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MÉLANGES.

Extrait des feuilles de Paris, du 21 janvier.

L'Ami du peuple a continué ses observations sur l'arrêté de la municipalité; il plaint le fatal aveuglement des écrivains patriotiques : « Qu'ils s'attachent, dit-il, à faire sentir aux soldats citoyens qu'ils ne doivent être subordonnés pleinement qu'à l'égard de la discipline militaire; que dans tout le reste il est de leur devoir d'examiner les ordres

ASSEMBLÉE NATIONALE.

Présence de M. Target.

SUITE DE LA SÉANCE DU MERCREDI 20 JANVIER.

Suite du rapport de M. l'abbé Sieyes sur la liberté de la presse.

Dans ses rapports politiques, la même cause se

qu'on leur donne et d'en peser les suites.» Avec de tels prin- change en une cause féconde de prospérité natio

cipes il sera difficile d'avoir une armée, et surtout un chef qui la fasse mouvoir, si chacun des ordres qu'il donne est soumis à la critique et au commentaire du simple soldat. Dans ce moment où la force publique réside dans les gardes nationales, il est infiniment dangereux de les détourner de l'obéissance qu'elles professent envers un chef justement honoré; c'est ce qui a déterminé le district de Sainte-Marguerite à prendre une délibération par laquelle il témoigne ses craintes sur l'esprit de désunion et de discorde que l'Ami du peuple peut semer entre les citoyens. Cette délibération a été la suite de la dénonciation faite par un député de la commune au district. L'auteur de l'Ami du peuple, inébranlable dans le dessein de dénigrer la municipalite et le Châtelet, a répondu dans son n° 104 aux reproches de ses concitoyens, en leur présentant un tableau affreux du despotisme que les administrateurs actuels, élus par le peuple, veulent, dit-il, exercer sur lui. On pourrait répondre à cette diatribe, que ce despotisme n'est pas si grand que l'auteur le prétend, puisque, malgré sa dénonciation au Châtelet, malgré les injures nominatives qu'il s'est permises contre des citoyens estimables, et enfin malgré le vœu de nombre de gens qui n'aiment point les écrits incendiaires, il jouit de la liberté de publier les siens, el que les lois sont muettes en sa faveur, au grand étonnement de la plus saine partie du public. Croit-on qu'il se répand dans les meilleures sociétés, que l'auteur de l'Ami du peuple est le champion connu de certains aristocrates qui l'emploient à semer partout le trouble en ameutant son ami, le peuple, contre toute espèce d'administration? Ce bruit est invraisemblable; les aristocrates (puisqu'il y en a encore) sont trop sensés pour ne pas prévoir que tout nouveau trouble pourrait leur devenir à eux-mêmes infiniment funeste, sans rien changer au torrent de l'opinion générale qui les précipite avec toute la nation vers l'égalité. Cerlainement on n'accusera pas M. l'abbé Sieyès d'être le partisan d'aucun genre d'arbitraire et de despotisme. Eh bien! cet apôtre éclairé de la liberté de la presse, dans le mémoire qu'il a lu mercredi à l'Assemblée nationale, mémoire qui lui a mérité les plus justes applaudissements, s'exprime ainsi sur les peines à infliger aux auteurs des écrits incendiaires : « Si un ouvrage excite le peuple à prendre des moyens violents pour obtenir ce qu'il demandera, les personnes responsables de l'ouvrage seront déclarées coupables de sédition et punies comme telles. » Si une telle loi était adoptée, les écrits de M, Marat ne paraîtraient plus.

Un nouveau papier, intitulé le Fidèle Observateur, rapporte qu'on a arrêté à Versailles et conduit en prison un ra ticulier revêtu de l'uniforme de la garde nationale, qui fréquentait les lieux publics, et qui se déchaînait avec fureur contre la révolution : on a découvert que cet énergumine sans fortune était soudoyé par un parti qui l'avait envoyé en avant comme un enfant perdu, et qui gagnait en conscience sun argent. Il a refusé longtemps de se laisser dépouiller de l'habit national qu'il avait endossé; mais c'était à lui une maladresse de porter les couleurs de la liberté en répandant les maximes du despotisme.

