32 - communauté réduite aux ac quêts dans les ter- droit français, t. 2, p. 88), par Chabrol (sur mes de l'art. 1531, C. Nap., avec cette condi- la coutume d'Auvergne, t. 2, p. 256), ont été consacrés par la jurisprudence, sous le tion que l'administration et la jouissance de tous ses paraphernaux demeureraient confiées Code Napoléon, et qu'il est généralement adau mari; Considérant que, le 17 déc. 1846, mis que la femme dotale est responsable, aussi les époux Humblot ont reconnu, par acte au- bien que le mineur, vis-à-vis des tiers, des thentique, devoir conjointement et solidaire- conséquences de son délit ou de son quasi· Mais considérant que pour qu'il en ment au sieur Joulin une somme de 12,000 fr., | délit ; et ont affecté à la garantie du rembourse- soit ainsi, deux conditions essentielles sont ment leurs immeubles propres et acquêts; la nécessaires; la première, c'est qu'il existe dame Humblot subrogeait en même temps le- de la part de la femme des manœuvres fraudit Joulin en son hypothèque légale, et les duleuses, des actes personnels, émanant de époux déclaraient qu'ils étaient mariés sous le sa volonté propre et indépendante, susceptirégime de la communauté, aux termes de leur bles dès lors d'engager sa responsabilité percontrat de mariage, reçu par Me Berthaux, sonrelle; la deuxième, c'est que le tiers lésé notaire à Saint-Mihiel, au mois de juill. 1821; n'ait pu se défendre contre ces actes ou ces Considérant que le sieur Humblot est dé- manœuvres, et qu'on ne puisse lui imputer cédé sans avoir acquitté son obligation, et aucune faute ou négligence dans la surveilConsidérant, d'une qu'aux dates des 20 août et 2 janvier derniers, lance de ses intérêts; le sieur Joulin a fait commandement à sa part, qu'on ne relève, dans l'espèce, aucune veuve d'avoir à payer, sur tous ses biens, l'obli- manoeuvre personnelle à la femme, pouvant gation du 17 déc. 1846, qu'elle avait solidai- lui être imputée comme un acte de sa volonté rement contractée avec son mari; Consi- indépendante; qu'on ne saurait qualifier ainsi dérant que la veuve Humblot a formé opposi- la simple déclaration, à laquelle elle n'a fait tion à ce commandement, en invoquant les que s'associer sous l'assistance et l'autorité de dispositions de son contrat de mariage, aux son mari, «qu'ils étaient mariés sous le régime termes duquel son obligation solidaire, comme de la communauté; »>-Qu'en supposant qu'elle la subrogation à son hypothèque légale, se- ait compris la valeur et la portée de cette déraient entachées de nullité en tant qu'on claration, ce qui est douteux en présence des voudrait les appliquer à ceux de ses biens qui circonstances de la cause, on doit admettre sont placés sous la protection du statut dotal; qu'elle ne s'y est associée que sous la presQue le créancier Joulin oppose à la femme sion abusive de l'autorité maritale; et que l'en Humblot la fraude qu'elle a commise, dans l'o- déclarer responsable, ce serait aller à l'enconbligation de 1846, en déclarant avec son mari tre même des principes de protection qui ont qu'elle était mariée sous le régime de la com- inspiré le statut dotal et le rendre illusoire, car on offrirait ainsi aux parties le moyen le plus munauté, fraude de laquelle il fait résulter un Considéquasi-délit dont elle doit être responsable, facile et le plus usuel de l'éluder; aux termes de l'art. 1382, même sur ses biens rant, d'autre part, que le sieur Joulin ne saudotaux ;-En droit:-Considérant que lorsque rait se plaindre du préjudice qu'il éprouve des époux se sont soumis au régime dotal, puisqu'il aurait pu l'éviter sans sa négligence; les biens de la femme déclarés dotaux sont que, traitant avec une femme mariée, la prefrappés d'inaliénabilité absolue en dehors des mière, la plus élémentaire des précautions à conditions prévues par la loi; que cette inalié- prendre était de se faire représenter son connabilité, établie