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MoCente en gagnant de vitesse sur l'expérience, et lui donnant la première émotion des sens. Son dernier espoir est de plaire à la faveur de la nouveauté ; c'est incontestablement là le motif secret de cette fantaisie; mais il se trompe, l'horreur qu'il fait n'est pas moins de la nature, que n'en sont les desirs' qu'il voudroit exciter: il se trompe aussi dans sa folle attente; cette même nature a soin de revendiquer ses droits; toute fille qui se vend s'est déja donnée, et s'étant donnée à son choix, elle a fait la comparaison qu'il craint. Il achete donc un plaisir imaginaire, et n'en est pas moins abhorré.

MÉCHANCETÉ, MÉCHANT. TOUTE Méchanceté vient de foiblesse ; l'enfant n'est Méchant que parce qu'il est foible; rendez-le fort, il sera bon', celui qui pourroit tout ne feroit jamais du mal. De tous les attributs de la Divinité toute puissante, la bonté est celui sans lequel on peut le moins concevoir. Tous les peuples qui ont reconnu deux principes ont toujours regardé le mau

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vais comme inférieur au bon, sans quoi ils auroient fait une supposition absurde.

Le Méchant se craint et se fuit, il s'égaie en se jetant autour de lui-même; il tourne autour de lui des yeux inquiets, et cherche un objet qui l'amuse; sans la satyre amère, sans la raillerie insultante, il seroit toujours triste; le ris moqueur est son seul plaisir. Au contraire, la sérénité du juste est intérieu re; son ris n'est point de malignité, mais de joie, il en porte la source en lui-même ; il est aussi gai seul qu'au milieu d'un cercle, il ne tire pas son contentement de ceux qui l'approchent, il Je leur communique.

HYPOCRISIE.

L'HYPOCRISIE est un hommage que le vice rend à la vertu ; oui, comme celui des assassins de César, qui se prosternoient à ses pieds pour l'égorger plus surement. Couvrir sa méchanceté du dangereux manteau de l'Hypocrisie, ce

'est point honorer la vertu, c'est l'outrager en profanant ses enseignes; c'esp

ajouter la lâcheté et la fourberie à tous fes autres vices; c'est se fermer pour jamais tout retour vers la probité. Il y a des caractères élevés qui portent jusques dans le crime je ne sais quoi de fier et de généreux, lui laissent voir au-dedans encore quelques étincelles de ce feu céleste fait pour animer les belles ames. Mais l'ame vile et rampante de l'Hypocrite est semblable à un cadavre où l'on ne trouve ni feu, ni chaleur, ni retour à la vie. J'en appelle à l'expérience. On a vu de grands scélérats rentrer en euxmêmes, achever saintement leur carrière et mourir en prédestinés. Mais ce que personne n'a jamais vu, c'est un Hypocrite devenir homme de bien; on auroit pu raisonnablement tenter la conversion de Cartouche, jamais un homme sage a'eût entrepris celle de Cromwel.

Il n'y a qu'un homme de bien qui sache l'art d'en former d'autres. Un Hypoerite a beau vouloir prendre le ton de la vertu, il n'en peut inspirer le goût à personne, et s'il savoit la rendreˇaimable, il aimeroit lui-même.

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L est des ames assez ressemblantes pour n'avoir aucun caractère marqué, dont on puisse au premier coup d'oeil as, signer les différences, et cet embarras de les définir les fait prendre pour des aines communes par un observateur superfi, ciel. Mais c'est par cela même qui les dise tingue, qu'il est impossible de les distinguer, et que les traits du modèle commun, dont quelqu'un manque tou jours à chaque individu, brillent tous. également en elles. Ainsi chaque épreuve d'une estampe a ses défauts particuliers qui lui servent de caractère, et s'il en vient une qui soit parfaite, quoiqu'on la trouve. belle au premier coup d'œil, il faut la considérer long-temps pour la re

connoître.

Comment réprimer la passion même la plus foible quand elle est sans contrepoids? Voilà inconvénient des caractères froids et tranquilles. Tout va bien tant que leur froideur les garantit des tentations; mais s'il en survient une qui les atteigne, ils sont aussi-tôr vaincus

qu'attaqués, et la raison, qui gouverne, tandis qu'elle est seule, n'a jamais de force pour résister au moindre effort.

Les hommes froids qui consultent plus leurs yeux que leur caur, jugent mieux des passions d'autrui, que les gens turbulens et vifs ou vains, qui commencent toujours par se mettre à la place des autres, ne savent jamais voir ce qu'ils sentent.i som

Celui qui n'est que bon ne demeure tel qu'autant qu'il a du plaisir à l'être da bonté se brise et périr sous le choc des passion's humaines: l'homme qui n'est que bon, n'est bon que pour lui.

L'observation nous apprend qu'il y e des Caractères qui s'annoncent presque Len naissant, et des enfans qu'on peut étudier sur le sein de leur nourrice, Ceuxlà font une classe à part, et s'élèvent en commençant de vivre. Mais quant aux autres qui se développent moins vite, vouloir former leur esprit avant de le connoître, c'est s'exposer à gâter le bien que la nature a fait, et à faire plus mal à sa place. v...

Pour changer un esprit, il faudroit changer l'organisation intérieure pour changer Caractère, il faudroit changer

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