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« ART. III. Il sera nommé, par le roi, des commissaires civils, au nombre de trois, pour la colonie de Saint-Domingue, et de quatre pour les îles de la Martinique, de la Guadeloupe, de SainteLucie et Tabago, et de Cayenne.

« ART. IV. Ces commissaires sont autorisés à prononcer la suspension et même la dissolution des assemblées coloniales actuellement existantes; à

prendre toutes les mesures nécessaires pour accélérer la convocation des assemblées paroissiales, à y entretenir l'union, l'ordre et la paix, comme aussi à prononcer provisoirement, sauf le recours à l'Assemblée nationale, sur toutes les questions qui pourraient s'élever sur la régularité des convocations, la tenue des assemblées nationales, la forme des élections, et l'éligibilité des citoyens.

« ART. V. Ils sont également autorisés à prendre toutes les informations qu'ils pourront se procurer sur les auteurs des troubles de Saint-Domingue, et leur continuation, si elle avait lieu, à s'assurer de la personne des coupables, à les mettre en état d'arrestation, et à les faire traduire en France pour être mis en état d'accusation, en vertu d'un décret du corps législatif, s'il y a lieu.

« ART. VI. Les commissaires civils seront tenus, à cet effet, d'adresser à l'Assemblée nationale une expédition, en forme, des procès-verbaux qu'ils auront dressés, et des déclarations qu'ils auront reçues concernant lesdits prévenus.

« ART. VII. L'Assemblée nationale autorise les commissaires civiles à requérir la force publique toutes les fois qu'ils le jugeront convenable, soit pour leur propre sûreté, soit pour l'exécution des ordres qu'ils auront donnés, en vertu des précédents articles.

« ART. VIII. Le pouvoir exécutif est chargé de faire passer dans les colonies une force suffisante, et composée en grande partie de gardes nationales.

« ART. IX. Immédiatement après leur formation et leur installation, les assemblées coloniales émettront, au nom de chaque colonie, leur vœu particulier sur la constitution, la législation eț l'administration qui conviennent à la prospérité et au bonheur des habitants, à la charge de se conformer aux principes généraux qui lient les colonies à la métropole, et qui assurent la conservation dé leurs intérêts respectifs, conformément à ce qui est prescrit par le décret du 8 mars 1790, et l'instruction du 28 du même mois.

« ART. X. Aussitôt que les colonies auront émis leur vou, elles le feront passer sans délai au corps législatif; elles nommeront aussi des représentants qui se réuniront à l'Assemblée nationale, suivant le nombre proportionnel qui sera incessamment déterminé par l'Assemblée nationale, d'après des bases que son comité colonial est chargé de lui pré

senter.

« ART. XI. Le comité colonial est également chargé de présenter incessamment à l'Assemblée nationale un projet de loi pour assurer l'exécution des dispositions du présent décret dans les colonies asiatiques.

« ART. XII. L'Assemblée nationale, désirant venir au secours de la colonie de Saint-Domingue, met à la disposition du ministre de la marine, une somme de six millions pour y faire parvenir des subsistances et des matériaux de construction, des animaux et des instruments aratoires.

« ART. XIII. Le ministre indiquera incessamment les moyens qu'il jugera les plus convenables pour l'emploi et le recouvrement de ces fonds, afin d'en assurer le remboursement à la métropole.

« ART. XIV. Les comités de législation, du commerce et des colonies réunis, s'occuperont incessamment de la rédaction d'un projet de loi, pour assurer aux créanciers l'exercice de leur hypothèque sur les biens de leurs débiteurs dans toutes nos colonies.

« ART. XV. Les officiers-généraux, administrateurs ou ordonnateurs, et les commissaires civils qui ont été ou seront nommés, pour cette fois seulement, pour le rétablissement de l'ordre dans les colonies des îles du Vent ou sous le Vent, particulièrement pour l'exécution du présent décret, ne pourront être choisis parmi les citoyens ayant des propriétés dans les colonies de l'Amérique.

« ART. XVI. Les décrets antérieurs concernant ces colonies seront exécutés en tout ce qui n'est pas contraire aux dispositions du présent décret. >>

L'assemblée coloniale s'était ajournée, dans l'espérance qu'il serait facile aux commissaires de déterminer les hommes de couleur à les suivre dans le nord pour y réduire les esclaves révoltés; car on se persuadait généralement que, dans l'enthousiasme de leur gratitude, ils uniraient leurs efforts à ceux des blancs, pour faire oublier le passé, et ramener partout la concorde, l'ordre et la paix.

Le commissaire et le gouverneur avaient été reçus à Saint-Marc aux cris de joie de toute la population les hommes de couleur s'étaient mêlés à l'ivresse générale; mais ils reçurent avec moins de facilité qu'on ne l'avait espéré d'abord, les propositions qu'on leur fit, pour marcher contre les nègres révoltés du Cap. Ils mirent leur assistance en cette conjoncture aux conditions suivantes.

Ils voulaient que les autorités de la colonie donnassent aussitôt leurs soins à remettre le Port-auPrince en paix vis-à-vis des autres paroisses; que l'assemblée provinciale de l'Ouest fût dissoute, et ses principaux membres déportés; la garnison de la place licenciée et remplacée par les milices de couleur.

Ces conditions furent acceptées par le commissaire et par le gouverneur. De Caradeux, effrayé en l'apprenant, abandonna en hâte le Port-au-Prince,

et passa aux États-Unis avec soixante nègres : Borel fut appelé à lui succéder. Les débris de la bande de ce chef s'étaient refugiés au Môle; il s'y dirigea pour les ramener au Port-au-Prince, sur une flottille qui fut envoyée de cette place dans la rade Saint-Nicolas; mais s'étant mis en mer sans une expédition régulière de la marine, il fut rencontré par Grimouard, commandant la station navale, qui l'arrêta comme forban. On le jeta en prison, et peut-être eût-il payé de sa tête cette dernière aventure, si l'assemblée du Cap n'eût réclamé pour lui une inviolabilité dont elle voulait investir tous les membres des réunions coloniales. Il fut remis en liberté.

Cependant les habitants du Port-au-Prince se trouvaient dans la situation la plus critique : d'un côté, Rigaud pressait la place sous le fort Bizoton; de tous les autres, elle était bloquée par les troupes réunies des confédérés, sous les ordres du général Beauvais ; et enfin, Blanchelande tenait la mer en vue de la ville, avec les vaisseaux de haut bord le Jupiter, le Borée, l'Agathe, et quelques autres bâtiments plus légers

Le commissaire Roume, parti de Saint- Marc, était venu se joindre aux assiégeants de terre, avec une escorte de soixante hommes de couleur. Tant et de si formidables préparatifs, effrayèrent la ville du Port-au-Prince; elle ouvrit ses portes, et se soumit au Commissaire civil. Les principaux me

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