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N° 11.

GAZETTE NATIONALE OU LE MONITEUR UNIVERSEL.

POLITIQUE.
TURQUIE.

Lundi 11 JANVIER 1790.

Les négociations pour la paix s'annoncent par des mouvements respectifs; mais l'activité commune a des causes si différentes, qu'elle ne décide rien sur les véritables intentions des négociateurs. D'un côté, des succès rapides ont élevé trop baut les prétentions; et de l'autre, une humiliation soudaine donne à peine le temps de réfléchir aux sacrifices que la prudence exige.

Si les pertes douloureuses que la Porte vient de faire doivent être irréparables; si la Moldavie, la Valachie sont enlevées pour toujours à la domination des Turcs; si la Servie même n'y doit demeurer encore que par une sorte de faveur et de grâce, on peut s'attendre à voir le sultan s'exposer à de plus grands hasards, et consulter de nouveau le destin de la guerre, en se mettant à la tête de ses armées. Les préparatifs de la Sublime Porte sont considé rables, et les dernières nouvelles de Constantinople annoncent que l'injustice de la guerre actuelle remplit les Turcs d'indignation, et leur inspire ce genre de courage qui plus d'une fois a prévenu chez eux le dernier degré de l'abattement du désespoir.

Pourquoi le parti que la plupart des écrivains politiques embrassent avec le plus de complaisance est-il souvent ami des vainqueurs? On les prendrait eux-mêmes pour des Souverains qui justifient leurs conquêtes. Ils sont pourtant, de tous les hommes qui écrivent, ceux qui devraient écrire le moins en faveur des conquérants. Ce n'est pas le récit des triomphes qui éclaire les peuples. Il ne leur est utile que de bien connaître les motifs qui portent si légèrement les souverains à exposer la vie des hommes.

ITALIE.

De Bologne, le 8 décembre. - Les Bolonais ont la réputation d'aimer les étrangers, et surtout d'imiter les Français. Quant à cette dernière inclination, le gouvernement la surveille aujourd'hui. On ne peut plus nous permettre sans danger de prendre, comme autrefois, les modes de France. Les bonnes lois ont des inconvénients; le bon goût n'en avait point.

Notre sénat, sur une requête que le magistrat a présentée, va promulguer une loi nouvelle, qui déclarera déchu de sa dignité et de toutes les fonctions de sa place tout membre du sénat qui épousera une personne que l'opinion aura dégradée. On sollicite vivement cette loi, à l'occasion d'on mariage qu'un homme du premier rang et de la plus haute naissance est sur le point de conclure avec une danseuse dont il est éperdument épris.

De Naples, le 19 décembre. - Un détachement de l'escadre anglaise de la Méditerranée a mouillé avant-hier dans cette rade; il est composé du vaisseau le Léandre, de 50 canons, ayant à son bord l'amiral Peyton et trois cent trente-sept hommes d'équipage; de la frégate Carysfort, de 28 canons et cent quatre-vingts hommes d'équipage; c de la corvette Bulldoy, de cent hommes d'équipage et 16 canons.

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crète: et où vont-ils la chercher? Ce n'est pas dans les abus du pouvoir, dans les vexations de ses agents; ce n'est pas dans la douleur des peuples, dans leur misère, dans leur indignation... On ne s'avise pas de regarder si près de soi. il n'y aurait plus de mystère; où serait le mérite de la découverte? Mais ces écrivains remontent plus haut ils s'y prennent de plus loin. Ils trouvent à l'insurrection d'un peuple une cause étrangère; ce sont des puissances jalouses, rivales, ennemies, qui ont machiné tous ces mouvements populaires ; ce sont elles qui soulèvent les sujets d'antrui, pour se venger elles-mêmes des couronnes voisines.

N'est-ce pas, en effet, de cette manière que l'on a jugé du soulèvement de nos provinces belgiques? N'a-t-on pas prétendu que les cours d'Angleterre et de Hollande avaient tout fait dans le Brabant? Il fallait, disait-on, opérer une diversion, distraire l'empereur de la guerre avec les Turcs, etc., etc. Et la Prusse, inquiète des victoires impériales, ne devait-elle pas embrasser le même système ?..... Dans l'instant les Brabançons se sont armés; ils ont remporté un premier avantage. Les habitants des environs de Turnhout se sont fait égorger et les vieillards, les femmes, les petits enfants; bientôt la ville de Gand a été inondée de sang; à Bruxelles, on s'est battu trois fois dans un jour pour chasser les impériaux; enfin, le fer et le feu ont parcouru les villes et les campagnes belgiques..... Et cet héroïsme de nos patriotes n'était qu'un système du cabinet de Londres et de Berlin! Quelle idée misérable!

