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surer dans le conseil municipal la représentation des intérêts des diverses collectivités en présence; que les requérants ne sont donc pas fondés à soutenir que ce sectionnement est entaché d'illégalité;

En ce qui concerne la délibération du 20 avril 1907 :

Considérant que la délibération du 20 avril 1907 a été implicitement rapportée par celle du 25 octobre suivant; que par suite la requête dirigée contre cette délibération est devenue sans objet;

ART. 1.

ART. 2.

Décide :

L'intervention des sieurs Feller et autres est admise.

Les requêtes susvisées tendant à l'annulation des délibérations des 26 octobre 1906 et 25 octobre 1907 sont rejetées. ART. 3. Il n'y a lieu de statuer sur la requête dirigée contre la délibération du 20 avril 1907.

La question de fond ne présentait pas de difficulté sérieuse. Il est bien rare qu'un sectionnement urbain ne soit pas régulier, car l'article 11 de la loi du 5 avril 1884 ne formule à l'égard de ces sectionnements que des règles faciles à observer. Il suffit, quand la population agglomérée de la commune est supérieure à 10.000 habitants, qu'aucune section ne soit formée de territoires appartenant à des cantons ou à des arrondissements municipaux différents et, d'autre part, que chaque section ait droit à quatre conseillers au minimum, d'après sa population; qu'aucune fraction ayant des biens propres ne soit divisée en plusieurs sections électorales, enfin que les sections soient composées de territoires contigus. Mais il n'est pas besoin qu'il existe plusieurs agglomérations d'habitants distinctes et séparées, condition à l'observation de laquelle le Conseil d'État se montre particulièrement sévère pour les communes ayant moins de 10.000 habitants.

D'autre part, il est rare que des fractions de territoires urbains aient des biens propres. Enfin, il est très facile de découper, même assez arbitrairement, le territoire d'une ville sans cependant former d'enclaves dans les sections.

A ce point de vue, le sectionnement électoral de Marseille ne laissait pas de prise à une critique sérieuse. Aussi le conseil d'État a-t-il rejeté la requête au fond.

Mais ce qui était plus délicat, c'étaient les questions de procédure soulevées par les divers recours.

Sur un point, le Conseil d'État n'a fait que confirmer sa jurisprudence antérieure en reconnaissant au conseil général le droit de

sectionner une commune dans une session autre que la session d'août, pourvu qu'il ait été saisi d'une demande dans la session d'avril précédente; que cette demande ait été instruite dans l'intervalle de la session d'avril à la session d'août et que la session, même extraordinaire, dans laquelle il a été procédé au sectionnement ne soit pas antérieure à la date légale de la session d'août (7 août 1903, Saint-Xandre; 3 avril 1908, Saint-Romans-des-Cordières).

Mais encore faut-il que la session dans laquelle il est procédé au sectionnement ait été régulière. Or, la loi du 10 août 1871 (art. 23 et 24) prévoit : 1o deux sessions ordinaires pour les conseils généraux: la session d'avril et la session d'août, qui, depuis la loi du 9 juillet 1907, peut être reportée jusqu'au 1er octobre, si le conseil général en a ainsi décidé dans sa session d'avril; 2o des sessions extraordinaires, pour lesquelles les assemblées départementales sont convoquées soit par un décret du chef de l'État, soit sur la demande écrite des deux tiers de leurs membres adressée au président et dont celuici doit immédiatement donner avis au préfet, qui convoque d'urgence les conseillers généraux. Or, dans le département des Bouchesdu-Rhône ces prescriptions légales n'étaient pas rigoureusement observées. Suivant un usage qui remontait à une dizaine d'années et qui s'était généralisé dans les départements du Midi, sous le prétexte de la chaleur estivale, le conseil général ne se réunissait pas en août, ou si quelques membres se rendaient pour la forme à la convocation légale, l'assemblée s'ajournait à une date bien postérieure à celle de la clôture de la session, qui, d'après l'article 24 de la loi du 10 août 1871, ne peut durer plus d'un mois. En fait, la session n'avait lieu, d'un commun accord, qu'en octobre, sans décret du chef de l'État et sans demande écrite des deux tiers des membres de l'assemblée. La loi du 9 juillet 1907 a consacré cet usage, qui parait répondre aux convenances des assemblées méridionales, en permettant aux conseils généraux, par une décision prise dans leur session ordinaire d'avril, de s'ajourner, pour la session d'août, au 1er octobre au plus tard, à la condition que la session soit terminée le 8 du même mois. Mais cette loi, étant postérieure au mois d'avril 1907, n'avait pu être mise à exécution au cours de cette dernière année et, par suite, la délibération du 25 octobre 1907 portant sectionnement électoral de la ville de Marseille prêtait à la critique, puisque la session, au cours de laquelle elle avait été prise, n'avait pas eu lieu

