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regardent le procureur de la commune, le secrétaire-greffier et le trésorier. On a aussi demandé si un citoyen élevé à la mairie peut se démettre de cette place, et si l'on peut élire une personne absente; notre réponse a été affirmative. Dix-huit paroisses, qui dépendaient de la ville de Duras, ont exprimé le vœu le rester unies à cette ville; nous avons rappelé le lécret par lequel vous avez arrêté que toute communauté aurait une municipalité séparée, et nous avons engagé ces paroisses à s'y conformer, sauf à 'adresser par la suite aux assemblées de départe

nents.

Deux autres objets nous obligent à vous présenter deux projets de décret.

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Nos concitoyens nous prient de vous faire passer leurs vœux et leurs craintes..... Il n'y a rien à espérer de nos magistrats; l'esprit de corps s'est réfugié chez eux..... En troublant notre repos, ils nous inquiètent sur leur sûreté..... Ils sont toujours gardés par deux hommes de planton: ils voulaient sortir de la ville; le peuple les aurait massacrés....... Ils ne paix qu'annonçait le retour des gentilshommes à la nous ont pas laissé jouir vingt-quatre heures de la

patrie..

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Adresse de la municipalité.

Un arrêt du parlement avait interdit toutes fonctions judiciaires à M. Bicherot, qui exerçait à Chinon celles de lieutenant particulier. Un mémoire qui nous a été adressé le représente comme coupable des délits les plus graves, et annonce qu'il est dans les liens d'un décret d'ajournement personnel au sujet d'une accusation de spoliation d'hoirie. La municipalité, considérant que ce décret suspend toutes fonctions civiles, a cru devoir lui refuser les droits de citoyen actif. Ce refus excite dans la ville de Chinon des débats qui peuvent occasionner de grands désordres. Nous devons ajouter que M. Bicherot est en faillite; il faut faire exécuter votre décret concercernant les faillis. Le comité vous propose de décré-jour cette conjuration contre le bien public! Après ter ce qui suit:

L'Assemblée nationale, sur le rapport du comité de constitution, ordonne l'exécution du décret du 22 décembre dernier, qui constitue les assemblées primaires juges de la validité des titres des citoyens actifs; en conséquence elle renvoie aux trois sections de la ville de Chinon le jugement de la capacité de M. Bicherot; ordonne de plus à la municipalité et à la garde nationale de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les élections se fassent avec ordre et tranquillité.

M. Loys: M. Bicherot a soulevé quelques classes du peuple; et cependant, par ce décret, son jugement serait renvoyé à ceux qu'il a séduits. Il serait beaucoup plus sage de déclarer que quiconque est entaché par un arrêt, ne peut exercer les droits de citoyen actif.

M. DESMEUNIERS: Ce décret n'aurait pas un effet rétroactif, il ne déciderait pas la question.

M. L'ABBÉ GOUTTES: Il se fait beaucoup de cabales, et certes ce ne sont pas les honnêtes gens qui cabalent. Le décret que propose le comité ne lèvera pas non plus la difficulté. L'homme qui a cabalé pour être élu cabalera bien davantage encore pour être jugé favorablement. Qu'on fasse juger par qui l'on voudra, mais que ce ne soit pas par la commune de Chinon.

M. BUZOT: Vous avez déclaré les assemblées primaires juges de la capacité des citoyens actifs; il n'est pas possible de s'écarter de ce décret. Celui du comité est très conforme aux principes; celui que propose M. Loys n'est pas convenable. Ces mots décrels d'ajournement personnel, entaché, sont très vagues on sait avec quelle facilité ces décrets se décernent.

Le projet du décret du comité est adopté.

La proposition de M. Loys est ajournée à lundi, deux heures, ainsi que le second décret que M. Desmeuniers a annoncé.