Rappelez-vous, monsieur, les propos que l'on tenait en France au moment de la bienheureuse insurrection qui a rendu la liberté aux Français, et qui a mérité à leur roi l'éternelle reconnaissance de cette nation. Ne disait-on pas que les Anglais étaient les auteurs de tous les troubles de ce royaume, qu'ils avaient des émissaires dans les provinces, que c'étaient eux qui payaient les Parisiens, et qu'on avait même vu di tribuer des guinées ?... Car il ne pouvait pas venir à la pensée que la fureur, chez un peuple opprimé, pût être un mouvement naturel....

Mais la révolution est faite en France, et ce beau royaume ne peut plus être fatigué par les nouvelles conjectures des politiques. Il n'en est pas ainsi de nous autres Brabançons; on ne se contente pas de nous avoir fait combattre comme des machines patriotiques; on veut encore, et la conséquence est juste, disposer à son gré de la liberté que nous avons acquise les armes à la main. Les politiques spéculent de nouveau: ils ne consultent ni nos sentiments, ni nos vertus, pour savoir ce que nous deviendrons; ils ne s'occupent point de ce que nous sommes, et c'est encore dans les cabinets de l'Europe qu'ils vont déchiffrer nos destinées.

La Prusse, protectrice du stathoudérat, aspire à natu raliser parmi nous ce pouvoir étranger, et nos forteresses vont bientôt recevoir les garnisons hollandaises; et nous n'avons versé tant de sang que pour les intérêts de la Prusse et de la maison d'Orange!... Comme si, témoins de notre valeur et de nos succès, les autres peuples, instruments aveugles des princes, allaient armer leurs bras pour étouffer notre liberté naissante! comme si les souverains dont on nous menace, et qu'un tel soupçon offense, pouvaient se charger du crime d'opprimer les généreux Brabançons!

Mais, s'il faut en croire la plupart des politiques, et s'en tenir à leurs calculs, les peuples et les souverains ont bien d'autres intérêts que ceux de la morale et de l'humanité, et ces considérations doivent éternellement demeurer étrangères aux relations de la politique et du commerce de l'Europe. Pour eux, il ne s'agit point de savoir quelle sera la liberté d'une nation, mais quel sera son commerce; ils ne s'inquiètent point du bonheur dont telle nation peut jouir chez elle, mais des liaisons qu'elle doit contracter, et surtout des alliances que doit former ou entretenir la maison de ses souverains, etc., etc.

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milieu de février; une chose plus certaine, c'est qu'on fera des changements à l'acte concernant le tabac.

La communication entre l'Angleterre et l'Inde est tellement facilitée par la marche de nos vaisseaux et les connaissances de nos pilotes, que ce qui était autrefois un Voyage dangereux et inquiétant est devenu une partie de plaisir. Entre les preuves multipliées que nous pourrions en donner, nous choisirons la traversée du Berrington comme la plus frappante et la plus extraordinaire qu'aucun navite ait peut-être jamais faite.

Ce vaisseau, commandé par le capitaine Ley, a fait le voyage de Madras en trois mois et quatre jours.

Le Melville Castle, vaisseau de la compagnie des Indes, s'est beaucoup plus approché du pôle méridional qu'aucun navigateur ne l'avait encore fait. Au 42° degré de latitude, il a trouvé une île de glace de deux milles de circonférence et de quatre cents pieds au-dessus du niveau de la mer. Comme la glace s'enfonce des deux tiers dans l'eau, on peut supposer à cette masse prodigieuse douze cents pieds d'épaisseur. Le capitaine envoya sa chaloupe reconnaître l'ile, mais il lui fut impossible d'y arriver à cause des quartiers de glace qui s'en détachaient avec fracas, et des torrents d'eau qui descendaient du sommet de cette montagne effrayante. Cette dernière circonstance paraît confirmer la théorie de la fonte des glaces polaires, que l'on trouve dans les belles Etudes de la nature, par M. de SaintPierre, livre immortel dont la traduction a chez nous autant de succès et d'admirateurs que l'original, dont yous devez être fiers, en trouve chez vous.

