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LX. Déclarons les confiscations et les amendes, qui n'ont point de destination particulière par ces présentes, nous appartenir, pour être payées à ceux qui sont préposés à la recette de nos revenus. Voulons néanmoins que distraction soit faite du tiers desdites confiscations et amendes, au profit de l'hôpital établi dans l'île où elles auront été adjugées.

Si donnons en mandement à nos amés et féaux les gens tenant notre conseil souverain établi à la Martinique, Guadeloupe, Saint-Christophe, que ces présentes ils aient à faire lire, publier et enregistrer; et le contenu en icelles, garder et observer de point en point selon leur forme et teneur, sans y contrevenir, ni permettre qu'il y soit contrevenu en quelque sorte et manière que ce soit, nonobstant tous édits, déclarations, arrêts et usages à ce contraires, auxquels nous avons dérogé et dérogeons par cesdites présentes. Car tel est notre plaisir, et afin que ce soit chose ferme et stable à toujours, nous y avons fait mettre notre scel. Donné à Versailles, au mois de mars mil six-cent quatre-vingtcinq, et de notre règne le quarante - deuxième ; signé Louis; et plus bas, par le Roi, COLBERT,

sitions de cette loi, la condition des affranchis. Les premières années de l'histoire des révolutions récentes de cette île, apprendront mieux encore comment les blanes des possessions françaises interprétaient cet article LIX du Code noir.

visa LE TELLIER; et scellé du grand sceau de cire verte, en lacs de soie verte et rouge. »>

Lu, publié et enregistré le présent édit ; ouï, et ce réquérant le procureur-général du roi, pour être exécuté selon sa forme et teneur ; et sera, à la diligence dudit procureur - général, envoyé copies d'icelui aux siéges ressortissants du conseil, pour y être pareillement lu, publié et enregistré. Fait et donné au conseil souverain de la côte de SaintDomingue, tenu au petit Goave, le 6 mai 1687. Signé MORICEAU.

LIVRE QUATRIÈME.

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La crise politique qui commençait à se déclarer en France à la fin de 1788, ne tarda pas à réagir aussi dans les colonies. Saint-Domingue, qui en était la plusriche et la plus importante, en ressentit surtout Peffet. La résolution adoptée par le gouvernement, le décembre 1788, d'admettre aux États-généraux un nombre de représentants du tiers-état égal à celui des membres des deux autres ordres, produisit surtout une vive sensation parmi les colons. Duchilleau, qu'on soupçonnait de favoriser secrètement les prétentions du peuple, venait d'être continué dans ses fonctions de gouverneur - général de la partie française de l'île; il fit de vains efforts pour modérer l'effervescence générale, et pour s'opposer à la formation des assemblées paroissiales et provinciales qui s'organisaient de toutes parts. Ces assemblées furent tenues au mépris des ordres du gouverneur ; et, d'une voix unanime, il y fut déclaré que la colonie avait le droit d'envoyer des députés aux États-généraux. Ces députés furent nommés au nombre de dix-huit, et sans avoir été ap

pelés par la cour, sans que leur départ fût autorisé par le gouverneur, ils s'embarquèrent pour la

France.

Ils arrivèrent à Versailles un mois après que les députés du tiers-états s'étaient constitués en Assemblée Nationale. Leur nombre parut excessif, et ce ne fut pas sans peine qu'ils obtinrent que six d'entre eux seraient admis à faire vérifier leurs pouvoirs et à prendre place dans l'assemblée.

Cependant une société dans laquelle figuraient les hommes les plus honorables, tels que Brissot, Pethion, Mirabeau, Clavières, Condorcet et Grégoire, s'était formée à Paris sous le nom de Société des Amis des Noirs. Le pitoyable état des esclaves dans les îles à sucre avait enfin touché efficacement des cœurs généreux : on commençait à haïr les colons, qu'on n'avait jamais aimés, soit que les fortunes immenses qu'ils apportaient dans la métropole excitassent l'envie, soit que leurs préjugés, qu'on ne supportait alors que chez les gens titrés, eussent blessé l'opinion publique.

D'un autre côté les grands planteurs de SaintDomingue qui résidaient à Paris pour y jouir de leurs richesses, avaient formé dans l'hôtel Massiac, une autre société connue sous le nom du club Massiac, et qui marchait dans le sens de la révolution, mais seulement dans ce que les opinions de celle-ci lui offraient de recours contre les autorités coloniales.

La correspondance du club Massiac avec les assemblées secrètes qui se réunissaient dans la colonie, achevèrent d'y propager les opinions les plus subversives de tout ordre, en ce qu'elles n'avaient pour bases que des intérêts privés, et qu'elles émanaient des vues les plus étroites. La fermentation qui régnait dans le même temps à Paris, n'était rien auprès de la fureur qui bouleversait toutes les têtes à Saint-Domingue.

A la nouvelle de la prise de la Bastille, cette fureur d'enthousiasme fut portée à son comble. Le gouvernement de la colonie, qui déjà luttait avec peine contre les colons novateurs et contre les comités qui se multipliaient chaque jour, se vit ouvertement attaqué par les habitants du Cap, qui s'enhardirent jusqu'à envoyer à l'intendant - général, de Barbé-Marbois, des députés choisis parmi eux, chargés de lui demander compte de sa gestion. Le comte de Peynier, qui venait de succéder à Duchilleau, eut la prudence d'inviter Barbé-Marbois à ne point attendre l'arrivée de cette députation factieuse, qui se dirigeait sur le Port-au-Prince, et le fit embarquer pour la France. Les députés du Cap survinrent peu de temps après que le navire eut fait voile ; ils firent une enquête : la fermeté du comte Peynier la prévint; mais ce premier mouvement illégal imprimé par les colons eux-mêmes, eut les suites les plus funestes, et ceux qui l'avaient causé en furent les premières victimes.

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