M. FERMON Obligé de mettre sous les yeux de l'Assemblée la conduite de la nouvelle chambre des vacations de Rennes, les conséquences fàcheuses de cette conduite, le besoin qu'a la Bretagne de n'être plus privée de la justice, je ne puis mieux remplir ces objets qu'en vous lisant la lettre de correspon

M. le président de Talhouet est resté seul fidèle à la nation; il n'a quitté le temple de la justice que pour venir rendre hommage à la liberté dans le temple de la patrie. Les autres magistrals n'ont cessé de donner à la France indignée le scandale de la désobéissance..... Doutera-t-on que le corps entier n'adopte des sentiments aussi coupables?....... Seronsnous toujours à la merci de ceux qui, ayant perdu sans retour la confiance du peuple, ne peuvent plus exercer le droit de le juger?... La voilà donc enfin consommée cette forfaiture; la voilà donc mise au

avoir tant de fois désolé la France par leur ambition criminelle, par des démissions combinées, par une désobéissance impunie, ils se prétendent quittes, en abandonnant leurs fonctions, comme si cette désertion n'était pas coupable!... Leur projet est connu; ils veulent exciter le peuple par la privation de la justice, perpétuer le désordre, anéantir vos décrets; et dans quel temps suivent-ils l'exemple de leurs confrères? c'est dans ce moment où les gentilshommes, par un heureux retour à la raison, à la patrie, à la vérité, semblaient assurer la tranquillité de notre province; c'est dans ce moment que la chambre des vacations, croyant tenir la paix et la guerre dans ses mains, se livre à sa haine, et n'écoute ni les intérêts du peuple, ni le cri de la patrie..... Ils renoncent à être magistrats-citoyens; hommes, ils ne veulent être que nobles..... La veille du jour même où les magistrats nous ont refusé leurs services, nous leur prodiguions les nôtres. Nos milices nationales allaient défendre les habitations des nobles contre les habitants des campagnes, contre ces hommes si longtemps opprimés et trompés aujourd'hui sur vos décrets. Il est temps que la loi s'appesantisse sur cette coalition de résistance, tantôt contre le peuple, tantôt contre le monarque, aujourd'hui contre tous deux. Nous venons, au nom de la tranquillité publique compromise, des lois violées, demander qu'un aussi grand scandale soit réparé par un grand exemple. En conséquence, nous déclarons dénoncer à l'Assemblée nationale et au comité des recherches, les membres de la nouvelle chambre des vacations du parlement de Rennes, comme coupables de désobéissance à la nation, à la loi et au roi, et nous supplions l'Assemblée nationale de les renvoyer au tribunal chargé de connaître des crimes de lèse-nation..

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M. FERMON: La députation de Bretagne, assemblée hier, ayant pris connaissance des faits, a rédigé le projet de décret dont je vais vous donner lecture. L'Assemblée nationale, instruite de la désobéissance de la nouvelle chambre des vacations du parlement de Rennes, décrète : que pour former un tribunal provisoire qui remplacera cette chambre, le roi sera supplié d'adjoindre à M. Talhouet dix-huit officiers, savoir: huit pris deux par deux dans les bailliages de Rennes, Vannes, Nantes et Quimper deux anciens avocats de ces trois derniers tribunaus,

et quatre anciens avocats du bailliage de Rennes. En l'absence de M. le président de Talhouet, le juge le plus anciennement reçu avocat présidera. La cour supérieure provisoire se divisera en deux chambres; elle tiendra séance chaque jour, excepté seulement les fêtes gardées par l'Eglise. Les gens du roi du bailliage de Rennes rempliront les fonctions du mi-❘ nistère public. Les huissiers près le parlement continueront leur service près la cour supérieure provisoire. Les magistrats des deux chambres des vacations sont tenus de remettre, dans huitaine, les pièces qu'ils peuvent avoir entre les mains, sous peine d'être poursuivis. L'Assemblée nationale eonfère à la cour supérieure provisoire le même pouvoir qu'à la chambre des vacations du parlement de Rennes.

A l'exception de M. le président de Talhouet, qui continuera à jouir des gages de sa charge, les magistrats de la cour supérieure provisoire recevront 12 livres d'honoraires par jour. Le trésorier sera autorisé à payer ces honoraires à la fin de chaque mois. En conséquence, ces magistrats ne prendront aucuns droits et épices. Les officiers ministériels continueront à percevoir les droits fixés par les régle

ments.

• Les ci-devant membres des chambres des vacations sont déchus de leurs gages jusqu'au moment de l'organisation du pouvoir judiciaire. Lesdits gages serviront à remplacer ce que le trésorier paiera en honoraires.

M. FERMON: Nous ne vous présentons pas de déeret au sujet des délits des magistrats de Rennes, et du jugement sollicité par la municipalité : nous nous en rapportons à votre justice et à votre sagesse.

M. d'Espréménil demande des détails sur la quotité des gages des membres du parlement de Rennes. M. Fermon répond.

M. d'Espréménil interroge encore.

L'Assemblée témoigne une vive impatience. M. d'Espréménil fait de nouvelles questions sur le même objet.