Des nouvelles récentes de la côte nord-ouest d'Ir

lande nous annoncent que la pêche du hareng, qui y était entièrement tombée depuis plus de trois ans, donne aujourd'hui de grandes espérances. On vient de construire des salines dans la nouvelle ville de Rutland, et des fumeries ou salles à sécher, dans le genre de celle d'Yarmouth, pour préparer le bareng saur. On convient généralement que si le hareng continue de donner sur cette côte, les ateliers élevés à Rutland deviendront une des premières ressources du commerce de ce pays.

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Le vent qui a fait périr douze vaisseaux à Ayr, sur la côte d'Ecosse, soufflant toujours avec beaucoup de violence, on a de grandes inquiétudes sur cinq vaisseaux d'Irvine et de Saltcoats, qui ne sont pas encore entrés dans Loch Ryan.

- Le pain est si cher à Dublin, que les pauvres se trouvent dans la situation la plus déplorable, et ont absolument besoin que les riches viennent à leur aide.

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De Lewes, le 28 décembre 1789. Un navire français, chargé de sel, a fait naufrage sur notre côte, entre Newha ven et Seaford. Heureusement pour l'équipage, la maréc l'a remis à flot au bout de deux heures. Personne n'a péri, l'on a même sauvé une partie de la cargaison.

- M. Damer vient de terminer la statue de Sa Majesté; elle a près de huit pieds: c'est un morceau admirable, au dire des connaisseurs.

FRANCE.

Extrait des registres des délibérations du greffe du comité d'administration de la ville de Nantes. Du mardi 29 décembre 1789, environ les six heures du soir.

Assemblée ordinaire du comité d'administration de la ville de Nantes, où présidait M. de Kvegan, maire et lieutenant-général de police; assistants MM. Maisonneuve, sous-maire, Dubern, Varsavaux, Roziers, Legris aîné et Cornet, conseillers, magistrats, échevins; ayant avec eux N. maître Menard de Roche-Caire, conseiller-secrétaire-greffier en titre de la communauté de ville.

M. Cornet faisant fonctions de procureur du roi, syndic absent.

MM. Cautin, Vaudez, Felloneau, avocat du roi; Foullois, Lambert, Lepot, Drouin de Pareay, le Cadre, Genevois, Fourmi père, Guillet, Dupoirier, de la Rivaudière, Chanceaulme, Gallon père, Sottin de la Coindière, Lahaye et Bridon, membres du comité d'administration.

Un citoyen, adressant la parole à M. de Maisonneuve, sous-maire, a dit : Les obligations que M. de Kvegan ne cesse de contracter et de remplir envers ses concitoyens, par l'exercice d'un dévouement absolu et des qualités les plus recommandables, prescrivent à la reconnaissance publique, que nous partageons et que nous devons manifester, un hommage fait pour conserver à la postérité les traits de ce citoyen courageux et infatigable.

Je vous prie donc, messieurs, de délibérer sur le projet qu'un honorable membre de votre comité, après avoir consulté l'opinion publique, m'a chargé de présenter à votre sanction. Ce projet, qui intéresse et nos devoirs et nos sentiments, était sans doute le seul dont nous puissions interdire la discussion à celui qui en est le respectable objet; mais tous les motifs que sa modestic opposerait à notre glorieuse satisfaction doivent céder à la nécessité de consacrer un imposant exemple des récompenses qu'il faut accorder aux talents et aux vertus, la véritable source du bonheur public et de toute prospérité.

Projet proposé à la reconnaissance des citoyens de cette ville, pour faire peindre le tableau de la mairie de M. Kvegan, par M. David, peintre du roi, le Rubens de notre siècle. Cet artiste célèbre, curieux de voir une ville qui s'est acquis tant de gloire dans la révolution actuelle, s'empressera de venir faire le portrait de l'administrateur bienfaisant qui nous of tre le modèle des vrais talents et de toutes les vertus.

Chaque citoyen contribuera pour quelque modique somme que ce soit : c'est l'hommage du sentiment qui fait la valeur du tribut.

Sur quoi l'assemblée délibérant, après avoir manifesté, par des applaudissements réitérés, sa satisfaction et sa sensibilité sur cette adresse, et sur le projet qu'elle contient, déclare de reconnaître dans le vœu qu'on vient d'énoncer, l'expression de ses sentiments, et les moyens d'en manifester aussitôt le témoignage.

Arrête en conséquence que l'on invitera M. David. peintre du roi, de venir à Nantes consacrer les traits du courageux administrateur dont le noble caractere offrira aux plus grands talents le modèle des plus grandes vertus.