dans l'intérêt de la consolida-trat de mariage; qu'il a été mis à même de tion des familles, est destinée à conserver une dernière ressource pour les enfants issus du mariage et à protéger la femme contre sa propre faiblesse et contre les entraînements auxquels pourrait la soumettre l'autorité trop souvent abusive de son mari; qu'elle ne peut ni directement ni indirectement éluder, par une convention quelconque, cette protection que la loi a voulu lui assurer; Considérant, cependant, que si la loi a voulu défendre la femme contre sa faiblesse, elle n'a pas voulu la protéger contre ses méfaits; que s'il importe à la société que la dot des femmes soit conservée, il importe bien plus encore que nul ne puisse blesser un de ses membres et lui porter impunément préjudice par son délit ou son quasi-délit; et que la femme, en cela, ne saurait être placée au-dessus des règles fondamentales de l'ordre social; que ces princi- Du 2 août 1862.-C. Nancy, ch. civ. - MM. pes, admis dans l'ancien droit, écrits dans Legrand, 1er prés.; Souef, av. gén. (concl. l'art. 544 de la coutume de Normandie, attes-conf.); Vollaud et Lallemand, av. tés par Roussilhe (Traité de la Dot, t. 1, p. 494, n. 24), par d'Argou (Institutions du faire cette vérification, puisque, ne se contentant pas de la déclaration des époux qu'ils étaient mariés sous le régime de la communauté, il a réclamé la date de leur contrat de mariage, et que ces derniers la lui ont donnée très-exactement, ainsi que le constate l'acte de 1846, en même temps que le nom de l'un des notaires rédacteurs de ce contrat ;-Qu'en ces circonstances, dire la femme responsable d'une déclaration pareille, faite sans aucune manœuvre et avec l'assistance de son mari, ce serait violer tous les principes de la dotalité et relever injustement le tiers qui a traité avec la femme des suites d'une négligence qu'il ne peut imputer qu'à lui seul et à ses conseils;Par ces motifs, dit que les obligations souscrites par la dame Humblot au profit de Joulin ne peuvent être exécutées sur ses biens dotaux, etc. l'instruction et pour que celle-ci ne pût être CASSATION (CRIM.) 16 janvier 1862. Juge d'instructioN, ORDONNANCE, OPPOSI-retardée par la résistance opiniâtre des téTION, MINISTÈRE PUBLIC, TÉMOIN, AMENDE. Le ministère public a le droit absolu de former opposition aux ordonnances du juge d'instruction, à quelques phases de la procédure et dans quelques cas que ces ordonnances aient été rendues (1). C. inst. crim., 135; L. 17 juill. | 1836. Spécialement, il est recevable à former opposition à l'ordonnance par laquelle le juge d'instruction déclare n'y avoir lieu à prononcer l'amende portée par l'art. 80, Cod. instr. crim., contre un témoin qui refuse de déposer (2). (Mestrezat.)-ARRÊT. Attendu LA COUR; Vu les art. 9, 57, 80, 135, 279, 280, 281, Cod. inst. crim.; qu'il résulte des art. 9, 57, 279, 280 et 281, Cod. inst. crim., que les juges d'instruction sont placés sous la surveillance des procureurs généraux et qu'ils exercent leurs fonctions sous l'autorité des Cours impériales; Attendu qu'en règle générale, les ordonnances de ces magistrats ne sont point affranchies du recours par voie d'appel; que, si l'art. 80, Cod. inst. crim., dans l'intérêt de la rapidité de (1-2) Le principe que proclame ici la Cour suprême avait été déjà à plusieurs reprises consacré par elle, et était enseigné par les auteurs antérieurement à la loi du 17 juill. 