Journal universel. Le comte de Mirabeau est allé faire un petit voyage à Caen, où est mort M. Dumesnil, avec lequel il était en correspondance. Les ennemis de l'éloquence et du patriotisme de ce député ont bâti sur ce voyage un edifice de calomnie inconcevable.

Journal général. Cette même feuille dit qu'on a pris au Bourg-la-Reine trois hommes qui dévastaient un grenier plein de farines, étant armés de pistolets, de cannes et de sabres; on les a conduits enchaînés au Châtelet.

nale; elle devient la sentinelle et la véritable sauvegarde de la liberté publique. C'est bien la faute du gouvernement s'ils n'ont pas su, s'ils n'ont pas voulu en tirer tout le fruit qu'elle leur promettait. Voulez. vous réformer des abus? elle vous préparera les voics; elle balaiera pour ainsi dire devant vous cette multitude d'obstacles que l'ignorance, l'intérêt personnel et la mauvaise foi s'efforcent d'élever sur votre route. Au flambeau de l'opinion publique, tous les ennemis de la nation et de l'égalité, qui doivent l'être aussi des lumières, se hâtent de retirer leurs honteux desseins. Avez-vous besoin d'une bonne institution, laissez la presse vous servir de précurseur; laissez les écrits des citoyens éclairés disposer les esprits à sentir le besoin du bien que vous voulez leur faire; et qu'on y fasse attention : c'est ainsi qu'on prépare les bonnes lois, c'est ainsi qu'elles produisent tout leur effet, et que l'on épargne aux hommes qui hélas! ne jouissent jamais trop tôt, le long apprentissage du siècle.

L'imprimerie a changé le sort de l'Europe; elle changera la face du monde. Je la considère comme une nouvelle faculté ajoutée aux plus belles facultés de l'homme par elle, la liberté cesse d'être resserrée dans de petites agrégations républicaines; elle se répand sur les royaumes, sur les empires. L'imprimerie est, pour l'immensité de l'espace, ce qu'était la voix de l'orateur sur la place publique d'Athènes et de Rome; par elle, la pensée de l'homme de génie se porte à la fois dans tous les lieux; elle frappe, pour ainsi dire, l'oreille de l'espèce humaine entière. Partout le désir secret de la liberté, qui jamais ne s'éteint entièrement dans le cœur de l'homme, la recueille, cette pensée, avec amour, et l'embrasse quelquefois avec fureur; elle se mêle, elle se confond dans tous ses sentiments; et que ne peut pas un tel mobile agissant à la fois sur des milliers d'âmes!

Les philosophes, les publicistes, se sont hâtés de nous décourager, en prononçant que la liberté ne pouvait appartenir qu'à de petits peuples. Ils n'ont su lire l'avenir que dans le passé; et lorsqu'une nouvelle cause de perfectibilité, jetée sur la terre, leur présageait des changements prodigieux parmi les hommes, ce n'est jamais que dans ce qui a été qu'ils ont voulu regarder ce qui pouvait être, ce qui devait être.

Elevons-nous à de plus hautes espérances; sachons population, que tout se prête à la liberté. Pourquoi, que le territoire le plus vaste, que la plus nombreuse en effet, un instrument qui saura mettre le genre humain en communauté d'opinions, l'émouvoir et l'animer du même sentiment, l'unir du lien d'une constitution vraiment sociale, ne serait-il pas appelé à prêter un jour à la nature même des moyens plus sûrs pour remplir son véritable dessein? car, sans doute, la nature entend que tous les hommes soient également libres et heureux.

Vous ne réduirez donc pas, messieurs, les moyens de communication entre les hommes; l'instruction et les vérités nouvelles ressemblent à tous les genres de produit; elles sont dues au travail ; c'est la liberté de faire et la facilité du débit qui soutiennent, exci

tent et multiplient la production; ainsi, gêner mal à propos la liberté, ce serait attaquer le fruit du génie jusque dans son germe; ce serait anéantir une partie des lumières qui doivent faire la gloire et les richesses de notre postérité.

Combien il serait plus naturel, au contraire, surtout lorsqu'on montre avec raison beaucoup d'intérêt aux progrès du commerce, de favoriser de toutes ses forces celui qui vous importe le plus, le commerce de la pensée! Mais il ne s'agit pas en ce moment d'une loi pour encourager l'usage utile, mais d'une loi pour réprimer les abus de la presse.