M. LE VICOMTE de Mirabeau : J'appuie le décret quant à la déclaration d'un nouveau tribunal. Quant à la conduite particulière des magistrats bretons, je ne suis pas monté à la tribune pour la justifier; je ne le pourrais qu'en développant des principes que j'ai déjà exposés. Ils ont été condamnés : je respecte le vœu de la majorité. Je veux seulement vous lire le détail de ce qui s'est passé entre M. Catuélan et le maire de Rennes.

Quatorze magistrats se sont réunis au palais; des lettres-patentes leur ont été remises; ils ont examiné la commission qui leur était adressée, et ont pensé ne pouvoir l'accepter. Quand ils sont sortis du palais, le plus grand calme régnait dans la ville. Entre trois et quatre heures de l'après-midi, M. de Catuélan était chez lui avec MM. de Mallilatre et de Pontaudon; M. de Monthierry, maire, et M. Gaudon ont demandé à lui parler. M. de Monthierry, introduit, s'est approché et a dit: Nous venons vous demander les motifs de la conduite de la chambre. — M. de Catuélan: Dans aucun cas nous ne pouvons répondre et violer le secret des délibérations; adressezvous à M. de Talhouet. M. de Monthierry: Nous sortons de chez ce magistrat. Depuis un an vous semez le trouble parmi nous; nous ne répondons plus de rien. La conversation s'est ensuite portée sur l'impossibilité où étaient quatorze magistrats de remplacer le parlement entier. - M. de Monthierry: De nouveaux troubles auront lieu sans doute, votre sûreté sera compromise, et vous pouvez être accusés de ceux qui existent. Il faut que tout le monde se courbe sous les lois faites par la majorité. — M. de Monthierry se retire. Une demi-heure après, une garde nationale est établie chez M. de Catuélan.

-

Une députation, à laquelle préside M. Gerbier, vient demander à M. de Catuélan si la chambre a pris un parti au sujet de la noblesse, s'il y a quelque chose sur les registres, et si l'on a fait une protestation. M. de Catuélan: Je ne puis violer le secret des délibérations; cependant je puis vous répondre que la chambre n'étant pas régulière, on n'a pas tenu de registre, et qu'on n'a fait aucune protestation. Chaque magistrat est gardé à vue.

M. le vicomte de Mirabeau reprend son opinion. Vous voyez par ces faits que le refus ne porte pas sur l'enregistrement, mais sur l'acceptation d'une commission. Hier, dans un projet qui vous a été lu, on a applaudi jusqu'à trois fois, et c'est sans doute la majorité de l'Assemblée, un article qui porte la suppression des parlements; je vous demande, non à l'Assemblée, mais à chaque individu, si renvoyer au Châtelet, ce n'est pas ordonner une question préalable que depuis longtemps on a abolie. Vous allez détruire les parlements; j'interroge non votre justice, mais votre humanité; est-il un de vous qui ne dise en lui-même : J'en aurais fait autant que le parlement de Rennes?

Le projet de décret lu par M. Fermon est adopté. La délibération sur le délit et sur le jugement de la nouvelle chambre des vacations de Rennes est ajournée à demain soir.

La séance est levée à trois heures et demic.

Précis de la séance du jeudi 4 janvier.

Le rapport sur les départements est continué. On annonce que le roi doit se rendre à l'Assemblée à midi.

Il vient s'unir à la constitution nouvelle, et inviter à la concorde, qui seule peut assurer le succès des travaux de l'Assemblée.

Le discours du roi est souvent interrompu par de vifs applaudissements, et cette scène touchante est terminée par l'appel nominal de tous les députés, qui prononcent successivement à la tribune un serment civique dont voici la formule :

a

Je jure d'être fidèle à la nation, à la loi, au roi, et de maintenir de tout mon pouvoir la constitution décrétée par l'Assemblée nationale et acceptée par le roi.»

Tous les détails de cette séance sont du plus grand intérêt. Ils paraîtront dans le numéro suivant.

THEATRE DE MONSIEUR.