conformément aux prescriptions soit de l'article 23, soit de l'article 24 de la loi du 10 août 1871. Cependant. le Conseil d'État a admis la régularité de la session par des raisons que nous ne pouvons qu'approuver.

Il a considéré que, dans les circonstances où la réunion avait eu lieu, les prescriptions légales avaient été observées dans leur esprit, sinon à la lettre. L'article 24 de la loi du 10 août 1871 permet, en effet, aux conseils généraux, de se réunir spontanément en session extraordinaire sur la demande écrite des deux tiers de leurs membres. Cette demande doit-elle être considérée comme une formalité substantielle et ne peut-il y être suppléé en aucun cas?

La réponse affirmative serait contraire à l'esprit général de tout notre droit, qui n'admet que très exceptionnellement les formalités substantielles. Du moment où la loi ne s'exprime pas formellement à cet égard, il faut examiner si, d'après les circonstances de l'affaire, le vœu du législateur a été obéi. Or, en prescrivant une demande écrite des deux tiers des membres au conseil général, la loi a voulu empêcher les surprises que pourrait tenter une minorité, ou même une faible majorité, inférieure aux deux tiers de l'assemblée. Si la totalité des conseillers généraux se réunit spontanément, cette surprise ne saurait exister, et il est clair que les membres présents à la réunion n'auraient pas refusé leur signature, si celle-ci leur avait été demandée pour obtenir la convocation du conseil général.

L'obligation de présenter quand même cette demande écrite constituerait donc une simple formalité ne répondant à aucune nécessité réelle, et c'est ici le lieu de rappeler le vieil adage que la lettre tue et que l'esprit vivifie.

Mais le conseil général n'est pas seul intéressé à l'observation des formes légales; il faut aussi, d'après celles-ci, que le préfet, représentant du gouvernement, ait été prévenu de la réunion, qu'il puisse assister aux séances ou user, s'il le désire, du droit d'instruction préalable que lui confère l'article 3 de la loi du 10 août 1871. C'est pourquoi l'article 24 exige qu'en cas de session extraordinaire, le président du conseil général l'avise immédiatement de la demande écrite de convocation qui lui a été adressée par les deux tiers des membres de l'assemblée, afin qu'il soit prévenu des intentions de celle-ci et qu'il puisse adresser les convocations individuelles, qu'il doit faire d'urgence. Mais la loi ne dit pas en quelle forme cet avis

doit être donné au préfet. Un avis verbal peut donc suffire et la nécessité même de cet avis ne s'impose pas si le préfet est déjà prévenu des intentions de l'assemblée, non plus que des convocations individuelles à adresser par le préfet, si tous les membres du conseil général sont déjà prévenus de la réunion projetée.

Or, dans l'espèce, le préfet a été prévenu au moins verbalement, puisqu'il a assisté à la session et y a prêté son concours. Par conséquent, le vœu du législateur a été obéi en fait, sans qu'il fût nécessaire d'exiger l'accomplissement de formalités prescrites seulement pour assurer l'obéissance à ce vou. Dans ces conditions de fait, le Conseil d'État a considéré comme régulière la session du conseil général des Bouches-du-Rhône tenue en octobre 1907.

