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Nicolas. Cette place, qui était occupée par une partie de l'armée de Pétion, fut enfin étroitement investie par Christophe en personne; et, après trente-deux jours de siége régulier, la garnison se rendit à discrétion, et fut réunie à l'armée du vainqueur. Après cet événement, qui eut lieu en octobre 1810, l'armée assiégeante fut en grande partie licenciée, et son chef s'en retourna au CapFrançais.

Depuis deux ans l'Espagne, envahie par une armée française, était en proie à toutes les horreurs de l'anarchie, et les Espagnols d'Hayti disputaient aux Français, dans leur île, avec plus d'avantage et non moins d'opiniâtreté que dans la péninsule européenne, le terrain cédé en 1795. Dès l'année précédente, Christophe avait pris avantage de cette guerre, qui venait de se rallumer avec quelque énergie, pour rallier à sa cause les habitants de l'est de Saint-Domingue. Il leur avait fourni des secours d'armes et de munitions, pour les aider dans leurs entreprises. D'un autre côté, les Anglais secondaient les opérations dirigées contre les débris de la puissance française à Saint-Domingue. En novembre 1809, la ville de Samana et les vaisseaux qui étaient dans le port avaient été pris par une escadre anglaise, les troupes françaises avaient été faites prisonnières, les vaisseaux emmenés, et la place abandonnée aux Espagnols. En juillet 1810, une flotte anglaise, sous le commandement du gé

néral Carmichael, vint de la Jamaïque pour coopérer à la réduction de la ville de Santo-Domingo, la dernière place de l'île demeurée au pouvoir des Français.

Le gouverneur de la ville, Barquier, exprima d'abord la détermination de ne pas se rendre; mais quand le général Carmichael eut fait des préparatifs sérieux pour emporter la place d'assaut, le chef des assiégés demanda à capituler. Il fut permis à la garnison de sortir avec tous les honneurs de la guerre. Les officiers furent envoyés en France sur leur parole, et les soldats restèrent prisonniers. Après l'évacuation, les Espagnols reprirent possession de leur capitale, qui était au pouvoir des Français depuis huit ans.

Ce fut au printemps de l'année 1811, que Christophe changea le titre de président pour celui de roi. Ce changement fut demandé par le conseild'état assemblé au Cap-Français, qui eut soin de protester, en décrétant cet acte, que celui qu'il concernait surtout, ne l'avait en aucune façon sollicité. La royauté fut donc établie à Hayti, dans la personne et la famille de ce chef.

En même temps que l'établissement du trône, le conseil du Cap décréta la fondation d'une noblesse héréditaire, à laquelle avaient droit de prétendre toutes les personnes distinguées par d'importants services rendus au pays, dans la magistrature, dans l'armée, dans les lettres ou dans les sciences.

Sur cette base, le conseil-d'état forma un acte constitutionnel, établissant la dignité royale dans la personne et la famille de Christophe; nommant les divers officiers d'état, et faisant d'autres additions à la constitution de 1807, suivant que l'altération apportée à la forme première du gouvernement, paraissait le requérir. La promulgation de cet acte fut bientôt faite publiquement. Nous donnons ici un extrait de la constitution de 1807, et l'acte constitutionnel qui la modifia en 1811.

« Les mandataires soussignés, chargés des pouvoirs du peuple d'Hayti, légalement convoqués par son excellence le général en chef de l'armée, pénétrés de la nécessité de faire jouir leurs commettants des droits sacrés, imprescriptibles et inaltérables d'hommes, proclament, en présence et sous les auspices du Tout-Puissant, les articles contenus dans la présente loi constitutionnelle :

1.

« 2.

Titre I. De la Condition des citoyens.

Toute personne résidant sur le territoire d'Hayti est libre, dans toute l'étendue du mot. L'esclavage est aboli à jamais dans Hayti. 3. Nul n'a le droit de violer l'asile d'un citoyen, ni d'entrer par la force dans son domicile sans un ordre émané de l'autorité supérieure et compé

tente.

« 4. Toute propriété est sous la protection du gouvernement. Toute attaque contre les propriétés d'un citoyen est un crime que la loi punit.

« 5. La loi punit de mort l'assassinat.

Titre II. Du Gouvernement.

« 6. Le gouvernement d'Hayti est composé : Pre mièrement, d'un magistrat en chef qui prend le titre et la qualité de président et de généralissime des forces d'Hayti, soit de terre soit de mer; toute autre dénomination est pour jamais proscrite dans Hayti; secondement, d'un conseil d'état.

« Le gouvernement d'Hayti prend le titre et sera reconnu sous la dénomination «< d'État d'Hayti. »

«7. La constitution nomme le général en chef, Henry Christophe, président et généralissime des forces de terre et de mer de l'État d'Hayti.

« 8. Le titre de président et de généralissime est à vie.

« 9. Le président a le droit de choisir son successeur, mais seulement parmi les généraux et de la manière ci-après prescrite: Ce choix doit être secret, et contenu dans un paquet scellé qui ne sera ouvert que par le conseil-d'état, solennellement assemblé à cet effet.

« Le président prendra toutes les précautions nécessaire pour informer le conseil de l'état dans lequel ce paquet sera déposé.

сс

10. La force armée et l'administration des finances seront sous la direction du président.

« 11. Le président a le pouvoir de faire des traités avec les nations étrangères, pour l'établissement

des relations commerciales, et la sûreté de l'indépendance de l'état.

guerre

« 12. Il peut faire la paix et déclarer la pour maintenir les droit du peuple d'Hayti. « 13. Il a aussi le droit d'aviser aux moyens de favoriser et d'augmenter la population du pays. 14. Il propose les lois au conseil-d'état, qui, après les avoir rédigées et adoptées, les renvoie à sa sanction, sans quoi elles ne sont pas exécutoires. « 15. La dotation du président est fixée à 40,000 dollars par an.

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Titre III. Du Conseil-d'État.

« 16. Le conseil-d'état est composé de neuf membres, nommés par le président, dont les deux tiers au moins parmi les généraux.

17. Les fonctions du conseil-d'état sont de recevoir les propositions de lois du président, et de les rédiger de la manière qu'ils jugent convenable; de fixer le montant des taxes, et le mode de les recueillir; de sanctionner les traités conclus par le président, et de fixer le mode de recruter l'armée. Le compte annuel des recettes et des dépenses lui sera présenté, aussi bien que celui des ressources du pays.

(Les titres IV, V, VI traitent des appointements des surintendants - généraux des finances, de la marine, et de l'intérieur; et aussi de ceux d'un secrétaire d'état et des tribunaux.)

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