1856, qui a étendu les attributions des juges d'instruction. V. Mangin, Instr. écr., t. 1, n° 18; Faustin Hélie, Instr. crim., 5, p. 178; Trébutien, Cours de dr. crim., t. 2, p. 230. Mais ce principe est surtout incontestable, comme le dit l'arrêt que nous rapportons, en présence de la nouvelle rédaction donnée par la loi de 1856 à l'art. 435, Cod. inst. crim., et, ajouterons-nous, en présence surtout de l'exposé des motifs de cette loi, où on lit : « Les ordonnances de la chambre du conseil ne sont pas les seules contre lesquelles, dans l'état présent de notre législation, il puisse être formé un recours : celles du juge d'instraction sont également susceptibles d'appel. Le droit d'opposition à ces dernières ordonnances est tiré des principes généraux du Code; il n'est pas écrit. Nous avons pensé qu'il était convenable de le consacrer par un texte; et comme les deux natures d'ordonnances émaneront désormais de la même autorité, il nous a semblé qu'il convenait de comprendre dans la même formule les diverses oppositions dont elles peuvent être frappées... Nous nous sommes employés, d'ailleurs, à résumer dans le nouvel art. 135 les applications les plus générales de la jurisprudence; nous n'avons pas voulu aller au delà. Nous avons donc proclamé le droit absolu d'opposition de la partie publique; nous avons contenu dans de justes limites celui de la partie civile; nous avons restreint aux deux seuls cas où il soit possible de l'admettre celui du prévenu» (V. Lois, décrets, etc., de 1856, p. 200, no 4). Quant à l'application spéciale que fait l'arrêt ci-dessus du principe dont il s'agit, V. Cass. 14 sept. 1832;-F. Hélie, loc. cit., p. 179; Trébutien, ut supr., et Morin, Rép. du dr. crim., v Instr. crim., no 28. Contr., Mangin, loc. cit., no 108.-V. aussi Rép. gén. Pal., v Juge d'instruction, no 117. ANNÉE 1863. - moins, interdit à ceux-ci le droit d'appeler des condamnés à l'amende, cette interdiction ne ordonnances par lesquelles ils auraient été s'étend pas au ministère public, par la raison même qu'il n'est pas compris dans l'exception portée audit article et que l'exception confirme la règle;-Attendu que tout doute doit cesser devant la nouvelle rédaction donnée à l'art. 135, Cod, inst. crim., par la loi de 1856, qui étend à tous les cas le droit du ministère public de former opposition aux ordonnances du juge d'instruction, proclamant ainsi le droit absolu de la partie publique, à quelques phases de la procédure et dans quelques cas que ces ordonnances aient été rendues; riale de Bordeaux a déclaré non recevable Et attendu, néanmoins, que la Cour impédu juge d'instruction de Bordeaux, en date du l'opposition du ministère public à l'ordonnance 4 déc. 1861, par laquelle ce magistrat a déclaré n'y avoir lieu à prononcer l'amende portée par l'art. 80, Cod. inst. crim., contre une affaire dont l'instruction lui était confiée; un témoin qui avait refusé de déposer dans qué a formellement violé les dispositions des Attendu qu'en statuant ainsi, l'arrêt attaart. 80 et 135, Cod. inst. crim.; Casse, etc. Du 16 janv. 1862. C. cass., ch. crim.-MM. Vaïsse, prés; V. Foucher, rapp.; Guyho, av. gén. (concl. conf.). CASSATION (CRIM.) 20 mars 1862. ENFANT (CRIMES ET DÉLITS CONTRE L'), SUPPRESSION, ACTION PUBLIQUE, QUESTION D'ÉTAT, ENFANT MORT. peut être poursuivie par la voie criminelle La suppression de la personne d'un enfant avant le jugement de la question d'état par les tribunaux civils: l'art. 327, Cod. Nap., ne s'applique qu'au cas où il y a suppression de l'état d'un enfant, et non à celui où il y a suppression de la personne même de l'enfant. Du moins, il en est ainsi lorsque la suppression de la personne de l'enfant n'a pas eu pour but la question de la filiation, et que cette question ne se rattache qu'incidemment au fait de l'accusation (3). (C. Nap., 326 et 327; C. pén, 345.) (3) V. dans le même sens, Cass. 26 sept. et 12 déc. 1823; 8 avril 1826 et 4 août 1842 (t. 2 1842, p. 614); 1er oct. 1842 (t. 1 1843, p. 62);-Merlin, Rép., vo Suppress. de part, el Quest., v° Quest. d'état, $ 2; Carnot, Comment. C.pen., sur l'art. 345, Observ. addit., n° 4; Mangin, Act. publ., t. 1, no 190; Chauveau et Hélie, Theor. C. pén., t. 4, 4o édit., n. 1544; Le Sellyer, Dr. crim., t. 4, n° 1514 et suiv.; Faustin Hélie, Instr. crim., t. 3, p. 223; Trébutien, Cours de dr. crim., t. 2, p. 66; Bertauld, Quest. préjudic., no 16 et 18; Demolombe, t. 5, no 275; Demante, Cours analyt., t. 2, no 53 bis IV; Massé et Vergé, sur Zachariæ, t. 4, $160, p. 292, note 24.