Terminons ces considérations par une dernière observation. Le Conseil d'État a admis l'intervention au recours pour excès de pouvoir contre le sectionnement électoral de la ville de Marseille d'électeurs de cette ville, en motivant l'admission de cette intervention par l'intérêt qu'avaient ces électeurs au maintien du sectionnement attaqué. Cette décision est logique; du moment où la nouvelle jurisprudence du Conseil d'État reconnaît à tout électeur d'une commune le droit d'attaquer directement le sectionnement électoral de cette commune, il doit par réciprocité l'admettre à intervenir pour en justifier le maintien, si ce sectionnement est attaqué. L'intérêt d'un électeur à défendre un sectionnement qu'il juge légal et utile à sa commune n'est pas moins respectable que l'intérêt d'un autre électeur à combattre un sectionnement qu'il estime irrégulier.

L'un et l'autre doivent être traités sur le même pied et, si l'un prend l'initiative de l'attaque, le second doit être admis à intervenir pour la défense. Le droit d'intervention du second naît le jour où son droit de participer à l'élection au conseil municipal, selon les conditions du sectionnement, se trouve menacé.

CONSEIL MUNICIPAL.

RECOURS AU CONSEIL D'ÉTAT DIRIGÉ DIRECTEMENT CONTRE L'ARRÊTÉ PRÉFECTORAL APPROUVANT UNE DÉLIBÉRATION.

NON-RECEVABILITÉ.

(5 décembre 1908)

Les recours en nullité formés contre les délibérations des conseils municipaux doivent d'abord être adressés au préfet, conformément aux dispositions des articles 65 et 67 de la loi du 5 avril 1884, et les auteurs d'une réclamation contre ces délibérations ne

sont pas recevables à discuter directement devant le Conseil d'Etat la régularité de ces délibérations au moyen d'un recours dirigé contre l'arrêté d'approbation du préfet, alors que cet arrêté, pris en lui-même, n'est entaché d'aucun excès de pouvoir.

Les sieurs Roussel et Mounier, conseillers municipaux de Catenay (Seine-Inférieure), ont demandé au Conseil d'État d'annuler, pour excès de pouvoir, un arrêté, en date du 14 janvier 1906, par lequel le préfet de la Seine-Inférieure a approuvé la délibération du conseil municipal de Catenay, du 27 décembre 1906, portant location du presbytère.

Les requérants exposaient qu'à l'époque où a été prise ladite délibération, trois vacances s'étaient produites dans le conseil municipal, qui se trouvait ainsi réduit aux trois quarts de ses membres et ne pouvait délibérer avant qu'il eût été procédé aux élections complémentaires prévues par l'article 42 de la loi du 5 avril 1884. Si, disaient-ils, par suite de circonstances de fait, le préfet avait pu croire que, lors de sa réunion du 27 décembre 1906, le conseil municipal comptait encore neuf conseillers en exercice, la délibération susmentionnée ne pouvait davantage échapper à sa censure; en effet, d'après l'article 50 de la loi précitée, le conseil municipal ne peut délibérer que lorsque la majorité de ses membres en exercice assiste à la séance; or, la délibération dont il s'agit n'a été prise que par quatre conseillers. Le Conseil d'État a statué ainsi qu'il suit :

Vu l'arrêté attaqué, ensemble la délibération du conseil municipal de Catenay du 27 décembre 1906;

Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, en réponse à la communication qui lui a été donnée du pourvoi, et tendant au rejet de la requête comme non recevable par le motif que la décision préfectorale n'est déférée au conseil qu'en tant qu'elle a approuvé une délibération du conseil municipal; que toute personne, qui demande l'annulation d'une délibération d'un conseil municipal, doit d'abord saisir le préfet de sa requête et ne peut porter sa réclamation devant le Conseil d'État que si le préfet refuse d'annuler la délibération attaquée, et comme mal fondée par le motif que la circonstance que le conseil municipal se trouve réduit aux trois quarts de ses membres n'entraine pas la nullité des délibérations, si la majorité des membres en exercice étaient présents à la séance;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier;
Vu la loi du 5 avril 1884;

Vu la loi du 24 mai 1872;

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