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CASSATION (REQ.) 16 février 1863.

NOTAIRES, DISCIPLINE, FAIT NON PUNISSABLE,
CONFRATERNITÉ, Manquement, RéglemENT,
APPROBATION DU MINISTRE.

Un fait non légalement punissable, comme n'étant pas contraire aux lois, à la morale et à l'ordre public, peut néanmoins, au point de vue de la confraternité et des devoirs qu'ont à remplir les notaires les uns envers les autres, étre l'objet d'une peine disciplinaire (1),

(Me H...)

de l'arrondissement de Chinon a pris une déLe 25 mars 1862, la chambre des notaires libération ainsi conçue :- « Considérant que Me H... avait connaissance, ainsi qu'il le reconnait lui-même, de la vente sous signature privée intervenue entre M. Rousse et M. Chatry et rédigé par Me Durand; Considérant que la vente au profit de M. Boné reçue par Me H... n'est que la réalisation partielle de cette vente sous seing privé, et que les modifications apportées au sous seing n'en ont nullement changé l'essence primitive;-Considérant qu'il

--

En conséquence, est à l'abri de la cassation la délibération d'une chambre de notaires prononçant une peine disciplinaire contre un no-importe peu que la vente à Boné ne soit pas taire qui, au sujet d'un acte de vente qu'il était chargé de recevoir, s'est refusé à faire auprès d'un confrère rédacteur de l'acte sous seing privé de la même vente, une démarche de nature à terminer leur différend relativement à la réception de l'acte notarié, alors que, d'après un règlement en vigueur dans l'arrondissement, la minute et les honoraires de l'acte de vente authentique devaient appartenir au notaire rédacteur de l'acte sous seing privé (2). (Ordonn. 4 janv. 1843, art. 2.)

Un règlement dressé par une chambre de notaires a-t-il force exécutoire et peut-il, par suite, servir de base à une décision disciplinaire, lorsqu'il n'a pas été revêtu de l'approbation du ministre de la justice (3)? (Ordonn. 4 janv. 1843, art. 23.)-Non résolu.

signée par Chatry comme mandataire de Rousse; que l'avoir fait signer par madame Rousse mère, comme mandataire de son fils, en présence de Chatry n'est qu'une précaution (nimia precautio) qui ne change que l'apparence des choses sans en altérer la réalité;-Vu l'art. 32 du règlement actuellement en vigueur parmi les notaires de l'arrondissement de Chinon, ainsi conçu : « Lorsqu'un acte sous seing privé << sera réalisé par acte authentique entre les

parties qui l'auront signé, ou toutes autres « personnes qu'elles se seront substituées, la « minute appartiendra au notaire qui aura ex«clusivement rédigé le sous seing, et il « aura droit à la totalité des honoraires. »>— Considérant que, dans l'espèce, Me H... s'il jugeait, comme cela est possible, son intervention nécessaire et même indispensable dans l'affaire, aurait dù, ayant connaissance du sous seing rédigé par son confrère, chercher à s'entendre avec ce dernier pour réaliser en commun la vente au profit de M. Boné, ce à quoi Me Durand ne se serait probablement pas refusé ;— Considérant qu'en ne faisant ou ne faisant faire aucune démarche en ce sens et en arrêtant la vente Boné à l'exclusion de Me Durand, Me H... a manqué aux règles de la confraternité et violé l'art. 32 susvisé du règlement;

rappel à l'ordre, l'engage à être plus circonspect à l'avenir et émet l'avis que Me Durand aurait eu droit à la minute de l'acte authentique et a seul droit à la totalité des hono