L'on dit en Italie, et on le répète ici, que la musique est soumise à l'empire de la mode; que tel maitre est suranné, que telle musique est du vieux style. Pourquoi s'étonner de cela ? n'a-t-on pas vu la même chose dans tous les autres arts? Il y a longtemps que la mode de peindre comme Raphaël et Titien est passée. A cette mode ont succédé celles des Albano, des Dominicain, et à celles-là d'autres encore, qui ne sont que trop passées. Et la nature et la vérité ne cessent-elles pas aussi bien souvent d'être à la mode? De mode, j'en conviens; mais quand la nature et la vérité cesseront d'être en usage chez les hommes, la peinture de Raphaël, de Titien, du Dominicain, etc., la musique de Pergolèse, de Jomelli, de Durante, et la Buona Figliuola, de Piccini, cesseront de trouver des admirateurs.

On sait que, dans tous les arts, les modernes ont parcouru bien rapidement tous les degrés qui en séparent les deux points extrêmes; mais il y en a peu dont la marche se soit précipitée comme celle de la musique. Quand on parle, dans cet art, de quelques années en arrière, il semble qu'on parle de siècles; cependant il en est des arts comme des mœurs; un même courant les entraîne, et doit les ramener au point d'où ils sont partis; la bonne et simple nature

recouvre tôt ou tard ses droits; on dirait que les hommes ne la quittent que pour avoir le plaisir de la retrouver. Ainsi les yeux fatigués de la pompe des villes, des dehors brillants du luxe, de la parure des courtisanes, se reposent avec délices sur la douce et tranquille image de la campagne et sur le modeste ajustement d'une élégante bergère.

Peut-être ne saurait-on mieux peindre l'effet que doit produire la musique de la Buona Figliuola sur l'ame de ceux qui n'ont joui depuis longtemps que des riches et brillantes compositions des maîtres plus modernes. On trouve dans les opéras nouveaux plus de mouvement d'orchestre, plus de travail dans les morceaux concertés, plus d'action dans la marche et la facture des airs, plus de variété dans les contrastes et l'enchainement des morceaux d'ensemble, plus de luxe d'accompagnements.

Mais où trouve-t-on un sentiment plus juste et plus vrai dans l'expression de la parole, plus de délicatesse dans les nuances des différents caractères d'airs, plus de sensibilité profonde et touchante dont Taction a d'autant plus de force, qu'elle montre moins d'efforts; plus de sagesse et de tempérance dans l'emploi de l'orchestre, plus de naïveté et de vivacité dans les morceaux dialogués, plus de tendresse et d'amour dans le coloris, plus de précieux d'exécution dans la manière de caresser plutôt que de finir son ouvrage; enfin, une plus juste mesure d'effet et d'expression que dans la Buona Figliuola?

Qu'on ne dise donc pas que c'est là de l'ancienne musique c'est une musique toujours jeune, de cette jeunesse qui est le propre des œuvres du génie, comme elle l'était des dieux, et qui, toujours la même, semble toujours nouvelle.

Si quelque chose pouvait la rajeunir aux oreilles de ceux qui l'out entendue il y a douze ans à Paris, ce serait sans doute la manière dont elle a été exécutée. Je ne parle point des talents connus de MM. Rafanelli, Megossi, Rovendino, et surtout de Viganoni, dont la voix divine, avec toute la souplesse et le goût qui s'accommodent aux airs les plus riches et les plus travaillés, a toute la pureté, je dirais presque toute la candeur qui convient à la musique la plus simple et la plus naïve. Mais il faut avouer que le rôle de la Buona Figliuola ne pouvait être plus parfaitement rendu que par mademoiselle Baletti. L'ingénuité, la décente sensibilité, l'honnêteté de ce rôle, ont trouvé un charme nouveau dans sa personne. C'est que mademoiselle Baletti est ce qu'est son rôle; elle n'a presque pas besoin de le jouer. On prétend qu'elle n'est point actrice; mais cela même est un de ses mérites, selon moi et selon bien d'autres, qui prétendent qu'elle joue bien mieux que si elle jouait plus. Quant à la manière dont elle chante tous les morceaux de cet opéra, le public lui a bien prouvé qu'on ne pouvait ni plus ni mieux les exécuter.

Deux seuls morceaux y ont été ajoutés par M. Piccini: c'est le terzetto du premier acte, et la final du dernier.

THEATRE ITALIEN.

Le Bon père, petite comédie donnée avant-hier à ce théâtre, a fait généralement plaisir; on y a surtout applaudi beaucoup de détails heureux et pleins d'une sensibilité naïvement exprimée. Comme cette pièce, qui fait suite au Bon ménage, est imprimée dans les œuvres de son auteur, M. le chevalier de Florian, et qu'elle a été jouée dans plusieurs sociétés, nous n'en ferons qu'une courte analyse.