Nous devons vous prévenir, messieurs, que nous n'avons pas entendu faire une loi pour un autre ordre de choses que celui qui existe maintenant; car c'est pour le moment que vous la demandez. Cet état présent des choses n'est ni l'ancien ni le nouveau, c'està-dire que votre nouvelle constitution a déjà nécessairement amené des réformes partielles dans votre législation, et que, d'autre part, il est impossible que cette législation ne reçoive bientôt des améliorations très considérables! Nous avons cru en conséquence devoir mettre pour premier article, que la présente loi n'aura d'effet que pendant deux ans; à cette époque, il est évident que cette loi particulière sur la presse devra profiter, comme toutes les autres, des progrès de l'art social.

Quant à présent nous nous sommes permis tout ce que les changements déjà opérés parmi nous pouvaient nous permettre de tenter. Ainsi, par exemple, nous avons introduit dans notre loi un commencement de procédure et de jugement par jurés; cette institution est le véritable garant de la liberté individuelle et publique contre le despotisme du plus redoutable des pouvoirs. Il sera essentiel d'employer tôt ou tard le ministère des jurés pour la décision de tous les faits en matière judiciaire: cette vérité vous est déjà familière, vous craignez seulement que son exécution ne fût prématurée en ce moment; mais cette inquiétude ne peut vous arrêter lorsqu'il s'agit des délits de la presse, c'est-à-dire de cette partie de l'ordre judiciaire qui se prête le plus aisément à l'institution des jurés, et qui échappe à tous les inconvénients qui pourraient en résulter en toute autre matière.

En effet, nous vous prions d'observer d'abord que ce n'est guère que dans les principales villes du royaume que sont les imprimeries, et où se fait le commerce des livres, et que parconséquent il ne sera pas difficile d'y trouver des jurés instruits et propres à bien décider du fait des délits de la presse. En second licu, il s'agit ici d'une loi qui ne peut guère intéresser que la plus petite partie du peuple, c'est-àdire de cette classe de citoyens que leurs lumières accoutumeront bientôt à un changement dont ils sentent et reconnaissent déjà toute l'utilité. Enfin, nous vous prions de considérer que la plupart des délits de la presse sont de leur nature de vrais délits de police, qu'ils s'accommodent fort bien de l'instruction sommaire; et vous ne serez point étonnés, d'une part, que nous les fassions juger définitivement au premier tribunal; et de l'autre, que nous en écartions la procédure par écrit, du moins à dater de l'époque où l'instruction pourra être publique, et où les jurés seront appelés.

La décision du fait par un jury est aussi la meilleure réponse que nous puissions faire à ceux qui trouveraient qu'il reste encore du vague dans quelques-uns des premiers articles. La loi que nous vous proposons n'est pas parfaite; elle n'est pas même aussi bonne qu'il sera facile de la faire dans deux ans, vous en savez la raison : il a fallu la lier à l'ordre actuel des choses. En même temps nous cacherions

mal-à-propos la moitié de notre pensée, en ne disant point que même dans son état d'imperfection, cette loi nous paraît encore, en ce genre, la meilleure qui existe en aucun pays du monde.

Projet de loi contre les délits qui peuvent se com-
mellre par la voie de l'impression, el par la pu-
blication des écrits et des gravures.

Voici les principales dispositions de cette loi:
Des délits et des peines.

Si un ouvrage excite le peuple à prendre des moyens violents pour obtenir ce qu'il demandera, les personnes responsables seront déclarées coupables de sédition et punies comme telles. Si un écrit, imprimé huit jours avant la sédition, contient des allégations fausses, et s'il est prouvé que ces allégations ont excité à la sédition, les personnes responsables seront poursuivies et punies comme séditieuses.

Si cet écrit renferme des imputations injurieuses au roi, dont la personne a été déclarée inviolable et sacrée, les responsables seront punis des peines portées par la loi.

Si les bonnes mœurs sont blessées, les responsables seront punis, ou par le blâme, ou par la privation du droit de cité pendant deux années, ou par une amende égale à la moitié de leur revenu, ou par une réclusion momentanée dans une maison de correction.