(4) V. en ce sens, Cass, 18 juin 1862 (1862, p. 1041), et les décisions indiquées en note.-V. Rep. gén. Pal. et Supp., vo Notaires, n. 1152 et suiv. (2) Cet arrêt peut, au premier abord, paraître en contradiction avec un autre arrêt de la chambre civile, du 12 nov. 1856 (1857, p. 975), lequel casse la délibération d'une chambre de notaires qui avait prononcé une peine disciplinaire contre un notaire pour avoir reçu les contrats de vente d'immeubles déjà mis en vente, à sa connaissance, par un confrère, et avoir en cela agi contrairement aux règle--Par ces motifs, prononce contre M° H... le ments en vigueur, quoique non approuvés par l'autorité supérieure. La chambre civile a vu là un excès de pouvoirs, attendu que la délibération ne relevait aucun fait ni ne signalait aucune circonstance de nature à imprimer un caractère illicite au fait incriminé. En réalité, le vendeur avait jugé à propos de changer de notaire et d'investir un autre de son mandat; or, rien n'établissait que l'acceptation du nouveau mandataire fût de nature à troubler les rapports de bonne confraternité entre les deux notaires.—Au contraire, dans l'espèce que nous rapportons, il y avait différend entre les deux notaires sur la question de savoir qui devait recevoir l'acte authentique de vente. Or, le fait constaté du refus du second notaire à faire une démarche qui devait aboutir à terminer le différend constituait seul un manquement aux rapports de bonne confraternité; et, dès lors, la chambre avait évidemment pouvoir pour frapper un tel fait d'une peine discipli naire.-V. au surplus Rép. gén. Pal. et Supp., vo Notaires, n. 1100 et suiv.

(3) La négative ressort de la jurisprudence constante de la Cour de cassation; V. Cass. 10 dée. 1862 (suprà, p. 435), et la note.-Mais, bien que, dans notre espèce, la question eût été soulevée, la Cour n'a pas eu à s'en occuper, puisqu'elle recon

raires..

POURVOI en cassation par Me H... pour excès de pouvoir, et violation des art. 2 et 23 de l'ordonnance du 4 janv. 1843 et de l'art. 2004, C. Nap., en ce que la chambre des notaires dé Chinon avait frappé d'une peine disciplinaire un fait qui n'était prohibé ni par la loi ni par un règlement ayant autorité légale dans l'arrondissement (le reglement appliqué n'ayant point été approuvé par le ministre de la justice), et à l'occasion duquel fait n'avait été relevée ni même alléguée la moindre circonstance qui pût lui imprimer un caractère d'indélicatesse.

naissait n'avoir à statuer qu'à raison d'un fait qui, par lui-même, constituait un manquement aux bons rapports de confraternité qui doivent exister entre notaires, manquement passible, dès lors, de peines disciplinaires, abstraction faite de tous règlements ou délibérations.

ARRÊT.

LA COUR ;-Attendu que s'il est vrai qu'un fait qui n'est point contraire aux lois, à la morale et à l'ordre public, n'est pas légalement punissable, il est certain aussi qu'au point de vue de la confraternité et des devoirs qu'ont à remplir les notaires les uns envers les autres, ce même fait peut être l'objet d'une peine disciplinaire; Attendu qu'il est constaté par la décision attaquée que Me H..., en se refusant à faire auprès de son confrère une démarche qui eût pu terminer leur différend, et en excluant celui-ci de la participation à un acte de vente, a manqué aux règles de la confraternité; D'où il suit que le rappel à l'ordre prononcé contre Me H... est suffisamment justifié, et que la chambre de discipline n'a point excédé ses pouvoirs ;-Rejette, etc.

Du 16 fév. 1863.-C. cass., ch. req.-MM. Nicias Gaillard, prés.; Hardoin, rapp.; Fabre, av. gén. (concl. conf.); Dufour, av.