Arrête également que, pour ménager à tous les citoyens la satisfaction de concourir à cet hommage public, chacun pourra remettre telle modique somme que ce soit. Mais l'assemblée, voulant assurer la plus prompte exécution d'un projet si désiré, arrête enfin qu'elle contribuera des fonds de la commune pour achever la somme a laquelle pourra s'élever cette dépense, et que copie de la présente délibération sera adressée à M. David; et a nommé commissaires, pour veiller à l'exécution du projet, MM. Drouin de Parée, Cautin, Genevois, et le Fèvre de la Champvire.-Fait lesdits jour et an que devant. Signé au registre, DE KVEGAN, maire, et MENARD DE ROCHE-CAIRE, secrétaire-greffier. Pour expédition, MENARD DE ROCHECAIRE, secrétaire-greffier. Copie de la lettre écrite à M. David, peintre du roi, par MM. les officiers municipaux el membres du comité de Nantes.

Monsieur, vous verrez, par la délibération dont nous avons l'honneur de vous adresser une expédition, que nous osons compter sur votre complaisance à venir concourir avec nous à l'hommage que nous voulons rendre au respectable chef de l'administration de cette ville.

Si vous daignez céder à nos pressantes sollicitations, nous aurons réussi, suivant nos désirs, à immortaliser les vertus les plus recommandables, par les talents les plus justement admirés. C'est ainsi que

nous transmettrons à nos neveux un tableau digne des sentiments que nous voulons exprimer, et du génie qui l'aura composé.

Signé les officiers municipaux et membres du comité, etc. Extrait d'une lettre de Tournon-en-Vivarais, du 28 décembre 1789.

Le 26 de ce mois, il y a eu en Vivarais trois nouvelles assemblées fédératives des gardes nationales des deux rives du Rhône, dont l'objet a été, ainsi que celui des précédentes faites en Dauphiné, le maintien des decrets de l'Assemblée nationale, la libre circulation des grains, la renonciation à toute dis tinction de province, et finalement tout ce qui pourra contribuer au succès de la révolution, en maintenant constamment la tranquillité publique,

Ces assemblées se sont tenues à trois lieues de distance l'une de l'autre, sous les murs des villes de Tournon, Saint-Pérai et la Voûte: elles ont été très bombreuses. On assure qu'il y avait plus de douze mille citoyens sous les armes, représentant une armée de soixante mille hommes, tous prêts à se rassembler au besoin : le plus grand ordre a régné dans chaque assemblée.

Dans le nombre des gardes nationales en uniforme, qui composaient l'assemblée de Tournon, on a remarque celles de Valence, Romans, Saint-Vallier, Tournon et Tain, toutes exercées depuis un certain temps par des officiers et soldats de troupes réglées; elles ont fait des évolutions qui ont étonné tous les assistants. Quatre pièces de canon de bronze, achetées pour le service de la patrie, par un riche négociant de Tain, ont rendu, par des décharges répetées, l'appareil de ce rassemblement de patriotes très inposant.

A une heure après midi, toutes les troupes s'étant rendues dans l'église de Saint-Julien, pour y prononcer le serment fédératif, les députés de Tournon, Romans Valence et Tain y ont prononcé des discours analogues aux circonstances, qui ont été entendus avec le plus grand intérêt. On a distingué surtout celui d'un des officiers députés de Valence, dont on a vivement applaudi le passage suivant :

La ville de Valence, occupée constamment du bonheur de ses habitants, mettra sa félicité la plus chère à voir régner autour d'elle, la paix et la tranquillité dont elle a joui jusqu'à présent. Précieuse paix, si chère aux âmes vertueuses, pénétrez le cœur des Français ! faites leur abjurer des querelles et des divisions étrangères au vrai patriotisme! S'il pouvait y avoir encore parmi eux des hommes assez prévenus. assez aveugles pour ne pas sentir le prix d'une liberté indépendante de l'arbitraire du gouvernement, uniquement fondée sur l'empire et sur la force des lois, soyons bien convaincus que la confiance, la persuasion, la sécurité sont des armes bien plus sûres, pour ramener leurs esprits égarés, que la contrainte et les persécutions!... Le caractère de franchise, de loyauté, de générosité qui distingua toujours la noblesse française, n'est point anéanti: encourageons cette portion précieuse de nos frères dans la société, de nos chefs dans les armées, à le faire paraître avec encore plus d'éclat; et n'oublions jamais que ce n'est point à heurter le bat avec impétuosité que doivent tendre les bons esprits, mais à l'atteindre avec sagesse et avec modération.