Arlequin, époux d'Argentine, comme on l'a vu dans le Bon menage, a fait connaissance à Bergame d'un riche Français qui, mécontent de son épouse, l'avait abandonLée avec un enfaut de six mois, et avait laissé tout son bien,

en mourant, à son nouvel ami Arlequin. Celui-ci est venu à Paris recueillir cette succession, a bien place ses fonds, et a doublé sa fortune. Il a perdu Argentine, et toute sa tendresse est réunie sur Nisida, sa fille, qu'il idolâtre. Il veut lui faire épouser un marquis; mais la jeune personne a donné son cœur à un jeune homme qui s'est introduit depuis peu chez son père, comme secrétaire. Ce jeune homine se trouve justement le fils abandonné du bienfaiteur d'Arlequin, qui, toujours honnête, veut lui rendre toute sa fortune. L'amant de Nisida ne l'accepte que pour la remettre à ses pieds. On devine bien que ce bon père ne manque pas d'y consentir.

L'action de cette pièce a peut-être quelque lenteur; mais les détails en sont si aimables qu'ils interdisent toute espèce de sévérité. Cette comédie, parfaitement jouée comme elle l'a été dans quelques sociétés, a da faire encore plus d'effet que sur un grand théâtre. Le rôle d'Arlequin surtout est prodigieusement difficile, lorsqu'on veut all er, dans ce caractère hors de nature, la balourdise agréable qui lui est essentielle avec cette sensibité naïve que l'auteur a voulu lui donner. C'est le comble de l'art que de faire sentir sans disparate ces nuances d'une délicatesse extrême; et l'on conçoit que l'acteur qui aurait ce talent répandrait sur l'ouvrage un charme de plus. La pièce est néanmoins bien jouée, et il serait didicile qu'elle eût réussi davantage.

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N 37.

GAZETTE NATIONALE OU LE MONITEUR UNIVERSEL.

POLITIQUE.

DANEMARK.

Samedi 6 FÉVRIER 1790.

De Copenhague, le 16 janvier. - Le nombre des mariages, dans l'évêché d'Aggerhaus, a monté, l'année dernière, à trois mille deux cents; celui des naissances, à onze mille deux cent soixante-onze, dont sept cent douze illégitimes; et à douze mille quatre cent soixante-neuf celui des morts.

PRUSSE.

De Berlin, le 19 janvier. - M. le baron de Knobelsdorf, capitaine aux gardes, vient d'être nommé pour aller résider à Constantinople, en qualité de ministre plénipotentiaire. Il s'y rendra très incessamment.

ALLEMAGNE.

De Vienne, le 19 janvier. —Dans la dernière promotion qui a eu lieu le 16 de ce mois, Sa Majesté a élevé au grade de lieutenants-feld-maréchaux les généraux-majors de Enzemberg, Thun, Herbach, Nadashi, Stuff, Oross, Eder, Pesefferkorn, Geneyne, Stuart, Zehentner, Latour, Lilien, Kavanagh, Kaheul, Winkein l'aîné, et Harnoncourt. Les colonels Curti, Furstenberg, Belloute, Rhubach, Seddler, Schreidauen, Boros, Klebersbourg, Welsch, Hoditz, Davidowich, Kalnoky, Diesbach, Mikovini, Auesperg, Scheidlin, Mihalffy, Wolkeinstein, Keglivics, Kospoth, Mongelas et Szerelem ont été nommés généraux-majors.

On dit ici que l'on va créer une commission particulière pour entendre MM. les comtes de Trautmansdorff et d'Alton, qui devront rendre compte de la conduite qu'ils ont tenue dans les Pays-Bas.

On assure que LL. AA. SS. les princes de Ligne, père et fils, sont partis hier pour Bruxelles.

M. le maréchal de Laudhon s'étant plaint de la mauvaise administration des hôpitaux militaires, M. de Brambilla, premier chirurgien de la cour, qui tenait ce département, a été remercié.

M. le général baron de Vins a obtenu le commandement général des troupes dans la Croatie.

ITALIE.

Extrait d'une lettre de Milan, du 6 janvier, écrite par un Français non-réfugié, mais voyageur.