-V. Rep. gén. Pal., v° Enfant (crimes et délits contre l'), no 117. 3 1 34 Si l'art. 345, Cod. pén., qui punit le crime de suppression d'enfant, est inapplicable à la suppression d'un enfant mort-né, il s'applique, au contraire, nécessairement à celle d'un enfant mort au moment de cette suppression, mais qui a eu vie, et dont la disparition a eu lieu avant que sa naissance ait été déclarée à l'officier de l'état civil (1). (Flocard.)-ARRÊT. LA COUR; Vu les art. 326 et 327, Cod. Et attendu que l'arrêt attaqué, après avoir (1) La Cour de cassation avait d'abord jugé d'une tion du crime de suppression d'enfant dirigée contre les mêmes prévenues, en se fondant d'abord sur ce que la disposition de l'art. 327, Cod. Nap., s'applique à tous les cas où il y a suppression de l'état civil de l'enfant, ensuite sur ce que l'art. 345, Cod. pén., ne s'étend pas à la suppression du cadavre d'un enfant qui a cessé de vivre, lorsque rien n'indique que la vie ait cessé par l'effet d'un crime;; Qu'en décidant, en s'appuyant sur ces motifs, qu'il n'y avait lieu à suivre, quant à présent, contre les deux prévenues, l'arrêt attaqué a méconnu le sens et fait une fausse application des art. 326 et 327, Cod. Nap., et de l'art. 345, Cod. pén.; Casse l'arrêt rendu par la Cour imp. de Díjon, le 27 fév. 1862, etc. Du 20 mars 1862. C. cass., ch. crim. MM. Vaisse, prés.; Faustin Hélie, rapp.; Savary, av. gén. CASSATION (CIV.) 11 décembre 1861. 1o L'héritier bénéficiaire peut valablement reconnaitre l'existence d'une servitude sur l'un des immeubles de la succession, sauf les conséquences contre la qualité de bénéficiaire auxquelles il pourrait être exposé par la suite (2). (Cod. Nap., 803.) 2° La reconnaissance d'une servitude, dans le cahier des charges dressé pour parvenir à la vente aux enchères du fonds servant, conserve son effet, encore bien que la vente qui s'en est suivie ait été ultérieurement annulée, si cette reconnaissance se trouve rappelée et confirmée dans un second cahier des charges dressé plus tard pour parvenir à une autre vente qui a été régulièrement effectuée. (Cod. Nap., 690 et 695.) L'art. 703, Cod. Nap., aux termes duquel les servitudes sont éteintes lorsque le changement dans l'état des lieux ne permet plus d'en (2) Il est certain que l'héritier bénéficiaire, ayant tous les droits qui appartiennent à un héritier, peut disposer comme il l'entend des biens héréditaires, ou reconnaître l'existence d'un droit sur ces biens: les aliénations ou reconnaissances par lui faites ne sauraient donc jamais être nulles en elles-mêmes comme émanant d'une personne sans qualité; elles ne peuvent donner lieu qu'à une déchéance du bénéfice d'inventaire, si elles impliquent la volonté d'agir comme héritier pur et simple.-Suivant M. Troplong (Success., t. 3, n° 381), la constitution par l'héritier bénéficiaire d'une servitude sur l'immeuble héréditaire emporterait déchéance du bénéfice d'inventaire.-V., en outre, sur les actes qui emportent une telle déchéance, Merlin, Repert., v° Bénéfice d'inventaire, no 26; Chabot, Success., sur l'art. 803, n° 6; Malpel, id., no 237 et suiv.; Demolombe, id., t. 3, nos 361 et suiv.; Aubry et Rau, d'après Zacha riæ, t. 5, $ 612, p. 164; Massé et Vergé, sur Zachariæ, t. 3, § 386, nole 16.-V., au surplus, Rép. gén. Pal. et Supp., vi▪ Servitude, no 561 et suiv.; Succession bénéficiaire, no 154 et suiv., 360 et suiv. user, a entendu parler d'une impossibilité ab- | pour défaut de contenance dans l'immeuble solue, et non d'un simple changement dans l'é-vendu, un nouveau cahier des charges fut tat des lieux comportant seulement une modifi- dressé par les légataires; et dans ce cahier cation dans l'usage de la servitude, mais qui ne des charges, il fut déclaré « qu'il existait une cause aucun dommage ou aggravation pour le servitude pour le passage de l'eau à l'établisfonds servant (1). — Ainsi, l'abaissement du sement de feu M. Desrieux, établie par les lit d'une rivière au point où s'exerce un droit | légataires, antérieurement à la vente aux frède prise d'eau n'emporte pas extinction de la res Salaïeu.»