ADMINISTRATION.

MUNICIPALITE DE PARIS. Département des établissements publics. Le département des établis ements publics, convaincu de la nécessité de maintenir à là Bourse l'or

dre, la tranquillité et la sûreté des négociations; considérant que le régime intérieur de cet établissement, adopté par l'ancienne administration de la police, n'a pu jusqu'à ce moment en écarter une foule de gens sans aveu qui s'y introduisent pour y commettre des vols et des désordres;

Que les réglements et ordonnances interdisent rigoureusement l'entrée de la Bourse aux faillis et à tous ceux qui n'ont point satisfait à leurs engagements et dettes exigibles;

Que le nombre indéfini de personnes qui, sans titre et sans qualité, s'immiscent dans les fonctions des agents de change, donne lieu à une multitude d'abus de confiance, et tend à perpétuer cet agiotage funeste réprouvé par les lois, qui ne peut enrichir quelques individus qu'aux dépens du commerce et de la véritable industrie;

Que, dans l'Etat le plus librement constitué, il est des fonctions délicates dont l'exercice exige une responsabilité particulière, et sont tellement liées à l'ordre public, qu'on ne peut les confier indifféremment à tous les citoyens;

Considérant enfin qu'il est de son devoir le plus impérieux de surveiller un établissement également intéressant par ses rapports avec le crédit public et les fortunes particulières, a arrêté ce qui suit:

1o La Bourse sera journellement inspectée par un des membres du département, qui entendra toutes les plaintes et toutes les dépositions relatives à la sûreté et tranquillité de la Bourse;

2o La garde ordinaire de la Bourse sera composée, comme ci-devant, d'un commandant, d'un brigadier et de trois gardes en uniforme;

30 La cloche extérieure annoncera le commencement et la fin de la tenue de la Bourse, et il ne sera permis, sous aucun prétexte, aux agents de change d'occuper activement, avant ou apres la Bourse, le parquet où ils négocient les effets publics;

40 Toutes les demandes et réclamations relatives à la Bourse et aux agents de change seront adressées à M. le maire ou au département des établissements publics.

50 Il sera enjoint à la garde de la Bourse d'en refuser l'entrée aux personnes désignées par les ordonnances; et sur les précautions à prendre pour éviter l'arbitraire à cet égard, le commandant se conformera à ce qui sera prescrit par l'officier municipal présent.

60 Il est expressément défendu, sous les peines portées par les ordonnances, à toutes personnes autres que les agents de change, de faire aucune des fonctions à eux attribuées.

Signé, BAILLY, maire; BROUSSE Des Faucherets, lieutenant de maire; BEAUFILS, CHAMPION DE VILLENEUVE, DELTUF Desrosières, FISSOUR, D'HERVILLY, conseillers-admi nistrateurs.

Nous nous permettrons quelques observations à F'occasion de cette ordonnance, qui peut-être ne seront pas entièrement inutiles ici.

L'hôtel de la Bourse fut établi à Paris par un arrêt du conseil du 24 septembre 1724. Cet arrêt ordonne que l'entrée en sera ouverte tous les jours, excepté les dimanches et fêtes, depuis dix heures du matin jusqu'à une heure après midi, aux négociants, marchauds, banquiers, financiers, agents de change et de commerce, aux bourgeois et autres personnes connues et domiciliées dans Paris, excepté aux femmes, qui n'y pourront entrer sous quelque prétexte que ce soit.

Tous ceux qui sont admis à la Bourse peuvent y négocier entre eux les lettres de change, les billets au porteur et à ordre, ainsi que des marchandises,

tienne, par sa direction et administration, aux établissements publics, il est clair que c'est à la police qu'on a dû s'adresser pour en assurer le repos, la tranquillité, en éloigner les attroupements, et préve

sans l'entremise des agents de change; mais pour les autres effets et papiers commerçables, ils ne peuvent être négociés que par des agents de change, à peine de nullité des négociations et de 3,000 livres d'amende, aux termes de l'arrêt du conseil du 6 no-nir les désordres qui pourraient compromettre ou la

vembre 1781, art. 13. C'est pourquoi les particuliers qui veulent vendre ou acheter ces papiers commercables et autres effets, doivent remettre l'argent ou les effets aux agents de change avant la Bourse, et ceux-ci sont obligés d'en donner leur reconnaissance.

Avant l'arrêt du conseil du 30 mars 1774, les agents de change étaient à la Bourse pêle-mêle avec le public, ce qui en rendait la recherche difficile et la communication embarrassante; mais cet arrêt a ordonné depuis qu'ils auraient un lieu séparé au haut de la salle, comme on le voit aujourd'hui.