En matière d'ordre amiable, le droit de greffe de 25 cent. par 100 fr. du montant de la créance colloquée, est dû sur les bordereaux de collocation délivrés par le greffier (2). (Décr. 12 juill. 1808, art. 2.)—Rés. par le trib. (Enregistrement C. de Delmar et autres.) L'administration de l'enregistrement s'est pourvue en cassation contre le jugement du tribunal de la Seine, du 25 janv. 1862, que nous avons rapporté dans notre Bull. des décis. en mat. d'enreg., etc., art. 743.- Ce pourvoi était fondé sur la violation des art. 4 et 69, § 2, n. 9, de la loi du 22 frim. an 7, en ce que le jugement attaqué avait décidé que les collocations faites dans un ordre amiable étaient exemptes du droit proportionnel.

ARRÊT.

LA COUR;-Sur le moyen unique tiré de la violation des art. 4 et 69, § 2, de la loi du 22 frim. an 7:-Attendu qu'aux termes de l'art. 69, § 2, de la loi du 22 frim. an 7, le droit de 50 c. par 100 fr. pour les expéditions, aujourCASSATION (REQ.) 9 mars 1863. d'hui les minutes (L. du 28 avril 1816), des ENREGISTREMENT, ORDRE AMIABLE, COLLOCA-jugements, n'est dû qu'autant que ces jugeTION, DROIT PROPORTIONNEL, BORDEREAUX, ments portent condamnation, collocation ou DROIT DE GREFFE. liquidation de sommes et valeurs mobilières ;

Les collocations faites dans un ordre amia-Attendu qu'il est impossible de voir dans le ble ne sont point passibles, comme celles faites tant collocation; - Que les termes de la loi règlement d'ordre amiable un jugement pordans un ordre judiciaire, du droit propor- s'opposent à cette assimilation, aussi bien que tionnel de 50 cent. par 100 fr. établi par l'art. 69, § 2, n. 9, de la loi du 22 frim, an 7 (1).si, aux termes de l'art. 751 de la loi du 2t son esprit; Qu'il est évident, en effet, que (C. proc., art. 751.)

(1) V. conf., Trib. de la Seine, 25 janv. 1862 (Bull. d'enreg., art. 743), et la note; c'est le jugement attaqué; Trib. de Reims, 5 sept. 1862 (ibid., art. 796); G. Demante, Princip. d'enreg., 2o son opinion: Le juge-commissaire, dit la loi du 24 mai 1858, convoque les créanciers inscrits, afin de se régler amiablement sur la distribution du prix. » Et plus loin: Le juge dresse procès-verbal de la distribution du prix par règlement amiable. » Dans tout cela, le juge exerce une autorité purement morale et de conciliation; ce sont les créanciers qui se règlent eux-mêmes sur l'invitation du juge; c'est leur volonté, non celle du magistrat, qui est opérante et efficace; le procès-verbal dressé par le juge n'est pas un jugement portant collocation ou liquidation; cette seule considération met obstacle à la perception du droit proportionnel. » -V. aussi E. Clerc, Tr. de l'enreg., t. 1, n. 1152 et suiv.-Toutefois une induction contraire semblerait pouvoir être tirée de la circulaire du ministre de la justice, du 2 mai 1859, sur l'exécution de la loi du 24 avril 1858, modificative de la procédure d'ordre et qui a organisé la procédure de l'ordre amiable. On lit, en effet, dans cette circulaire (V. Lois, décrets, etc., de 1859, p. 180) que le procès-verbal d'ordre amiable, rédigé par le juge, le greflier tenant la plumeest signé par le juge et par le greffier, car c'est un acte du juge, qui ne diffère point du règlement qui met fin à l'ordre judiciaire. Mais, sainement entendu, ce passage de la circulaire ministérielle s'applique à la forme, et non au fond même de l'acte; dans la forme, c'est un acte judiciaire, car il est fait et rédigé par le juge; ce n'en est pas un au fond, car il constate, non pas une dé