Si un ouvrage a excité à un crime, et s'il a contribué à le faire commettre, les responsables seront poursuivis comme complices de ce crime.

Toute inculpation de délits graves contre un particulier sera considérée comme une dénonciation, et les dénonciateurs seront punis comme dénonciateurs téméraires, et comme calomniateurs, si la calomnie est jugée.

Si le fait imputé n'est pas mis au rang des délits, mais est déshonorant, les personnes responsables de l'ouvrage qui contient l'imputation, seront condamnées à une amende égale à une demi-année de leur revenu, dans le cas où elles ne pourraient administrer la preuve du fait.

Les accusations qui auront pour objet des abus de pouvoir, des délits à l'égard de la nation ou d'une partie de la nation, commis par des personnes publiques, ne feront encourir nulles peines à leurs auteurs; mais les juges pourront examiner ces accusations et les déclarer calomnicuses.

Délits contre les propriétés des auleurs.

Toutes les personnes convaincues d'avoir imprimé un livre, pendant la vie, ou moins de six ans après la mort de l'auteur, sans le consentement de cet auteur, ou de ses ayant-cause, seront déclarées contrefacteurs, et condamnées à une amende égale au prix de mille exemplaires, et l'édition contrefaite sera confisquée au profit de l'auteur.

La même disposition est portée contre les comédiens qui joueront des pièces de théâtre sans le cousentement de l'auteur. L'amende sera égale à la totalité de la recette.

De la responsabilité.

Tout homme qui vendra un ouvrage portant fausse indication d'imprimeur, sera condamné à une amende de 36 livres.

Tout imprimeur qui mettra à un ouvrage un aufre

nom que le sien, sera condamné à une amende de 1,200 livres, et déclaré complice des délits que la publication de cet écrit aurait pu faire commettre. Sil'imprimeur met un faux nom d'auteur, l'amende sera de 2,400 livres.

Nul ne pouvant disposer des lieux et des places publiques, et la proclamation des actes publics ne devant pas être gênée, il sera défendu de proclamer tous papiers, journaux, etc.

Aucun citoyen ne pourra être puni pour des ouvrages dont la nature n'aura pas été comprise dans les délits précédemment indiqués.

Tout homme qui aura vendu ou imprimé un ouvrage, sera responsable, s'il ne peut désigner celui qui lui aura remis ou les exemplaires ou le manuscrit.

Tout homme qui aura remis un manuscrit à l'imprimeur, sera responsable, s'il ne peut représenter l'auteur.

L'auteur ne sera responsable d'un ouvrage, que s'il a été imprimé de sa volonté ou avec son consen

tement.

Si l'auteur d'un ouvrage, ou celui qui a remis le manuscrit, ne se présente pas, nul ne sera responsable.

De l'instruction et du jugement.

Les juges ordinaires commenceront l'instruction. Lorsqu'elle sera arrivée au moment d'être publique, elle se continuera pardevant dix jurés qui jugeront le fait. Le juge prononcera.

Sitôt que les jurés seront appelés, la procédure ne sera plus que verbale.

Les jurés seront choisis par le procureur-syndic parmi les auteurs.

Ils seront désignés au nombre de vingt. Les accusés choisiront les dix jurés qui doivent être juges du fait.

Il sera déclaré aux accusés à quel cas indiqué par la loi se rapporte leur délit. Ils pourront combattre cette déclaration. Les jurés jugeront à la pluralité de huit contre deux.

Si l'accusé de contrefaçon allègue que l'ouvrage n'est pas le même, qu'il est changé par des additions ou des commentaires, les jurés jugeront l'identité à la pluralité simple.

Les jurés prononceront que l'accusé est coupable ou non coupable. Pour le déclarer coupable, il faudra une majorité de sept contre trois. Pour le reconnaitre innocent, il suffira de la pluralité simple.

Le rapport de M. l'abbé Sieyès a été fréquemment interrompu par des applaudissements.

L'Assemblée en ordonne l'impression, ainsi que du projet de décret, et ajourne la discussion.

M. LE MARQUIS DE FOUCAULT : Quand des feuilles et des journaux m'ont appelé aristocrate ou démocrate, je n'ai rien dit; mais quand on me transporte de la place que j'occupe dans cette Assemblée au Châtelet, je dois à vous et à ma province de présenter des explications.