De tous temps la police de la Bourse et des agents de change a été attribuée au lieutenant-général de police, comme on peut s'en assurer par les arrêts du conseil du 24 septembre 1724, 6 novembre 1781 et 3 septembre 1784. C'est qu'en effet ce magistrat, obligé de veiller à la sûreté générale de tous les établissements, a dû avoir inspection sur un de ceux où la cupidité peut faire plus aisément commettre des friponneries. Les relations que la police entretient avec tous les préposés ou agents de l'administration de la justice, la connaissance qu'elle acquiert des individus mal famés ou suspects de la capitale, la mettent à portée de remplir l'objet qu'on attend d'elle à cet égard.

Le public pourra donc se demander, à l'occasion de l'ordonnance, fort sage d'ailleurs, que nous vcnons de rapporter, comment il peut se faire que ce soit l'administration des établissements publics qui soit aujourd'hui chargée de ce soin? Les idées se confondent, on ne voit plus la ligne de démarcation qui sépare l'administrateur qui prépare et ordonne un établissement public, de celui qui en maintient le repos et la sûreté. L'homme à qui l'on aura escroqué quelque chose ou joué un mauvais tour à la Bourse, viendra toujours s'en plaindre au département de police, et cela est dans l'ordre, je crois.

Il est sûr que s'il n'existait d'autres départements que celui des établissements publics, il aurait à lui seul la disposition, l'ordonnance et la police, depuis les clubs jusqu'aux hôpitaux, aux grands chemins, aux promenades et aux théâtres, puisque tout cela est établissements publics.

Mais comme il serait impossible qu'un département cût tant d'objets à la fois dans son ressort, sans mettre de la confusion ou de l'oubli dans sa gestion, on les partagerait en plusieurs espèces de fonctions administratives, et c'est ce que l'on a fait.

On a senti que la police ne pouvant pas être rigoureusement prise pour ce qu'elle était autrefois, Il fallait diviser les fonctions qu'elle s'était attribuées, et en faire plusieurs départements. De tous les articles du plan provisoire, cette division est peut-être, à quelques irrégularités près, la seule qui puisse être adoptée pour empêcher la réunion de toute l'administration dans quelques mains, et parconséquent les abus qui en résultent nécessairement pour le peuple.

Ce principe a été consacré par l'assemblée générale des représentants de la commune dans la question des théâtres, et le lieutenant de maire au département des établissements publics l'a lui-même invoqué comme un moyen de solution. Il a été arrêté que l'administration et direction des spectacles appartiendrait aux établissements publics, et que la surveillance de police et de sûreté resterait à la police.

Un acte du département de police relatif, à la caisse d'escompte, et que nous avons rapporté, vient à l'appui de cette vérité; quoique cette caisse appar

caisse, ou le public pendant qu'elle est ouverte.

Tout établissement public où il faut sûreté et protection pour les personnes et les choses, rentre sous le domaine de la police; mais considéré en luimême, dans ses droits, dans ses fonctions, avant et après son érection, il est l'objet du département des établissements publics. (Cet article est de M. Peuchet.)

CHATELET DE PARIS.

Le vendredi 8, M. de Favras a entendu la lecture des charges et des pièces produites contre lui; il a nommé pour conseils M. Liégard de Ligny, avocat, et M. Gaillard de la Ferrière, procureur au Châtelet. Il a été interrogé le samedi 9, par M. Quatremère, conseiller au Châtelet, Nous nous proposons de suivre dans ses détails ce nouvea procès.

Le 8 et le 9, on a entendu huit témoins dans l'affaire de M. de Bezenval; quatorze ou quinze doivent l'être incessamment, et l'audition de cent dix-huit témoins n'offre encore aucune charge contre cet officier-général.

On répand mal à propos dans le public qu'on a formå un parti pour enlever M. de Bezenval; la version qui assure qu'on cherche à le proscrire dans une sédition, est également dénuée de fondement. Les troupes nombreuses placées au Châtelet ont pour objet de maintenir l'ordre et la paix au milieu des citoyens que la curiosité amène à ce tribunal pour y entendre plaider les causes intéressantes qui y sont instruites. C'est ici l'occasion de prévenir nos lecteurs que nous ne nous hâtons jamais de leur présenter les événements qui sont aujourd'hui d'un intérêt public. parcequ'il nous est impossible de chercher aux dépens de la vérité une priorité qui ne peut avoir qu'un succès éplic mère, et qui n'est pas même sans danger.