édit., n. 433-II; voici comment cet auteur formule

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mai 1858, le juge-commissaire préside et assiste aux différentes opérations de l'ordre amiable, ce n'est pas lui qui dresse le règlement ; — Que ce sont les créanciers eux-mêmes qui s'entendent amiablement sur la distribution du prix, et que le juge ne fait qu'assurer l'exécution de leurs conventions en ordonnant la délivrance des bordereaux de collocation aux créanciers utilement colloqués et la radiation des inscriptions des créanciers non admis en ordre utile;-Attendu que ce n'est qu'à défaut du règlement amiable que le juge constate sur son procès-verbal que les créanciers n'ont pu. se régler entre eux, prononce l'amende contre ceux qui n'ont pas comparu et déclare ouvert l'ordre qui devient alors judiciaire ;Qu'ainsi ce règlement amiable ne constitue ni un jugement ni un acte dans le sens de la loi de frim. an 7;-Attendu qu'il est de principe qu'en matière d'enregistrement, l'interprétation ne doit jamais dépasser les termes de la loi, et que la régie de l'enregistrement ne peut exiger que les droits dont la quotité est expressément fixée;-Que rien ne serait.

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moins conforme au but que s'est proposé le législateur en organisant l'ordre amiable, lequel a été, en simplifiant la procédure, d'en réduire les frais, non-seulement ceux résultant de la rétribution des officiers ministériels, mais encore ceux perçus par le fisc;-Que de ce qui précède, il résulte que le tribunal de la Seine, en décidant que le règlement de l'ordre amiable ne pouvait donner ouverture au droit de 50 c. par 400 fr., loin d'avoir violé les articles invoqués de la loi du 22 frim. an 7, en a fait une juste et saine application;Rejette, etc.

Du 9 mars 1863.-C. cass., ch. req.-MM. Nicias Gaillard, prés.; Pécourt, rapp.; Blanche, av. gén. (concl. conf.); Moutard-Martin,

-

9,500 fr., de l'ouverture d'un chemin de fer à proximité du domaine de Vaugonard, et pour les deux tiers, soit 19,000 fr., des divers traSauret ;-Considérant que la plus-value qui a vaux de réparations exécutés par les époux pour cause l'ouverture du chemin de fer doit profiter à la dot, et accroître d'autant le fonds dotal; qui provient des travaux exécutés, lesquels Qu'il n'en est pas de même de celle ont eu pour objet et pour effet la conservation de ce fonds lui-même: que le montant peut donc en être touché par les intimés sans obligation de remploi ;-Considérant que Sauret, qui a payé avec des deniers non dotaux les frais de la vente du 5 sept. 1857, est également fondé à réclamer la restitution et le prélèvement desdits frais, lesquels se sont élevés à la somme de 15,000 fr....-Met l'appellation et ce dont est appel au néant, en ce que les remploi une somme de 45,000 fr. sur le prix époux Sauret ont été autorisés à toucher sans consigné ou dù par Foacier de Ruzé; émendant quant à ce, et statuant à nouveau, dit et ordonne que les époux Sauret ne pourront toucher sans être tenus à remploi que la somme de 19,000 fr., montant de la plus-value, et celle de 15,000 fr. montant des frais de la première vente, soit 34,000 fr., et que le surMais il n'en est pas de même de la plus-va-plus du prix dû par Foacier de Ruze ne sera lue provenant des travaux exécutés sur l'im- touché par eux qu'à la charge d'en faire emmeuble, lorsqu'ils ont eu pour objet et pour ploi conformément aux stipulations de leur effet sa conservation (2). contrat de mariage, etc.

av.

PARIS 23 mai 1863.

DOT, REMPLOI, Plus-value, ChemiN DE FER,
TRAVAUX DE CONSERVATION.

La plus-value résultant, pour un immeuble dotal, de l'ouverture d'un chemin de fer à proximité de cet immeuble doit profiter à la dot et accroitre d'autant le fonds dotal; par suite elle est sujette à remploi en cas de vente de l'immeuble (1).

(Foacier de Ruzé C. Sauret.)—ARRÊT.