-Sur ce cahier des charges, servitude, si la prise d'eau peut être établie l'adjudication de l'immeuble eut lieu, le 24 déc. sur un autre point, sans dommage pour le 1837, au profit du sieur Michel. fonds servant (2). Plus tard, des contestations se sont élevées Les travaux nécessités par le changement relativement à cette servitude, entre le sieur d'assiette d'une servitude, par suite d'une mo-Michel et le sieur Morange qui était devenu dification dans le fonds servant, peuvent être mis à la charge exclusive du propriétaire du fonds dominant (3). Cod. Nap., 698. 3o Le désistement non accepté d'une disposition d'un jugement ou arrêt, n'empêche pas ces jugement ou arrêt de pouvoir être cassés de ce chef (4). MICHEL C. MOrange. Le sieur Ricard, décédé à Saint-Denis, ile de la Réunion, avait institué trois légataires universels, qui, après avoir accepté sous bénéfice d'inventaire, procédèrent à la vente des immeubles dépendant de la succession. Dans le cahier des charges dressé pour parvenir à cette vente, les légataires déclaraient qu'il était à leur connaissance que le sieur Ricard, propriétaire d'un terrain (compris dans les biens mis en vente) contigu à un immeuble appartenant au sieur Desrieux, l'un d'eux, avait grevé son terrain, au profit de la propriété de ce dernier, d'une servitude de prise d'eau pratiquée dans une rivière, dite le Butor, qui traversait le fonds servant.-Le 24 mai 1829, l'adjudication de l'immeuble auquel se rapportait cette déclaration, fut prononcée au profit des frères Salajeu. Mais cette adjudication ayant été annulée par arrêt du 16 sept. 1837, (1-2) Il a été jugé, dans un sens analogue, que la servitude qui a cessé d'exister parce que les choses se sont trouvées dans un tel état qu'on ne pouvait plus en user, revit si les choses sont rétablies de manière qu'on puisse user de la servitude, sans qu'il soit nécessaire que les choses soient remises identiquement telles qu'elles étaient dans l'origine. V. notamment Cass. 21 mai 1851 (t. 1 1853, p. 666); Bordeaux, 14 août 1855 (1857, p. 204), et les renvois. — Le changement qui éteint la servitude doit donc s'entendre d'un changement absolu et radical. propriétaire du fonds ayant primitivement appartenu au sieur Desrieux le lit du Butor s'étant abaissé au point où devait avoir lieu la prise d'eau au profit du fonds Desrieux, et le sieur Morange ayant demandé à exercer sa servitude sur un autre point, le sieur Michel s'y opposa, en se fondant d'abord sur ce que la servitude invoquée n'avait jamais eu d'exisun jugement d'adjudication frappé de résolutence légale, puisque son titre consistait dans tion, et émanait d'ailleurs d'héritiers ou légataires sous bénéfice d'inventaire, incapables de constituer ou de reconnaître une servitude; ensuite, sur ce qu'en tout cas, elle était éteinte, l'état des lieux ne permettant plus de l'exercer. Saint-Denis, qui déclare le sieur Morange mal Le 15 août 1854, jugement du tribunal de fondé dans sa prétention, en ces termes : cahier des charges dressé le 12 mars 1829, «Attendu que, s'il est vrai que l'art. 4 du par l'avoué Legoff, pour parvenir à la vente sur licitation des immeubles dépendant de la succession du sieur Ricard, et situés dans les hauts de Saint-Denis, proclame l'existence à perpétuité d'une servitude d'eau, constituée, moyennant certains avantages, sur le domaine Ricard, aujourd'hui Michel, et dans l'intérêt de la propriété du sieur Thomas Desrieux, actuellement représenté par le demandeur Prosper Morange,-il est incontestable aussi que l'adjudication tranchée sur ledit cahier