LYCÉE.

La seconde séance de vendredi dernier, sur le droit public, a encore eu plus de succès que la première: un des morceaux qui a été le plus applaudi, c'est celui de la justice.

«Malheureusement, dit M. de La Croix, nous avons eu jusqu'à présent des idées fausses sur l'administration de la justice; nous l'avons regardée comme un attribut de la souveraineté, lorsque nous ne devions la considérer que comme une de ses charges.

Les rois n'accordent point la justice, ils la doivent ; elle est la première dette de la puissance qui gouverne.

Tout prince, tout monarque qui souffre que l'on vend la justice dans ses Etats, fait payer à ses sujets ce qui leur appartient.

Comment concevoir, d'après ces vérités, que des souve rains aient pu imaginer de transformer la justice en une ferme, d'en vendre les fonctions, de mettre un impôt sur la nécessité de l'obtenir? Ah! combien ils se sont éloignés de ce digne monarque qui, assis modestement au pied d'un chêne, y établissait son tribunal, avait pour dais la cime de l'arbre qui le couvrait de son ombre; pour escorte, l'amour et le respect de ses sujets; pour conscillers, la droi ture de sa raison et la bonté de son cœur; pour auditoire, toute sa nation qui venait applaudir à l'équité de ses jugements!....

« Si ces fiers barons, si ces grands propriétaires de fiefs avaient dans leurs terres imité un si bel exemple; s'ils avaient su s'y créer un véritable tribunal de justice, ils s'y seraient maintenus pendant toute la durée de la monarchie, parcequ'il n'est aucune puissance sur la terre capable d'arracher à la vertu son empire, et de faire perdre à la bonne foi éclairée l'ascendant de ses lumières; mais aveuglés par l'intérêt, au lieu de mettre la justice au nombre de leurs devoirs, ils l'ont mise au nombre de leurs redevances, et ils l'ont perdue ainsi que toutes celles qu'ils avaient usurpées. »

ASSEMBLÉE NATIONALE.

Présidence de M. l'abbé de Montesquiou.

SUITE DE LA SÉANCE DU 8 JANVIER AU SOIR. M. le rapporteur observe qu'il reste quelques difficultés sur le partage, mais qu'elles ne sont pas de nature à inquiéter sur leur solution.

Le Bourbonnais et la Haute-Marche, deux; la Basse-Marche, Limosin et Dorat, trois; Lyonnais, Forez et Beaujolais, un; la Corse, un.

Total: quatre-vingt-un départements.

Le rapport est terminé par la demande de la solution de quelques questions, notamment si le Dauphiné peut rester en un seul département, ayant neuf cent cinquante lieues de surface; si le pays d'aunis, qui n'a que cent lieues, en peut former un autre, de même que les Basques avec cent quarante lieues.

Il demande que d'ici à mercredi prochain, chaque département porte le tableau de ses limites, sinon le comité les retracera lui-même, et les soumettra au jugement de l'Assemblée.

Qu'il sera accordé au comité de division, à compter du 11 de ce mois, une heure chaque séance, pour faire uger les difficultés qui n'auraient pu être terminées de concert.

Que les députés de chaque département se pourvoiront de deux exemplaires collés sur toile, en une seule pièce, contenant les limites du département, des districts et des cantons, signés d'eux, dont un restera aux archives de l'Asemblée nationale, avec la signature des commissaires, l'autre sera envoyé à chaque assemblée de département, pour être déposé dans ses archives.

Ce travail obtient les applaudissements de l'Assemblée, qui en ordonne l'impression.

-Les magistrats de la chambre des vacations du parlement de Rennes sont introduits à la barre.

M. le président leur lit le décret qui les mande à la barre; il leur adresse ensuite la parole.

M. le PRESIDENT: Messieurs, l'Assemblée nationale a ordonné à tous les tribunaux du royaume de transcrire sur leurs registres, sans retard et sans remontrances, toutes les lois qui leur seraient adressées; cependant vous avez refusé l'enregistrement du décret qui prolonge les vacances de votre parlement. L'Assemblée nationale, étonnée de ce refus, vous a mandés pour en savoir les motifs. Comment les lois se trouvent-elles arrêtées dans leur exécution? comment des magistrats ont-ils cessé de donner l'exemple de l'obéissance? Parlez : l'Assemblée, juste dans les moindres détails, comme sur les plus grands objets, veut vous entendre; et si la présence du corps législateur vous rappelle l'inflexibilité de ses principes, n'oubliez pas que vous paraissez aussi devant les pères de la patrie, toujours heureux de pouvoir en excuser les enfants, et de ne trouver dans leurs torts que les égarements de leur esprit et de simples erreurs.

fidèles sujets, lorsque, commandés par un monarque vertueux, ils ne sont réprouvés, ni par les devoirs sacrés de la conscience, ni par les lois impérieuses de l'honneur.