LA COUR;-En ce qui touche les conclusions principales de Foacier de Ruzé, appelant:-Considérant que le prix moyennant lequel les époux Sauret ont acquis, le 5 sept. 1857, le domaine de Vaugonard, était de 180,000 fr., contrat en main; Considérant que postérieurement, le 29 avril 1861, les époux Sauret ont revendu leur immeuble à Foacier de Ruzé, au prix de 210,000 fr.; mais qu'il a été convenu entre les parties que certains frais de quittances, s'élevant à 1,500 fr., qui, dans les conditions ordinaires, sont à la charge de l'acheteur, seraient supportés par les vendeurs; d'où suit qu'en définitive le prix réel est de 208,500 fr., et que le bénéfice de la seconde vente sur la première est de 28,500 fr. seulement; - Considérant que les documents de la cause, et notamment l'expertise à laquelle il a été procédé en vertu du jugement de la chambre du conseil du tribunal civil de la Seine, en date du 1er mai 1861, établissent que cette plus-value résulte, pour un tiers, soit

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(2) V., dans le même sens, Rodière et Pont, Contr. de mar., t. 2, n. 415.-Jugé, au contraire, que les améliorations et constructions faites sur le fonds dotal sont dotales comme le fonds lui-même; Cass. 14 fév. 1843 (t. 1 1843, p. 607); 29 août 1860 (1861, p. 482); Rouen, 2 mai 1861 (1862, p. 749), et les renvois.-V. Rép. gen. Pal, et Supp., v° Dot, n. 77.

Du 23 mai 1863.-C. Paris, 3 ch.-MM. Barbier, prés.; Sallé, av. gén. (concl. conf.); Gavignot et Dupuich père, av.

TOULOUSE 22 mai 1863.

PARTAGE D'ASCENDANT, BIENS RÉUNIS, ACTION
EN NULLITÉ OU EN RESCISION, DÉCÈS DES
DONATEURS.

L'action en nullité ou en rescision d'un partage anticipé fait conjointement par le père et la mère entre leurs enfants ne peut être intentée qu'après le décès du dernier mourant des donateurs, alors que les biens de tous deux ont été confondus en une seule masse, et qu'il est impossible de distinguer, dans chacun des lots attribués aux enfants ce qui provient de l'un ou de l'autre héritage (3). (C. Nǝp., 1079.)

(Daram C. de Bouttes.)

leurs enfants, par donation entre-vifs du 9 mai 1853, le partage de leurs biens, qui se composaient d'immeubles appartenant au père et de reprises mobilières à exercer par la mère sur les biens du mari. Tous les immeubles furent abandonnés aux deux fils, Félix et Alfred de Bouttes, sous réserve de l'usufruit d'une por

Les sieur et dame de Bouttes ont fait entre

(3) V. dans le même sens, Lyon, 18 avril 1860 (1861, p. 375). — Toutefois, la question a été controversée: V. les arrêts cités en note sous Cass. 19 déc. 1859 (1860, p. 675).—Rép. gén. Pal, ct Supp., vo Partage d'ascendant, n. 240 et suiv.

tion au profit des donateurs et à la charge, en outre, de payer à ceux-ci, ou au survivant d'eux une reute annuelle de 4,000 fr. Quant aux deux filles qui avaient reçu une dot en argent, cette dot leur fut définitivement attribuée, et, pour compléter leurs parts, il leur fut alloué un supplément, également en argent, que les fils furent chargés de leur payer au décès du survivant des donateurs. Le sieur de Bouttes père est mort peu de temps après, dans la même année 1853.-Quelques années plus tard, le sieur Arthur Daram, qui avait figuré au partage du chef de sa mère, l'une des deux filles des sieur et dame de Bontes, prétendit que l'acte du 9 mai 1853 était nul comme ayant attribué tous les immeubles à certains copartageants à l'exclusion des autres, et il demanda, en conséquence, qu'il fût procédé à un nouveau partage de la succession de son grand-père.-Les défendeurs soutiurent que le partage, ayant été fait conjointement par les deux époux de Bouttes, ne pouvait être attaqué qu'après le décès des deux donateurs.

