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fortifie de toutes les forces de son entendement. Toujours » alliée au sacrilége, elle brave Dieu en perdant les hommes. » Avec une fureur qui n'a pas d'exemple, cet insolent blas→ » phémateur en vient à se déclarer l'ennemi personnel du >> Sauveur des hommes; et cette loi adorable que l'Homme» Dieu apporta sur la terre, il l'appelle l'Infáme. Aban» donné de Dieu, qui punit en se retirant, il ne connoît » plus de frein. D'autres cyniques étonnèrent la vertu, Vol>> taire étonne le vice. Il se plonge dans la fange, il s'y >> roule, il s'en abreuve ; il livre son imagination à l'enthou>>siasme de l'enfer qui lui prête toutes ses forces pour le > traîner jusqu'aux limites du mal. Il invente des prodiges, >> des monstres qui font pâlir. Paris le couronna, Sodome » l'eût banni. »

(Soirées de St.-Pétersbourg, tom. Ier, pag. 271 et suiv.)

CHAPITRE II.

Suite du précédent.

ON vient de voir une partie des moyens et des choses qui contribuèrent aux succès des encyclopédistes; leurs cabales, leurs intrigues et leurs complots se trouvent parfaitement détaillés dans leurs lettres, et surtout dans la correspondance que nous possédons complète depuis peu de temps; on en citera plusieurs fragmens dans cet ouvrage; mais Voltaire et ses amis durent leurs plus grands triomphes à un mot véritablement magique, par l'effet qu'il produisit sur un nombre infini de personnes de toutes les classes; ce grand mot de ralliement fut: tolérance. On confond volontairement, depuis 60 ans, l'indifférence sur le relâchement de la morale et l'oubli de tous ses principes, avec la tolérance; il faut être toujours tolérant pour les personnes (a), et ne jamais l'être pour les erreurs. On

(a) A moins qu'elles n'eussent la folie d'attaquer ouver

ne compose point avec la morale, et l'on ne doit pas, par bonté de caractère, s'accommoder d'un mauvais principe; il faut au contraire le combattre avec toute l'énergie d'une juste indigna

tion.

Veut-on voir des échantillons de la tolérance philosophique, en voici quelques-uns Lorsque M. de Voltaire donna la tragédie de Sémiramis, on en fit une parodie, et on pouvoit la faire bonne, parce que, malgré le mérite et l'éclat de cette belle pièce, elle est remplie d'invraisemblances et que le plan en est défectueux. M. de Voltaire fit agir tous ses amis, pour que le pouvoir arbitraire empêchât la représentation de cette parodie; il écrivit à la duchesse de Luynes, pour engager la Reine à la faire défendre (la pièce étoit dédiée à cette princesse). La Reine fit répondre par madame de Luynes, que les parodies étoient d'usage, et qu'on avoit travesti Virgile. Dans le temps où l'Année littéraire avoit un grand nombre de souscripteurs, M. de Voltaire écrivoit à ses amis :

« Ce n'est pas assez de rendre Fréron ridicule, » l'écraser est le plaisir; mais toutes ces pas

tement la religion, le gouvernement ou la morale publique. Il y a chez toutes les nations des lois qui punissent des délits si graves; il faut espérer, pour l'intérêt de la société, que la philosophie ne parviendra jamais à les faire abroger.

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>>sions s'anéantissent devant la haine cordiale » que je porte à l'impudent Omer (M. Omer de » Fleuri). Cependant la violence de cette juste >> haine peut céder à la raison; et puisque je ne » puis lui couper la main dont il a écrit son in» fâme réquisitoire (a), je l'abandonne à son hypocrisie, à sa méchanceté de singe, et à » toute la noirceur de son caractère. Mes anges (M. et Mad. d'Argental), si j'avois cent mille » hommes, je sais bien ce que je ferois; mais » comme je ne les ai pas, je communierai à Pâ» ques, et vous m'appellerez hypocrite tant que >> vous voudrez (Lettres de Voltaire). C'est dom>> mage que les philosophes ne soient encore ni » assez nombreux, ni assez zélés, ni assez riches, aller détruire avec le fer et la flamme » pour >> cette secte abominable ( les chrétiens.) » (Lettres de Voltaire). «Si mon cher ange (M. d'Ar

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gental) parvient à faire chasser le monstre » Fréron, qui déshonore la littérature depuis si long-temps, les gens de lettres lui éleveront une statue..... Jetez le diable dans l'abîme et >> tirez les Scythes du tombeau » (b) ( Lettres du

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(a) Ouvrage plein de force, de raison et d'éloquence, contre des brochures exécrables que venoit de publier M. de Voltaire.

(b) Tragédie qui venoit de tomber, et que toutes ses intrigues ne purent relever.

même). En 1767, il écrivit à Marin, censeur royal: « On dit qu'on a ôté à Fréron ses feuilles; >> mais quand on saisit les poisons de La Voisin, >> on ne se contenta pas de cette cérémonie (a) ».

La même année, il dénonce M. de la Beaumelle au maréchal de Richelieu, parce que la Beaumelle avoit écrit un trait contre la famille de Richelieu. Voltaire engage le maréchal à chasser la Beaumelle de son gouvernement, ce qui eut lieu. Il fit chasser J.-J. Rousseau de Genève, et il écrivoit à la maréchale de Luxembourg : qu'il plaignoit beaucoup M. Rousseau. Dans le même temps, il attisoit en secret les troubles de Genève, et il écrivoit aux indifférens qu'il ne s'en mêloit en aucune manière. Voici sur ce sujet sa lettre au duc de Choiseul, alors ministré : ....

Si j'osois, je vous supplierois d'engager M. de >> Hauteville à demeurer, en vertu de la garantie, » le maître de juger de toutes les contestations » qui s'éleveront toujours à Genève. Vous seriez >> en droit d'envoyer un jour à l'amiable une » bonne garnison pour maintenir la paix, et de » faire de Genève, à l'amiable, une bonne place

(a) Il vouloit donc qu'on le brûlât tout vif? Dans son Dictionnaire il dit que M. de la Beaumelle mérite le carcan.

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