des charges au profit des frères Salaïeu, et ledit cahier des charges lui-même, partie intégrante de ladite adjudication, dont il réglait les conditions entre les ayants droit, ont été annulés par l'arrêt de la Cour royale de l'île il suit que la clause relative à la servitude, Bourbon, en date du 16 sept. 1837; dont se prévaut Morange, doit être considérée comme non avenue, et cela avec d'autant plus de raison qu'aucun document, aucun indice même, en dehors de ladite clause, ne tend (3) Cela ne saurait souffrir de difficulté en pré-à démontrer que cette servitude ait été étasence de la disposition de l'art. 698, Cod. Nap., blie par Ricard lui-même, ou de son consend'après lequel les ouvrages nécessaires pour user ou tement, pour l'usage et l'utilité du fonds inconserver une servitude, sont aux frais de celui à qui férieur; elle est due, et non à ceux du propriétaire du fonds deuxième cahier des charges rédigé en 1837, Attendu, d'un autre côté, que le assujetti, à moins que le titre constitutif de la servi- après la résolution de vente susrelatée, par tude ne dise le contraire.-V. d'ailleurs Rép. gen. Pavoué Bérenger, pour parvenir à une nouPal. et Supp., v° Servitude, no 59, 781 et suiv. (4) V. cependant les arrêts rappelés en note d'un velle adjudication sur licitation du domaine arrêt de la Cour de cassation du 27 août 1856 (1857, Ricard, garde un silence absolu en ce qui p. 1173).-V. aussi Rép. gén. Pal., yo Cassation concerne le droit de servitude aujourd'hui (mat, civ.), n* 1749 et suiv. revendiqué;-Qu'en effet, le dire de l'avoué V. Marcadé, sur l'art. 703, et Massé et Vergé, sur Zachariæ, t. 2, § 341, note 2.-V. au surplus, Rép. gen, Pal. et Supp., vo Servitude, no 903 et suiv., et 917. D'où poursuivant Bérenger, dire consigné à la suite lors, et sans même qu'il soit nécessaire de du deuxième cahier des charges, n'a point pour rechercher si dans les circonstances qui ont objet l'établissement d'une servitude; qu'il n'a donné lieu au litige actuel, les légataires Rilui-même qu'une valeur purement énonciative card ont fait un acte susceptible de leur faire et récognitive; qu'il n'aurait d'autorité qu'au- perdre leur qualité d'héritiers bénéficiaires, tant qu'elle se référerait à un acte primordial, qu'il suffit qu'un pareil acte ne leur fût pas régulier et valable, ce qui ne se rencontre interdit, pour faire écarter dès le début l'expoint dans le cas proposé;-Attendu, au sur- ception tirée du défaut de capacité desdits plus, que l'acceptation sous bénéfice d'inven-légataires, et laisser entière, sous tous les taire de la succession du sieur Ricard, par autres rapports, l'appréciation des titres dont ses légataires universels, au nombre desquels Prosper Morange prétend faire résulter, au se trouvait le sieur Thomas Desrieux, ne per-profit de sa propriété, un droit de passage mettait point à ceux-ci de créer un droit de d'eau sur l'ancien terrain Ricard, aujourd'hui servitude sur la propriété dont ils avaient l'ad- possédé par le sieur Michel;-Attendu, à cet ministration dans l'intérêt de tous; que, sans égard, que Prosper Morange invoque en faveur doute, il faut le reconnaître, si la constitution de son droit de servitude une double recond'un pareil droit excède les bornes de la ges- naissance émanée soit des légataires Ricard tion confiée à l'héritier bénéficiaire, un acte eux-mêmes, soit de leur avoué, dans deux de cette nature, de la part de ce dernier, n'est cahiers d'enchères dressés pour parvenir à la pas nul, et lui imprime seulement la qualité vente par adjudication publique de biens déd'héritier pur et simple; mais qu'il est juste pendant de la succession Ricard; - Attendu, aussi de remarquer que les légalaires univer- en effet, qu'en recourant au premier de ces sels du sieur Ricard ont toujours entendu documents, celui du 12 mars 1829, enregistré, conserver, en présence d'un passif énorme, on voit que les