L'amour du bien-être et de la liberté est sans doute un mal incurable dans l'espèce humaine. Que n'a-t-on pas fait en Europe pour en guérir les peuples radicalement? Chaque gouvernement a là-dessus ses recettes particulières. Les effets sont variés: mais toujours il reste quelque symp. tome qui déroute les docicurs. On a d'abord épuisé les ressources de la féodalité; il paraît même que jusqu'à nos jours cette méthode a été la plus curative. L'avilissement est en effet ce qu'il y a de mieux pour énerver les peuples, et il est reconnu, d'après les plus grands publicistes, que l'épuisement des forces morales est le préservatif le plus assuré contre ce genre de maladie chronique, que l'on nomme aujourd'hui dans presque toute l'Europe le mal français. Une recette encore familière aux gouvernements curopéens, et dont les bons effets sont journellement attestés par de longues convalescences chez plusieurs peuplades nombreuses, c'est la fiscalité. Les belles ordonnances sur l'impôt sont aussi très curatives. On a remarqué que la misère était fort asservissante et propre à éloigner les symptômes de liberté. Un peuple qui travaille pour payer, et qu'on impose à mesure que son travail augmente, ne songe guère à vivre heureux; il a bien autre chose à pen

ser.

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remèdes, prodigués à la fois au même peuple, viennent à le fatiguer à la fois, il n'y a plus d'espérance, il faut céder, et la maladie fait en quelques jours les progrès de plusieurs siècles. Tel a été le sort de la France, où le besoin d'être heureux, cette infirmité de l'espèce humaine, s'est développé avec tant de force, et l'a emporté sur toutes les ressources de l'art politique.

Il n'est pas donné à tous les peuples d'avoir des accès de cette violence. On écrit de Sicile qu'un fait de gabelle a produit un soulèvement, et qu'un droit sur l'huile pourrait bien exposer la contrée à demander les droits de l'homme. Cette denrée (l'huile) ne se vendait qu'à raison de quatre carlins la livre; mais le gouvernement ayant donné l'imposition à bail, le fermier augmenta le prix d'un tiers. Le peuple, irrité de ce monopole, s'est porté aux derniers excès. Le vice-roi, qui n'avait pas jugé d'abord que la dose de fiscalité fût trop violente, ne fut plus le maître d'en arrêter les terribles effets. La maison du traitant a été pillée, lui et ses commis ont été massacrés.... l'huile a été remise à son ancien prix.... A Milan, des opérations de finance ont encore eu des suites dangereuses. M. le comte de Wilizech, ministre plénipotentiaire au gouvernement de la Lombardie autrichienne, a demandé, dans le mois de décembre dernier, à l'assemblée de la corporation municipale, un subside d'un million et demi, comme produit de la taxe de guerre pour l'année 1790: c'était un ordre de l'empereur.... Le chef municipal refusa absolument d'accepter cette onéreuse proposition, et la plupart des membres de l'assemblée ayant successivement quitté la séance, le préalable fut prononcé de fait la délibération ne fut point entamée; mais le peuple instruit de ce qui se passait, prit de l'inquiétude; il se rassembla en foule sur la place; son humeur devenait de plus en plus menaçante. De nombreuses patrouilles accoururent pour dissiper la multitude; mais le peuple devenait plus furieux à la vue des soldats voulant leur résister. Neuf bourgeois et six fusiliers ont été tués.... Enfin, le soir, le gouvernement eut recours au remède le plus puissant: toute la noblesse monta en carrosse, et se rendit chez M. l'archiduc Ferdinand, gouverneur-général de la Lombardie. Ce luxe de personnes ne tarda pas à imposer. Le cortège conjura M. le gouverneur d'instruire l'empereur, son frère, de l'insurrection milanaise. S. A. R. le promit, et se hâta de faire distribuer une somme de 30,000 livres au peuple, qui ne tarda pas à s'apaiser, etc.

Le roi de Sardaigne a donné ordre d'augmenter tous les régiments d'infanterie et de cavalerie; les premiers de quinze hommes, les seconds de dix hommes par compagnie. Une grande partie des grenadiers est arrivée dans la Savoie. -Trois mille tentes ont été commandées. On fait des approvisionnements considérables en grains....

ANGLETERRE.

PARLEMENT.

Chambre des communes.