Dans le no 167 d'un journal intitulé Assemblée nationale ou Courrier de Paris dans les provinces, on dit que, parmi des lettres et des écritures présentées à M. de Favras et à sa femme, ils en ont reconnu pour être de la main du marquis de Foucault, député à l'Assemblée nationale.

Je n'ai jamais vu ni connu M. de Favras ct sa femme; je ne leur ai point écrit.

L'Assemblée témoigne sa satisfaction de ce dé

saveu.

M. le président annonce qu'il faut procéder à la nomination d'un nouveau comité des rapports.

M.Duport fait la motion de ne plus choisir les membres de ce comité, en en prenant un par bureau, mais parmi tous les membres de l'Assemblée.

MM. de Juigné, de Mirepoix et l'évêque de Clermont attaquent cette motion par la question préalable.

L'Assemblée décide qu'il n'y a lieu à délibérer, et elle adopte la motion de M. Duport.

La séance est levée à quatre heures.

SEANCE DU JEUDI 21 JANVIER AU MATIN.

Lecture faite du procès-verbal, on rappelle le plan proposé la veille dans une lettre de M. Bailly, en faveur des indigents.

M. l'évêque d'Oléron renouvelle, à ce sujet, la motion que les députés cèdent aux pauvres le quart de leurs émoluments.

Un membre demande que tous les bénéficiers soient réduits à un revenu de 1,000 écus.

M. l'évêque d'Oléron retire sa motion.

On nomme une commission de quatre personnes chargées de recevoir les aumônes des députés, et de préparer un plan pour abolir généralement la mendicité.

Sur le rapport du comité de constitution, il est

décrété :

Que la Lorraine, le Barrois et les Trois-Evêchés seront divisés en quatre départements;

Que la Champagne sera distribuée en six départements;

Que la ville de Châlons sera provisoirement le chef-lieu du département, sauf aux électeurs à le placer ailleurs à la première assemblée;

Que ce département sera divisé en six districts.

- Un de MM. les secrétaires lit les noms des membres choisis pour former le comité des impositions. Ce sont MM. Dupont de Nemours, duc de La Rochefoucauld, Laborde de Mereville, de Fermont, baron d'Allarde, évêque d'Autun, Roederer, Jarry, Dauchy, Duport et Lebrun de Dourdan.

Cette communication fait élever la question de savoir si un membre de l'Assemblée peut être de plusieurs comités à la fois.

M. de Montlosier cite les lois qui s'opposaient à ce qu'un citoyen exerçât des offices incompatibles.

M. CHAPELIER: Je crois qu'il ne peut y avoir à délibérer, le réglement ne disant pas que la nécessité ne puisse faire déroger à ses dispositions; d'ailleurs les occupations sont si importantes, qu'il ne faut pas perdre le temps à une pareille discussion.

M. DE FOUCAULT: C'est justement parceque nos occupations sont importantes, qu'il faut statuer à l'instant que le réglement sera observé. Si quelqu'un imaginait qu'il pût être de deux ou trois comités à la fois, je ne puis le qualifier autrement que de pré-' somptueux.

Qu'appelez-vous l'aristocratie? n'est-ce pas la réunion de tous les pouvoirs, de ceux de législation, d'impositions? Etre membre de plusieurs comités à la fois, c'est une véritable aristocratie.

La question préalable est mise aux voix; M. le président prononce qu'il n'y avait pas lieu à délibérer.

La pluralité paraissant douteuse, on demande l'appel nominal.

M. de Custine insiste sur la raison mathématique qui empêchait un homme de se trouver en différents comités à la fois.

M. de Montlosier ajoute que quand le réglement serait changé, le changement ne pourrait avoir un effet rétroactif.

M. LAPOULE : Je soutiens qu'il doit dépendre de l'Assemblée de revenir, quand elle le juge à propos, sur son réglement: il y a des rapports de travail entre les divers comi'és, et ce serait rompre ces rapports salutaires que de gêner la coufiance de l'Assemblée.