légataires déclarent qu'il est leur qualité d'héritiers bénéficiaires ;-Attendu à leur connaissance qu'il existe sur le fonds enfin, et toujours surabondamment, que, par mis en vente une servitude d'eau à perpétuité suite de l'abaissement du lit du Butor, abais- au profit de la propriété Thomas Desrieux, sement occasionné vraisemblablement par les laquelle servitude aurait été consentie par feu inondations de 1844 et 1845, l'exercice de Ricard lui-même, par réciprocité de certains la servitude réclamée est désormais impossi- avantages qui lui auraient été accordés pour ble; que ladite servitude, en supposant qu'elle la manipulation de ses propres cannes; que, eût jamais existé autrement qu'à l'état de de plus, toutes les conditions constitutives de simple tolérance, devrait donc cesser, aux la servitude y sont soigneusement relatées, de termes de l'art. 703, Cod. Nap. ;-Qu'ainsi, à manière à en former un véritable titre récogniquelque point de vue qu'on se place, tout con- tif dans le sens des art. 1338 et 1339, Cod. court à déterminer le rejet des conclusions Nap.;-Attendu qu'il est hors de doute qu'à principales du demandeur. >> partir du 24 mai 1829, date de l'adjudication aux frères Salaïeu, jusqu'au 24 déc. 1837, où a eu lieu celle au nom du sieur Michel, et même longtemps encore après cette époque, «Attendu qu'il s'agit au procès d'une ser- le droit au passage de l'eau n'a fait l'objet vitude continue et apparente;-Attendu qu'à d'aucune difficulté de la part des divers prol'égard des servitudes de ce genre, l'art. 695, priétaires qui se sont succédé sur le domaine Cod. Nap., admet que le titre constitutif de Ricard ;-Attendu que c'est depuis quelques la servitude peut être parfaitement remplacé années seulement que ce droit a été mis en par un titre récognitif émané du propriétaire question par le sieur Michel, qui, indépendamdu fonds asservi;-Attendu, d'un autre côté, ment de l'incapacité où se seraient trouvés les qu'il est de principe que le bénéfice d'inven- héritiers bénéficiaires Ricard, de consentir une taire n'ôte pas à l'héritier la propriété des pareille servitude, excipe encore d'un arrêt de choses héréditaires; que ce qu'un héritier pur la Cour du 16 sept. 1837, enregistré, ayant et simple peut faire, un héritier bénéficiaire, prononcé la résolution de l'adjudication tranqui n'est en réalité qu'un administrateur de chée le 24 mai 1829 au nom des frères Sasa propre chose, peut le faire aussi; que ses laïeu; - Attendu, selon le sieur Michel, que actes dans ce cas ne sont pas nuls, mais qu'ils cet arrêt qui, avec l'adjudication, a fait tomber emportent déchéance du bénéfice d'inventaire le cahier des charges en vertu duquel elle lorsqu'ils excèdent les bornes d'une simple avait eu lieu, aurait aussi anéanti du même administration; — Attendu que la justesse de coup toutes les stipulations qu'il contenait, ces principes se trouverait au besoin formelle-même celles intéressant des tiers non appelés ment confirmée par les art. 958 et 959, Cod. en cause, et contre lesquels néanmoins deproc. civ., qui, en décidant que l'héritier bé-vraient se retourner les conséquences d'une néficiaire devient héritier pur et simple pour ne s'être pas conformé à leurs dispositions, montrent bien clairement que c'est là le seul effet que la loi a entendu attacher à l'inobservation des conditions exigées pour le maintien des avantages résultant de ce mode d'acceptation d'une succession; - Attendu, dès Appel par le sieur Morange; et, le 30 mars 1855, arrêt infirmatif de la Cour impériale de la Réunion, ainsi conçu : décision qui leur est de tous points étrangère; Attendu que le sieur Michel n'est pas fondé dans sa résistance en présence de la déclaration de l'avoué Bérenger, mandataire légal des héritiers Ricard, lors de l'adjudication préparatoire qui a nécessairement précédé celle qui a été faite à lui-même comme surenchérisseur |