30 juill. 1862, jugement du tribunal civil de Toulouse, qui accueille cette fin de non-recevoir.

Appel par le sieur Daram.

ARRÊT.

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l'heure fixée par la nature et par la loi, il serait étrange que les bénéficiaires eussent le pouvoir de traduire en justice leurs père ou mère donateurs pour discuter ou contester avec eux l'importance, les avantages relatifs et la distribution, de leurs biens; -Attendu que le partage sous forme de donation entre-vifs n'a d'effet que par l'acceptation du donataire; que librement accepté il forme un contrat obligatoire, et que si le sentiment d'une respectueuse déférence a pu déterminer de la part des enfants quelque sacrifice de leurs intérêts, les mèmes raisons commandent le silence de l'abnégation pendant la vie de leur auteur; Qu'ainsi les principes du droit et des considérations de haute morale sont d'accord pour interdire à l'enfant donataire l'exercice de toute action en lésion ou en nullité du partage pendant la vie des père ou mère donateurs ;-Attendu que, par une conséquence et une application rationnelle des mêmes principes, l'action en nullité ou rescision doit être interdite aux copartagés avant le décès de l'époux survivant, lorsque le partage a été fait par le père et par la mère simultanément, dans un seul et même acte, si d'ailleurs les biens de l'un et de l'autre, réunis et confondus dans une seule masse, ont été distribués ou répartis sans qu'il soit possible de distinguer la portion de chacun LA COUR ; - Attendu que les partages de dans les deux héritages; Qu'il en doit être présuccession autorisés par les art. 1075 et surtout ainsi lorsque, par des stipulations porsuiv., C. Nap., sont assujettis aux formalités et tant sur le double patrimoine considéré comme conditions prescrites pour les donations quand un seul et unique héritage, il a été fixé des ils sont faits par acte entre-vifs;-Que, par droits de diverses natures; que, par un ensemble conséquent, irrévocables de leur nature, ils ne de combinaisons engageant à la fois l'actif des peuvent être attaqués que dans les cas prévus deux successions, des avantages et des charges par la loi ;-Attendu que cette faculté de dis- corrélatives ont été créés et acceptés par les poser ainsi de ses biens est encore soumise contractants; qu'enfin l'ensemble des clauaux règles des successions, et que si les droits ses et conditions ramenées dans le partage des réservataires n'en peuvent souffrir aucune constitue un véritable pacte de famille dont atteinte, l'exercice de ces droits doit être toutes les parties sont coordonnées par un néanmoins suspendu pendant la vie du dona- lien commun, et que supprimer l'un des éléteur;-Que les enfants n'ont, en effet, aucun ments qui le composent serait le détruire dans droit sur les biens de leurs père et mère, que sa base, ou du moins en changer arbitrairement ceux-ci peuvent en disposer librement, et la nature et la portée;-Attendu que tel est le que c'est seulement à leur décès que s'ouvre caractère éminent de l'acte de donation-parpour les héritiers la faculté de réclamer, dans tage fait le 9 mai 1853 par le sieur et la dame la succession, leur part légitime dont la quotité de Bouttes à leurs enfants;- Que si les imreste jusqu'à ce moment incertaine;-Que par meubles étaient la propriété du sieur de Bouttes, conséquent ils ne sont pas recevables à pour- époux prédécédé, il est reconnu que les biens suivre avant cette époque l'action en nullité de l'épouse, purement mobiliers il est vrai, ou en rescision consacrée par l'art. 1079, C. sont néanmoins confondus dans l'actif généNap.; Attendu que si le partage permis parral de la succession; qu'ainsi la mère, en parles articles précités forme une exception à la règle d'ordre public qui interdit toute stipulation sur une succession future, cette exception spéciale, fondée sur le respect de l'autorité paternelle, ne peut être étendue en dehors des cas prévus et des limites posées; - Que la loi serait en contradiction avec elle-même si elle autorisait un débat judiciaire sur des intérêts subordonnés à une succession non ouverte, en présence et à l'encontre de celuilà même qui a été investi du droit d'en régler le partage;-Que lorsque cet acte d'abandonnement spontané a pour résultat de faire jouir les enfants d'une portion de patrimoine avant