Les lettres-patentes du 3 novembre étaient adressées au parlement de Rennes, et nous n'en étions que quelques membres isolés; nous ne formions même plus la chambre des vacations; le terme fixé pour la tenue de ses séances était expiré le 17 octobre précédent; elle n'existait plus; et, s'il fallait en créer une nouvelle, le parlement en corps pouvait seul enregistrer le titre de son établissement.

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Nous étions dispersés dans la province, et nous donnions à nos affaires personnelles le peu de temps qui devait s'écouler jusqu'à la rentrée du parlement, lorsque chacun de nous a reçu une lettre close qui lui enjoignait de se rendre à Rennes pour y attendre les ordres du roi.

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Malgré la distance des lieux, nous nous sommes assemblés le 25 novembre. Le substitut du procureur-général nous a présenté les lettres-patentes du 3 de ce mois; mais nous n'aurions pu les enregistrer que par un arrêt, et nous étions sans caractère pour le rendre.

Un motif plus impérieux encore s'opposait à l'enregistrement de cette loi et de toutes celles qui renversent également les droits de la province, droits au maintien desquels notre serment nous oblige de veiller, et dont il n'est pas en notre pouvoir de consentir l'anéantissement.

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Lorsque Anne de Bretagne épousa successivement les rois Charles VIII et Louis XII; lorsque les Bretons, assemblés à Vannes en 1532, consentirent à l'union de leur duché à la couronne de France, le maintien de leur antique constitution fut garanti par des contrats solennels, renouvelés tous les deux ans, toujours enregistrés au parlement de Rennes, en vertu de lettres-patentes, dont les dernières sont du mois de mars 1789.

Ces contrats, que des ministres audacieux ont quelquefois enfreints, mais dont la justice de nos rois a toujours rétabli l'exécution, portent unanimement que non-seulement les impôts, mais encore tout changement dans l'ordre public de Bretagne, doivent être consentis par l'Etat de cette province.

« La nécessité de ce consentement fut la principale et en quelque sorte la seule barrière que les Bretons opposèrent si courageusement aux édits du mois de mai 1788, et notamment à celui qui mettait tous les parlements du royaume en vacances. Cinquante-quatre députés des trois ordres, envoyés à la cour de toutes les parties de la province, les commissions intermédiaires des Etats et les corporations réclamèrent unanimement cette loi constitutionnelle. Tous les avocats de Rennes, dont plusieurs siégent dans cette assemblée, disaient alors au roi : Vous ne laisserez pas subsister des projets qui, quand ils n'offriraient que des avantages, ne pourraient être exécutés sans le consentement des Etats; nos franchises sont des droits, et non pas des priviléges, comme on a persuadé à Votre Majesté de les nommer, pour la rendre moins scrupuleuse à les enfreindre. Les corps ont des priviléges, les nations ont des droits. Pour autoriser le parlement de Rennes à enregistrer, sans le consentement des Etats de la province, Messieurs, impassibles comme la loi dont nous les lois qui sanctionnent vos décrets, il faudrait, sommes les organes, nous nous félicitons de pou- messieurs, qu'elle ait renoncé à ses franchises et livoir donner en ce moment au plus juste des rois une bertés, et vous savez que dans les assemblées qui grande preuve de notre soumission, en exposant aux ont précédé la vôtre, tous les suffrages se sont réunis représentants de la nation les motifs et les titres qui pour le maintien de ces droits inviolables, que nos ne nous ont pas permis d'enregistrer les lettres-pa-pères ont défendus, et que nous avons nous-mêmes tentes du 30 novembre 1789, portant continuation des vacances de tous les parlements du royaume. II n'est point de sacrifices qui paraissent pénibles à de

La parole est donnée à M. de Lahoussaye, président de la chambre des vacations.

M. de Lahoussaye, au nom de la chambre des vacalions.

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réclamés avec un zèle si persévérant.

Vous connaissez le vœu des deux premiers ordres rassemblés à Saint-Brieuc. Les ecclésiastiques

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