Mercredi 27 janvier. La lecture de plusieurs bills parti culiers, portant pour la plupart sur des réglements de police et de finance, a pris les premiers moments de la séance de la chambre, appelée par l'ordre du jour à une affaire beaucoup plus importante, pour l'examen de laquelle elle s'est formée en comité. Ce comité général en a nommé un particulier, chargé spécialement de continuer l'audition des témoins relativement à l'abolition de la traite des nègres; chaque membre aura droit d'y siéger et d'en suivre les opérations.

M.Wilberforce a résumé, pour des membres qui ne s'étaient pas trouvés à la séance précédente, les arguments par lesquels il avait déjà établi la nécessité d'un comité. Il a protesté que, convaincu plus que jamais de l'iniquité de la traite en elle-même et de ses funestes effets politiques pour son pays, il ne se lasserait pas de poursuivre, an nom de la patrie et de l'humanité, l'abolition de ce commerce honteux, sur lequel il n'avait jamais varié, quoique des bruits calomnieux eussent donné à entendre qu'il ne voyait plus les choses du même œil ; et pour mieux les dé37

mentir, il a terminé son discours en pressant la chambre de nommer ce comité, et de l'autoriser à recueillir les dépositions des témoins fournis par les fauteurs de la traite; dépositions dont le comité ferait incessamment son rapport.

Cette nomination a trouvé un opposant dans sir John Miller, qui a objecté le peu d'espace du local, tandis que l'importance de l'affaire exigeait, indépendamment d'une longue discussion, la plus grande publicité. Ces raisons ont paru faibles à M. Taylor. De tout temps on avait traité des objets majeurs devant des comités assemblés dans cette même chambre, alors suffisante, quoiqu'on affectât aujourd'hui de la trouver trop petite; c'était moins le local que la chose qu'on devait y décider qui déplaisait à certaines personnes. Il a fait paraître victorieusement les moyens déjà mis en avant par d'autres membres. L'impression successive des différentes partics du procès-verbal fournirait aux opinants et au public, toutes les lumières nécessaires; elle associerait le reste de la chambre et la nation entière aux travaux du comité; enfin le cours impérieux des choses entraînait à suivre cette affaire d'une manière quelconque; un plus long délai pouvait devenir très dangereux. Pourquoi donc ne pas adopter de préférence la méthode la plus expéditive, si bien justifiée d'ailleurs contre les prétendus inconvénients que la partialité lui reprochait ?

Ici ont reparu, encore divisés d'opinions, deux antagonistes qui s'étaient déjà signalés dans une autre affaire. Le major Scot, l'ami et le défenseur de M. Hastings, s'est opposé à la formation du comité, en montrant qu'un pareil avait amené le fameux impeachment de l'ex-gouverneur du Bengale, procès si long pour l'accusé, et si dispendicux pour la nation. Il était impossible qu'il touchât cette corde sans réveiller la sensibilité de M. Francis, impliqué luimême dans cette affaire. Aussi s'est-il levé pour prendre le parti d'un comité, qui, selon lui, avait sauvé l'honneur du nom anglais dans l'Inde; il croyait qu'un second comité, que les heureux effets du premier devaient décider à établir, justifierait les espérances qu'on en aurait conçues, en rendant la liberté à l'Afrique, et en couvrant ainsi l'Angleterre de gloire. Les négociants sont parties intéressées dans ce commerce, il était juste de les entendre. Sir Waskin Lews, l'un des députés de Londres, et commandant de la milice bourgeoise de cette ville, a demandé que leurs avocats fussent admis à la barre de la chambre, seul lieu convenable, selon lui, à l'importance

de l'affaire.

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Un autre député de Londres s'est élevé avec autant de force contre le comité. « En prononçant sur cette grande question, a dit M. Newnham, vous allez prononcer en même temps sur le plus grand intérêt des planteurs Américains, et des négociants de Londres, mes commettants. Je ne dis pas assez; c'est de l'existence même de la patrie, sous le point de vue du commerce, qu'il s'agit en ce moment, et je n'hésiterai pas à prononcer, sans prétendre au titre de prophète, que l'Angleterre va perdre irrévocablement ses îles, sources de sa richesse, à l'instant même où l'on décrétera l'abolition de la traite des nigres.» Il accusa ceux qui la demandent avec tant d'ardeur, de s'abandonner à un esprit de système qui veut substituer ses vertiges, ses innovations, tout au moins inconsidérées, et les chimères de ses spéculations, aux bases fixes et stables de la prospérité d'une nation commerçante. « Quoi ! reprit-il, après avoir perdu les provinces du continent de l'Améri que, arrachées à la mère-patrie, dont la plaie saigne encore, voulez-vous l'épuiser entièrement par la perte de toutes ses colonies ? C'est pourtant là le danger qui la menace, si vous voulez hasarder ses intérêts les plus chers, par respect humain pour les vaines considérations du philosophisme.