tageant sa fortune à ses enfants, leur a abandonné tous ses droits résultant de ses reprises matrimoniales et gains de survie, abdiquant ainsi la libre disposition de ses capitaux ; que ces libéralités sont faites à la charge, par ceux des copartagés auxquels sont attribués les immeubles, de servir aux époux et aux survivants d'entre eux une pension viagère et annuelle d'une somme de 4,000 fr., en outre des prestations et fournitures de deniers, provisions de ménage et objets analogues, indépendamment de l'usufruit réservé par les donateurs sur une partie des immeubles donnés; - Attendu que les stipulations, les clauses et conditions di

verses, du partage dont s'agit forment dans leur ensemble un contrat homogène essentiellement indivisible; qu'il est impossible de toucher à la volonté du père décédé sans porter en même temps atteinte à la volonté de la mère survivante, et qu'attaquer le partage fait par l'un d'eux c'est attaquer le partage fait par l'autre ;-Qu'ainsi les considérations morales et les principes de droit plus haut développés se réunissent pour protéger l'acte du 9 mai 1853 contre les critiques prématurées dont il est l'objet ;-De tout quoi il suit que les premiers juges ont a bon droit déclaré l'action irrecevable;-Par ces motifs, etc.

Du 22 mai 1863.-C. Toulouse, 2o ch.-MM. Caze, prés.; de Vaulx, av, gén. (concl. conf.); Vidal et Albert, av.

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Lorsqu'une femme mariée ou ses héritiers n'ont pas pris inscription sur les immeubles de la succession du mari dans l'année du décès, et que cette succession vient à être déclarée vacante, la femme ou ses héritiers perdent, non pas seulement le rang donné à l'hypothèque legale par l'art. 2135, C. Nap., mais l'hypothè que elle-même, et ne peuvent, dès lors, prétendre à aucune cause de préférence sur les biens du mari (1). (C. Nap., 2135 et 2146; L. 23 mars 1835, art. 8.)

(Lavo C. Roques et Buffières.) Après le decès du sieur Aubineau, arrivé le

vilége du vendeur, au préjudice des tiers, et ajoute: qui ont acquis des droits sur l'immeuble du chef de l'acquéreur et qui se sont conformes aux lois pour les conserver. Evidemment, dans l'art. 8, le mot tiers est employé dans le même sens, et ne peut s'entendre que de ceux auxquels le propriétaire avait conféré un droit réel, tel qu'une hypothèque, c'està-dire des tiers en vue desquels a été faite la loi de 1855, à l'effet de garantir la sécurité des transactions que le propriétaire pourrait faire avec eux et de fortifier ainsi le crédit de la propriété foncière.