L'Assemblée passe à l'ordre du jour.

et l'Assemblée nationale, pleine d'équité et de justice, adoptent, pour l'administration de cette île, les sentiments, les systèmes, les divisions et les réglements qui peuvent convenir davantage à la France, ainsi qu'à la nation corse; la république reste à cet égard dans une entière indifférence.

devienne partie intégrante de la monarchie franMa's elle ne peut voir du même œil que la Corse caise, puisque la république serait blessée dans les l'exercice de sa souveraineté dans ce royaume. droits qu'elle s'est expressément réservés en cédant

La république, pleine de confiance dans la bonne foi et la justice de Sa Majesté, qui connaît combien l'inviolabilité des traités importe au bonheur et à la Sur le rapport du comité de constitution, il est décidé qu'il sera ôté du terrain de soixante licues effets ses respectueuses représentations, et qu'elle sûreté des nations, espère qu'elle ne laissera pas sans du département de la Haute-Auvergne, pour le join-maintiendra tous les droits que la république s'est dre à la basse, laquelle en donnera l'équivalent au réservés sur le royaume de Corse, ainsi que toutes Vélay. les conditions exprimées dans le traité, auquel on ne peut déroger sans consentement réciproque des parties contractantes.

M. Gossin continue ses rapports sur la division des districts.

L'Assemblée nationale a décrété:

Que le département de Chartres sera divisé en six districts, dont les chefs-lieux sont Dreux, Châteauneuf en Th meray, Nogent-le-Rotrou, Chartres, Châteaudun et Genlis;

Que les limites du département convenues députés de la Lorraine, des Trois-Evêchés et du Barles par rois subsisteront ainsi qu'elles sont énoncées dans le procès-verbal du 31 décembre dern ́er;

Que Châlons-sur-Marne sera provisoirement cheflieu d'un des départements de la Champagne. Les électeurs décideront, à la première assemblée, si cette ville doit alterner avec celle de Reims. Ce département s t sera divisé en six districts, dont les chefslieux seront Reims, Sainte-Ménehould, Vitry-leFrançais, Epernay, Sézanne et Châlons. La ville de Montinirail fera partie de ce département.

- M. Barère de Vieuzac fait lecture d'un mémoire envoyé par la république de Gênes, relativement à l'incorporation de l'île de Corse à l'empire francais.

Mémoire de la république de Gênes.

Depuis que la république de Gênes a cédé, en 1768, par un traité, à Sa Majesté très chrétienne, l'administration de la souveraineté dans le royaume de Corse, elle n'a jamais eu lieu de croire que cette fle pût rester libre et indépendante, ni sous la domination d'un autre souverain, ni même être sujette à un nouveau système contraire à celui qui a été fixé par le traité.

Elle n'a en effet, pour garantie, que l'obligation contractée par Sa Majesté de ne point s'écarter du traité sur le consentement des parties. Le silence constant que la république a gardé prouve que, jusqu'à ce jour, elle n'a même pas eu d'inquiétude sur le sort de la Corse, quoique les faits et les changements arrivés dans cette île pussent lui en donner quelque motif; elle a toujours été rassurée par l'inviolabilité d'un traité solennel.

Cependant tout le monde vient d'apprendre, par la voie de l'impression, que l'Assemblée nationale de France, secondant les demandes et les désirs des Corses, a déclaré cette île partie intégrante de la monarchie française. La république manquerait essentiellement à ce qu'elle se doit à elle-même et à ses peuples, si elle négligeait de prier respectueusement Sa Majesté de vouloir bien considérer que ce traité blesse ou plutôt détruit le traité de 1768.

Il n'est point contraire à ce traité que Sa Majesté

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On demande le renvoi de ce mémoire au comité

diplomatique; d'autres l'ajournement.
(La suite demain.)

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THEATRE DU PALAIS-ROYAL. Auj. 23, au profit des pauvres des districts de Saint-Roch et Saint Honoré, l'Amant femme de chambre, com. en 4 acte; et la 6o représ. de la Journée de Louis XII, en 3 actes.

PETITS COMÉDIENS DE S. A. S. Mgr. Le comte de Braujo- Auj. 23, Reláche. On préviendra le public du jour de l'ouverture de ce spectacle.

LAIS.

