jur. du XIXe siècle, 1832-1-687.) |