(1) Pour résoudre cette importante question, il précédents ne peuvent être opposés aux tiers qui ont faut se pénétrer de l'esprit de la loi du 23 mars 1855, des droits sur l'immeuble, et qui les ont conservés sur la transcription, et du but que se sont proposé en se conformant aux lois; quand, dans l'art. 7, ses auteur. En cherchant à relever le crédit de la relatif à l'action résolutoire, elle veut que cette acpropriété foncière par toutes les mesures propres à❘tion ne puisse être exercée après l'extinction du pridonner une sécurité plus complète aux tiers qui traiteraient à l'avenir avec le propriétaire, surtout par la publicité qui devait les avertir des mutations que cette propriété devait éprouver, des modifications qu'elle devait subir et des charges qui pouvaient la grever, la loi nouvelle a re-pecté les principes du Code Napoléon qui forment la base du droit de propriété, et d'après lesquels la vente est parfaite, entre les parties, par le seul consentement. De même elle a maintenu la protection que le législateur de 1804 a donnée aux femmes mariées et aux mineurs eu leur accordant une hypothèque existant à leur profit indépendamment de l'inscription. Seulement elle a pensé que cette exception au système de la publicité devait cesser, dans l'intérêt des tiers, en même temps que les motifs qui l'avaient fait admettre, c'est-à-dire du moment où l'état de dépendance de la femine, ou l'incapacité du mineur ou de l'interdit, n'existeraient plus. De là la disposition de l'art. 8, qui dispose que si la veuve, le mineur devenu majeur, l'interdit relevé de l'interdiction, leurs héritiers ou ayants cause, n'ont pas pris inscription dans l'année qui suit la dissolution du mariage ou la cessation de la tutelle, leur hypothèque ne date, A L'ÉGARD DES TIERS, que du jour des inscriptions prises ultérieu

rement. ⚫

Ne résulte-t-il pas clairement du texte de cet article que, sous la loi de 1855, comme sous le Code Napoléon, l'hypothèque légale de la femme ou du mineur a continué à exister indéfiniment, avec son caractère et les effets qui lui sont propres, notamment avec la rétroactivité qu'elle produit quant à la dale que lui assure l'art. 2135, à l'égard de tous autres que les tiers dont la loi nouvelle a voulu assurer la sécurité, alors même que cette hypothèque n'aurait pas été inscrite dans le délai qu'elle a fixé, c'est-à-dire dans l'année de la dissolution du mariage ou de la cessation de la tutelle. Il est impossible de nier cette conséquence de l'art. 8, qui ne déroge au principe du Code Napoléon qu'en faveur des tiers.

Mais ici il faut bien préciser ce qu'on doit entendre par cette expression les tiers. La loi de 1855 elle-même a pris soin d'en définir le sens, quand, dans son art. 3, elle dispose que, jusqu'à la transcription, les droits résultant des actes et jugements énoncés aux articles

Donc, tant qu'aucun droit réel, aucune charge établie sur l'immeuble au profit d'un tiers, ne se sont manifestés, la loi sur la transcription n'est pas en jeu, et l'on vit toujours sous l'empire du Code Napoléon.

C'est ce principe que méconnaît la Cour de Paris. Suivant son arrêt, il résulte de l'art. 8 de la loi sur la transcription que, du jour où la femme, le mineur ou l'interdit, reprennent ou acquièrent, par la dissolution du mariage ou la cessation de la tutelle, la liberté ou la capacité d'action dont ils étaient privés, leur hypothèque cesse d'exister par la seule force de la loi, et que désormais elle ne peut plus vivre ou passer à l'état de droit actif que par l'effet de l'inscription qui doit la rendre publique; que cette inscription, sauf l'effet rétroactif qui s'y attache quand elle a été prise dans le délai fixé par la loi susénoncée, est, à tous autres égards, régie par les dispositions du droit commun; d'où la Cour conclut qu'elle est atteinte par la disposition de l'art. 2146, C. Nap., d'après lequel l'inscription est sans effet entre les créanciers d'une succession, si elle n'a été prise par l'un d'eux que depuis l'ouverture de cette succession dans le cas où elle n'a été acceptée que sous bénéfice d'inventaire, règle qui s'applique à une succession vacante.

En d'autres termes c'est dire, ce que la loi de 1855 n'a dit nulle part, que l'hypothèque légale de la femme, non inscrite dans le délai, dégénère en une hypothèque ordinaire, et cela d'une manière absolue, envers et contre tous. Mais il suffit de se reporter au texte de l'art. 9 pour se convaincre que si l'inscription de cette hypothèque, quand elle survient hors des délais, n'a plus de date que du jour où elle est (prise, ce n'est qu'à l'égard des tiers. D'où la consé◄

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