CIRQUE DU PALAIS-ROYAL. Auj. 23, concert à 6 h.; puis assaut d'armes, dans lequel M. Lamotte, musicien maîtres connus; ensuite bal jusqu'à 14 h. du roi, amateur et professeur d'armes, tirera ave différents

Grands Danseurs du Roi. — Auj. 23, Relâche, pour sa. voriser la recette de l'Ambigu-Comique. Dem. 24, grand spectacle.

AMBIGU-COMIQUE. — Anj. 23, au profit des pauvres du district des Pères-Nazareth, l'Artisan philosophe; l'Epreuve raisonnable, pièces en 4 acte; et l'Homme au Masque de Fer, pant. en 4 actes, avec des divertissements.

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N° 24.

GAZETTE NATIONALE OU LE MONITEUR UNIVERSEL.

POLITIQUE.
POLOGNE.

Dimanche 24 JANVIER 1790.

De Varsovie, le 29 décembre. La diète a ordonné aux maréchaux de faire parvenir à tous les districts les buit articles fondamentaux qui doivent servir de base à la nouvelle constitution de la Pologne, et de leur faire connaitre aussi toutes les résolutions qui ont été prises jusqu'à ce moment, sanctionnées par les Etats. Il a été enjoint aux éviques de faire faire partout des prières publiques pour rendre grâces à Dieu du bonheur que ses bontés semblent assurer désormais à la nation.

Ainsi donc le peuple ne sera jamais compté pour quelque chose en Pologne, qu'aux yeux de l'Eternel!... Mais ici le ridicule trahit la gravité aristocratique; car enfin, le plus sublime précepte de l'Evangile est de prier pour ses enuemis : il en arrive ce qui peut; mais en Pologne, on force le tiers-élat à faire mieux. Après avoir prié, comme tous les peuples, souvent pour ses ennemis, il lui faudra encore remercier Dieu de leur prospérité !

ITALIE.

De Naples, le & décembre. -On continue, dans l'arsenal de cette ville et dans le chantier de Castellamare, la construction des chaloupes canonnières et des bombardes qui y sont commencées depuis quelque temps; cinquante sont presque achevées; l'on se propose d'en porter le nombre jusqu'à cent.

Sous le ministère du marquis de Squilace, les impôts avaient été mis sur les soieries, et cette branchê importante de l'industrie des Deux-Siciles en avait souffert un tort considérable. Le coinmerce a fait à ce sujet ses représentations au roi: Sa Majesté vient d'abolir ces droits, et a en même temps érigé un conseil, composé de personnes distinguées et de négociants, sous la direction du marquis Palmineri, conseiller des finances : le conseil s'occupera des moyens de rétablir et d'encourager les manufactures de soie dans le royaume.

De Rome, le 6 janvier. — Le tribunal du Saint-Office continue ses recherches relativement à la détention du comte de Cagliostro.

On dit qu'on a trouvé dans ses papiers une prophétie qui annonce que Pie VI sera le dernier pape, et qu'après lui l'élise sera dépouillée de ses Etats.

De Genes, le 11 janvier. — Dans la nuit du samedi 9 de ce mois, une tartane française, venant de Marseille, avec sept hommes d'équipage, a chaviré à l'entrée du port; l'équipage a été sauvé.

C'est aujourd'hui que se fait la cérémonie du couronnement du doge. Demain il donnera à dîner à toute la noblesse et aux ministres étrangers.

ESPAGNE.

-

De Gibraltar, le 20 décembre. Les chantiers de l'Espagne dans la Méditerranée, à Barcelonne, à Malaga, à Carthagène, sont actuellement dans la plus grande activité. On construit à Mahon même de nouveaux vaisseaux de guerre.

Ces travaux redoublés ont un but qu'on ignore. On fait des conjectures: l'état actuel de l'Europe ne s'y refuse point. Cependant l'Espagne, qui, à la fin de la dernière guerre, avait soixante-huit vaisseaux, n'en a pas aujourd'hui, dit-on, plus de trente à remettre en mer.

De Madrid, le 8 janvier. — La reine, dont nous avons annoncé la grossesse (dans cette feuille, no 23), a fait une fausse couche le 5 de ce mois. Cet accident n'a pas eu de suites fâcheuses, et Sa Majesté est aujourd'hui aussi bien qu'on puisse le désirer.