Cette sortie, accompagnée de raisons plus puissantes et plus adroites pour soutenir les intérêts des négociants, qui, par reconnaissance, ne manqueront probablement pas, à la prochaine élection, de les remettre entre les mains de M. Newnham, n'a pas empêché M. Jekyll de lui répondre. Il l'a fait sans entamer le fond de la question, mais avec les sarcasmes dont il avive tous ses discours. Il a cependant été d'avis que les fauteurs de la traite plaidassent définitivement leur cause à la barre de la chambre.

Je n'ai jamais demandé le contraire, a répondu M. Wi!berforce.» M. Gascoyne, après avoir essayé, dans le préce

pent débat, de faire valoir des raisons tirées du fond même de la chose, s'est retranché à celui-ci dans les formes, en invoquant les réglements de la chambre. L'orateur, fait pour les connaître et les faire connaitre aux autres, a donné son avis pour le comité. La chambre a nomme les membres qui le composeront, en leur enjoignant de s'assembler le lendemain; ce qui n'a pu avoir lieu, parceque le jeudi 28 il ne s'est trouvé, à l'heure fixée par le réglement, que le nombre insuffisant de vingt-trois membres.

FRANCE.

De Paris. Le 2, jour de la Purification de la Vierge, le roi est sorti de son appartement vers midi, pour se rendre à la chapelle du château des Tuile-i ries. Sa Majesté était précédée de Monsieur, du duc de Chartres, des chevaliers-commandeurs et officiers de l'ordre du Saint-Esprit. La grand'-messe a été célébrée par M. l'archevêque de Narbonne, prélatcommandeur, et chantée par la musique du roi. La Reine, accompagnée de monseigneur le dauphin, de Madame fille du roi, de Madame et de madame Elisabeth, y a assisté dans la tribune. Madame la priucesse de Solre a fait la quête. L'après-midi, la cour, après avoir entendu le sermon prononcé par M. l'abbé de La Fage, nommé pour prêcher le carême, a assisté aux vêpres, chantées par la musique du roi, et auxquelles M. l'abbé de Sauderatz, chapelain de la grande chapelle, a officié.

L'Université de Paris, ayant à sa tête M. Dumouchel, recteur, a eu l'honneur de présenter au roi, suivant l'usage, le cierge de la Chandeleur.

ADMINISTRATION.
MUNICIPALITÉ DE PARIS.

Assemblée des représentants de la commune.

La séance du soir, 4 de ce mois, a été une des plus volution, par le nombre et la nature des objets qui intéressantes et des plus mémorables depuis la réont occupé l'assemblée.

Un des membres a ouvert la séance en rendant un compte bref de ce qui s'était passé à l'Assemblée nationale le matin, et, après quelques réflexions, a fait la motion de députer vers le roi, à l'effet de porter à Sa Majesté l'expression des sentiments d'amour et de reconnaissance qu'inspirait à la commune de Paris sa démarche auprès de l'Assemblée nationale.

Cette motion, vivement applaudie, a été suivie de la proposition de renouveler le serment d'étre fidèle à la nation, à la loi, au roi, et de maintenir la constitution décrétée par l'Assemblée nationale el acceptée par le roi.

Un autre membre a proposé de décerner une couronne civique à Sa Majesté, comme un témoignage de la haute confiance et de l'enthousiasme que font naître ses vertus et son patriotisme; mais cette motion n'a point été accueillie, soit qu'on ait cru qu'une pareille démarche ne pouvait appartenir qu'à toute la nation réunie ou à l'assemblée de ses représentants, soit qu'on ait pensé que la majesté royale, élevée par la grandeur de ses attributs et la plénitude de sa gloire au-dessus des distinctions particulières, le fût également au-dessus d'une marque d'estime très honorable sans doute, mais disproportionnée au caractère du chef suprême de l'administration et du dispensateur des honneurs et des récompenses dues à tous les genres de civisme et de vertus publiques.

La motion pour la prestation du serment, à l'imitation de l'Assemblée nationale, ayant été universellement adoptée, quelqu'un a observé qu'avant

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