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clamé en même temps par un noble et par un roturier, fasse injustement pencher la balance du côté du noble. Gouvernez-vous envers la noblesse, de telle façon, qu'on la regarde comme une raison de faire mieux et plus que les autres, et que toujours timide à réclamer la qualité de noble, parce qu'on sait qu'elle expose à un examen plus rigoureux, on la regarde comme un poids accablant, et on la cache avec soin, si l'on n'est pas en état de prouver qu'en tout on a cherché à donner l'exemple du bien. Gardez-vous surtout qu'à l'exemple de l'institution de Napoléon, la richesse entre pour quelque chose dans l'acquisition ou la transmission de la qualité de noble : des services généreux, des vertus incorruptibles, un corps usé par des travaux civils ou affaibli par des cicatrices militaires, voilà en pareil cas, ce qu'il faut que l'on présente pour l'intérêt de la société; vous préparez sa honte et sa ruine, plus ou moins éloignées, si vous déclarez que l'inscription d'une famille sur le nobiliaire ne peut être que le prix d'une somme d'argent, ou la conséquence d'un état de fortune quelconque.

Beaucoup de personnes ont cru que la création de la noblesse de Bonaparte avait été la suite d'un des articles du traité de Tilsitt, ainsi conçu : « Le cérémonial des deux cours des Tuileries et de SaintPétersbourg, à l'égard des ambassadeurs, ministres et envoyés, qu'elles accréditeront l'une près de l'autre, sera établi sur le principe d'une réciprocité et d'une égalité parfaite. » Ces personnes ont pu ne pas se tromper.

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La création d'une noblesse par Napoléon, déplut généralement. Les uns la critiquèrent sans restrictions, comme une violation scandaleuse du serment de maintenir l'égalité, qu'il avait fait au moment de son sacre, et renouvelé lors de la distribution des étoiles de la légion. Les autres, jugeant le décret d'institution en lui-même se demandaient pourquoi au moins, s'il s'était vu ou cru dans la nécessité de créer une noblesse, il n'avait pas tout simplement établi l'ancienne, en admettant dans ses rangs les hommes nouveaux qui lui paraissaient dignes de devenir nobles: « Quest-ce, disaient-ils, qu'une institution en France, par laquelle le fils ou le neveu de tel dignitaire quel qu'il soit, devient baron, comte, ou chevalier, en possédant un certain revenu, tandis que les descendans de Duguesclin et de Bayard, qui ont, avec raison, joué un si grand rôle dans l'institution de la nouvelle chevalerie, ne sont plus rien? >>

Cet acte date du 1er. mars 1808. Le 22 août1807, celui des frères de Napoloén qui, ensuite du traité de Tilsitt, était devenu roi de Westphalie, avait épousé, dans la chapelle du Louvre, la princesse Catherine, fille du roi de Wurtemberg.

On vit, pendant quelque temps, l'empereur des

Français s'occuper, au sein de la cour qu'il s'était formée, de régler ou perfectionner l'administration de son empire, et présider aux embellissemens de tous genres par lesquels il voulait rendre sa capitale la plus belle ville du monde. Le plan qu'il s'était formé contre l'Angleterre l'appelait cependant en Italie. Il en prit la route le 16 novembre 1807. Ce plan s'explique tout entier dans le décret suivant, rendu, il est vrai, en représailles de ce que faisait l'Angleterre elle-même :

Napoléon, empereur des Français, roi d'Italie considérant,

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1°. Que l'Angleterre n'admet point le droit des gens suivi universellement par tous les peuples policés;

2°. Qu'elle répute ennemi tout individu appartenant à l'état ennemi, et fait, en conséquence, prisonniers de guerre, non-seulement les équipages des vaisseaux armés en guerre, et les navires marchands et même les facteurs de commerce, mais encore les équipages des vaisseaux de commerce, et les négocians qui voyagent pour les affaires de leur négoce;

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3°. Qu'elle étend aux bâtimens et marchandises du commerce et aux propriétés des particuliers le droit de conquête, qui ne peut s'appliquer qu'à ce qui appartient à l'état ennemi;

4°. Qu'elle étend aux villes et ports de commerce non fortifiés, aux havres et embouchures

des rivières, le droit de blocus qui, d'après la raison et l'usage de tous les peuples policés, n'est applicable qu'aux places fortes;

Qu'elle déclare bloquées des places devant lesquelles elle n'a pas même de bâtimens de guerre, quoiqu'une place ne soit bloquée que quand elle est tellement investie, qu'on ne puisse tenter de s'en approcher sans un danger imminent;

Qu'elle déclare même en état de blocus des lieux que toutes ses forces réunies seraient incapables de bloquer, des côtes entières et tout un empire;

5°. Que cet abus monstrueux du droit de blocus n'a d'autre but que d'empêcher les communications entre les peuples, et d'élever le commerce et l'industrie de l'Angleterre sur la ruine de l'industrie et du commerce du continent;

6°. Que, tel étant le but évident de l'Angleterre, quiconque fait sur le continent le commerce des marchandises anglaises, favorise par-là ses desseins et s'en rend complice;

7°. Que cette conduite de l'Angleterre, digne en tout des premiers âges de la barbarie, a profité à cette puissance au détriment de toutes les autres;

8°. Qu'il est de droit naturel d'opposer à l'ennemi les armes dont il se sert, et de le combattre de la même manière qu'il combat, lorsqu'il méconnaît toutes les idées de justice et tous les sentimens libéraux, résultat de la civilisation parmi les hommes:

Nous avons résolu d'appliquer à l'Angleterre les usages qu'elle a consacrés dans sa législation maritime.

Les dispositions du présent décret seront constamment considérées comme principe fondamental de l'empire, jusqu'à ce que l'Angleterre ait reconnu que le droit de la guerre est un, et le même sur terre que sur mer; qu'il ne peut s'étendre ni aux propriétés privées, quelles qu'elles soient, ni à la personne des individus étrangers à la profession des armes, et que le droit de blocus doit être restreint aux places fortes réellement investies par des forces suffisantes.

Nous avons en conséquence décrété et décrétons ce qui suit :

Art rer. Les îles britanniques sont déclarées en état de blocus.

2. Tout commerce et toute correspondance avec les îles britanniques, sont interdits.

En conséquence, les lettres et paquets adressés en Angleterre ou à un Anglais, ou écrits en langue anglaise, n'auront pas cours aux postes, et seront saisis.

3. Tout individu sujet de l'Angleterre, de quelque état et condition qu'il soit, qui sera trouvé

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