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puisque les gazettes se remplissent des plus minces récits quand il est question de guerre et de combats, il est convenable de ne rien négliger de tous les mouvements qui se font dans les provinces belgiques....

On mande qu'un détachement des patriotes de Tournai, en entrant à Namur par le faubourg de Belgrade, a reçu des habitants l'accueil le plus fraternel.

Le détachement est resté deux jours dans la ville. Il en est sorti le 12, pour aller camper à quatre lieues de Namur, près du village d'Emprimes. Sa destination était de se rendre vers la ville de Marche, où un corps de troupes impériales s'était établi,

Les dernières lettres que l'on venait de recevoir de Luxembourg portaient que la désertion continuait parmi les impériaux, et que leur nom était en horreur dans cette ville, informée des cruautés inouies qu'ils avaient commises dans leur retraite précipitée. A Luxembourg même on leur reproche des vexations insupportables. On cite en exemple les Dominicains de cette ville, chassés sans quartier, ainsi que les Récollets et les Capucins; les religieuses même de la congrégation, forcées de renvoyer leurs pensionnaires pour loger des soldats et sans doute des officiers; enfin, on se récrie sur la profanation de l'église du SaintEsprit, dont les Autrichiens ont fait des étables et une boucherie.... Les personnes modérées trouveront sans doute ces récits exagérés; d'ailleurs ils sont tracés par la fureur et la haine; mais elles se rappelleront que la disette des vivres se fait sentir à Luxembourg, et que les impériaux s'y regardent comme dans un pays ennemi. En effet, la bourgeoisie n'y est pas autrichienne; elle est presque ouvertement déclarée pour les Brabançons. - Le 10, le corps entier des musiciens de Wirtemberg est arrivé à Namur. Ces déserteurs ont été suivis de seize dragons d'Arbert. Ils venaient tous du camp de Marche.

De Louvain, le 15 ianvier. On mande que le rélablissement de l'Université de cette ville a été le premier présent de la liberté. Son déplacement avait, depuis deux ans, répandu la consternation; son absence avait appauvri les habitants. La cérémonie s'est faite le 14 de ce mois, en grande pompe. Tous les membres de l'Université se sont rendus, à neuf heures et demie du matin, dans leur salle d'assemblée ordinaire. Ce lieu solennel, que plus d'une fois ils avaient imaginé ne revoir jamais, a rappelé bien des souvenirs. On a d'abord procédé au choix d'un recteur. M. Clavers, régent du collège du Porc, a été continué dans cette dignité.... Une table était au milieu de la salle, espèce d'autel orné d'un crucifix et de deux cierges, etc. Le recteur a prêté serment de catholicité, en faisant sa profession de foi, suivant la bulle d'Or.... (On connaît assez les affaires du Brabant pour ne pas douter que le peuple n'ait pris part à cette magnifique oisivelé du premier ordre belgique). Une compagnie de bourgeoisie ar❤ mée, en uniforme de volontaires, précédée d'une nombreuse musique, drapeau déployé, et trois cents hommes de troupes patriotiques, ont été recevoir à la porte des Halles les membres de l'Université. Le cortège s'est avancé en triomphe vers la collégiale de Saint-Pierre. Après l'office divin, le recteur a été reconduit avec la même pompe. Tout le jour s'est passé en réjouissances, et le soir la ville a été illuminée.... Hélas! s'écriera peut-être un Français intolérant, à quoi sert donc la liberté? Un Français tolérant répondra: Un peuple qui devient libre avant d'être philosophe, ne doit pas tarder à avoir autant de raison que de courage.... Pourquoi le dieu des armées, qui a béni les armes des Brabançons, en chassant la tyrannic, ne leur accorderait-il pas encore une grâce?...

De Bruxelles, le 18 janvier. - Le corps national vient de former un nouveau département de la guerre, sous la dénomination de départment général de guerre des Etats Belgiques-Unis. L'administration de ce département s'exercera sous l'autorité des députés de ces Etats, qui y enverront chacun le leur. Le Brabant sera représenté par M. le duc d'Ursel; la Flandre, par M. le comte de Laurétan; le Hainaut, par M. le comte d'Yves; la Gueldre, par M. le 24

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